possible. Vous employez l'expression « lignée des Hominidés », je voulais juste vous dire
de bien faire attention de ne pas dire que la lignée des Hominidés n'est pas une branche
« à coté » des grands Singes mais juste une branche dans les grands Singes.
SNES : nous allons à des considérations pédagogiques : le problème de cette nouvelle
définition de l'espèce, effectivement plus valable scientifiquement, est d'ordre
pédagogique. Il faut, dans cette nouvelle définition, plus voir les mécanismes évolutifs
que les espèces elles-mêmes et leur classification. Mais, comme l'histoire de la notion
d'espèce est liée à cette définition ancienne et à la classification pour ensuite aboutir à
une possible théorie de l'évolution, est-ce que les pédagogues n'ont pas besoin de passer
par cette classification, quitte par la suite à démontrer que cette facilité n'est pas tout
à fait représentative de la vérité scientifique ?
P-H G : Je vous remercie de poser cette question et je la trouve tout à fait importante.
Pour moi, évidemment, toutes ces notions doivent être enseignées dans un cadre
historique. C'est-à-dire que si on commençait à montrer ce qu'était une espèce pour
Linné, puis on montrait ce qu’elle est devenue chez Darwin, et qu'ensuite on en arrivait
au moment où on en est actuellement, on donnerait un enseignement beaucoup plus
riche que si on leur donnait un résultat tout cuit comme s'il avait été comme cela de
toute éternité. Alors, si on pense qu’on n’a pas le temps de présenter la démarche
historique, au moins présentons une démarche acceptable actuellement. Y a-t-il des
pédagogues qui pensent qu’il faut présenter le système de Ptolémée en primaire, celui
de Descartes en terminale et arriver à Newton seulement en fac ? C’est à peu près ce
qu’on fait pour la biodiversité.
Sincèrement, je trouve que dans les programmes de SVT il y a beaucoup trop de
données et pas assez de concepts et de réflexion5. Si, au travers de l'espèce et de
l'évolution, on arrivait à faire comprendre qu'il y a une série de processus très
importants qui sont à l'œuvre, que la biodiversité va devenir un enjeu très important. Et
que la biodiversité ce n'est pas simplement une liste d'espèces mais c'est au contraire
tout un fonctionnement écosystémique d'interactions entre des espèces, des individus,
des populations, des éléments du milieu. Je trouve qu’on ferait vraiment œuvre utile.
C'est cela que l'on devrait essayer de faire passer en SVT. Je suis désolé si pour les
collègues c'est un peu plus compliqué d'enseigner les choses de la façon dont j’essaie de
les présenter là mais je pense que c'est tellement plus riche ! De plus, les enjeux
sociétaux sont tellement importants, il est essentiel que l’enseignement permette le
développement d’une vraie culture dans ce domaine là.
On peut sur ce point recommander le film, « Espèce d'espèces » qui vient de sortir, et
qui montre comment la classification est fondée sur la phylogénie, elle-même issue de la
généalogie. On comprend bien que cela va demander un effort de revoir la façon
d'enseigner ces choses. Il faudrait alléger les programmes par ailleurs pour qu'on ait le
temps d’insister sur ce genre de question, de discuter, d’argumenter. C'est vrai que je
suis un peu traumatisé par la quantité de descriptions que les élèves avalent
actuellement par rapport à plein d'autres choses. Sincèrement, dans mon rêve, l'écologie
et l'évolution seraient des domaines enseignés dès le primaire. Dès le primaire, on peut
expliquer l'histoire d'une espèce puis progressivement avec un aspect historique les
concepts , etc, ... Th. Dobsansky a dit, et tout le monde a repris la phrase, que « rien en
biologie n'a de sens si ce n'est à la lumière de l'évolution ». Or on enseigne la biologie
absolument pas à la lumière de l'évolution ; on l'enseigne donc, selon sa propre phrase,
de façon insensée. J'appelle de mes vœux un mouvement de l'ensemble du monde
enseignant pour dire ça suffit, il faut qu'on mette les processus évolutifs et les
interactions écologiques qui vont avec au centre de l'enseignement de la biologie. Et
quand je dis processus évolutifs c'est vraiment les deux aspects : la description du