La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXVIII - no 5 - septembre-octobre 2013 | 159
ÉDITORIAL
”
L’enjeu commercial sur le plan mondial nous dépasse. En Europe,
plusde200solutés de remplissage contiennent des HEA, fabriqués
essentiellement par 3grands laboratoires. L’un d’entre eux a d’ailleurs décidé
de retirer du marché l’un desessolutés. Néanmoins, le 12 juillet 2013,
lestitulaires des AMM des solutés contenant des HEA ont demandé
unréexamen de l’avis initial du PRAC dans le cadre d’une procédure d’appel
auprès de l’EMA. En parallèle, et à la suite des décisions tranchées
duRoyaume-Uni et de l’Italie, une nouvelle procédure de réévaluation a été
engagée. Uneposition définitive sur l’ensemble de ce dossier est attendue
pour finoctobre 2013. En attendant, les prescripteurs utilisent beaucoup
moins lesHEA, que ce soit en réanimation ou dans les autres spécialités.
On peut se demander pourquoi ces HEA de deuxième génération ont été
prescrits pendant plus de 10 ans après le retrait de la quasi-totalité des HEA
de première génération. Acontrario, certains prescripteurs soulignent
l’intérêt (ressenti au lit du patient) deces HEA au cours de certains gestes
programmés. Compte tenu des données scientifiques actuelles –mais les
résultats dequelques études sont attendus–, on voit mal comment le PRAC
de l’EMA etles autres agences de santé pourraient revenir sur leurs
décisions. Enattendant une décision probablement définitive, il nous
asemblé intéressant de vous informer sur les mécanismes, les méandres
et les enjeux qu’implique une telle décision quand il s’agit d’un produit
desanté aussi fréquemment utilisé.
3. Schortgen F, Lacherade JC,
Bruneel F et al. Effects of
hydroxyethylstarch and
gelatin on renal function in
severe sepsis: a multicentre
randomized study.
Lancet 2001;357(9260):911-6.
4. Brunkhorst FM, Engel
C, Bloos F et al. Intensive
insulin therapy and
pentastarch resuscitation in
severe sepsis. N Engl J Med
2008;358(2):125-39.
5. Perel P, Roberts I, Ker K.
Colloids versus crystalloids for
fluid resuscitation in critically
ill patients. Cochrane Database
Syst Rev 2013;2:CD000567.
6. Dellinger RP, Levy MM,
Rhodes A et al. Surviving
sepsis campaign: international
guidelines for management of
severe sepsis and septic shock,
2012. Intensive Care Med
2013;39(2):165-228.
L’auteur déclare avoir des liens
d’intérêts avec Astellas et Pfizer.
On apprend que le PRAC (Pharmacovigilance Risk Assessment Committee) de l’Agence euro-
péenne du médicament (EMA) a rendu son avis en date du 11 octobre 2013 (http://www.ema.
europa.eu/ema/index.jsp?curl=pages/news_and_events/news/2013/10/news_detail_001917.
jsp&mid=WC0b01ac058004d5c1). Le Comité conclut que les HEA ne doivent plus être utilisés
chez les patients de réanimation ou ayant un sepsis, compte tenu d’un risque avéré en termes de
mortalité et de toxicité rénale. Cependant, le Comité accepte que les HEA puissent être utilisés
chez les patients en choc hémorragique quand le remplissage par des cristalloïdes seuls apparaît
insuffisant. Le Comité stipule que dans cette dernière situation, il faudra mettre en place des
mesures pour limiter les risques potentiels, et recommande que les HEA ne soient pas utilisés
plus de 24 heures, et que la fonction rénale de ces patients soit surveillée jusqu’à J90. Enfin, le
PRAC demande que des études soient réalisées pour évaluer l’intérêt des HEA dans 2 popula-
tions spécifiques : chirurgie élective et polytraumatisés. Ces recommandations vont maintenant
être envoyées au Coordination Group for Mutual Recognition and Decentralized Procedures –
Human, qui adoptera une position définitive fin 2013 et qui se chargera de la diffuser aux diffé-
rents états de l’Union européenne.
En bref, la position initiale du PRAC a été légèrement nuancée, mais ces recommandations
limitent très nettement l’usage des HEA. La porte n’est pas totalement fermée mais l’avenir de
ces solutés apparaît tout de même très compromis.
Dernière minute
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