CAS CLINIQUE
▼ Figure 5. Application de silicones colorés dans le moule.
▼ Figure 4. Modelage de la maquette naso-orbitaire.
▲ Figure 3. Patient
en 2013 après éviscération
de l’œil gauche.
14 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 334 - juillet-août-septembre 2013
Quelle réhabilitation est encore
possible pour ce patient ?
L’étendue de la cavité comprend à présent la lèvre supérieure,
le nez et l’orbite (figure 3). Il existe une très large communi-
cation entre la cavité buccale et la cavité nasale, également
élargie vers les joues et partiellement comblée par une pro-
thèse dentaire mal ajustée, mobile et complétée d’un obtu-
rateur. L’ensemble bouge quand le patient mange ou parle. Il
reste en effet très peu de maxillaire supérieur, sans beaucoup
de reliefs, et les muqueuses très fragiles de ces cavités ont
tendance à saigner facilement et n’ont de ce fait pas permis
un maintien stable de la prothèse dentaire.
On se retrouve ainsi avec une base dentaire mobile, une lèvre
supérieure très fine (quelques millimètres de hauteur seu-
lement) et une cavité orbitaire peu profonde. Les solutions
habituelles de maintien d’une prothèse sont évoquées (4) :
ancrage osseux, maintien sur la prothèse dentaire, sur les
montures de lunettes, dans les rebords de la cavité ou par
adhésif biologique.
Étant donné l’évolution lente et progressive des lésions, la
mise en place d’implants pour une épithèse à ancrage osseux
n’est plus envisageable. Par ailleurs, la mobilité de la prothèse
dentaire et l’étendue du defect ne permettront pas une fixa-
tion collée. Enfin, la rétention dans les rebords des cavités est
également exclue du fait de la sensibilité et de la tendance
aux saignements des muqueuses. De plus, le maintien sur les
lunettes est aléatoire à cause de l’étendue de la mutilation et
de la mobilité de l’ensemble. L’épithèse serait assez lourde et
reposerait horizontalement sur les oreilles alors que, vertica-
lement, la stabilité ne serait pas assurée.
Une solution mixte a de ce fait été retenue, et l’épithèse
médiofaciale a été divisée en 2 parties. La première partie
prolonge la lèvre supérieure, elle est fixée par 2 aimants sur
l’obturateur et placée de façon frontale. Cette lèvre est très
légère et permet de fermer la partie inférieure de la cavité en
épousant le filet de lèvre supérieure existant sans gêner le
patient. La seconde est l’épithèse naso-orbitaire. Une résine a
été ajustée dans la cavité afin de bloquer le mouvement vers
le haut et un gros aimant a été fixé horizontalement sur le
haut de l’obturateur afin de retenir le mouvement vers le bas.
La prothèse oculaire a ensuite été positionnée dans l’orbite,
ajustée sur le patient, et le modelage du nez et des paupières
a été réalisé en respectant le regard naturel du patient. La
maquette a été ajustée sur le patient, le modelage a été finalisé
et les bords de l’épithèse ont été adaptés aux contours de la
cavité. L’ensemble est stable (figure 4).
Deux moules ont ensuite été conçus et réalisés (5). Les parties
mobiles ont été placées dans les moules (résines et aimants,
prothèse oculaire). Deux types de silicones ont été sélectionnés :
un silicone très résistant pour respecter les fines couches
externes et un silicone plus souple pour les sous-bases. Ils ont
été soigneusement mélangés avec les pigments naturels et
avec des floquages afin de respecter les teintes et la plus ou
moins grande transparence de la peau des différentes régions,
puis ils ont été appliqués dans les moules selon chaque teinte