Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIV - n° 3 - mars 2010
48
Avant-propos
Éditorial
L
épidémie de diabète de type 2 suit celle de
l’obésité. Trente-deux pour cent des Français
adultes sont en surpoids, et 14,5 % sont
obèses, soit une augmentation de 11 % par rapport à
2006 (résultats ObEpi 2009), tandis que la prévalence
du diabète augmente de 5 % par an. La France compte
2 500 000 patients diabétiques de type 2. La prévention
repose bien sûr sur un vaste programme déducation à la
san, s’adressant à l’ensemble de la population, et par-
ticulièrement aux jeunes. Au stade de l’obésité maladie
comme du diabète, il ne s’agit plus déducation pour
la santé, mais d’éducation thérapeutique. Léducation
thérapeutique a pour but d’aider le patient à atteindre
un compromis optimal individuel entre lobservance
thérapeutique et le maintien d’une qualide vie jugée
acceptable, grâce à l’acquisition de compétences de
soins et à une aide aux changements de comportement.
Léducation thérapeutique est donc d’abord thérapeu-
tique, et ne peut se sumer à un apprentissage technique
dispensé par des paradicaux, à un accompagnement
psychosocial par un psychologue ou à des informations
et des conseils on live grâce à la télémédecine. Elle sup-
pose un changement de la relation avec le patient, qui
devient un authentique partenaire de soins. Levidence-
based medicine nore donc pas une recette universelle,
mais un outil entre les mains des praticiens, les aidant à
individualiser les objectifs pour chaque patient.
Les données récentes de l’evidence-based medicine en
matière d’équilibre glycémique au cours du diabète
de type 2 ont évolué dans deux sens apparemment
opposés. D’une part, l’étude post-l’UKPDS (1) pour le
diabète de type 2, conrmant les données post-DCCT
dans le diabète de type 1, a montré qu’il existe une
mémoire de l’hyperglycémie. Les diabétiques bien équi-
librés pendant les premières années de leur diabète
gardent un bénéce rémanent 10 ans après. En vérité,
il s’agit plutôt d’une pénalité rémanente, comme si
l’hyperglycémie avait entraîun vieillissement accélé
irréversible de la paroi artérielle. Les années perdues
ne se rattrapent pas. Le slogan “plus tôt, plus vite, plus
fort !” des diabétologues s’en trouve conforté.
Mais l’evidence-based medicine est venue rappeler ce
que l’on avait oublié : l’hypoglycémie sévère peut être
mortelle chez le diabétique coronarien, alors qu’il n’y
a pas de bénéce démontré à vouloir ramener l’HbA1c
au-dessous de 7,5 % chez des patients ayant un diabète
Les objectifs de traitement
du diabète de type 2
À nos lecteurs
Nous sommes extrêmement heu-
reux de vous proposer, à linstar de
notre publication dédiée au tabac,
en 2009, un nouveau numéro plu-
ridisciplinaire de Correspondances entabolismes Hormones Diabètes
et Nutrition (MHDN), entièrement consacré au diabète de type 2. Le
Professeur André Grimaldi, que nous remercions ici très sincèrement,
nous a fait l’honneur de bien vouloir en élaborer le sommaire et
coordonner le contenu éditorial. Sous l’égide de la publication MHDN,
de toute l’équipe éditoriale et du Dr Sylvie Vercken, il a su réunir des
auteurs de plusieurs spécialités soutenues par nos publications : La
Lettre de l’Hépato-gastroentérologue, La Lettre du Cardiologue, Images
en ophtalmologie, Images en dermatologie
Nous sommes convaincus que, comme nous, vous serez extrêmement
intéressés par ces écrits conçus et rassemblés pour vous.
Excellente lecture à tous.
Claudie Damour-Terrasson, Pr Pierre Gourdy,
directrice de la publication rédacteur en chef
Éditorial
ancien et une insusance coronaire. Rappelons que,
dans la grande étude STENO 2 (2) qui démontra la réduc-
tion de 50 % de la morbi-mortalité cardio- vasculaire
grâce au traitement intensif de l’ensemble des facteurs
de risque, l’HbA1c du groupe “traitement intensif était
à 7,7 %, loin de l’objectif visé de 6,5 %. Sur toutes les
études interventionnelles randomisées réalisées chez
les diabétiques de type 2, ce sont les patients du groupe
contrôle de l’étude ACCORD (3) qui ont obtenu la mor-
talité cardio-vasculaire la plus faible, avec une HbA1c de
7,5 %. Lorsque le patient diabétique n’a pas de risque
d’hypoglycémie, en particulier lorsqu’il n’est pas sous
insuline, il faut viser le meilleur équilibre glycémique
possible, commencer par la metformine, passer à une
bithérapie lorsque l’HbA1c atteint ou dépasse 6,5, à
une trithérapie lorsqu’elle atteint ou dépasse 7. Mais
lorsque le patient est à haut risque cardio-vasculaire
ou coronarien, et lorsquon utilise des drogues à risque
d’hypoglycémie comme les sulfamides et l’insuline, une
HbA1c à 7,5, voire à 8, paraît acceptable.
