L’ e x c ep t io n
Images en Dermatologie • Vol. VI • n° 1 • janvier-février 2013
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Cas clinique
Lèpre • Réaction de type 2
• Érythème noueux lépreux.
Leprosy • Type 2 reaction
• Erythema nodosum.
Légendes
Figure 1. Multiples lésions cutanées maculo-
papuleuses formant des plaques à centre
plus clair.
Figure 2. Sous un épiderme parakérato-
sique, légèrement infl ammatoire et associé
à des lésions d’interface lichénoïdes, il existe
un infi ltrat diff us et périvasculaire, associé
à des débris nucléaires (hématéine-éosine-
safran, × 100).
Figure 3. L’infi ltrat associe des histiocytes
clairs et des débris nucléaires, avec de rares
polynucléaires neutrophiles intacts, sur un
fond de nécrose (hématéine-éosine-safran,
× 200).
Figure 4. Ces vacuoles contiennent des
amas de bacilles acido-alcoolo-résistants
(pointes de flèches), témoignant de la
présence du bacille de Hansen en grande
quantité, formant ici des globi (coloration
de Ziehl, × 400).
Figure 5. Les capillaires dermiques ne
sont plus visibles, siège d’une nécrose dans
laquelle on retrouve des hématies. Des
vacuoles claires sont visibles dans certains
histiocytes (flèches) [hématéine-éosine-
safran, × 400].
Érythème noueux lépreux…
Erythema nodosum leprosum
N. Ortonne1, I. Missotte2, V. Rouleau3
(1 Département de pathologie, hôpital Henri-Mondor, Créteil ; 2 Service de dermatologie, centre
hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie, Nouméa ; 3 Service d’anatomie et de cytologie
pathologiques, centre hospitalier territorial de Nouvelle- Calédonie, hôpital de Magenta, Nouméa)
Observation
Une jeune fi lle de 12ans, originaire de Lifou en Nouvelle-Calédonie, avec comme anté-
cédents un retard de croissance intra-utérin en rapport avec une infection materno-
fœtale à
Escherichia coli
et un asthme du nourrisson, est hospitalisée pour une éruption
évoluant depuis 5jours, associée à une rhinite et à un fébricule. Un de ses frères a
présenté plusieurs années auparavant une lèpre lépromateuse. Les lésions sont diffuses
sur le tronc et les membres, et forment des plaques maculo-papuleuses de plusieurs
centimètres, rouge brun, avec un centre plus clair
(fi gure1)
. L’examen clinique montrait
par ailleurs des adénopathies inguinales et latéro-cervicales. Les examens biologiques
montraient une élévation de la vitesse de sédimentation (35mm), sans élévation de la
CRP (protéine C-réactive), une lymphopénie (700lymphocytes/ mm3), une hyponatrémie,
avec un bilan hépatocellulaire normal. Les différentes sérologies effectuées étaient
négatives (VIH, hépatiteC) ou témoignaient d’infections anciennes (virus Epstein-Barr
[EBV] et cytomégalovirus [CMV]). Il n’y avait pas d’anticorps anti-nucléaires ni anti-
ADN natif. Les hémocultures et l’examen bactériologique urinaire étaient stériles et la
recherche de bacilles de Koch dans l’expectoration était négative. Les examens d’ima-
gerie (radiographie thoracique, échographie cervicale et abdominale, échocardiogra-
phie) n’ont trouvé qu’une adénopathie sous-maxillaire gauche suppurée. Une première
biopsie cutanée a été réalisée et a montré un aspect de lèpre
borderline
vraie (BB), mais
avec des lésions de panniculite septale associées à de minimes lésions de vascularite,
suggérant un début d’érythème noueux lépreux. Les investigations complémentaires
ont révélé une neuropathie sensitivo-motrice atteignant les 4membres.
Le traitement initial par antibiothérapie (amoxicilline +acide clavulanique) a alors
été remplacé par un traitement spécifi que, avec dapsone, clofazimine et rifampicine,
associé à une corticothérapie (prednisone à 40 mg/ j), en raison d’une suspicion de
réaction de réversion. L’évolution initiale a été marquée par une majoration des lésions
cutanées des bras, devenant plus nodulaires, et une altération de l’état général, avec
majoration de l’hyperthermie, réalisant des pics fébriles, arthralgies diffuses avec
céphalées. Le bilan biologique montrait un syndrome infl ammatoire plus marqué et
une cytolyse hépatique. Une anémie hémolytique était également notée, attribuée à
la dapsone, ultérieurement arrêtée. Un début de syndrome d’activation macropha-
gique était également détecté, avec élévation de la ferritinémie. Une nouvelle biopsie
cutanée a alors été réalisée.
Histopathologie
La biopsie montrait un épiderme parakératosique avec des remaniements infl am-
matoires lichénoïdes, et, sur toute la hauteur du derme, un infi ltrat lympho-histio-
cytaire sans cellule géante ni granulome
(fi gure2)
. Les histiocytes ont souvent un
aspect spumeux, évoquant des cellules de Virchow
(fi gure3)
. La coloration de Ziehl
mettait en évidence de façon assez diffuse des amas de bacilles le plus souvent
rassemblés en petits “globi”
(fi gure4)
. Il existait également des zones de nécrose
avec débris nucléaires, associés à des lésions de vascularite
(fi gure5)
. Ces lésions
étaient retrouvées jusque dans l’hypoderme. L’ensemble de ces éléments a permis
de retenir le diagnostic de lèpre de typeBL (
borderline
lépromateuse), avec réaction
à type d’érythème noueux lépreux (réaction de typeII).