218 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 3 - mars 2011
PHARMACOLOGIE
Nouvelles cibles
des médicaments anticancéreux 1
New targets in oncology
É. Civade*, F. Thomas*
1 © La Lettre du Pharmacologue
2010;24(4):113-20.
* EA 3035 et université de Toulouse,
institut Claudius-Regaud, Toulouse.
L
apparition des premières thérapeutiques
ciblées, il y a quelques années, a donné un
nouveau souffle à la recherche de nouvelles
molécules anticancéreuses. Une des approches
thérapeutiques consiste en l’utilisation de petites
molécules inhibitrices de l’activité tyrosine kinase
(TK) intracellulaire des récepteurs. La plus connue est
l’imatinib, inhibiteur TK du récepteur c-KIT surexprimé
dans les tumeurs stromales gastro-intestinales ou de
la protéine chimérique BCR-ABL impliquée dans les
leucémies myéloïdes chroniques (1). L’autre grande
approche consiste à utiliser des anticorps mono-
clonaux bloquant l’activité du récepteur, principa-
lement par un mécanisme de compétition entre le
ligand et l’anticorps. Le chef de file est le trastuzumab,
anticorps ciblant les récepteurs des facteurs de
croissance épidermoïde humain de type HER2, surex-
primé dans certains cancers du sein. L’amélioration
des connaissances des mécanismes impliqués dans
l’oncogenèse (prolifération, angiogenèse, invasion)
et dans la résistance aux traitements cytotoxiques
(apoptose, réparation des dommages de l’ADN) a
permis le développement de médicaments capables
de cibler directement les protéines incriminées. Cette
revue décrit de manière non exhaustive les nouvelles
cibles pour lesquelles des composés sont actuelle-
ment en phase de développement clinique.
Cibles impliquées
dans la prolifération cellulaire
La prolifération des cellules tumorales dépend
essentiellement des voies de signalisation intra-
cellulaires activées par les récepteurs à activité
tyrosine kinase (RTK) des facteurs de croissance
(EGFR, IGFR, PDGFR, etc.). La famille des récepteurs
du facteur de croissance épidermique humain (EGFR,
HER2, HER3 et HER4) a déjà été largement étudiée,
notamment les récepteurs HER1 et HER2, pour
lesquels des inhibiteurs sont maintenant commercia-
lisés (erlotinib, cétuximab, lapatinib, trastuzumab).
Le développement des inhibiteurs des RTK se
poursuit, et les protéines intracellulaires média-
trices du signal deviennent également des cibles
pour les médicaments anticancéreux (par exemple
MEK, RAF, mTOR, etc.). Dans ce paragraphe seront
développés quelques exemples de nouvelles cibles
impliquées dans la croissance tumorale.
Les récepteurs membranaires
à activité tyrosine kinase
HER3
La dimérisation est un prérequis essentiel au
fonctionnement des récepteurs de type HER. HER3,
privé d’activité TK, ne peut former que des hétéro-
dimères, dont HER2/HER3 est le plus important
vis-à-vis de la croissance tumorale. De ce fait, HER3
est devenu une cible potentielle dans l’inhibition des
voies de signalisation médiées par les récepteurs
HER (2). De nombreux anticorps humanisés ciblant
HER3 (AMG 888, MM121) sont en cours de dévelop-
pement clinique (2). Par ailleurs, le pertuzumab,
anticorps humanisé inhibant l’hétérodimérisation,
peut représenter une alternative intéressante au
traitement par trastuzumab (anticorps monoclonal
anti-HER2) dans le cancer du sein HER2 positif.
L’association pertuzumab/trastuzumab, qui permet
le double blocage de la dimérisation et de la signa-
lisation médiée par HER2, a été également évaluée
lors de 2 phases II : un bénéfice clinique a été
démontré chez 50 % des patientes traitées pour
un cancer du sein surexprimant HER2 (3). Une étude
de phase III est actuellement en cours.
É. Civade
F. Thomas
La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 3 - mars 2011 | 219
Résumé
»
Le développement des thérapeutiques ciblées répond à une attente majeure des cancérologues : le trai-
tement spécifique de la cellule cancéreuse permettant d’éviter ou de limiter la toxicité locale ou générale
des traitements du cancer sur les cellules saines.
»
Deux approches constituent aujourd’hui la thérapeutique ciblée : les anticorps monoclonaux et les
petites molécules inhibitrices.
»
De nouvelles molécules agissant sur tous les processus de l’oncogenèse ainsi que de nouvelles approches
pharmacologiques (oligonucléotides antisens) sont actuellement en cours de développement clinique dans
le but d’amplifier l’arsenal des thérapies ciblées en vue d’une optimisation des stratégies thérapeutiques.
Mots-clés
Trapies ciblées
Oncogenèse
Cibles
en développement
Anticorps
monoclonaux
Petites molécules
inhibitrices
Highlights
»
The development of targeted
therapies is meeting oncolo-
gists’ expectations: to specifi-
cally treat the tumor cell and
limit the systemic toxicity,
which is usually due to the
cytotoxic effect of the drug on
normal cells.
»
Most targeted therapies
currently used rely on two
pharmacological strategies:
monoclonal antibodies and
small molecules that inhibit
tyrosine kinase activity.
»
New molecules targeting
proteins involved in oncogen-
esis as well as new approaches
(such as the use of antisens
oligonucleotides) are under-
going clinical development
and will hopefully enhance the
therapeutic options for cancer
treatment.
Keywords
Targeted therapies
Oncogenesis
Emerging targets
Monoclonal antibodies
Small-molecule kinase
inhibitors
c-Met
L’identification d’une amplification de c-Met (RTK)
chez les patients résistants aux inhibiteurs de HER1
ou HER2 a mis en lumière un nouveau rôle potentiel
de ce RTK, dont l’implication dans la tumori-
genèse, la résistance à l’apoptose et l’angiogenèse
tumorale était déjà bien connue (4). La diméri-
sation de c-Met, indispensable à son activation,
est consécutive à la fixation de son seul ligand
connu, le facteur de croissance des hépatocytes
(HGF). Les stratégies les plus largement exploitées
pour bloquer c-Met sont celles qui ciblent le site
de fixation de l’ATP, et de nombreux inhibiteurs
(K252a, SU-11274) sont actuellement en cours
d’évaluation clinique (5). En outre, on dénombre
3 anticorps anti-HGF humains ou humanisés en
cours d’évaluation clinique (PRO143966, AMG102,
SCH 900105) et un anticorps anti c-Met humanisé
(MetMab ou OA5D5) actuellement en phase II dans
le cancer du poumon.
IGF-1R
L’IGF-1R fait partie de la famille des RTK et a pour
ligand essentiel le facteur de croissance à l’insuline
(IGF). La voie de l’IGF-1R est cruciale pour le
développement embryonnaire, la croissance et les
mécanismes de réparation tissulaire. Cependant, le
dysfonctionnement de l’axe IGF-1R/IGF est aussi un
acteur majeur du développement tumoral. Dans
de nombreux types tumoraux, la surexpression de
l’IGF-1R semble jouer un rôle essentiel dans la trans-
formation cellulaire, l’angiogenèse, la résistance à
l’apoptose. Récemment, son rôle a également été
mis en évidence dans des mécanismes de résistance
aux traitements par trastuzumab ou géfitinib (6).
Il pourrait donc être utile d’associer les 2 types de
traitement ou de cibler des populations résistantes
à ces molécules en utilisant une thérapie dirigée
contre l’IGF-1R, ce qui justifie l’évaluation clinique
d’anticorps monoclonaux ciblant ce récepteur.
Celui dont le développement est le plus avancé est
le CP-751,821 pour lequel 18 essais cliniques sont
déclarés, dont 2 phases III dans le cancer du poumon
en association avec le paclitaxel-carboplatine. Enfin,
2 molécules antagonistes (AXL1717 et BMS-754807)
et 2 ITK (OSI-906 et XL228) de l’IGF-1R sont en
cours de développement clinique.
HSP90
La protéine chaperon HSP90 (Heat Shock Protein)
joue un rôle vital non seulement dans la réponse au
stress cellulaire en maintenant un bon repliement
tridimensionnel des protéines en dépit des chocs
thermiques, mais aussi dans la régulation de
certaines fonctions cellulaires fréquemment
dérégulées lors d’un cancer, telles que la prolifération
cellulaire et l’apoptose. De nombreuses protéines
impliquées dans l’oncogenèse sont prises en charge
par HSP90, telles que HER2 et c-Met (7). La tanespi-
mycine inhibe l’activité de HSP90 et entraîne ainsi la
dégradation de HER2, l’arrêt de la croissance cellu-
laire et l’apoptose (2). Une étude de phase I a évalué
la faisabilité de l’association trastuzumab-tanespi-
mycine chez 25 patientes atteintes du cancer du sein
surexprimant HER2 et réfractaires au trastuzumab
seul. Des réponses tumorales ont été observées chez
5 patientes (8).
ADAM
Les membres de la famille des désintégrines et
des métalloprotéases (ADAM) sont des molécules
transmembranaires qui jouent un rôle majeur dans
la transformation des proligands de la famille des
EGFR, de leur forme transmembranaire en forme
soluble par clivage (figure,◆p.◆220). Lactivation des
ADAM fait suite à l’activation d’un récepteur couplé
aux protéines G (RCPG). De plus, le fragment ancré
de l’EGF dans la membrane après clivage peut être
transloqué dans le noyau et accentuer la prolifération
cellulaire en séquestrant une protéine répressive
de la transcription (figure). Enfin, ADAM10 est
capable de cliver la partie extracellulaire de HER2,
rendant le récepteur constitutivement actif, ce qui
se traduit par des cancers de mauvais pronostic et
résistants aux thérapies ciblées de type anticorps
monoclonaux (9). Un inhibiteur des ADAM10 et 17
(ADAM les plus souvent surexprimés), INCB7839,
est actuellement en cours d’évaluation dans un essai
clinique de phase II chez des patients atteints de
tumeurs solides surexprimant HER2 (9). KB-R7785
inhibe, quant à lui, la translocation nucléaire du
fragment du ligand restant après clivage, entraînant
ainsi l’inhibition de la croissance cellulaire, qui peut
être renforcée par l’association avec un anticorps
dirigé contre EGFR, tel le cétuximab (10).
ADAM Progiland EGF EGFR IGF-1R c-Met
HER2/HER3
RCPG RCPG SFK
Domaines
tyrosine kinase
Protéines
clientes de HSP90
(HER2, AKT, etc.)
PI3K
Répresseur
Exportation
du répresseur
Noyau
Prolifération
cellulaire
Prolifération
cellulaire
Apoptose/
survie
Angiogenèse
Maturation
Mobilité/migration/
invasion
PIP2 PIP3
AKT
Ras/Raf
HSP90HSP90
HSP90
MEK/Erk
mTOR
Figure. Schéma des cibles de la prolifération.
ADAM : a disintegrin and metalloproteinase ; EGF : facteur de croissance épidermoïde ; PIP2 : phosphatidylinositol-2-phosphate ; PIP3 : phosphatidylinositol-
3-phosphate ; RCPG : récepteur couplé aux protéines.
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PHARMACOLOGIE
c-Src
c-Src est un proto-oncogène codant pour une
protéine transmembranaire à activité TK (SFK) ;
un stade avancé et de mauvais pronostic de divers
cancers humains semblent être associés à un fort
niveau d’expression et d’activité de cette protéine.
Pour cela, c-Src interagit, après changement de
conformation, directement avec des RTK, des RCPG
ou des récepteurs aux stéroïdes, entraînant la proli-
fération et la migration des cellules cancéreuses ainsi
que l’angiogenèse (11). Par conséquent, de petites
molécules ayant pour fonction d’interférer avec
le domaine kinase ou de bloquer les domaines de
fixation ont été développées afin d’inhiber l’activité
des SFK. La plus connue est le dasatinib, inhibiteur
multikinase (BCL-ABL, c-kit, c-Src, PDGFR-β) indiqué
dans les leucémies myéloïdes chroniques (LMC)
ou dans les leucémies lymphoïdes aiguës avec
présence du chromosome Philadelphie (chromosome
BCR-ABL) et qui fait l’objet actuellement d’études
de phase I ou II dans les cancers métastatiques du
sein et de la prostate ou encore dans les cancers
non hodgkiniens. D’autres molécules sont en cours
de développement, telles que le bosutinib dans les
LMC réfractaires aux traitements de référence (étude
de phase III) ou dans le cancer du sein (étude de
phase II) [12].
Voie◆PI3K/AKT/mTOR
La voie PI3K/AKT/mTOR est une voie de signalisation
intracellulaire jouant un rôle clé dans l’homéostasie
cellulaire par sa fonction de régulation de l’apoptose,
de la croissance, du cycle cellulaire et de l’angio-
genèse. La cascade d’activation intracellulaire de
la voie PI3K/AKT/mTOR se fait par l’intermédiaire
de différents RTK (figure). mTOR est une sérine/
thréonine kinase régulée par le taux en acide
aminé, en nutriments, par l’hypoxie et par AKT.
Elle peut former 2 types de complexes : mTORC1 et
mTORC2. mTORC1 a pour cible 4E-BP1, eEF2 et S6K1,
Nouvelles cibles desdicaments anticancéreux
La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 3 - mars 2011 | 221
PHARMACOLOGIE
qui exercent un contrôle sur la traduction, le cycle
cellulaire et l’apoptose. Dans les cellules tumorales,
cette voie de signalisation est fréquemment
dérégulée, la plupart des protéines la constituant
pouvant être mutées, délétées ou surexprimées selon
les cas. La rapamycine (ou sirolimus) est le premier
inhibiteur de mTOR à avoir été mis en évidence.
Cependant, comme elle n’est pas suffisamment
hydrosoluble, 3 analogues ont été développés, qui
ont un meilleur profil pharmacologique : le temsiro-
limus (CCI-779), l’évérolimus (RAD001) et le déforo-
limus (AP23573). Leurs premières indications sont le
carcinome rénal ; des essais cliniques en cours dans
les lymphomes du manteau donnent des résultats
intéressants. Cependant, les taux de réponse dans les
autres localisations restent dans l’ensemble insuffi-
sants du fait de phénomènes de résistance. En effet,
ces molécules sont des inhibiteurs spécifiques de
mTORC1, et de récentes études ont mis en évidence
différents mécanismes de résistance qui induisent
une suractivation du complexe mTORC2 par rétro-
contrôle positif des protéines en aval de mTOR. Une
alternative a donc été trouvée en développant des
inhibiteurs qui bloquent la sous-unité kinase cataly-
tique des mTOR, identique pour les 2 complexes. Ces
inhibiteurs (AZD8055, INK 128) sont en cours d’éva-
luation clinique (phases I et II), et les résultats préli-
minaires montrent un effet antitumoral supérieur à
celui obtenu avec la rapamycine et ses analogues (13).
D’autres molécules sont capables de bloquer la voie
de signalisation PI3K/AKT/mTOR : d’une part, des
inhibiteurs de PI3K spécifiques (GDC-0941, XL-147)
ou ciblant également mTORC1/2 (BEZ235) du fait
de l’homologie de leurs sous-unités catalytiques.
Ces molécules donnent des résultats préliminaires
encourageants (14). D’autre part, des inhibiteurs des
AKT, comme MK-2206, agissent en bloquant le site
de liaison de l’ATP. Cette inhibition, testée au cours
d’une étude de phase I, a permis une stabilisation
de la maladie chez 6 patientes sur 19 atteintes de
cancer ovarien (13).
Cibles impliquées
dans la vascularisation
tumorale
En raison de son rôle crucial dans la croissance
tumorale, la vascularisation tumorale constitue une
cible qui a été largement exploitée ces dernières
années. L’angiogenèse et ses principaux acteurs ne
sont pas réellement des cibles nouvelles, mais nous
citerons les stratégies récentes pour l’inhibition de
ce phénomène, qui peut se faire :
avec un anticorps monoclonal anti-VEGF : le
bévacizumab ;
avec un récepteur soluble du VEGF : le VEGF-Trap
(aflibercept) est un anticorps monoclonal reconnais-
sant et piégeant toutes les isoformes du VEGF-A.
Actuellement, l’aflibercept est testé en phase III
dans différentes indications (prostate, poumon,
colon et pancréas) ;
avec des ITK du VEGFR. Ces ITK ne sont souvent
pas spécifiques des VEGFR mais inhibent également
d’autres RTK potentiellement impliqués dans l’on-
cogenèse et/ou dans l’angiogenèse. C’est le cas du
sunitinib, qui inhibe VEGFR, PDGFR et c-kit, et du
sorafénib, qui inhibe les activités kinase de Raf et
de VEGFR-2. Une dizaine de composés similaires
sont en cours de développement, certains (vandé-
tanib, pazopanib, cédiranib et brivanib) plus avancés
que d’autres (axitinib, dovitinib, motésanib, XL647,
XL880).
Contrairement aux agents antiangiogéniques qui
agissent sur les vaisseaux naissants, les agents
antivasculaires (AAV) ciblent les vaisseaux tumoraux
déjà établis en provoquant l’ischémie et la nécrose.
Dans les minutes qui suivent l’injection, ces agents
entraînent une diminution du flux sanguin tumoral et
une fermeture du réseau vasculaire, et sont suscep-
tibles d’être actifs sur des tumeurs évoluées. Les AAV
les plus avancés sont les flavonoïdes, avec l’ASA404
(ou vadimézan, DMXAA) et le FAA (Flavone Acetic
Acid) – qui induisent des lésions apoptotiques de
la cellule endothéliale par sécrétion de cytokines
et d’agents vaso-actifs – et les agents se liant à la
tubuline, dérivés de la colchicine (combretastatine
A-4P, ZD6126, CA1P, etc.) [15]. Ces derniers, en se
fixant sur la tubuline, perturbent le cytosquelette
des cellules endothéliales et causent ainsi la détério-
ration de l’endothélium. Ce phénomène entraîne
une congestion vasculaire et l’interruption du flux
sanguin, responsables de la nécrose tumorale. Ces
agents ciblent les vaisseaux sanguins tumoraux en
s’appuyant sur leur fragilité : cellules endo théliales
en prolifération et immatures, extrêmement
dépendantes de leur cytosquelette à tubuline pour
conserver leur forme, membrane basale anormale,
perméabilité vasculaire élevée, vaisseaux désorga-
nisés et fins aux diamètres irréguliers et flux sanguin
variable. Ces caractéristiques rendent les vaisseaux
tumoraux très sensibles à l’action des AAV alors que
les vaisseaux normaux, plus robustes, ne seront que
peu affectés par ces agents. Les effets indésirables
de l’ASA404 sont essentiellement neurologiques et
222 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 3 - mars 2011
PHARMACOLOGIE
cardiologiques (allongement de l’intervalle QT) [16].
Peu actifs en monothérapie, les AAV semblent être
bien tolérés et prometteurs en association avec la
chimiothérapie. Les résultats de la phase III testant
l’ASA404 en association avec le carboplatine et le
paclitaxel dans le poumon devraient être disponibles
en 2011 (16).
Cibles impliquées
dans le cycle cellulaire
Le cycle cellulaire est l’ensemble des phases par
lesquelles une cellule passe entre 2 divisions succes-
sives (4 phases : G1, S, G2 et M). Il s’accompagne de
mécanismes de régulation très complexes pour éviter
une prolifération excessive des cellules. Les cibles
potentielles du cycle cellulaire pour des traitements
anticancéreux se répartissent en 3 groupes :
Les CDK (Cyclin-Dependent Kinases), qui, en
interagissant avec les cyclines, sont responsables
du passage d’une phase à l’autre et donc de la
progression dans le cycle cellulaire. Leur expres-
sion est fréquemment altérée dans différents types
tumoraux ;
Les points de surveillance du cycle cellulaire, dont
les principaux acteurs, ATM, ATR, CHK1 et CHK2
(checkpoint kinases) interagissent pour arrêter le
cycle cellulaire en cas de dommages sur l’ADN et
permettre la réparation de ce dernier avant de pour-
suivre le cycle. L’inhibition pharmacologique de ces
molécules entraîne une radiosensibilisation et une
chimiosensibilisation par catastrophe mitotique liée à
l’accumulation de dommages non réparés sur l’ADN ;
Les kinases qui régulent la mitose, telles que les
kinases Aurora et les kinases polo-like (PLK). Alors
qu’Aurora A et PLK-1 sont impliquées dans la division
du centrosome et la formation du fuseau mitotique,
Aurora B joue un rôle dans la bi-orientation des chro-
mosomes lors de la métaphase et dans la cytokinèse.
Les composés en cours de développement sont
présentés dans le tableau,◆p.◆224.
Cibles impliquées
dans la réparation
des dommages de l’ADN
Les poly(ADP-riboses) polymérases (PARP) sont des
enzymes impliquées dans la réparation de l’ADN,
en particulier des cassures simple brin, qui peuvent
entraîner des lésions double brin au niveau des
fourches de réplication. Ces dernières sont réparées
par recombinaison homologue, avec intervention
des gènes suppresseurs de tumeur BRCA1 et BRCA2.
Les inhibiteurs de PARP sont donc particulièrement
actifs chez les patients présentant des mutations
de BRCA1 ou de BRCA2 retrouvées dans certains
cancers du sein, de l’ovaire ou de la prostate, chez
qui l’accumulation d’anomalies non réparées sur
l’ADN va induire l’apoptose des cellules tumorales.
Lolaparib est un inhibiteur de PARP administré per
os. Les résultats des phases I et II (18, 19) ont d’ores
et déjà montré une effi cacité très prometteuse sur
les tumeurs mutées pour BRCA1 ou BRCA2, avec un
effet dose-réponse et des effets indésirables accep-
tables (fatigue et troubles gastro-intestinaux) et
indépendants des mutations de BRCA1 et BRCA2.
Actuellement, plusieurs inhibiteurs de PARP sont en
cours d’essais cliniques (phases I et II principalement).
Le BSI-201, notamment, est testé en phase III dans
les tumeurs du sein triple-gatives (ER−, PR− et
HER2−).
Cibles impliquées
dans l’apoptose
La famille des protéines antiapoptotiques BCL-2,
dont la surexpression a été associée à un phénotype
tumoral plus agressif et à des phénomènes de résis-
tance à la chimiothérapie dans les tumeurs solides
et hématologiques, constitue une cible intéressante
pour laquelle une dizaine de composés sont actuel-
lement en développement à des stades allant du
préclinique à la phase III (20). La plus avancée est
un antisens de BCL-2 (oblimersen sodium) qui, en
se fi xant sur l’ARNm de façon spécifi que, inhibe la
synthèse protéique de BCL-2. Loblimersen (G3139,
Genasense®) est actuellement testé en association
avec la chimiothérapie dans les tumeurs hématolo-
giques et dans certaines tumeurs solides (poumon,
mélanome, prostate, rein, foie) [20]. De petites
molécules (gossypol ou AT-101, ABT-737 ou ABT-263,
GX15-070) qui inhibent les protéines de type BCL-2
en se liant au niveau de la poche hydrophobe, telles
les protéines BH3 dont le rôle endogène est de lever
l’action antiapoptotique de BCL-2 et de déclencher
la voie intrinsèque de l’apoptose (20), sont en cours
d’essais cliniques.
La survivine est une protéine antiapoptotique qui
pourrait faire une cible pharmacologique intéres-
sante :
elle est fortement exprimée dans le tissu tumoral
et très peu dans le tissu normal ;
Nouvelles cibles desdicaments anticancéreux
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