Éditorial
Éditorial
La Lettre du Rhumatologue - n° 330 - mars 2007
6
La dixième recommandation porte sur la progression
de la gonarthrose et de la coxarthrose, qui est ralentie
par le renforcement musculaire et la proprioception. La
notion d’un déficit musculaire préalable à la gonarthrose
était déjà connue. Celle d’un exercice qui renforce la
musculature est également connue et confirmée. Toute-
fois, très peu d’études ont eu pour but d’analyser la
progression radiologique parallèlement au gain de la
force du quadriceps. Une étude a cependant montré
qu’une plus grande force du quadriceps, au point de
départ, est un facteur péjoratif de progression dans les
gonarthroses fémorotibiales désaxées. Tout se passe
comme si, dans des gonarthroses désaxées, le renfor-
cement musculaire pouvait au contraire aggraver la
surcharge mécanique du compartiment souffrant. Des
données récentes rapportées lors du congrès de l’ACR
en 2006 ne mettent pas en évidence d’effet délétère du
renforcement du quadriceps sur l’évolution de l’arthrose
fémorotibiale (7). Ce renforcement peut au contraire
recentrer la rotule et pourrait ralentir l’évolution de
l’arthrose fémoropatellaire externe, quoique cette notion
reste controversée par les études récentes (7, 8).
AU TOTAL
Ces recommandations mettent bien en évidence l’im-
portance de la prise en charge non pharmacologique au
cours de la gonarthrose. Cette importance est suggérée
dans le cas de la coxarthrose bien que les données de
la littérature soient nettement moins abondantes. Pour
autant, des enquêtes d’opinions récentes montrent que
cette prise en charge reste sous-estimée (4, 5). Il appa-
raît clairement, à la lumière de ces recommandations,
qu’un des problèmes majeurs est celui de la compliance
au long cours des patients et que l’un des objectifs, en
pratique quotidienne, est d’améliorer cette compliance
soit par des programmes éducatifs, soit en impliquant
le patient ou son entourage direct.
Enfin, il est utile de rappeler que les objectifs de la réédu-
cation sont le maintien de l’amplitude articulaire, le
renforcement isométrique et isotonique des chefs
musculaires péri-articulaires, l’incitation à la pratique
des exercices en endurance et l’adaptation des exercices
en fonction du stade de la maladie et de la douleur.
Ces objectifs simples peuvent s’intégrer dans des
programmes de rééducation effectuée en groupe ou à
titre personnel, menée soit chez un kinésithérapeute,
soit à domicile. On peut recommander de pratiquer ces
exercices trois à cinq fois par semaine, sur des durées
✓
variables allant de 10 à 30 minutes, le but étant égale-
ment d’amener le patient vers l’apprentissage d’une
autorééducation. La constatation d’une diminution
des douleurs et d’une amélioration de la fonction est
également un facteur important dans les phénomènes
de compliance au long cours à cette rééducation.
CONCLUSION
Même si ces recommandations ont des limites et qu’elles
ne permettent pas d’entrer dans le détail du type de
rééducation et des méthodes à privilégier, elles consti-
tuent une base de données de nature à alimenter notre
réflexion dans la pratique quotidienne. Depuis cette
publication, la Société française de médecine physique et
réadaptation (SOFMER), sous l’impulsion de F. Rannou
et de M. Revel (hôpital Cochin, Paris), finalise des recom-
mandations rédigées de façon originale, à partir de la
revue de la littérature (par deux experts différents pour
chaque question retenue), de l’expérience au quotidien
des praticiens (questionnaire de 37 questions soumis
lors des grands congrès nationaux à 120 collègues par
domaine de spécialité) et d’opinions d’experts rééduca-
teurs, orthopédistes et rhumatologues. Cette approche
multidisciplinaire paraît pertinente et originale. Sa
confrontation avec les recommandations MOVE sera,
à n’en pas douter, extrêmement utile. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Jordan KM, Arden NK, Doherty M et al. and the Standing Committee for
International Clinical Studies Including erapeutic Trials ESCISIT. EULAR
Recommendations 2003: an evidence-based approach to the management of
knee osteoarthritis: Report of a Task Force of the EULAR Standing Committee
on International Clinical Studies, Including erapeutic Trials (ESCISIT). Ann
Rheum Dis 2003;62:1145-55.
2. Zhang W, Doherty M, Arden N et al. EULAR evidence based recommendations
for the management of hip osteoarthritis: Report of a Task Force of the EULAR
Standing Committee on International Clinical Studies, Including erapeutic
Trials (ESCISIT). Ann Rheum Dis 2005;64:669-81.
3. Roddy E, Zhang W, Doherty M et al. Evidence-based recommendations for the
role of exercise in the management of osteoarthritis of the hip or knee- e MOVE
consensus. Rheumatology 2005;44:67-73.
4. Denoeud L, Mazieres B, Payen-Champenois C, Ravaud P. First line treatment of
knee osteoarthritis in outpatients in France: adherence to the EULAR 2000 recom-
mendations and factors infl uencing adherence. Ann Rheum Dis 2005;64:70-4.
5. Chevalier X, Marre JP, de Butler J, Hercek A. Questionnaire survey of manage-
ment and prescription of general practitioners in knee osteoarthritis: a compari-
son with 2000 EULAR Recommendations. Clin Exp Rheumatol 2004;22:205-12.
6. Messier SP, Loeser RF, Miller GD et al. Exercice and dietary weight loss in
overweight and obeses older adults with knee osteoarthritis. e arthritis, diet
and activity promotion trial. Arthritis Rheum 2004;50:1501-10.
7. Amin S, Baker K, Niu J et al. Quadriceps strenght and its relation to cartilage
loss in knee osteoarthritis. Arthritis Rheum 2006;54(suppl.9):abstract 2092.
8. Hunter DJ, Zhang Y, Niu J et al. Muscle mass predicts patellofemoral osteo-
arthritis progression. Arthritis Rheum 2006;54(suppl.9):abstract 2090.