matoires. « Encore une énigme,
constate notre confrère, alors
que le site précis d’action du
paracétamol (une enzyme
proche de la COX 2) n’est tou-
jours pas identifié. » M.C. Se-
gonnes qui dit, elle aussi, avoir
ignoré les propriétés anti-in-
flammatoires du paracétamol,
précise que cette étude ne sera
pas suffisante pour qu’elle re-
nonce à prescrire du paracéta-
mol lors d’une vaccination.
COMMENTAIRE
DU PR CLAIRE-ANNE SIEGRIST
(La contribution essentielle de
C.A. Siegrist, coauteur des
deux études publiées dans le
Lancet, a été l’analyse et l’inter-
prétation des observations ré-
coltées en République
tchèque.)
« Les premières observations
nous ont laissés pantois : com-
me pédiatre, je n’aurais jamais
pensé que quelques doses de
paracétamol puissent avoir un
tel effet sur les réponses vacci-
nales. Nous avons donc choisi
la prudence ! D’une part, nous
avons attendu une année de
plus pour que les résultats de
la seconde étude soient dispo-
nibles. D’autre part, nous
avons demandé à GSK de lan-
cer une méta-analyse sur l’en-
semble des données d’immuno-
génicité collectées dans leurs
études cliniques au cours des-
fois, remarquent-ils, la réponse
immunitaire cellulaire se déve-
loppe sur des jours et des se-
maines, alors que le paracéta-
mol est administré seulement
durant vingt-quatre heures et a
une demi-vie d’environ deux
heures. L’administration pro-
phylactique de paracétamol n’a
pas un effet équivalent sur
toutes les réponses vaccinales ;
elle interfère essentiellement
avec les réponses à la primo-
vaccination par les vaccins
conjugués et les anatoxines.
L’hypothèse faite par les au-
teurs est ainsi que l’administra-
tion prophylactique de paracé-
tamol interfère avec les
interactions précoces entre
lymphocytes B et T, peut-être
par une réduction des signaux
inflammatoires au site de l’in-
jection. Les résultats, après
analyses complémentaires ef-
fectuées secondairement et non
initialement prévues dans le
protocole, supportent l’hypo-
thèse que l’interférence du pa-
racétamol avec la réponse à la
vaccination serait maximale en
cas de prise précoce, et serait
plus faible lorsque le paracéta-
mol est donné à titre thérapeu-
tique une fois que la fièvre et
les signaux inflammatoires ont
été émis.
L’ensemble de ces résultats
conduit les auteurs de l’étude à
déconseiller la prescription en
routine d’antipyrétiques en
prophylaxie de la fièvre provo-
quée par la vaccination.
Commentant cette étude, que
F. Vié le Sage juge de bonne
qualité, F. Corrard rappelle que
le paracétamol est plus utile
pour ses propriétés antalgiques
et de confort que pour son ac-
tion antipyrétique. C’est donc
dans cette indication qu’il est
raisonnable de le donner, pré-
cise notre confrère. Une autre
étude (en cours de publica-
tion), rapporte F. Corrard, in-
dique que le soir d’une vaccina-
tion susceptible de donner de
la fièvre et un inconfort, les pa-
rents administrent le paracéta-
mol environ une fois sur trois.
Un sondage parmi 90 pédiatres
avait révélé qu’ils prescrivaient
ces médicaments deux fois sur
trois. « Ces résultats, estime
F. Corrard, semblent être un
bon argument pour donner la
main aux parents, ne plus être
systématique et aider à cette
nouvelle vision de la fièvre, sa-
chant que “la recherche de
l’apyrexie n’est pas un objectif
en soi” (recommandations jan-
vier 2005).»
Pour F. Vié le Sage, de telles
données ne font que confirmer
un mécanisme bien connu en
vaccinologie : la réaction in-
flammatoire est une réaction
recherchée car elle permet une
meilleure présentation de l’an-
tigène vaccinal aux cellules im-
munocompétentes, qui affluent
lors de cette réaction. Tout ce
qui inhibe la réaction inflam-
matoire risque donc de dimi-
nuer la réaction immunitaire.
Les adjuvants comme l’alumi-
nium sont d’ailleurs là pour ce-
la, précise notre confrère : la
réaction inflammatoire locale
qu’ils provoquent permet de di-
minuer la charge antigénique
nécessaire dans le vaccin. Les
traitements anti-inflamma-
toires ne doivent être utilisés
que si la réaction est trop forte,
pour la modérer et non pour
l’empêcher.
L’intérêt de l’inflammation
pour la synthèse des anticorps
lors d’une vaccination est es-
sentiel, confirme F. Corrard.
Pour notre confrère, cette étu-
de tchèque pose toutefois une
question de physiopathologie,
car le paracétamol n’est pas
considéré actuellement comme
doté de propriétés anti-inflam-
quelles la prise de paracétamol
(ou d’autres médicaments fé-
brifuges ou analgésiques) avait
été notifiée. Les résultats
étaient tellement concordants
que la pédiatre que je suis a été
convaincue du peu de bénéfice
de la prophylaxie par le para-
cétamol lors de l’utilisation des
vaccins actuels, dont la réacto-
génicité est bien plus faible que
celle des vaccins combinés aux
vaccins coqueluche à germes
entiers. En changeant de blou-
se blanche pour endosser celle
de l’immunologue, je me suis
rendu compte que les réponses
aux vaccins très dépendants de
la réponse lymphocytaire T
(vaccins conjugués, hépatite B)
étaient affectées de façon pré-
pondérante. Or ces réponses
lymphocytaires T dépendent
précisément de la migration de
cellules présentatrices d’anti-
gènes depuis le site d’injection
vers les ganglions locaux, sug-
gérant que le paracétamol pro-
phylactique interfère avec les
processus de prise en charge
des antigènes au site d’injec-
tion.
Est-ce que ces résultats sont im-
portants ? Les vaccins actuels
sont tellement immunogé-
niques que la majorité des nour-
rissons sont protégés avec ou
sans paracétamol. Mais l’impact
pourrait être marqué au niveau
d’une population, puisque des
Médecine
& enfance
novembre 2009
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Vaccin Prevenar® chez un prématuré
Pour un enfant né prématurément (vingt-sept semaines), faut-il conserver
l’ancien schéma vaccinal (deux, trois et quatre mois avec rappel à dix-huit
mois) ou bien le schéma deux, quatre, douze mois est-il suffisant ? de-
mande M. Massonnaud. Le calendrier vaccinal (Bulletin épidémiologique
hebdomadaire, avril 2009) est très clair à ce sujet, répond F. Vié le Sage :
les prématurés doivent avoir une vaccination en trois doses plus un rappel
« comme avant ». Le terme n’étant pas précisé, il faut se référer à la défini-
tion de la prématurité, c’est-à-dire moins de trente-sept semaines. Beau-
coup, précise notre confrère, estiment que cela concerne surtout les moins
de trente-deux semaines, mais pour un enfant né à un terme de vingt-sept
semaines, aucune hésitation : c’est l’ancien schéma qui prévaut.
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