Les decins prescripteurs ont maintenant à leur dispo-
sition non plus trois classes trapeutiques (metformine,
sulfamides, insuline) mais huit (metformine, sulfamides,
inhibiteurs des alphaglucosidases, glinides, glitazones,
gliptines, analogues du GLP1, insuline, et bientôt gli-
ozines). Comment choisir ? Les AMM positionnent les
nouvelles molécules précocement en bithérapie avec la
metformine. Elles ne font que suivre le programme de
développement déni par l’industrie pharmaceutique
elle-même. Les recommandations devraient prendre en
compte non seulement la puissance d’action, la tolé-
rance, les eets secondaires (poids et hypoglycémies),
l’additivité, mais aussi la réponse à trois questions clés
pour le traitement du diabète de type 2 :
quelle durabilité d’action ?
quelles conséquences sur la morbi-mortalité cardio-
vasculaire ?
quel coût ?
Par dénition, on ne peut répondre pour les nouvelles
molécules quà la troisième question, celle du coût, tou-
jours beaucoup plus élevé. Les questions 1 et 2 supposent
des études prolones sur plusieurs années. Logiquement,
les nouvelles molécules nont donc de place quen cas
d’échec des anciennes molécules bon marché. En l’oc-
currence, prudence et économie vont de pair, comme
l’a mont l’histoire récente décevante des glitazones et
l’épisode du rimonabant
®
qui a é retiré rapidement de
la vente. Avec les glitazones, les diabétologues ont appris
quil existe des patients répondeurs – parfois de façon
spectaculaire et des patients non répondeurs. Une des
nouvelles voies de recherche sera donc de nir le phé-
notype, voire le notype des pondeurs. En attendant,
force est de se contenter d’une démarche empirique. Un
nouveau traitement hypoglycémiant qui nentraîne pas
une baisse d’HbA1c surieure ou égale à 0,5 point dans
les 3 mois suivants doit être arrêté.
Reste que la classe thérapeutique qui a fait les preuves
de son ecacité pour la réduction du risque cardio-
vasculaire des diabétiques est celle des statines, avec
pour objectif un LDL-cholestérol inférieur à 1,30 g/l
chez tous les diabétiques de type 2, inférieur à 1 g/l
en cas de haut risque cardio-vasculaire, et autour de
0,70 g/l en prévention secondaire. À côté des statines,
les antihypertenseurs, en particulier les IEC, ont démon-
tré leur ecacité, tandis que l’indication du traitement
antiplaquettaire, reconnu en prévention secondaire,
reste discutée en prévention primaire. Quoi qu’il en
soit, l’incidence des accidents cardio-vasculaires, en
particulier de l’infarctus du myocarde, a considérable-
ment diminchez les patients diabétiques, même si la
prévalence reste importante compte tenu de l’épidémie
de diabète. Cette amélioration importante, due au trai-
tement médical, soulève la question de la pertinence
du dépistage systématique de l’ischémie myocardique
silencieuse, dont le néce reste toujours à montrer.
En conclusion, la prise en charge du diabète de type 2
représente environ 10 % des dépenses de la Sécurité
sociale, soit 12,5 milliards d’euros, avec une augmenta-
tion en euros constants de 80 % entre 2001 et 2007 (4).
Voilà des chires qui devraient nous faire rééchir sur
l’application du “juste soin au juste coût”, qui est pour
le médecin d’abord un devoir éthique, avant d’être une
responsabilité économique.
Pr André Grimaldi,
Service de diabétologie-métabolisme,
groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris
1. Holman RR, Paul SK, Bethel MA, Matthews DR, Neil AW.
10-year follow-up of intensive glucose control in type 2 dia-
betes. N Engl J Med 2008;359:1577-89.
2. Gaede P, Lund-Andersen H, Parving HH, Pedersen O. Effect
of a multifactorial intervention on mortality in type 2 diabetes.
N Engl J Med 2008;358:580-91.
3. The Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes Study
Group. Effects of intensive glucose lowering in type 2 diabetes.
N Engl J Med 2008;358:2545-59.
4. Ricci P, Chantry M, Detournay B et al., pour le comité scien-
tifique d’Entred. Coûts des soins remboursés par l’Assurance
maladie aux personnes traitées pour diabète : études Entred
2001 et 2007. Bulletin épidémiologique hebdomadaire théma-
tique – Institut de Veille Sanitaire 2009;42-43:464-9.
R é f é r e n c e s
1 / 2 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !