Maq avril 04/06/02 10:02 Page 139 R E V U E D E P R E S S E Dirigée par le Pr P. Amarenco Rétinopathie de stase veineuse et occlusion carotidienne ■ La rétinopathie de stase veineuse est le premier signe du syndrome d’ischémie oculaire compliquant les occlusions carotidiennes. Elle est le plus souvent asymptomatique, dépistée lors d’un examen systématique du fond d’œil, et associe dilatation des veines rétiniennes et hémorragies profondes en moyenne périphérie rétinienne. Elle est secondaire à une hypoperfusion chronique de la rétine et est réversible en cas de reperfusion oculaire. Elle peut se compliquer d’un syndrome d’ischémie oculaire dont le pronostic est catastrophique. Au cours du syndrome d’ischémie oculaire, des néovaisseaux apparaissent sur la rétine, le disque optique, l’angle irido-cornéen et l’iris, produisant des douleurs oculaires, un glaucome néovasculaire, des hémorragies intraoculaires, une cataracte et un œdème cornéen conduisant à une baisse irréversible d’acuité visuelle. Dans cette étude, les auteurs ont systématiquement examiné le fond d’œil de 110 patients ayant une occlusion carotidienne symptomatique. Une rétinopathie de stase veineuse était présente chez 32 patients (29 %), notamment chez ceux ayant des symptômes neurologiques évoquant un mécanisme hémodynamique (RR 2,4 ; IC 95 % : 1-5,9). Les patients ayant une rétinopathie de stase veineuse avaient un débit sanguin cérébral plus bas que ceux sans rétinopathie de stase veineuse. Après 29 mois de suivi en moyenne, seulement 4 patients avaient des symptômes oculaires suggérant un syndrome d’ischémie oculaire. Commentaires. Cette étude est importante car elle confirme la forte prévalence de rétinopathie de stase veineuse (1/3) chez les patients ayant une occlusion carotidienne provoquant une ischémie chronique. Ces patients, qui ont un débit sanguin cérébral diminué, sont à risque de déveloper un accident ischémique cérébral hémodynamique et ont également un risque de syndrome d’ischémie oculaire irréversible. Un examen ophtalmologique systématique permet de dépister ces patients lorsqu’une occlusion carotidienne est découverte. Cette étude ne permet aucune conclusion quant à la prise en charge thérapeutique des patients ayant une occlusion carotidienne symptomatique, mais il est possible qu’une revascularisation cérébrale et oculaire précoce améliore leur pronostic. Il faut également mentionner que cette étude n’a évalué que les patients ayant une occlusion carotidienne symptomatique, alors que la rétinopathie de stase veineuse et le syndrome d’ischémie oculaire surviennent souvent chez des patients n’ayant aucun symptôme neurologique, révélant ainsi l’occlusion carotidienne. V. Biousse, unité de neuro-ophthalmologie, université Emory, États-Unis. ✔ Klijn CJM, Kappelle J, van Schooneveld MJ et al. Retinopathy in symptomatic carotid artery occlusion. Prevalence, cause, and outcome. Stroke 2002 ; 33 : 695-701. Spectre de l’atteinte des nerfs périphériques dans la sarcoïdose ■ Said et al. rapportent une série rétrospective de 11 patients atteints de neuropathies sarcoïdosiques prouvées histologiquement. Profil clinique : 6 neuropathies focales ou multifocales, dont un patient qui s’est présenté comme une neuropathie avec blocs de conduction et un autre comme une neuropathie multifocale axonale, 4 atteintes symétriques et distales et un patient qui s’est présenté comme un Guillain-Barré avec une diplégie faciale et une défaillance respiratoire. ECA : élevée chez 2 patients ; IDR à la tuberculine : négative chez 10 patients. Histologiquement : granulomes dans l’épinèvre et la périnèvre sur toutes les biopsies nerveuses ; infiltrat inflammatoire dans l’endonèvre, le tissu conjonctif et les vaisseaux chez 5 patients ; cellules géantes multinucléées chez 8 patients et vascularite nécrosante chez 7 patients. Sur 10 biopsies musculaires : infiltrats inflammatoires et granulomes chez 9 patients et vascularite nécrosante chez 2 patients. Les cellules infiltrantes étaient en majorité des lymphocytes CD4+ et des macrophages (réaction d’hypersensibilité retardée). Tous les patients avaient un autre tissu ou organe atteint : muscle (9), poumons et/ou ganglions thoraciques (8), peau (3), arthrite (2), ganglion périphérique (1), œil (1), estomac (1). Seuls 2 patients avaient un diagnostic de sarcoïdose avant les manifestations neurologiques. La plupart des patients ont été améliorés par les corticoïdes. Commentaires. Cette étude illustre le spectre large de l’atteinte sarcoïdosique avec deux présentations inattendues et La Lettre du Neurologue - n° 4 - vol. VI - avril 2002 jamais rapportées dans la littérature : les cas mimant la neuropathie avec blocs et le Guillain-Barré. D. Dimitri, hôpital Sainte-Anne, Paris. ✔ Said et al. Nerve granulomas and vasculitis in sarcoid peripheral neuropathy. A clinicopathological study of 11 patients. Brain 2002 ; 125 : 264-75. Homocystéine plasmatique et démence ■ Pour étudier la relation entre l’homocystéine plasmatique et le développement d’une démence, 1 092 sujets non déments (âge moyen 76 ans) ont été suivis de manière prospective. Le taux d’homocystéine de base a été mesuré et celui effectué 8 ans plus tôt. Une analyse multivariée avec ajustement à l’âge et au sexe a inclus le génotypage de l’ApoE, les autres facteurs de risque cardiovasculaires, et des dosages vitaminiques (folates, B12 et B6). Après une période médiane de suivi de 8 ans, 111 sujets ont développé une démence dont 83 de type Alzheimer. Le risque relatif de démence, était de 1,4 (1,1 à 1,9) pour chaque élévation d’1 DS de la valeur de l’homocystéine exprimée en log, que ce soit à la mesure de base ou 8 ans avant. Le risque relatif de DTA était de 1,8 (1,3 à 2,5) pour l’élévation d’1 DS de la valeur de base et de 1,6 (1,2 à 2,1) pour l’élévation d’1 DS 8 ans plutôt. Pour un taux d’homocystéine à 14 µmol/l, le risque de DTA double. Commentaires. Cette analyse permet d’identifier une association forte et indépendante entre l’hyperhomocystéinémie et le développement d’une démence (DTA ou non). L’hyperhomocystéinémie a été associée également à une augmentation du risque d’accident vasculaire cérébral, d’athérosclérose carotidienne et à l’augmentation du risque de décès après un infarctus du myocarde et un AVC. Le lien de causalité entre hyperhomocystéinémie et démence reste à établir. Une stratégie de prévention par supplémentation folique pourrait être alors mise en place. D.D. ✔ Seshari et al. Plasma homocysteine as a risk factor for dementia and Alzheimer disease. NEJM 2002 ; 346 : 476-83. 139 Maq avril 04/06/02 10:02 Page 140 R E V U E D E P R E S S E Dirigée par le Pr P. Amarenco Syndrome parkinsonien guadeloupéen : une tauopathie PSP-like ? ■ Une fréquence inhabituellement importante de syndrome parkinsonien atypique a été récemment rapportée en Guadeloupe. Les auteurs rapportent les données de 220 patients guadeloupéens consécutifs, adressés pour syndrome parkinsonien (par des médecins généralistes dans 75 % des cas) entre septembre 1996 et mai 2001. Selon les critères de diagnostic clinique, seuls 50 patients présentaient une maladie de Parkinson typique, 58 (26,5 %) présentaient un tableau compatible avec une probable paralysie supranucléaire progressive (PSP) et 96 (43,8 %) étaient classés en syndrome parkinsonien indéterminé. Celui-ci comprenait un syndrome akinétorigide symétrique, à prédominance axiale, une atteinte cognitive précoce fréquente, des signes d’atteinte frontale, un syndrome pseudo-bulbaire, une absence de réponse à la dopa à long terme et une absence d’atteinte oculomotrice. Trois patients classés PSP ont été autopsiés. Dans l’un de ces cas, le tableau neuropathologique était inhabituel avec des filaments tau+ très abondants constituant la lésion principale. Les mêmes caractéristiques histologiques, évocatrices de “tauopathies”, ont été décrites dans la FTDP-17, due à une mutation du gène tau qui n’a pas été retrouvée dans les cas rapportés ici. Les études biochimiques ont révélé un doublet majeur de protéines tau à 64 et 69 kDa, comme observé dans la PSP. Tous les cas étaient homozygotes pour l’haplotype tau H1. Commentaires. La fréquence de syndromes parkinsoniens atypiques en Guadeloupe (globalement 3,4 fois plus de PSP et de 140 syndromes parkinsoniens atypiques que de maladies de Parkinson) et la ressemblance avec l’association démence-syndrome parkinsonien-SLA de l’île de Guam posent la question de l’intervention d’un facteur environnemental tel que les toxines alkaloïdes (inhibiteurs du complexe mitochondrial I) contenues dans les feuilles de thé et/ou les fruits tropicaux. Des études pathologiques complémentaires sont nécessaires pour confirmer que ce syndrome parkinsonien “guadeloupéen” est bien une tauopathie identique ou très proche de la PSP. P. Favrolle, Service de neurologie, hôpital Saint-Antoine, Paris. ✔ Caparros-Lefebvre D, Sergeant N, Lees A et al. Guadeloupean parkinsonism : a cluster of progressive supranuclear palsy-like tauopathy. Brain 2002 ; 125 (Pt 4) : 801-11. Lévodopa ou agoniste en première intention ? ■ Cette étude veut démontrer que l’agoniste dopaminergique pramipexole ralentit la progression de la maladie de Parkinson par comparaison à la L-dopa. L’hypothèse est que les agonistes seraient moins toxiques que la L-dopa pour les neurones dopaminergiques résiduels (environ 50 % au début de la maladie), ce qui expliquerait qu’ils retardent la survenue des dyskinésies chez ces patients. Les auteurs évaluent la progression du Parkinson avec le [123I]-ß-CIT, un ligand pour le SPECT qui se fixe sur le transporteur de la dopamine, mesurant ainsi la densité des terminaisons striatales. Des parkinsoniens débutants (n = 82, randomisés en bras pramipexole et L-dopa) sont examinés avec ce traceur à l’entrée puis 2, 3 et 4 ans plus tard. À chaque examen, la diminution de fixation striatale du traceur est significativement moins rapide chez les patients sous pramipexole que chez ceux sous L-dopa : à 4 ans, elle atteint – 16 % sous pramipexole (n = 32) contre – 26 % sous L-dopa (n = 33, p < 0,01). La L-dopa est plus efficace contre les signes parkinsoniens, mais l’évolution du score UPDRS total à 4 ans, mesuré après au moins 12 heures d’arrêt des médicaments, était similaire dans les 2 groupes (pramipexole + 4,1 ; L-dopa + 4,0). Les auteurs concluent que la mort des neurones dopaminergiques nigrostriataux est plus lente sous pramipexole que sous L-dopa. Commentaires. Première étude montrant que le choix du traitement initial a un effet sur la progression de la mort neuronale dans le Parkinson, même si on ignore si la maladie est accélérée par la L-dopa ou ralentie par le pramipexole. L’imagerie évite que l’effet “protecteur” soit obéré par l’effet symptomatique du pramipexole. Et à 4 ans, 65 malades suffisent pour le démontrer ! P. Rémy, hôpital Henri-Mondor, Créteil. ✔ Parkinson Study Group. Dopamine transporter brain imaging to assess the effects of pramipexole vs levodopa on Parkinson disease progression. JAMA 2002 ; 287 : 1653-61. La Lettre du Neurologue - n° 4 - vol. VI - avril 2002