Marqueurs prédictifs de réponse aux anti-HER dans les cancers ORL :

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dossier
thématique
Marqueurs prédictifs
de sensibilité et
de résistance aux anti-HER
Marqueurs prédictifs de réponse
aux anti-HER dans les cancers ORL :
état des lieux et perspectives
Predictive markers for response to anti-HER in head and neck cancer:
current status and perspectives
Gérard Milano*
» Le récepteur à l’EGF (REGF, HER1) joue un rôle primordial dans
EGFR receptor (EGFR, HER1) plays a central role during
oncogenesis. EGFR gene amplification is seen in 10 to 30% of
head and neck cancer cases. Tumoral overexpression of EGFR was
found to be a defavorable prognostic factor in head and neck
cancer. Preclinical studies performed at the CAL (human cancer
cell lines from head and neck origin) have put into evidence that
cell sensitivity to gefitinib was not influenced by p53 mutational
status and that there was an inverse relationship between IC50
values of gefitinib and EGFR tumoral expression (determined by
Scatchard analysis). Multifactorial analyses have permitted, at
the preclinical level, to identify a series of parameters such as
E-cadherin, TGFα, amphiregulin, EGFR, glutathione S-transferase
π as biomarkers able to predict the tumoral sensibility to gefitinib.
The CAL clinical-biological team has recently performed a
controlled trial with translational investigations in advanced
head and neck cancer patients treated by radio-chemotherapy
with or without gefitinib. IGF1R tumoral expression was found
to be a strong prognostic factor influenced by the presence of
gefitinib. This latter drug weakened the defavorable prognostic
outcome brought by the high expression of IGF1R. Possible links
between the presence of HRAS mutations in head and neck
cancer tumors and the efficacy of EGFR-targeted therapies have
been advocated. Also, the presence of the truncated form of
EGFR (EGFRvIII) would merit to be further evaluated regarding
the individual sensibility to monoclonal antibodies targeting
EGFR in head and neck cancer patients.
la cancérogenèse. L’amplification du REGF dans les tumeurs ORL
est observée dans 10 à 30 % des cas. Sa surexpression tumorale
s’est révélée être un facteur de mauvais pronostic. Les travaux
précliniques du CAL (lignées cellulaires issues de cancers ORL)
ont mis en évidence que la sensibilité cellulaire individuelle au
géfitinib n’était pas influencée par le statut mutationnel p53 et
qu’il y avait une relation inverse entre la CI50 du géfitinib et le
niveau d’expression du REGF mesuré par la méthode de Scatchard.
Des analyses multifactorielles ont permis, au niveau préclinique,
d’identifier une série de paramètres tels que la E-cadhérine, le TGFα,
l’amphiréguline, le REGF et la glutathion S-transférase π comme
biomarqueurs capables de prévoir la sensibilité au géfitinib.
biologique concernant l’utilisation du géfitinib pour des cancers
ORL avancés traités par radiochimiothérapie. L’expression de l’IGF-1R
était un paramètre capable d’influencer significativement la survie
sans événement d’une manière différentielle selon que les patients
avaient reçu ou non du géfitinib. Il serait justifié de mieux analyser
le lien entre l’existence des mutations HRAS et la résistance au
traitement par anti-REGF dans les cancers ORL.
» Enfin, la présence du REGFvIII (forme tronquée du REGF)
peut être une voie de recherche intéressante et prioritaire dans
l’identification de facteurs de résistance au ciblage du REGF par
anticorps monoclonaux dans les cancers ORL.
Summary
RÉSUMÉ
» L’équipe du CAL a conduit récemment une étude clinique et
Mots-clés : Récepteurs à l’EGF – Thérapies ciblées – Marqueurs prédictifs – Cancers ORL.
Keywords: EGF receptor – Targeted therapies – Predictive
markers – Head and neck cancer.
Principaux dérèglements moléculaires
des cancers ORL : place des récepteurs HER
* Laboratoire d’oncopharmacologie, centre
Antoine-Lacassagne, Nice.
68
Il existe une variabilité importante de la localisation
primitive des cancers oto-rhino-laryngologiques (ORL)
au sens strict, avec principalement la cavité orale, l’oropharynx, le larynx et l’hypopharynx. Il faut noter que les
cancers ORL occupent la sixième place au classement
mondial des cancers de par leur fréquence (1). Le pronostic de ces cancers est largement déterminé par le
Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. I - n° 2 - avril-mai-juin 2012
Marqueurs prédictifs de réponse aux anti-HER dans les cancers ORL :
état des lieux et perspectives
stade de la maladie à la présentation. Le stade tumoral
est principalement établi sur la base de l’extension de
la tumeur, de la présence de métastases ganglionnaires
et de métastases à distance. La principale étape de la
prise en charge thérapeutique est la chirurgie combinée
à la radiothérapie postopératoire.
Ces dernières années, le rôle de la conservation d’organe associant chimioradiation et chirurgie s’est accru.
Ces progrès sont fondés sur les avancées de la chirurgie des lésions avancées, de la radiothérapie et de la
préservation d’organe. L’hétérogénéité génétique et
biologique des cancers ORL a longtemps été un frein
au développement des thérapeutiques innovantes.
Récemment, la connaissance biologique et la pathogenèse moléculaire des cancers ORL ont connu un développement accéléré (2). Le rôle primordial joué par le
récepteur à l’EGF (REGF, HER1) dans la cancérogenèse
ORL provient de l’observation suivante : l’expression
ectopique du REGF dans les kératinocytes oraux peut
conduire à leur transformation tumorale (3).
La présence de la surexpression du REGF dans les
cancers ORL a été rapportée dès 1986 (4), et elle a été
ensuite confirmée par de nombreuses autres études.
Comme tous les récepteurs à protéine kinase membranaire, le REGF induit une signalisation moléculaire
intracellulaire initiée par une phosphorylation (autophosphorylation pour le REGF). Ce récepteur compte
plus d’une dizaine de sites de phosphorylation pouvant
entraîner des voies de signalisation différentes (5) ; ce
fait met en évidence la complexité du fonctionnement
moléculaire de ce récepteur. L’amplification du REGF
dans les tumeurs ORL varie de 10 à 30 % (2) et les cas
de surexpression du REGF sont vraisemblablement
liés pour beaucoup à ce phénomène d’amplification
génique touchant le domaine 7p11.2 (6). La surexpression tumorale du REGF s’est avérée être un facteur de
mauvais pronostic.
Nos travaux réalisés au centre Antoine-Lacassagne de
Nice ont été parmi les premiers à mettre en évidence le
rôle pronostique indépendant du REGF dans les cancers
ORL (7). Des analyses ultérieures, menées par l’équipe de
J.R. Grandis (8), ont confirmé cette forte valeur pronostique du REGF qui était accrue si l’on prenait en compte
dans l’analyse le ligand naturel du REGF, le TGFα. Plus
récemment, l’étude de G. Almadori et al. s’est intéressée
à la palette élargie des récepteurs HER dans les cancers
ORL et à leur valeur pronostique (9). En utilisant une
méthode d’immunohistochimie par analyse d’image, les
auteurs ont pu mettre en évidence que le statut HER2-4
ajoutait à la valeur pronostique du REGF pris isolément.
Le fait que le REGF soit fréquemment exprimé dans
les cancers ORL et que cette surexpression soit reliée
à une évolution défavorable de la maladie a conduit
fort logiquement à considérer le REGF comme une cible
thérapeutique potentielle dans les cancers ORL.
Différentes approches thérapeutiques utilisant soit des
anticorps monoclonaux (cétuximab, matuzumab et
nimotuzumab), soit des inhibiteurs de tyrosine kinase
(ITK) [géfitinib et erlotinib] ont été évaluées dans les
cancers ORL. Seul le cétuximab associé à la radiothérapie a obtenu une Autorisation de mise sur le marché en
France (10). Cette Autorisation s’est ensuite étendue à la
situation métastatique de première ligne en association
avec le cisplatine et le 5-FU (11).
La question se pose donc de la place et de la valeur des
marqueurs biologiques prédictifs dans le cadre de l’utilisation des anti-REGF dans les cancers ORL. La réponse à
cette question sera abordée sur un plan expérimental en
considérant les principales données issues des travaux
précliniques qui utilisent les médicaments anti-REGF
sur des modèles cellulaires ou animaux appropriés.
Seront également examinés et commentés les principaux résultats des études cliniques orientées sur la
recherche de facteurs biologiques prédictifs.
Ciblage du REGF, marqueurs prédictifs
et données précliniques
Notre groupe a été l’un des premiers à développer
une recherche préclinique orientée spécifiquement
sur le ciblage du REGF dans la pathologie tumorale
ORL. Parmi nos travaux, figure justement une étude
multifactorielle qui a eu pour objectif l’identification
des paramètres biologiques intracellulaires susceptibles
de prévoir l’efficacité de l’activité des anti-REGF. Nous
avons ainsi examiné l’activité antiproliférante de l'ITK
ZD1839 (géfitinib, Iressa®) sur une série de 7 lignées
cellulaires issues de cancers de la sphère ORL (12). Parmi
les hypothèses formulées pour expliquer les différences
de sensibilité au géfitinib, figurait la possibilité que l’activation continue de la voie MAP-kinase par la présence
d’une mutation KRAS puisse être une entrave à l’activité
de l'ITK. C’était la première fois que cette possibilité de
résistance au ciblage du REGF via la présence de mutations KRAS était évoquée, bien avant les publications
des travaux conduits en pathologie colorectale qui ont
édifié le marqueur “mutations KRAS” au rang de pierre
angulaire dans l’identification des tumeurs résistantes
aux anti-REGF (13).
Les 2 autres paramètres que nous avions pris en considération dans cette étude étaient le statut mutationnel p53 − dont on connaît la prépondérance dans les
cancers ORL (14) −, et le niveau d’expression de la cible
Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. I - n° 2 - avril-mai-juin 2012
69
dossier
CI50 ZD 1839 (µM)
40
p = 0,022
r2 = 0,68
1
30
3
5
2
20
6
4
10
7
0
102
103
104
105
REGF (fmol mg–1 protéine)
106
thématique
Lignées tumorales
humaines d’origine
ORL
1. Hep-2
2. Detroit 562
3. CAL 165
4. CAL 50
5. CAL 166
6. CAL 22
7. CAL 33
Figure 1. Lien entre l’expression du REGF et la sensibilité au géfitinib (ZD 1839). Données expérimentales sur lignées cellulaires de tumeurs de la sphère ORL (12).
REGF. La mesure de l’expression du REGF a été réalisée
dans cette étude selon la technique de référence de
base pour la quantification des récepteurs membranaires, à savoir la méthode dérivée de Scatchard (15).
Nos résultats ont établi que, pour des lignées ORL
exprimant le même niveau de REGF, la présence d’une
voie MAP-kinase activée (suspectant fortement la
présence d’une mutation KRAS en amont) impliquait
une moindre efficacité du géfinitib, inaugurant ainsi la
notion de mutation KRAS comme facteur de résistance
au ciblage du REGF. La sensibilité cellulaire individuelle
au géfitinib n’était pas influencée par le statut mutationnel p53. Enfin, et d’une manière remarquable, il y
avait une relation inverse entre la CI50 du géfitinib et
le niveau d’expression du REGF. En d’autres termes, la
sensibilité au géfitinib était directement reliée au niveau
d’expression de la cible mesurée, soulignons-le encore,
par une méthode analytique prenant en compte la
fonctionnalité physiologique du récepteur (figure 1).
Des données expérimentales plus récentes ont permis de réexaminer le rôle de p53 dans la résistance au
ciblage du REGF. Ainsi, S. Huang et al. ont développé
des clones cellulaires épidermoïdes (origine : cancer
pulmonaire) résistant à l’action de l’anti-REGF, le cétuximab (16). Les auteurs ont pu mettre en évidence que la
résistance acquise au cétuximab s’accompagnait d’une
perte de p53. La réintroduction expérimentale de p53
était capable de resensibiliser les lignées résistantes à
l’activité du cétuximab (16).
Le rôle de p53 dans la résistance au ciblage du REGF
dans les cancers épidermoïdes reste cependant à être
confirmé. En ce qui concerne l’association entre l’expression du REGF et la sensibilité à son ciblage, des
70
Marqueurs prédictifs
de sensibilité et
de résistance aux anti-HER
avancées intéressantes ont été récemment rapportées par C. Li et al. en identifiant la présence du REGF
nucléaire comme un marqueur potentiel de résistance
au traitement par cétuximab (modèle épidermoïde,
cancer du poumon) [17]. Les avancées des analyses
multifactorielles ont également touché le domaine de
ciblage du REGF sur le plan expérimental. Ainsi, l’étude
de D.M. Hickinson et al. a porté sur l’identification de
biomarqueurs capables de prévoir la sensibilité au géfitinib sur des lignées cellulaires issues de cancers de la
sphère ORL (18). Les auteurs ont réparti les 20 lignées
étudiées en 3 groupes avec les lignées très sensibles au
géfitinib (CI50 < 1 μM), les lignées de sensibilité intermédiaire (CI50 entre 1 et 7 μM) et enfin les lignées jugées
résistantes (CI50 > 7 μM). L’application d’une exploration
d’expression multiple de l’ARN tumoral sur système
Affymetrix® (Affymetrix GeneChip® Human Genome U133
Plus 2.0 Array) a permis d’identifier une série de paramètres d’expression de la E-cadhérine, du TGFα, de l’amphiréguline, du REGF, et de la glutathion S-transférase
π. Une autre approche d’analyse de liaisons était, dans
cette étude, fondée sur une recherche non supervisée
identifiant l’expression différentielle de 46 gènes dont 7
étaient associés au REGF et au cancer ORL, à savoir HER3,
TGFα, E-cadherine, kératine 16, FGF2 et cortactine. Le
même outil Affymetrix® d’analyse d’expression multiple
du génome a été utilisé par l’équipe de H.H. Fiebig et
al. (19). Ces auteurs ont étudié la réponse au cétuximab
sur une série de 79 xénogreffes issues de 5 histotypes
différents dont des cancers de la sphère ORL (n = 8). Sur
ces 8 tumeurs, 5 étaient sensibles au cétuximab (63 %).
Cette proportion de tumeurs sensibles était la plus
élevée parmi l’ensemble des localisations tumorales
explorées. L’absence de réponse des 3 xénogreffes
de cancer ORL n’était reliée ni à une surexpression
de HER3 ou MET, ni à des mutations KRAS, BRAF ou
NRAS (19). Dans cette étude, le rôle de l’amplification
et de la surexpression de MET dans la résistance des
cancers du poumon au cétuximab a été globalement
mis en évidence. À l’opposé de l’approche de ce type
d'analyse multifactorielle se situe l’exploration moléculaire ciblée visant à disséquer les voies de signalisation
en rapport avec l’activation du signal REGF. Parmi ces
voies se situe l’axe PI3K-AKT-mTOR (20). L’équipe de
S. Vagner et al. a rendu résistante au cétuximab notre
lignée CAL 33 (lignée CAL 33/LTE) [21]. Cette lignée
a été explorée au sein d’un ensemble plus large de
lignées sensibles et résistantes au ciblage de HER2 ou
HER1 (21). Les auteurs ont examiné la modification de
la formation du complexe elF4F sous l’effet de différents
agents ciblant HER2 ou HER1, dont le cétuximab pour
HER1, et mis en évidence le rôle critique de l’expression
Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. I - n° 2 - avril-mai-juin 2012
Marqueurs prédictifs de réponse aux anti-HER dans les cancers ORL :
état des lieux et perspectives
REGF (unités arbitraires normalisées)
Ciblage du REGF, marqueurs prédictifs
et données cliniques
Comme précisé plus haut, les 2 catégories d’outils
thérapeutiques utilisés en clinique pour le ciblage du
REGF sont, d’une part, les anticorps monoclonaux et,
d’autre part, les ITK.
A.M. Egloff et J.R. Grandis ont passé en revue les différents biomarqueurs biologiques potentiels susceptibles
de prévoir la réponse aux anti-REGF dans les cancers
ORL. Le constat est que l’on ne dispose pas actuellement de marqueurs tumoraux cliniquement validés et
capables d’identifier les patients ORL bons candidats
au ciblage du REGF (22).
Nous avons récemment porté une attention toute particulière à l’expression de la cible REGF dans les cancers
ORL (23). Notre objectif a été de comparer différentes
méthodes de mesure de l’expression du REGF sur une
série de 79 patients inclus dans l’essai CARISSA du
GORTEC (étude contrôlée pour déterminer l’apport du
géfitinib à la radio-chimiothérapie pour des cancers
ORL à haut risque, résultats évoqués en détail ci-dessous). Nous avons utilisé en parallèle la technique de
fixation spécifique du ligand dérivée de la méthode de
Scatchard et les méthodes de Western-Blot sur les membranes cellulaires et d’immunohistochimie (IHC) par tissue
microarray. De plus, nous avons pris en compte l’état de
phosphorylation (activation) du REGF selon une mesure
par Western-Blot sur les membranes. La corrélation la
plus faible (r = 0,29) était notée entre l’expression IHC
et le Western-Blot membranaire, et la plus forte (r = 0,83)
était entre les expressions REGF et phospho-REGF membranaires. Pour cette dernière association, il est intéressant de souligner que l’élaboration de la forme active
phosphorylée du REGF (résidu tyrosine 1068) n’était pas
un phénomène saturable même à de très forts niveaux
d’expression du REGF (figure 2). En revanche, dans l’intervalle de valeurs des expressions REGF considérées, la
forme REGF de base augmentait d’un facteur 10 alors
que la forme phosphorylée ne s’élevait entre les extrêmes
que d’un facteur 3. Cette augmentation disproportionnée entre le REGF et sa forme activée peut traduire un
phénomène de rétrocontrôle de l’activation du REGF qui
reste à élucider. Globalement, cette étude indique que
l’expression du REGF membranaire est en accord avec
son état d’activation dans la situation des études de
1,2
0,0
1,0
0,2
0,8
0,4
0,6
0,6
0,4
0,2
pREGF
REGF
0,8
1,0
pREGF (unités arbitraires normalisées)
de elF4F dans la sensibilité à ces agents (21). À noter
que la lignée CAL 33/LTE surexprime le facteur 4E-BP1
par rapport à CAL 33 WT dont le rôle dans la résistance
au cétuximab mériterait d’être pris en considération.
1,2
0,0
Patients selon l’expression REGF croissante
Figure 2. Histogramme de distribution individuelle de l’expression du REGF et du phospho-REGF
(pREGF) pour les patients ORL de notre étude (23).
corrélations biologico-cliniques dans le cadre du ciblage
thérapeutique du REGF en pathologie tumorale ORL.
L’amplification génique du REGF varie de 10 à 60 % dans
les cancers ORL (24). On ne dispose pas, à ce jour, de
données suffisantes pour statuer sur le rôle de l’amplification génique du REGF comme facteur prédictif des
traitements ciblant le REGF dans les cancers ORL.
Nous avons exploité récemment l’étude clinique et
biologique concernant l’utilisation du géfitinib chez des
patients atteints d'un cancer ORL avancé et traités par
radio-chimiothérapie (essai CARISSA du GORTEC). Cette
étude prévoyait de n’inclure dans l’essai contrôlé (avec/
sans supplément de géfitinib) que les sujets disposant
initialement d’un prélèvement tumoral permettant
de réaliser l’ensemble des analyses biologiques prévues. Nos résultats, portant sur une série limitée de
patients (2 x 27), n’ont pas abouti à la mise en évidence
d’une différence significative de survie sans événement
selon que les patients avaient reçu ou non une supplémentation par géfitinib (25). Une analyse de facteurs
pronostiques pour toute la population (sujets traités
et non traités par géfitinib) a révélé que l’expression de
l’IGF-1R était un paramètre capable d’influencer significativement la survie sans événement d’une manière
différentielle selon que les patients avaient reçu ou
non du géfitinib. Pour les sujets sans géfitinib, l’IGF1R est un paramètre biologique dont l’élévation est
reliée à un pronostic défavorable. Au contraire, pour
les patients recevant le géfitinib, la valeur élevée de ce
marqueur est un élément de meilleur pronostic. Il paraît
Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. I - n° 2 - avril-mai-juin 2012
71
dossier
Liens d’intérêts. L’auteur déclare
avoir des liens d’intérêts avec Roche,
GSK, Saladax (États-Unis).
thématique
donc intéressant de creuser davantage la relation entre
l’expression de l’IGF-1R et l’efficacité des anti-REGF chez
les patients atteints d'un cancer ORL.
Les mutations de l’oncogène RAS ont été examinées
dans les cancers ORL (22). Contrairement aux cancers
du côlon, c’est surtout la forme HRAS (10 à 22 %) qui est
mutée dans les cancers ORL et non pas KRAS (3 à 7 %).
Il serait justifié de mieux analyser le lien entre l’existence
des mutations HRAS et la résistance au traitement par
anti-REGF dans les cancers ORL.
Marqueurs prédictifs
de sensibilité et
de résistance aux anti-HER
Le variant le plus fréquent du REGF est la forme tronquée (REGFvIII), dont l’expression a été rapportée avec
une fréquence pouvant atteindre 40 % dans les cancers
ORL (26). Des délétions des exons 2-7 du gène du REGF
sont en rapport avec la formation du REGFvIII qui est
constitutivement actif. La présence du REGFvIII peut être
une voie de recherche intéressante et prioritaire, selon
nous, dans l’identification de facteurs de résistance au
ciblage du REGF par anticorps monoclonaux dans les
cancers ORL.
■
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poor clinical outcome in patients with head and neck
vous S,donne
dès lawithrentrée
16. Huang S,et
Benavente
Armstrongrendez-vous
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pour vous accompagner dans votre pratique !
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growth factor receptor (EGFRvIII) contributes to head and neck
cancer growth and resistance to EGFR targeting. Clin Cancer
Res 2006;12(17):5064-73.
Sous 2 colonnes
largeur 140 mm
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72
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RÉSUMÉ
1. Kamangar F, Dores GM, Anderson WF. Patterns of cancer
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