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Adam Smith ( 1723-1790)
Stage avril 2015
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
13/07/2017
1
Sa biographie.
Né en 1723 à Kirkaldy en Écosse, il étudie la philosophie morale à Glasgow. Lors de ses études, il
découvre D Hume (1711-1776) « Traité sur la nature humaine » (1735) avec lequel il se lie
d’amitié.
En 1751, il obtient la chaire de logique à l’université de Glasgow, puis à trente ans, il est transféré
à la chaire de philosophie morale qu’il conservera pendant douze années.
En 1759, il publie « La théorie des sentiments moraux ». Il s’interroge sur le fait qu’un même
individu puisse dans certaines situations, manifester des comportements égoïstes où
prime l’intérêt personnel, alors que dans d’autres situations, il se révèle agir sous le
« regard d’un spectateur impartial » conformément à une morale inspirée par la
communauté. Il affirme que les gens prennent des décisions « morales » grâce à leur
sentiment de sympathie pour autrui.
En 1764, il devint le précepteur du jeune Duc de Buccleuch. Il accompagne le jeune homme en
Europe. Il découvre d’Alembert et rencontre Quesnay et Turgot qui l’initient à l’économie
politique.
En 1776, il publie « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations ».
Il meurt en 1790 à Edimbourg en Écosse.
A Smith est souvent appelée le « père de l’économie ». Il est le défenseur du libéralisme
économique, (mais dans une certaine mesure nous reviendrons sur sa conception des
fonctions de l’ État) et il est à l’origine de la valeur travail.
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Ses inspirateurs.
 Bernard de Mandeville (1670-1733):
En 1705, Mandeville publie « La Fable des abeilles ». L’idée du livre est contenu dans
le sous-titre « les vices privés font la prospérité publique ». Ce texte provocateur
dénonce les vertus des puritains. Les abeilles de la fable deviennent pauvres quand
elles se mettent à travailler et à accumuler. Dans cette fable, Mandeville veut montrer
que l’intérêt est un élément de cohésion plus fort que le dévouement, et que la
dépense est un facteur de richesse plus utile que l’épargne.
« Oui, si un peuple veut être grand
Le vice est aussi nécessaire à l’État
Que la faim l’est pour le faire manger
La vertu seule ne peut faire vivre les nations ».
Cet immoralisme, loin d’engendrer la pauvreté, est selon Mandeville, utile à la société.
La dépense est source d’emploi et de richesse. Cette fable prépare les esprits à la
conception d’un individu mû par son seul intérêt individuel.
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Ses inspirateurs.
 David Hume (1711-1776):
Il entretient une grande amitié avec A Smith. David Hume est un philosophe dans la lignée
de John Locke.
D Hume publie entre 1752 et 1758 sept textes de réflexion économique. Il réfute l’idée
mercantiliste selon laquelle il est important de détenir un stock de monnaie
important. Il conteste l’idée selon laquelle le déficit commercial est source de tous
les maux.
Pour cet auteur, toute augmentation de la quantité de monnaie se traduit par une hausse
des prix et la recherche des excédents extérieurs (par le bais d’une politique
protectionniste) est vaine. L’excédent extérieur se traduit par une augmentation de la
masse monétaire qui entraîne une baisse de la compétitivité et tarit les débouchés à
l’exportation. Il montre ainsi, qu’il est préférable de laisser le commerce international se
développer librement. La philosophie sous-jacente de D Hume est celle d’un
libéralisme économique tempéré.
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Ses inspirateurs.
 Les physiocrates ( F Quesnay, R Turgot):
Les physiocrates sont considérés avec des philosophes comme J Locke (1632-1704),
comme les intellectuels à l’origine du développement du libéralisme.
Sur le plan économique le libéralisme est une doctrine qui considère que la régulation par le
marché est la meilleure modalité de gestion des richesses. Le primat des libertés
individuelles s’articule avec la propriété privée, et de ce fait, l’intervention de l’État est
perçue comme un obstacle à ces libertés.
A Smith n’est pas un physiocrate mais pendant la période où il réside à Paris, il assiste aux
réunions des physiocrates. Comme F Quesnay (1694-1774), il croit aux bienfaits de
l’agriculture. Les physiocrates pensent que l’enrichissement monétaire ne doit pas être
l’objectif d’une économie. Seules les productions agricoles constituent de véritables
richesses.
Les physiocrates l’inspirent aussi, par leur éloge du marché sans intervention publique. Ils
considèrent que l’État ne doit pas intervenir dans l’économie. A Smith affirmera lui-aussi que
c’est au moyen du « laissez-faire » et du « laissez-passer » que l’on obtient une économie
prospère.
Les physiocrates sont libre-échangistes et s’opposent au protectionnisme de Colbert
qui limite les exportations de blé. Ils considèrent qu’il faut favoriser les exportations de blé et
l’augmentation du prix des produits agricoles afin d’encourager les agriculteurs à accroître
leur production.
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La pensée
économique d’Adam
Smith (1723-1790)
« Donnez-moi ce dont j’ai besoin, et
vous aurez de moi ce dont vous avez
besoin vous-même »
A Smith « Recherches sur la nature
et les causes de la richesse des
nations » , Livre 1 chapitre II, 1776
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De la morale à l’économie
 Adam Smith est souvent considéré comme l'auteur emblématique du
libéralisme, qui incarnerait la foi dans les vertus du marché.
Les lectures de A. Smith qu'apportent aujourd'hui, historiens de la pensée
économique et philosophes, remettent en cause cette vision simpliste, et font
de l'Écossais un auteur complexe, à la croisée de l'économie et de la
philosophie morale.
En 1759 paraît la « Théorie des sentiments moraux », le premier ouvrage
du philosophe écossais. Son objet : définir les principes de la morale,
saisir les vertus nécessaires au bon fonctionnement de la société et
comprendre d’où vient le sens moral.
Ce n’est pourtant pas cet ouvrage qui marquera la postérité, mais
« Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »
(1776), considéré par la science économique comme l’œuvre fondatrice de la
discipline.
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« L’Enquête sur la nature et les
causes de la Richesse des
Nations » 1776.
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Dans son ouvrage « Recherches sur la nature et les causes de la
richesse des nations » (1776), A Smith cherche à identifier les causes de
l’enrichissement des pays, c’est-à-dire de la croissance économique.
Ce livre est considéré aujourd’hui, comme le premier livre majeur de l’histoire
de la pensée économique moderne.
 Dans cet ouvrage A Smith s’intéresse aux déterminants de la richesse
des nations et notamment aux déterminants de la croissance
économique ( livres I et II).
 Dans le livre III, il présente les progrès de l’opulence chez les différentes
nations, et il dresse un tableau économique de l’histoire occidentale
fondée sur la division du travail.
 Dans le livre IV, il propose une critique des systèmes économiques de
son époque, le mercantilisme.
 Dans le livre V, A Smith interroge les modalités et le financement de
l’intervention de l’Etat.
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Les déterminants de la
richesse des nations.
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La division du travail est source d’efficacité et de croissance.
 Pour A Smith, la richesse des nations résulte de la division du travail de plus
en plus poussée. L’échange conduit à la division du travail et l’efficacité de
cette dernière conditionne croissance et emploi.
Pour analyser la division technique du travail, A Smith part de la description d’une
manufacture d’épingles. Il montre que la division du travail permet d’accroître la
force productive du travail. La division du travail est le facteur principal de
l’accroissement de la productivité. « Les plus grandes améliorations dans la puissance
productive, et la plus grande partie de l’habileté, de l’adresse et de l’intelligence avec
laquelle il est dirigé ou appliqué, sont dues, à ce qui semble, à la division du travail ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre I
chapitre 1.
La division du travail conduit chacun à se spécialiser dans l’activité où il est plus
productif que les autres, ce qui contribue à une augmentation de la productivité et donc
de la production. Les peuples ainsi concernés s’enrichissent. La division du travail
débouche pour A Smith,
sur l’enrichissement du plus grand
nombre. Cependant A Smith dénonce les effets abrutissants de la division du
travail.
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La division du travail est source d’efficacité et de croissance.
Les liens entre la division du travail, la spécialisation et la productivité.
Division du travail
Spécialisation
Gain de temps,
élimination des temps
morts
Dextérité, la répétition du
geste accroît l’habileté
Productivité
Progrès technique, la
division du travail rend
possible l’utilisation des
machines
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Les déterminants de la division du travail: la faculté d’échanger,
la taille du marché , et l’accumulation du capital.
 La division du travail est la conséquence du penchant naturel des
hommes à échanger.
« Les hommes ont un penchant à trafiquer, à faire du troc et des échanges d’une
chose pour une autre. Il n’est pas de notre sujet d’examiner si ce penchant est un
de ces premiers principes de la nature humaine dont on ne peut se rendre
compte, ou bien comme cela paraît plus probable, s’il est une conséquence
nécessaire de l’usage de la raison et de la parole. Il est commun à tous les
hommes, et on ne l’aperçoit dans aucune autre espèce d’animaux, pour lesquels
ce genre de contrat est aussi inconnu que tous les autres ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776.
Une des singularité de l’analyse smithienne est de montrer que ce n’est pas
la division du travail qui implique l’échange mais l’échange qui engendre la
division du travail. Ainsi, plus la propension à échanger est étendue dans
une société, plus la facilité d’effectuer des marchés et des contrats est
développée, et plus la division du travail se développe.
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Les déterminants de la division du travail: la faculté d’échanger,
la taille du marché , et l’accumulation du capital.
 Déterminée par le penchant naturel des hommes à échanger, la
division du travail l’est aussi par la taille du marché.
C’est l’étendue des marchés qui permet le plein épanouissement de
cette dynamique des échanges. Division, spécialisation du travail
deviennent intéressantes à condition qu’il existe des marchés
importants.
« Puisque c’est la faculté d’échanger qui donne lieu à la division du travail,
l’accroissement de cette division doit par conséquent, toujours être limité par
l’étendue de la faculté d’échanger, ou, en d’autres termes, par l’étendue du
marché. Si le marché est très petit, personne ne sera encouragé à s’adonner
entièrement à une seule occupation, faute de pouvoir trouver à échanger tout
le surplus du produit de son travail qui excédera sa propre consommation
contre un pareil surplus du produit du travail d’autrui qu’il voudrait se
procurer ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre I
chapitre III.
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La division du travail est source d’efficacité et de croissance.
Les liens entre division du travail, productivité, richesses produites et
hausse de la taille des marchés.
Hausse de la division
du travail
Hausse de la
productivité
Hausse de la taille
des marchés
Hausse des richesses
produites
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Les déterminants de la division du travail: la faculté d’échanger,
la taille du marché , et l’accumulation du capital.
 La division du travail nécessite également la constitution d’un fonds qui
doit assurer la subsistance du travailleur pendant l’activité productive et
jusqu’à la vente du produit de son travail. Elle doit en outre lui permettre
d’acquérir les matières premières et les outils de son ouvrage.
« Puis donc que, dans la nature des choses, l’accumulation du capital est un
préalable nécessaire à la division du travail, le travail, ne peut recevoir des
subdivisions ultérieures qu’en proportion de l’accumulation progressive des
capitaux [...]. A mesure donc que la division du travail est plus grande, il faut, pour
qu’un même nombre d’ouvriers soit constamment occupé , qu’on accumule
d’avance une égale provisions de vivres, et une provision de matières et d’outils
plus forte que celle qui aurait été nécessaire dans un état de choses moins
avancé [...]. De même que le travail ne peut acquérir cette grande extension
productive sans une accumulation préalable de capitaux, de même l’accumulation
des capitaux amène naturellement cette extension ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776, livre II, introduction.
Dans cette perspective toute accumulation du capital est de nature à
accroître l’efficacité du travail.
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Les déterminants de la division du travail: la faculté d’échanger,
la taille du marché , et l’accumulation du capital.
 Le stock de capital est pour A Smith un déterminant essentiel de la
richesse des nations puisqu’il accroît à la fois la puissance productive et
détermine le nombre de travailleurs productifs employés. Or le stock de
capital dont dispose une nation est d’abord déterminé par sa propension
à accumuler des richesses, c’est-à-dire l’épargne.
« Les capitaux augmentent par l’économie; ils diminuent par la prodigalité et la
mauvaise conduite. Tout ce qu’une personne épargne sur son revenu, elle l’ajoute
à son capital [...]. Un homme économe, par ses épargnes annuelles, non
seulement fournit de l’entretien à un nombre additionnel de gens productifs pour
cette année ou pour la suivante, mais il est comme le fondateur d’un atelier
public, et établit en quelque sorte un fonds pour l’entretien à perpétuité d’un
même nombre de gens productifs [...]. Si la prodigalité de quelques-uns n’était
pas compensée par la frugalité des autres, tout prodigue, e, nourrissant ainsi la
paresse avec le pain de l’industrie, tendrait par sa conduite à appauvrir le pays ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776, livre II, chapitre III.
Rappelant que les capitaux sont accrus par la parcimonie, et diminués par
la prodigalité, A Smith suggère que le caractère du peuple, et plus
particulièrement des capitalistes est le déterminant essentiel de
l’accumulation du capital.
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La division du travail est source d’efficacité et de croissance.
Les liens entre division du travail et croissance économique.
Division du
travail
Productivité du
travail
Capital
Epargne
Augmentation des
richesses
produites
Division du travail, accumulation du capital et échange apparaissent
comme les éléments fondamentaux de la croissance économique.
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La métaphore de la main
invisible.
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La métaphore de la main invisible.
 A Smith accorde une grande importance aux vertus de la concurrence. La main
invisible assure la société que ce qui est produit correspond aux besoins de ses
membres, et ce dans les quantités désirées.
Cette image de la main invisible est déjà utilisée dans la Théorie des sentiments moraux
(quatrième partie, chapitre1 ) : « Une main invisible semble les forcer à concourir à la
même distribution des choses nécessaires à la vie qui aurait eu lieu si la terre eût été
donnée en égale portion à chacun de ses habitants ; et ainsi, sans en avoir l’intention, sans
même le savoir, le riche sert l’intérêt social et la multiplication de l’espèce humaine. »
Les comportements individuels s’agrègent harmonieusement. Chaque individu, en
recherchant son intérêt personnel, œuvre « intentionnellement » pour l’intérêt général. La
métaphore de la « main invisible » illustre l’idée que les actions individuelles conduisent
indépendamment des intentions des agents à l’enrichissement des nations. Poussé par le
seul aiguillon de l’intérêt personnel, chacun cherche à satisfaire au mieux les autres
pour en tirer un bénéfice.
« Mais l’homme a presque continuellement besoin de ses semblables, et c’est en vain s’il se
fiait à leur seule bienveillance. Il sera bien plus sûr de réussir, s’il s’adresse à leur intérêt
personnel et s’il les persuade que leur propre avantage leur commande de faire ce qu’il
souhaite d’eux. C’est ce que fait celui qui propose à un autre un marché quelconque; le
sens de sa proposition est ceci : donnez-moi ce dont j’ai besoin, et vous aurez de moi ce
dont vous avez besoin vous-même, et la plus grande partie de ces bons offices qui nous
sont nécessaires s’obtiennent de cette façon ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre I chapitre
II.
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La métaphore de la main invisible.
« Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du marchand de bière et du
boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien du soin qu’ils apportent à
leurs intérêts. Nous ne nous adressons pas à leur humanité mais à leur égoïsme;
et ce n’est jamais de leurs besoins que nous leur parlons, c’est toujours de leur
avantage».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776, livre I chapitre II.
A Smith affirme à travers la métaphore de la « main invisible » que l’harmonie
sociale vient du respect par chacun de ses intérêts propres (idée reprise de
Mandeville). Avec A Smith la poursuite de l’intérêt personnel devient un régulateur
efficace des relations économiques et sociales. La recherche par chacun de son
intérêt individuel permettra, en situation de concurrence, d’atteindre l’optimum
général ; la main invisible « du marché » permet de concilier les intérêts
individuels et l’ intérêt général.
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La métaphore de la main invisible.
« À la vérité, son intention, en général n’est pas de servir l’intérêt public, et il ne sait même
pas jusqu’à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de l’industrie
nationale à celui de l’industrie étrangère, il ne pense qu’à se donner personnellement une
plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière à ce que son produit ait le plus
de valeur possible, il ne pense qu’à son propre gain ; en cela comme dans beaucoup
d’autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n’entre nullement dans
ses intentions, et ce n’est pas toujours ce qu’il y a de plus mal pour la société, que cette fin
n’entre nullement dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il
travaille souvent d’une manière plus efficace pour l’intérêt de la société, que s’il avait
réellement pour but d’y travailler ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,
livre IV chapitre II.
« La main invisible », décrit le mécanisme par lequel certains actes individuels
contribuent au bien commun indépendamment de toute intention bienveillante.
La main invisible est souvent interprétée comme étant au fondement du libéralisme
économique : le maximum de liberté accordée aux agents économiques, marchands
en particulier, c’est-à-dire le minimum d’intervention de l’État dans l’économie,
conduit au maximum de bien-être pour tous, grâce à ce mécanisme qualifié alors de
« providentiel ».
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Valeur et prix dans l’analyse
smithienne.
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La mesure et la cause de la valeur
 La valeur des marchandises.
Pour A Smith, il faut distinguer la valeur en usage de la valeur en
échange. La valeur en usage résulte de l’utilité de la marchandise et la
valeur en échange exprime la faculté que donne la possession de cette
marchandise pour acheter d’autres marchandises.
« Il faut observer que le mot valeur a deux significations différentes :
quelquefois il signifie l’utilité d’un objet particulier, et quelquefois il signifie la
faculté que donne la possession de cet objet d’en acheter d’autres
marchandises. On peut appeler l’une, valeur en usage et l’autre valeur en
échange. [...] Il n’ y a rien de plus utile que l’eau, mais elle ne peut presque
rien acheter ; à peine y a-t-il moyen de rien avoir en échange. Un diamant au
contraire, n’a presque aucune valeur quant à l’usage, mais on trouvera
fréquemment à l’échanger contre une très grande quantité de
marchandises ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,livre I
chapitre IV.
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La mesure et la cause de la valeur
 Pour A Smith, la valeur en échange représente le prix réel de la
marchandise et elle provient du travail nécessaire à sa production.
La valeur des marchandises provient de la quantité de travail nécessaire
pour les produire.
« Ainsi la valeur d’une denrée quelconque pour celui qui la possède, et qui
n’entend pas en user ou la consommer lui-même, mais qui a l’intention de
l’échanger pour autre chose, est égale à la quantité de travail que cette
denrée le met en état d’acheter ou de commander. Le travail est donc la
mesure réelle de la valeur échangeable de toute marchandise. Le prix réel de
chaque chose, ce que chaque chose coûte réellement à celui qui veut se la
procurer, c’est le travail et la peine qu’il doit s’imposer pour l’obtenir ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,livre I
chapitre V.
Le prix réel d’une marchandise est selon A Smith égal à la quantité de
travail qu’elle peut commander.
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La mesure et la cause de la valeur
 Cependant, A Smith sait que dans la pratique quotidienne, le jeu de
l’offre et de la demande peut forger un prix de marché nominal qui
fluctue autour du prix réel. Il précise la notion de prix nominal d’un bien.
Le prix nominal d’un bien est la quantité d’argent nécessaire pour
obtenir ce bien.
« Mais quoique le travail soit la mesure réelle de la valeur échangeable de toutes
les marchandises, ce n’est pourtant pas celle qui sert communément à apprécier
cette valeur. Il est souvent difficile de fixer la proportion entre deux différentes
quantités de travail. [...] D’ailleurs, chaque marchandise est plus fréquemment
échangée et comparée, avec d’autres marchandises qu’avec du travail. Il est
donc plus naturel d’estimer sa valeur échangeable par la quantité de quelque
autre denrée que par celle du travail qu’elle peut acheter. [...] Ainsi le travail, ne
variant jamais dans sa valeur propre, est la seule mesure réelle et définitive qui
puisse servir, dans tous les temps et tous les lieux, à apprécier et à comparer la
valeur de toutes les marchandises. Il est leur prix réel, l’argent n’est que le prix
nominal ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,livre I chapitre
V.
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La critique du système
mercantile.
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Un opposant aux thèses mercantilistes.
 Opposé aux mercantilistes, il définit la richesse non pas comme une
quantité de monnaie ou de métaux précieux, mais comme
« l’ensemble des choses nécessaires et commodes à la vie ». La véritable
richesse n’est pas l’or mais les marchandises. Il s’agit donc d’une
richesse réelle, et, pour lui, la seule source de création de richesse
est le travail.
« Le Travail annuel d’une nation est le fonds primitif qui fournit à sa
consommation annuelle toutes les choses nécessaires et commodes à
la vie ; et ces choses sont toujours, ou le produit immédiat de ce travail,
ou achetées des autres nations avec ce produit ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, introduction.
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Un opposant aux thèses mercantilistes.
 A Smith s’oppose aux mercantilistes. Il juge le « système mercantile »,
dont les représentants sont plus influents, comme réellement nuisible à
l’intérêt général.
Pour ceux-ci, l’accroissement de la richesse nationale passe par l’excédent de la
balance commerciale qui permet l’accumulation de métaux précieux. Ils sont donc
favorables au protectionnisme contre lequel A. Smith s’inscrit. Pour A Smith, l’État
ne doit pas intervenir dans le commerce : il ne faut pas chercher à réduire les
importations car il est profitable d’acheter à l’étranger ce qui y est moins cher, et il
faut rejeter les aides à l’exportation (par exemple les primes) car cela nuit à la
concurrence en favorisant artificiellement certains producteurs et certains
marchands.
« En gênant, par de forts droits ou par une prohibition absolue, l’importation de ces
sortes de marchandises qui peuvent être produites dans le pays, on assure plus ou
moins à l’industrie nationale qui s’emploie à les produire, un monopole dans le
marché intérieur. Ainsi, la prohibition d’importer ou du bétail en vie, ou des viandes
salées à l’étranger, assure aux nourrisseurs de bestiaux, en Angleterre, le
monopole du marché intérieur pour la viande de boucherie ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,livre
IV chapitre II.
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Un partisan du libre-échange.
 A Smith préconise le libre-échange. Il montre que chaque pays a intérêt
à se spécialiser dans les produits pour lesquels il est le plus avantagé
(ceux qui nécessitent le moins de travail pour les produire). L’échange
international est une source de bénéfices pour tous.
Le raisonnement part de l’exemple individuel. Le spécialiste a une plus grande
efficacité. En participant à la division du travail, on peut économiser son travail
dans les domaines où l’on est médiocre et se consacrer aux domaines où l’on
excelle. Le résultat est que chacun peut s’offrir un plus grand nombre de
biens.
« La maxime de tout chef de famille prudent est de ne jamais essayer de faire
chez soi la chose qui lui coûtera moins à acheter qu’à produire. Le tailleur ne
cherche pas à faire des souliers, mais il les achète au cordonnier [...]. Il n’y en a
pas un d’eux tous qui ne voie qu’il y va de son intérêt d’employer son industrie
tout entière dans le genre de travail dans lequel il a quelque avantage sur ses
voisins, et d’acheter toutes les autres choses dont il peut avoir besoin avec une
partie du produit de cette industrie, ou, ce qui est la même chose, avec le prix
d’une partie de ce produit ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776,livre IV chapitre II.
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Un partisan du libre-échange.
 Pour A Smith, le raisonnement sur la spécialisation individuelle peut être
généralisé aux nations. Les pays sont inégalement dotés par la nature,
ce qui fonde une spécialisation sur leurs avantages absolus.
« Si un pays étranger peut nous fournir une marchandise à meilleur marché que
nos ne sommes en état de l’établir nous-mêmes, il vaut bien mieux que nous la lui
achetions avec quelque partie du produit de notre industrie, employée dans le
genre dans lequel nous avons quelque avantage. [...]
Les avantages naturels qu’un pays a sur un autre pour la production de certaines
marchandises sont quelquefois si grands, qu’au sentiment unanime de tout le
monde, il y aurait folie à vouloir lutter contre eux. Au moyen de serres chaudes,
de couches, de châssis de verre, on peut faire croître en Ecosse de forts bons
raisins, dont on peut faire aussi de fort bon vin avec trente fois peut-être de
dépense qu’il en coûterait pour s’en procurer de tout aussi bon à l’étranger. Or,
trouverait-on bien raisonnable un règlement qui prohiberait, l’importation de tous
les vins étrangers uniquement pour encourager à faire du vin de Bordeaux et du
vin de Bourgogne en Écosse? »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,livre IV chapitre
II.
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31
Un partisan du libre-échange.
 La théorie des avantages absolus.
La division du travail est au cœur de la justification du commerce international.
L’ouverture des frontières permet d’augmenter la taille des marchés et l’intensité de la
division du travail par la spécialisation internationale.
- Chaque pays se spécialise dans la production des biens pour lesquels il dispose
des coûts de production les plus faibles.
-
Chaque pays a intérêt à exporter les biens qu’il produit de façon plus efficace que ses
pays voisins et importer les autres types de biens.
 Les limites de la théorie des avantages absolus.
Cette conception conduit à expliquer le commerce international par les avantages absolus
de coût: une nation achète à l’étranger les biens dont les coûts moyens de production sont
les plus faibles. Cependant ce raisonnement présente des limites: les nations
désavantagées dans toutes les productions seraient dans l’impossibilité d’exporter et ne
pourraient pas payer leurs importation. D Ricardo (1172-1823) « Principes de l’économie
politique et de l’impôt » (1817), en raisonnant sur les avantages comparatifs, il
montre pourquoi un pays qui serait plus efficace dans la production de tous les
biens, aurait tout de même intérêt à entretenir des relations commerciales avec ses
pays voisins.
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Le rôle de la puissance
publique.
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33
Un État minimal.
 A Smith est avant tout le fondateur du libéralisme moderne. A Smith croit au respect de
l’ordre naturel. L’économie s’équilibre automatiquement, et l’État doit intervenir le moins
possible dans l’économie.
Le marché, en favorisant les échanges, autorise la rencontre et la spécialisation de tous les
talents. Il contribue à l’allocation la plus efficace possible des facteurs de production. La liberté
d’échanger est donc une condition sine qua non de la prospérité. Nul ne doit donc
intervenir dans la vie économique, pas même le prince le plus éclairé. L’activité économique
est le fait d’agents privés qui décident en toute liberté des transactions qu’ils veulent réaliser.
« Quant à la question de savoir quelle est l’espèce d’industrie nationale que son capital peut
mettre en œuvre, et de laquelle le produit permet de valoir davantage, il est évident que chaque
individu, dans sa position particulière, est beaucoup mieux à même d’en juger qu’aucun homme
d’État ou législateur ne pourra le faire pour lui. L’homme d’État qui chercherait à diriger les
particuliers dans la route qu’ils ont à tenir pour l’emploi de leurs capitaux, non seulement
s’embarrasserait du soin le plus inutile, mais encore, il s’arrogerait une autorité qu’il ne serait pas
sage de confier, je ne dis pas à un individu, mais à un conseil ou à un sénat, quel qu’il pût être ;
autorité qui ne pourrait jamais être plus dangereusement placée que dans les mains de l’homme
assez insensé et assez présomptueux pour se croire capable de l’exercer ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre IV chapitre II.
Vouloir orienter l’activité économique dans en un sens plutôt qu’un autre, c’est
quasiment aller contre nature ; d’une part parce que cette intervention est
nécessairement moins efficace ; d’autre part parce que le fonctionnement du marché
repose sur des lois économiques qui, à travers la main invisible, s’imposent aux
hommes.
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Le rôle de la puissance
publique.
Les devoirs du souverain.
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Les trois devoirs du souverain.
 A Smith distingue cependant trois prérogatives que le souverain doit
légitimement exercer.
Le rôle de cet État minimal se limite à trois fonctions, deux fonctions
régaliennes et une fonction tutélaire. L’État doit:
- protéger la nation (armée),
- protéger les individus contre l’injustice et l’oppression (justice et police),
-s’occuper des travaux d’infrastructures et d’éducation pour contrecarrer les effets
négatifs de la division du travail (« ouvrages et institutions publics ») nécessaires
pour le développement économique et non rentables pour le secteur privé.
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Les trois devoirs du souverain.
« Dans le système de la liberté naturelle, le souverain n’a que trois
devoirs à remplir ; trois devoirs à la vérité d’une haute importance, mais
clairs, simples et à la portée d’une intelligence ordinaire. Le premier,
c’est le devoir de défendre la société de tout acte de violence ou
d’invasion de la part des autres sociétés indépendantes. Le second, c’est
le devoir de protéger, autant qu’il est possible, chaque membre de la
société contre l’injustice ou l’oppression de tout autre membre, ou bien le
devoir d’établir une administration exacte de la justice. Et le troisième,
c’est le devoir d’ériger et d’entretenir certains ouvrages publics et
certaines institutions que l’intérêt privé d’un particulier ou de quelques
particuliers ne pourrait jamais les porter à ériger ou à entretenir , parce
que jamais le profit n’en rembourserait la dépense à un particulier ou à
quelques particuliers, quoiqu’à l’égard d’une grande société ce profit
fasse beaucoup plus que rembourser les dépenses. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776, livre IV, chapitre IX .
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Le rôle de la puissance
publique.
Les justifications de l’intervention de l’État.
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Le manque de rentabilité et l’intérêt général.
 Pour A Smith, la puissance publique doit financer les projets collectivement
nécessaires et socialement rentables. Il confère à la puissance publique le
soin d’entretenir les infrastructures qui facilitent l’échange et le commerce.
« Le troisième et dernier devoir du souverain ou de la république est celui
d’élever et d’entretenir ces ouvrages et ces établissements publics dont une
grande société retire d’immense avantages, mais qui sont néanmoins de nature
à ne pouvoir être entrepris ou entretenus par un ou par quelques particuliers,
attendu que pour ceux-ci, le profit ne saurait jamais leur en rembourser la
dépense. Ce devoir exige aussi, pour le remplir, des dépenses dont l’étendue
varie selon les divers degrés de la société. Après les travaux et les
établissements publics nécessaires pour la défense de la société et pour
l’administration de la justice, deux objets dont nous avons parlé, les autres
travaux et établissements de ce genre sont principalement ceux pour faciliter le
commerce de la société, et ceux destinés à étendre l’instruction parmi le
peuple ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre I.
Les ouvrages publics (ponts, routes, canaux) doivent être pris en charge par l’Etat car
de tels projets ne sont pas toujours rentables et sont indispensables au
développement économique. L’État doit donc intervenir pour pallier les insuffisances
Stage
M Gosse, en
S Parayre
académie
AixduSES/Philosophie,
marché en prenant
charge
leur construction
(fonction d’allocation).
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Marseille 2015
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L’éducation de la classe laborieuse.
 La puissance publique doit porter une attention particulière à l’éducation
des membres de la classe laborieuse. La division du travail a des effets
négatifs. Elle menace les dispositions morales et elle entraîne un déclin
de l’échange conversationnel.
« Ils1 n’ont guère de temps de reste à mettre à leur éducation. Leurs parents
peuvent à peine suffire à leur entretien pendant l’enfance. Aussitôt qu’ils
sont en état de travailler, il faut qu’ils s’adonnent à quelque métier pour
pouvoir gagner leur subsistance. Ce métier est en général si simple et si
uniforme, qu’il donne très peu d’exercice à leur intelligence; tandis qu’en
même temps leur travail est à la fois si dur et si constant, qu’il ne leur laisse
guère de loisir et encore moins de disposition à s’appliquer, ni même à
penser à aucune autre chose ».
1. Les gens du peuple.
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre V,
chapitre I.
A Smith montre que les activités routinières font perdre l’habitude de la
réflexion. Les capacités de l’individu se dégradent. Sa participation à la vie
publique devient difficile car il est « incapable de juger des grands et vastes
intérêts de son pays ». Le peuple doit se composer de citoyens aptes à
comprendre les actions du souverain.
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L’éducation de la classe laborieuse.
 Pour A Smith le véritable enjeu concerne l’éducation du plus grand nombre.
A Smith souligne que l’État tirera avantage de l’instruction des rangs
inférieurs du peuple.
« L’éducation de la foule du peuple, dans une société civilisée et commerçante,
exige peut-être davantage les soins de l’État, que celle des gens qui sont mieux
nés et qui sont dans l’aisance [...]. Plus elles1 seront éclairées , et moins elles
seront sujettes à se laisser égarer par la superstition et l’enthousiasme , qui sont
chez les nations ignorantes les sources ordinaires des plus affreux désordres.
D’ailleurs un peuple instruit et intelligent est toujours plus décent dans sa
conduite et mieux disposé à l’ordre, qu’un peuple ignorant et stupide [...] Le
peuple est plus en état d’apprécier les plaintes intéressés des mécontents et des
factieux; il est plus capable de voir clair au travers de leurs déclamations; pour
cette raison, il est moins susceptible de se laisser entraîner dans quelque
opposition indiscrète ou inutile contre les mesures du gouvernement ».
1 Les classes inférieures du peuple.
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre I.
L’éducation doit être centrée sur les savoirs fondamentaux, puisque les
membres des classes populaires disposent de peu de temps à consacrer à
l’éducation étant obligés très rapidement de gagner leur subsistance.
L’instruction du peuple est nécessaire pour éviter les désordres et les révoltes
contre le souverain. Elle permet de devenir des citoyens éclairés.
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L’éducation de la jeunesse.
 L’éducation de la jeunesse est importante car l’artisanat et l’industrie
naissante ont besoin d’une main d’œuvre suffisamment instruite pour
travailler efficacement.
« Cependant les parties les plus essentielles de l’éducation, lire, écrire et
compter, sont des connaissances qu’ont peut acquérir à un âge si jeune, que la
plupart même de ceux qui sont destinés aux métiers les plus bas ont le temps de
prendre ces connaissances avant de commencer à se mettre à leurs travaux.
Moyennant une très petite dépense l’État peut faciliter, peut encourager
l’acquisition de ces parties essentielles de l’éducation parmi la masse du peuple,
et même lui imposer, en quelque sorte, l’obligation de les acquérir. L’État peut
faciliter l’acquisition de ces connaissances, en établissant dans chaque paroisse
ou district une petite école où les enfants soient instruits pour un salaire si
modique, que même un simple ouvrier puisse le donner; le maître étant en partie
mais pas en totalité, payé par l’État, parce que, s’il l’était en totalité ou même
pour la plus grande partie, il pourrait prendre l’habitude de négliger son métier ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre I.
Tous les enfants doivent savoir lire et compter pour exercer un métier. A Smith
montre l’utilité de l’éducation sur le plan économique (capital humain) et
politique.
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Les ressources de la puissance
publique.
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Trois sources de revenus.
 A Smith distingue trois sources de revenus dont peut disposer la
puissance publique:
-
les sources du revenu provenant fonds appartenant au souverain,
-
la levée d’impôts sur le revenu des gens,
-
l’endettement.
« Le revenu qui doit pourvoir non seulement aux dépense de la défense publique
et à celle que demande la dignité du premier magistrat, mais encore à toutes les
autres dépenses nécessaires du gouvernement, pour lesquelles la constitution de
l’État n’a pas assigné de revenu particulier, peut-être tiré, soit en premier lieu de
quelques fonds qui appartiennent en particulier au souverain ou à la république,
et qui soient indépendants du revenu du peuple, soit, en second lieu, du revenu
du peuple. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », 1776, livre V, chapitre II.
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Les ressources de la
puissance publique.
Les impôts.
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Les quatre maximes de l’impôt.
 Pour A Smith, pour que l’impôt soit accepté et légitime, il doit reposer
sur quatre maximes:
 L’égalité devant l’impôt, « les sujets d’un État doivent contribuer au soutien du
gouvernement, chacun, le plus possible, en proportion de ses facultés, c’est-à-dire en
proportion du revenu dont il jouit sous la protection de l’État ».
 L’impersonnalité de l’impôt, « La taxe ou portion d’impôt que chaque individu est tenu de
payer doit être certaine et non arbitraire ».
 « Tout impôt doit être perçu à l’époque et selon le mode que l’on peut présumer les
plus commodes pour le contribuable ».
 Le bon impôt est celui qui maintient l’incitation à produire, « Tout impôt doit être
conçu de manière qu’il fasse sortir des mains du peuple le moins d’argent possible au
delà de ce qui entre dans le trésor, et en même temps qu’il tienne le moins possible cet
argent hors des mains du peuple avant d’entrer dans ce Trésor[...]. L’impôt peut
entraver l’industrie du peuple et le détourner de s’adonner à certaines branches de
commerce ou de travail, qui fourniraient de l’occupation et des moyens de
subsistances à beaucoup de monde ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre V,
chapitre II.
Au final, la puissance publique doit garantir l’égalité devant l’impôt et faire en sorte
que l’impôt reste supportable. Des impôts modérés sont les plus à même de ne pas
diminuer la consommation, de ne pas limiter l’activité productive et de ne pas inciter à la
contrebande.
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Les impôts sur les revenus de la propriété du capital.
 A Smith est défavorable à l’imposition du profit pur qu’il présente comme « la
compensation très modéré pour le risque et la peine d’employer les fonds ».
« S'il était donc imposé directement à proportion du profit total qu'il retire, il serait
obligé, ou d'élever le taux de son profit, ou de rejeter sur l'intérêt de l'argent, c'est-àdire de payer moins d'intérêt [...]. S'il l'employait, comme capital de fermier, à la culture
de la terre, il ne pourrait faire hausser le taux de son profit qu'en retenant par ses
mains une plus forte portion du produit de la terre, ou, ce qui revient au même, le prix
d'une plus forte portion de ce produit; et comme cela ne pourrait se faire qu'en
réduisant le fermage, le paiement définitif de l'impôt tomberait sur le propriétaire. S'il
employait le capital comme capital de commerce ou de manufacture, il ne pourrait
hausser le taux de son profit qu'en augmentant le prix de ses marchandises, auquel
cas le paiement final de l'impôt tomberait totalement sur les consommateurs de ses
marchandises. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
L’imposition sur le profit a pour conséquence une augmentation des prix faisant
peser l’impôt sur les consommateurs ou une diminution de la rente foncière. Au
final imposer les profits ne servirait pour A Smith à rien, sauf à faire peser
l’impôt sur d’autres catégories que les propriétaires du capital physique.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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47
Les impôts sur les revenus de la propriété du capital.
 A Smith est également réservé quant à l’imposition de l’intérêt de l’argent
pour deux raisons:
-
les difficultés liées à l’estimation des capitaux possédés et prêtés,
-
la mobilité des capitaux.
« Il y a cependant deux différentes circonstances qui rendent l'intérêt de l'argent un sujet
d'imposition directe, beaucoup moins convenable que le revenu de la terre. Premièrement, la
quantité et la valeur de la terre qu'un homme possède ne peuvent jamais être un secret, et
peuvent toujours se constater avec une grande précision. Mais la somme totale de ce qu'il
possède en capital est presque toujours un secret, et on ne peut guère s'en assurer avec
une certaine exactitude [...]. En second lieu, la terre est une chose qui ne peut s'emporter,
tandis que le capital peut s'emporter très facilement. Le propriétaire de terre est
nécessairement citoyen du pays où est situé son bien. Le propriétaire de capital est
proprement citoyen du monde, et il n'est attaché nécessairement à aucun pays en particulier.
Il serait bientôt disposé à abandonner celui où il se verrait exposé à des recherches
vexatoires qui auraient pour objet de le soumettre à un impôt onéreux. En emportant son
capital, il ferait cesser toute l'industrie que ce capital entretenait dans le pays qu'il aurait
quitté ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,
livre V, chapitre II.
A Smith rejette l’imposition sur l’intérêt et l’imposition des profits. Une telle fiscalité
pénaliserait la croissance économique puisqu’elle risque de limiter les fonds alloués à
l’entretien du travail productif.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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La condamnation des impôts sur les salaires du travail.
 A Smith condamne l’impôt portant sur les salaires. Tout impôt sur les
salaires du travail fait augmenter son coût et réduit les profits.
« La hausse que l'impôt occasionnerait dans les salaires du travail des ouvriers de
manufacture serait avancée par le maître manufacturier, qui serait à la fois dans la
nécessité et dans le droit de la reporter, avec un profit, sur le prix de ses marchandises
[...]. Dans tous les cas, un impôt direct sur les salaires du travail doit nécessairement
occasionner à la longue une plus forte diminution dans la rente de la terre, et en même
temps une plus grande élévation dans le prix des objets manufacturés, que n'en aurait
pu occasionner d'une part ni de l'autre une autre imposition d'une somme égale au
produit de cet impôt, qui aurait été convenablement assise, partie sur le revenu de la
terre et partie sur les objets de consommation. Si les impôts directs sur les salaires du
travail n'ont pas toujours occasionné dans ces salaires une hausse proportionnée, c'est
parce qu'ils ont, en général, occasionné une baisse considérable dans la demande de
travail. Le déclin de l'industrie, la diminution des moyens d'occupation pour le pauvre,
et le décroissement du produit annuel des terres et du travail du pays, sont en général
les effets qu'ont amenés de pareils impôts ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
Les impôts sur les salaires peuvent limiter la demande de travail et engendrer le
ralentissement de l’activité économique. On retrouve l’analyse libérale
considérant le coût du travail trop élevé comme étant un frein à la croissance
économique.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
13/07/2017
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Les impôts sur les rentes de terre et loyers des maisons.
 A Smith est cependant très favorable aux impôts sur les rentes de
terre et les loyers de maisons.
« Le luxe et la vanité forment la principale dépense du riche, et un
logement vaste et magnifique embellit et étale, de la manière la plus
avantageuse, toutes les autres choses du luxe et de vanité qu'il
possède. Aussi un impôt sur les loyers tomberait, en général, avec plus
de poids sur les riches, et il n'y aurait peut-être rien de déraisonnable
dans cette sorte d'inégalité. Il n'est pas très déraisonnable que les
riches contribuent aux dépenses de l'État, non seulement à proportion
de leur revenu, mais encore de quelque chose au-delà de cette
proportion ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
A Smith est favorable à la fiscalité relative à la rente car cet impôt ne
retombe pas sur les salaires ou sur le capital, et ne pénalise pas la
croissance économique.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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50
Les ressources de la puissance
publique.
L’endettement public.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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51
L’endettement public.
 Adam Smith critique la solution de facilité que constitue l’endettement.
Pour financer ses emprunts l’État a besoin de sujets disposant « d’une
capacité et d’une inclination à prêter ». Un État endetté devient
dépendant de la volonté des créanciers et des marchands.
« Par conséquent, un pays qui abonde en marchands et manufacturiers abonde
nécessairement en une classe de gens qui ont en tout temps la faculté d'avancer, s'il
leur convient de le faire, de très grosses sommes d'argent au gouvernement; de là
provient, dans les sujets d'un État commerçant, le moyen qu'ils ont de prêter [...]. Le
marchand ou capitaliste se fait de l'argent en prêtant au gouvernement, et au lieu de
diminuer les capitaux de son commerce, c'est pour lui une occasion de les augmenter.
Ainsi, en général, il regarde comme une grâce du gouvernement d'être admis pour une
portion dans la première souscription ouverte pour un nouvel emprunt; de là la bonne
volonté ou le désir que les sujets d'un État commerçant ont de lui prêter. Le
gouvernement d'un tel État est très porté à se reposer sur les moyens ou la bonne
volonté qu'ont ses sujets de lui prêter leur argent dans les occasions extraordinaires.
Il prévoit la facilité qu'il trouvera à emprunter, et pour cela il se dispense du devoir
d'épargner ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,
livre V, chapitre II.
A Smith critique la solution de facilité que constitue l’endettement public. Il rend la
puissance publique suspendue au bon vouloir des marchands et à leur disposition à
lui prêter des fonds.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
13/07/2017
52
Les ressources de la puissance
publique.
Les effets pervers de l’endettement public.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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53
Les conflits armés.
 L’endettement public présente différents effets pervers:
 Il permet de financer la guerre et en ce sens, il favorise les conflits
armés,
« Le défaut d'économie, en temps de paix, impose la nécessité de contracter des
dettes en temps de guerre. Quand survient la guerre, il n'y a dans le Trésor que l'argent
nécessaire pour faire aller la dépense ordinaire de l'établissement de paix [...].Mais au
moment même où commence la guerre, ou plutôt au moment même où elle menace de
commencer, il faut que l'armée soit augmentée; il faut que la flotte soit équipée; il faut
que les villes de garnison soient mises en état de défense; il faut que cette armée,
cette flotte, ces garnisons soient approvisionnées de vivres, d'armes et de munitions.
C'est une énorme dépense actuelle qui doit parer à ce moment de danger actuel, et il
n'y a pas moyen d'attendre les rentrées lentes et successives des nouveaux impôts.
Dans ce besoin urgent, le gouvernement ne saurait avoir d'autre ressource que celle
des emprunts. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,
livre V, chapitre II.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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La dépendance par rapport à l’étranger.
 L’endettement public engendre un risque de dépendance par rapport à
l’étranger (la dette publique britannique était financée par les
hollandais), et notamment une fuite des capitaux vers l’étranger
(paiement des intérêts) réduisant les fonds disponibles pour financer la
croissance économique.
« Dans les paiements qui se font des intérêts de la dette publique, a-t-on dit, c'est la
main droite qui paie à la main gauche. L'argent ne sort pas du pays. C'est seulement
une partie du revenu d'une classe d'habitants qui est transportée à une autre classe,
et la nation n'en est pas d'un denier plus pauvre. Cette apologie est tout à fait fondée
sur les idées sophistiques de ce système mercantile que j'ai combattu dans le livre
IVe de ces Recherches, et après la longue réfutation que j'ai faite de ce système, il
est peut-être inutile d'en dire davantage sur cette matière. C'est supposer d'ailleurs
que la totalité de la dette publique appartient aux habitants de ce pays; ce qui ne se
trouve nullement vrai, les Hollandais, aussi bien que les autres nations étrangères,
ayant une part très considérable dans nos fonds publics. Mais quand même la
totalité de la dette appartiendrait à des nationaux, ce ne serait pas une raison de
conclure qu'elle n'est pas un mai extrêmement pernicieux ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,
livre V, chapitre II.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
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L’effet d’éviction.
 L’endettement détourne une partie du capital de la nation de l’entretien
des travailleurs productifs pour financer les dépenses de l’État (effet
d’éviction), l’endettement est donc défavorable à la croissance
économique.
« Il y a un auteur qui a représenté les fonds publics des différentes nations
endettées de l'Europe, et spécialement ceux de l'Angleterre, comme
l'accumulation d'un grand capital ajouté aux autres capitaux du pays, au moyen
duquel son commerce a acquis une nouvelle extension, ses manufactures se
sont multipliées, et ses terres ont été cultivées et améliorées beaucoup au-delà
de ce qu'elles l'eussent été au moyen de ses autres capitaux seulement. Cet
auteur ne fait pas attention que le capital avancé au gouvernement par les
premiers créanciers de l'État était, au moment où ils ont fait cette avance, une
portion du produit annuel, qui a été détournée de faire fonction de capital pour
être employée à faire fonction de revenu, qui a été enlevée à l'entretien des
ouvriers productifs pour servir à l'entretien de salariés non productifs, et pour
être dépensée et dissipée dans le cours, en général, d'une seule année, sans
laisser même l'espoir d'aucune reproduction future [...] S'ils n'eussent point
fourni leur capital au gouvernement, il y aurait eu alors dans le pays deux
capitaux au lieu d'un, deux portions du produit annuel au lieu d'une, employées
à entretenir du travail productif. ».
A
Smith
« Recherches
sur
la nature
et les causes de la richesse des nations »,
Stage
SES/Philosophie,
M Gosse, S
Parayre
académie Aix13/07/2017
1776,
Marseillelivre
2015 V, chapitre II.
56
La fuite des capitaux.
 L’endettement est d’autant plus défavorable que pour payer les intérêts de
la dette, il contraint la puissance publique à augmenter les impôts qui
peuvent à leur tour favoriser un départ des capitaux et affecter la
croissance économique. Ce qui déclinera la capacité de la puissance
publique à rembourser sa dette.
« Quand, par l'effet de la multiplicité des impôts sur les choses propres aux
besoins et aisances de la vie, les capitalistes et ceux qui font valoir des capitaux
viennent à s'apercevoir que, quelque revenu qu'ils puissent retirer de leurs fonds,
ce revenu n'achètera jamais, dans le pays où ils sont, la même quantité de ces
choses que ce qu'ils en auraient dans tout autre pays avec le même revenu, ils
sont portés à chercher quelque autre résidence. Et quand, à raison de la
perception de ces impôts, tous ou la plus grande partie des marchands et
manufacturiers, c'est-à-dire tous ou la plus grande partie de ceux qui font valoir
de grands capitaux, viennent à être continuellement exposés aux visites
fâcheuses et aux recherches vexatoires des collecteurs de l'impôt, cette
disposition à changer de résidence se réalise bientôt par une émigration.
L'industrie du pays tombera nécessairement quand on lui aura retiré les capitaux
qui la soutenaient, et la ruine du commerce et des manufactures suivra le
dépérissement de l'agriculture. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
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Les ressources de la puissance
publique.
Les conséquences d’un endettement
public excessif.
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La banqueroute.
 En cas d’endettement public insupportable, l’État peut être contraint
à la faillite.
« Quand la dette nationale s'est une fois grossie jusqu'à un certain
point, il n'y a pas, je crois, un seul exemple qu'elle ait été loyalement et
complètement payée. Si jamais la libération du revenu public a été
opérée tout à fait, elle l'a toujours été par le moyen d'une banqueroute,
quelquefois par une banqueroute ouverte et déclarée, mais toujours par
une banqueroute réelle, bien que déguisée souvent sous une apparence
de paiement. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
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Les moyens dont dispose l’État pour éviter la faillite .
 L’État dispose alors de plusieurs moyens pour remédier à la faillite:
 la dépréciation de la valeur de la monnaie et donc l’inflation qui permet
de réduire mécaniquement la valeur des dettes à rembourser mais cela
conduit à ruiner les créanciers,
« L'expédient le plus ordinaire qu'on ait mis en œuvre pour déguiser une
vraie banqueroute nationale sous l'apparence d'un prétendu paiement, c'est
de hausser la dénomination de la monnaie [...]. Mais dans presque tout pays
les créanciers de l'État sont, pour la plupart, des gens opulents, plutôt sur
le pied de créanciers, que sur celui de débiteurs avec le reste de leurs
concitoyens. Ainsi, un prétendu paiement de ce genre aggrave le plus
souvent la perte des créanciers de l'État au lieu de le soulager; et sans
aucun avantage pour le public, il étend la plaie sur un grand nombre
d'autres personnes qui ne devraient y être pour rien.»
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
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Les moyens dont dispose l’État pour éviter la faillite .
 Augmenter le revenu public et réduire les dépenses publiques.
« Il est évident qu'on ne saurait se flatter d'atteindre à cette libération, à moins de
quelque augmentation considérable dans le revenu public, ou bien de quelque
réduction non moins considérable dans la dépense.»
•
Pour augmenter le revenu public, la puissance publique peut
augmenter les impôts sur les rentes de la terre et les loyers des
maisons et les répartir avec plus d’égalité.
« Une taxe foncière répartie avec plus d'égalité, un impôt aussi plus égal sur le loyer
des maisons, et des réformes dans le système actuel des douanes et de l'accise, telles
que celles proposées dans le chapitre précédent, pourraient peut-être, sans
augmenter la charge de la majeure partie du peuple, et seulement en en répartissant le
poids d'une manière plus égale sur la totalité, donner lieu à un accroissement
considérable du revenu public. Toutefois, il n'y a pas de faiseur de projets, quelque
exalté qu'il puisse être dans ses idées, qui ose se flatter qu'avec une augmentation
quelconque de ce genre il soit encore possible d'espérer raisonnablement, soit une
libération totale du revenu public, soit même un acheminement assez avancé vers
cette libération, en temps de paix, pour prévenir ou balancer, dans la guerre suivante,
un nouvel accroissement du capital de la dette. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776,
livre V, chapitre II.
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Les moyens dont dispose l’État pour éviter la faillite .
•
Pour augmenter le revenu public, la puissance publique peut aussi mettre en en
place un système de paiement de papier monnaie pour servir aux transactions
intérieures. Comme dans le cas de la Pennsylvanie, la puissance publique peut en
tirer un revenu en prêtant le papier-monnaie à ses sujets. A Smith voit déjà dans le
processus de création de monnaie scripturale, un facteur de la croissance
économique.
« On a fait voir, dans le IIe livre de ces Recherches, que les affaires intérieures d'un
pays quelconque, au moins dans les temps de tranquillité, pouvaient marcher à l'aide
d'un papier ayant cours de monnaie, avec à peu près autant d'avantage que si l'on
employait de la monnaie d'or et d'argent. Pour les Américains, qui sont toujours dans
le cas d'employer avec profit à l'amélioration de leurs terres de plus grands capitaux
que tous ceux qu'il leur est possible de se procurer aisément, c'est un avantage que
d'épargner, autant qu'il se peut, la dépense d'un instrument de commerce aussi
dispendieux que l'or et l'argent, et de consacrer cette partie de leur produit superflu
qu'absorberait l'achat de ces métaux à acheter bien plutôt les instruments de métier,
les matières pour vêtements, les ustensiles de ménage, les ouvrages en fer, et enfin
tout ce qui leur est nécessaire pour former leurs établissements et étendre leurs
plantations, à acquérir un fonds actif et productif, plutôt qu'un fonds mort et stérile.
Chaque gouvernement colonial trouve son intérêt à fournir au peuple du papiermonnaie en une quantité largement suffisante, et même en général plus que suffisante
pour faire aller toutes les affaires intérieures. Quelques-uns de ces gouvernements,
celui de Pennsylvanie en particulier, se font un revenu en prêtant ce papier-monnaie à
leurs sujets, à un intérêt de tant pour 100. »
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », 1776, livre V, chapitre II.
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Les moyens dont dispose l’État pour remédier à la faillite.
•
A Smith suggère également la création d’une union politique et monétaire
entre la Grande Bretagne et ses colonies. Il est favorable à une unification
des systèmes fiscaux comme à la représentation politique des colonies
britanniques qui deviendraient alors des provinces britanniques.
« Outre la liberté de commerce, l'Irlande gagnerait à une union avec la GrandeBretagne d'autres avantages beaucoup plus importants, et qui feraient bien plus que
compenser toute augmentation d'impôts que cette union pourrait amener avec elle.
Par l'union avec l'Angleterre, les classes moyennes et inférieures du peuple en
Écosse ont gagné de se voir totalement délivrées du joug d'une aristocratie qui les
avait toujours auparavant tenues dans l'oppression [...]. Dans le cas d'une union, il
dominerait moins probablement encore en Irlande qu'en Écosse, et les colonies
en viendraient bientôt, selon toute apparence, à jouir d'un degré de concorde et
d'unanimité inconnu jusqu'à présent dans toute partie quelconque de l'empire
britannique. A la vérité, l'Irlande et les colonies se trouveraient assujetties à des
impôts plus lourds qu'aucun de ceux qu'elles paient aujourd'hui. Néanmoins,
une application soigneuse et fidèle du revenu public à l'acquit de la dette
nationale ferait que la majeure partie de ces impôts ne serait pas de longue
durée, et que les dépenses de la Grande-Bretagne pourraient être bientôt
réduites à la somme simplement nécessaire pour maintenir un établissement
de paix modéré ».
A Smith « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations »,
1776, livre V, chapitre II.
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e
Existe-t-il une contradiction
entre la pensée économique
d’A Smith et la « Théorie des
sentiments moraux » (1759)?
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« Adam Smith Problem ».
Son œuvre ne se limite pas aux doctrines économiques. Elle contient
aussi, notamment, une philosophie morale publiée dans la « Théorie des
sentiments moraux » (1759), ainsi que des considérations juridiques
rassemblées dans les « Leçons sur la jurisprudence » (1762-1764). Or
l’autonomisation de la science économique au XIX siècle a conduit à isoler les
thèses économiques de ses autres ouvrages, et notamment du Smith
philosophe.
L’expression « Adam Smith Problem » a été employée pour exprimer la
contradiction entre la sympathie (capacité à se mettre à la place de
l’autre et à éprouver ses sentiments) considérée comme sentiment
naturel, caractéristique de l’être humain « Théorie des sentiments
moraux », et l’égoïsme posé comme principe universel de l’action
humaine dans « Recherches sur la nature et les causes de la richesse
des nations ».
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La philosophie d’A Smith est–elle cohérente avec sa
pensée économique?
Jean-Daniel Boyer1 pense qu’il existe une cohérence entre les écrits d’Adam
Smith. Le « Adam Smith Problem » est le résultat d’une partition des
sciences sociales.
L’analyse smithienne n’est pas dichotomique, elle a pour ambition de fonder
un système cohérent permettant d’analyser le fonctionnement et le devenir
des sociétés humaines.
« A Smith avait pour projet de fonder une vaste science humaine
comprenant la morale, l’économie, l’histoire mais aussi la jurisprudence »1.
L’ambition centrale d’A Smith est d’élaborer une philosophie morale
nouvelle. Les réflexions économiques d’A Smith trouvent leur fondement
dans la « Théorie des sentiments moraux » 1759.
1. J D Boyer « Adam Smith Problem ou problème des Sciences sociales détour par l’Antrhopologie
d’Adam Smith », Revue Française de Socio-Économie, n°3, La Découverte, 2009.
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« Théorie des sentiments
moraux » (1759)
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La nature et l’origine de nos sentiments moraux.
Dans cet ouvrage A Smith s’interroge sur la nature et l’origine de nos
sentiments moraux.
Pour Adam Smith tous les hommes sont égaux par nature et l’inégalité
de fait résulte du produit des structures sociales et de la socialisation
des individus.
Les hommes sont animés par des passions (asociales, sociales et
égoïstes. Ils se caractérisent par des facultés de l’esprit, par la
« sympathie » et une conscience morale « le spectateur impartial ».
Ce sont ces caractéristiques humaines qui permettent de déterminer
l’origine de nos jugements moraux.
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« Théorie des sentiments
moraux » (1759)
Les caractéristiques de l’homme.
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L’homme est animé par des passions égoïstes, sociales et
asociales.
Dans la « Théorie des sentiments moraux » A Smith dresse une typologie des
passions.
 L’individu smithien est égocentrique. Il est mû par des passions égoïstes. Il est
déterminé par sa tendance à se soucier davantage de son propre sort et de
sa propre situation que de ceux de ses semblables.
« Les passions égoïstes et originelles de la nature humaine [...]. La perte ou le
gain d’un très petit échange semblent beaucoup plus important, excitent en nous
un chagrin ou une joie plus passionnés et une aversion ou un désir beaucoup
plus ardents, que le plus grand souci d’une personne avec qui nous n’avons pas
de rapport particulier ».
A Smith « Théorie des sentiments moraux » 1759, III.
 Mais pour A Smith, la sphère des passions n’est pas seulement égoïstes.
L’individu Smith est aussi animé par des passions asociales (la haine, le
ressentiment) qui constituent une tendance à nuire à autrui.
 Il existe également un dernier type de passions, les passions sociales (
générosité, bonté, compassion, amitié) qui visent le bonheur et le bien-être
d’autrui.
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70
L’homme est doté de facultés de l’esprit.
L’homme est doté de facultés de l’esprit: l’imagination, la raison et la
mémoire.
 L’imagination se présente comme la capacité humaine à associer
des idées et à relier des évènements disjoints ou inconnus. Mais
pour A Smith, cette faculté n’apprécie pas la nouveauté et la raison.
 La raison apparaît comme la capacité réflexive et critique. Elle
recherche l’ordre, l’arrangement systématique et l’harmonie. Elle
vise l’impératif de cohérence.
 La mémoire est une sorte de fonds ou de stocks de connaissances
potentiellement valides. Elle ressemble à un répertoire de liens
établis et approuvés par la raison ou la pratique, à laquelle
l’imagination peut avoir recours.
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La sympathie dérive des capacités de l’esprit.
La sympathie est la capacité imaginaire dont dispose tout homme de se
mettre à la place d’autrui et d’imaginer ce que seraient ses propres
sentiments ou ses réactions s’il était dans cette situation. L’origine de
nos sentiments moraux, comme la pitié mais aussi avec les joies
d’autrui résident dans la sympathie.
« Parce que n’avons pas une expérience immédiate de ce que les autres
hommes sentent, nous ne pouvons former une idée de la manière dont
ils sont affectés qu’en concevant ce que nous devions nous-mêmes
sentir dans la même situation […] Ce n’est que par l’imagination que
nous pouvons former une conception de ce que sont ses sensations. Et
cette faculté ne peut nous y aider d’aucune autre façon qu’en nous
représentant ce que pourraient être nos propres sentiments si nous
étions à se place ».
A Smith « Théorie des sentiments moraux » 1759, I.
La sympathie est cette capacité à nous projeter dans la situation occupée par
autrui. « La sympathie ne naît pas tant de la vue de la passion que de la
situation qui l’excite ».
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La sympathie nécessite souvent un effort individuel.
La sympathie peut être irréfléchie et instantanée (vue d’un être vivant
confronté à un danger) mais aussi réfléchie.
Elle peut susciter un effort de l’acteur pour se mettre à la place d’autrui.
Plus encore la sympathie qu’éprouve autrui à notre égard nous plaît. « Il
nous plaît d’observer chez d’autres hommes une affinité avec toutes les
émotions de nos âmes et rien ne nous choque plus que l’apparence
contraire ».
Pour A Smith c’est la façon dont sont exprimées nos passions qui va ou
non susciter chez autrui la sympathie.
La sympathie devient ainsi le critère de jugement de la convenance de
l’action.
Toute expression des passions individuelles qui parvient à susciter la
sympathie d’un spectateur est jugée convenable. Au contraire plus, la
sympathie suppose un effort plus l’expression des passions est jugée
inconvenante.
Cependant la sympathie seule ne permet pas de réguler les passions
égoïstes de l’individu.
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« Le spectateur impartial », une instance régulatrice des
passions.
Dans l’analyse smithienne, le spectateur impartial apparaît comme la
conscience morale individuelle. Il unit l’homme à la divinité. Il permet à
l’homme de canaliser les passions de l’amour de soi et d’affirmer les
passions sociales ainsi que les impératifs de justice.
« Le très sage Auteur de la Nature a enseigné à l’homme à respecter les
sentiments et les jugements de ses frères, à être plus ou moins content
qu’ils approuvent sa conduite, et plus ou moins blessé quand ils la
désapprouvent. Il a fait l’homme, si je peux dire, le juge immédiat du
genre humain; il a en cela, comme à bien d’autres égards, crée à son
image, et il l’a désigné comme son vice-représentant sur terre pour
surveiller le comportement de ses frères ».
A Smith « Théorie des sentiments moraux » 1759, III.
L’homme porterait en lui l’empreinte de la justice divine.
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« Théorie des sentiments
moraux » (1759)
L’origine des sentiments moraux.
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La sympathie, un premier niveau du jugement moral.
La sympathie est pour A Smith, un premier guide pour déterminer la
moralité de nos actions. Elle permet de déterminer la convenance
d’une action.
Si nous adhérons aux comportements ou aux propos d’autrui, nous
« entrons dans » cette personne qu’est autrui.
Au contraire, plus la sympathie suppose un effort, plus l’expression
des passions est perçue comme inconvenante.
La convenance est toujours jugée à l’aune de la sympathie qu’elle
suscite.
L’accord né de la sympathie garantit la réunion des âmes séparées
par les corps. Plus la sympathie est intense, plus les liens existants
entre les individus sont denses.
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Néanmoins, la convenance d’une action ne permet pas d’assurer
sa moralité.
La sympathie est partiale. Elle déforme les sentiments d’autrui.
« Nous sentons [parfois] pour autrui une passion qu’il semble entièrement
incapable de sentir lui-même; car, lorsque nous nous mettons à sa place,
l’imagination fait naître cette passion dans notre cœur, alors que la réalité ne la fait
pas naître dans le sien ».
A Smith « Théorie des sentiments moraux » 1759, I.
La sympathie est corruptible. Nous sommes davantage disposés à sympathiser
avec des individus riches ou au statut socialement élevé.
« Nous sommes favorables à toutes leurs inclinations et soutenons tous leurs
souhaits ».
Trois conséquences en découlent:
-
le jugement fondé sur la sympathie est déterminé par la situation sociale
d’autrui,
-
le caractère déformant de la sympathie tient dans notre acceptation de l’ordre
existant,
Stage
M Gosse,
S Parayre
Aix- SES/Philosophie,
le caractère
spécifique
deacadémie
la sympathie
est au
Marseille explique
2015
notre volonté d’améliorer notre sort.
fondement de13/07/2017
notre ambition et
77
Le mérite et le sens du mérite, le deuxième niveau du
jugement moral des actions d’autrui.
Compte tenu de ses imperfections, la morale ne peut avoir pour
fondement la sympathie.
A Smith évoque un jugement d’une autre nature « Il s’agit du mérite et
du démérite, des qualités par lesquelles on gagne la récompense ou le
châtiment ».
Pour juger du mérite, « Il faut que nous changions de position, pour
comparer les intérêts opposés; nous devons les voir, ni de notre place,
ni avec nos yeux, ni avec les yeux en opposition avec nous, mais de la
place et avec les yeux d’un tiers impartial et désintéressé ».
Le mérite et le démérite d’une action sont jugés à l’aune de la
conscience morale. Dans la récompense du mérite se joue la
bienfaisance et dans celle du démérite se joue la justice.
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La référence au spectateur impartial: le troisième
niveau du jugement moral.
Pour juger de manière plus satisfaisante et en dernière instance l’action
d’autrui, nous essayons de nous abstraire de tout lien avec les
individus concernés et d’annihiler toutes les imperfections de la
sympathie.
Les actions humaines doivent en dernière instance être examinées à
travers les yeux du spectateur impartial. Nos jugements doivent pouvoir
se débarrasser des caractères déformants de la sympathie et d’une
certaine partialité née de la proximité que nous entretenons avec la
personne jugée ou de celle dérivant de son statut social ou de ses
richesses.
Sympathie, mérite, récompense du mérite et approbation supposée du
spectateur impartial sont les niveaux du jugement moral des actions
d’autrui et de leur approbation.
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Comment les réflexions morales d’A
Smith trouvent-elles leurs
applications dans la sphère
économique?
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« Les réflexions économiques d’A Smith trouvent leurs
fondements dans la Théorie des sentiments moraux ».
L’utilité est insuffisante pour rendre compte de la recherche des richesses.
Ce n’est pas le motif essentiel de l’action économique. D’autres explications
peuvent être invoquées comme l’admiration d’autrui.
A Smith explique que c’est le « désir d’améliorer son sort », qui est à
l’origine de l’accumulation du capital et de la croissance économique. La
quête de richesses et d’ascension sociale proviendrait des imperfections de
la sympathie et de ses caractères déformants.
« D ’où naît cette émulation qui court à travers les différents rangs de la
société? Et quels sont les avantages que nous nous proposons au moyen
de ce grand dessein de la vie humaine que nous appelons amélioration de
notre condition? Être observés, être remarqués, être considérés avec
sympathie, contentement et approbation sont tous les avantages que nous
pouvons proposer d’en retirer. C’est la vanité, non le bien-être ou le plaisir,
qui nous intéresse. Or, la vanité est toujours fondée sur la croyance que
nous avons d’être l’objet d’attention et d’approbation ».
A Smith « Théorie des sentiments moraux » 1759
La sympathie et la vanité seraient d’autres motifs de l’action économique.
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La recherche de l’intérêt n’est pas l’unique motif à l’œuvre dans
la sphère économique.
Pour A Smith les passions égoïstes et l’intérêt individuel ne sont pas
non plus, les seuls motifs à l’œuvre dans la sphère économique.
L’échange marchand ne s’explique pas seulement par la recherche de
l’intérêt individuel, il nécessite aussi la reconnaissance d’autrui. Sans
sympathie, l’échange marchand ne pourrait avoir lieu car il faut au
préalable qu’autrui , tout comme ses possessions soient reconnus.
Les désirs d’autrui doivent pouvoir être anticipés, ce qui nécessite de
pouvoir se mettre à sa place.
L’échange marchand permet de canaliser les intérêts individuels et les
passions égoïstes par la prise en compte de la situation d’autrui.
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82
La libre concurrence permet de se rapprocher du
juste prix.
C’est l’échange et la libre confrontation des jugements qui
permettent de réveiller le spectateur impartial, de canaliser les
intérêts partiaux et de modérer les passions égoïstes.
La liberté de commerce est un gage de l’affirmation progressive de
la justice dans la sphère économique.
« La libre concurrence est le seul moyen de garantir la libre
confrontation des jugements sur la valeur des marchandises sans
que celle-ci ne soit biaisée par les inégaux pouvoirs de marché des
échangistes »1.
L’échange et le débat sur le prix permettent de se rapprocher du
« juste prix » et de répartir équitablement les richesses produites.
1. J D Boyer « Adam Smith problem ou problème des Sciences sociales détour par
l’Anthropologie d’Adam Smith », Revue Française de Socio-Économie, n°3, La Découverte,2009.
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Comment utiliser les apports de cet
auteur dans les nouveaux
programmes de SES?
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Aperçu des programmes de SES
En première ES, dans le thème 3: la coordination par le marché.
Thèmes
Notions
Indications complémentaires
3.2. Comment
un marché
concurrentiel
fonctionne-til ?
Offre et
demande, prix
et quantité
d'équilibre,
preneur de prix,
rationnement,
surplus, gains à
l'échange,
allocation des
ressources
On s'attachera à mettre en évidence les déterminants des
comportements des agents, offreurs et demandeurs, puis on
procédera à la construction des courbes d'offre et de
demande et à l'analyse de la formation de l'équilibre sur
un marché de type concurrentiel. La modification des
conditions d'offre ou de demande permettra de montrer
comment s'ajustent, dans le temps, prix et quantités
d'équilibre. On étudiera les réactions de l'acheteur aux
changements des incitations (augmentation du prix du tabac,
de la fiscalité sur les carburants, prime à la casse sur le
marché de l'automobile, etc.). L'étude de la notion de surplus
et de son partage entre acheteurs et vendeurs permettra
d'illustrer graphiquement les gains de l'échange. On fera
apparaître l'existence de situations de rationnement lorsque
le prix est fixé, quelle qu'en soit la raison, à un autre niveau
que celui qui équilibre le marché (files d'attente,
réglementation des loyers, pénuries de places pour des
rencontres sportives ou les spectacles, etc.).
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85
Aperçu des programmes de SES
Au-delà de leur grande diversité, les marchés présentent des caractéristiques
communes.
Au sens économique, le marché est d’abord le lieu, plus ou moins concret, ou
entrent en relation des acheteurs et des vendeurs, et où cette confrontation
aboutit à des échanges à un certain prix, dit prix du marché.
Le marché délivre aux individus des signaux de prix et de quantités. Sa
principale qualité est de permettre aux individus d’agir au plus près de leurs
intérêts par le moyen de l’échange marchand.
Analyser le marché comme lieu de coordination, c’est évaluer son
efficacité au regard de la réalisation d’objectifs individuels. L’analyse de
la main invisible d’Adam Smith peut être étudiée pour montrer comment
le marché permet d’ajuster les activités des uns et des autres.
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13/07/2017
86
Aperçu des programmes de SES
En première ES, dans le thème 5: Régulation et déséquilibres macroéconomiques.
Thèmes
Notions
Indications complémentaires
5.1 Pourquoi la
puissance
publique
intervient-elle
dans la régulation
des économies
contemporaines ?
Fonctions
économiques
de l'État
(allocation,
répartition,
stabilisation)
En faisant référence aux défaillances
de marché étudiées précédemment et
à la possibilité de déséquilibres
macroéconomiques, on étudiera les
fonctions de régulation économique de
la puissance publique en insistant sur
l'importance du cadre réglementaire
dans lequel s'exercent les activités
économiques. On présentera
brièvement les principaux niveaux
d'intervention (notamment européen,
national et local).
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87
Aperçu des programmes de SES
En terminale ES, dans le thème : croissances, fluctuations et crises.
Thèmes et
questionnements
Notions
Indications complémentaires
1.1 Quelles sont les
sources de la
croissance
économique ?
PIB, IDH,
investissement,
progrès technique,
croissance
endogène,
productivité globale
des facteurs, facteur
travail, facteur
capital.
En s'appuyant sur le programme de première, on
s'interrogera sur l'intérêt et les limites du PIB.
L'étude de séries longues permettra de procéder à
des comparaisons internationales. À partir d'une
présentation simple de la fonction de production,
on exposera la manière dont la théorie
économique analyse le processus de croissance.
On fera le lien entre la productivité globale des
facteurs et le progrès technique et on introduira la
notion de croissance endogène en montrant que
l'accumulation du capital, sous ses différentes
formes participe à l'entretien de la croissance. On
mettra l'accent sur le rôle des institutions et des
droits de propriété. Acquis de première : facteurs
de production, production marchande et non
marchande, valeur ajoutée, productivité,
institutions, droits de propriété, externalités.
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13/07/2017
88
Aperçu des programmes de SES
Dans « Recherches sur la nature et les causes de la richesses des nations » A
Smith montre que l'accumulation du capital, facteur de croissance, est un
préalable à la division du travail, qui favorise à son tour la hausse des revenus et
donc l'épargne.
Cette accumulation concerne le capital fixe (machines, bâtiments…) et le capital
circulant (nécessaire pour un cycle de production: matières premières et avances en
salaires faites par les capitalistes). La croissance contribue à l'amélioration du sort des
travailleurs, puisque leur salaire s'élève au-dessus du minimum de subsistance.
Cependant, en l'absence de division du travail accrue, de progrès technique et de
nouveaux marchés, la baisse tendancielle du profit freine l'accumulation du capital,
conduisant à l'état stationnaire. Le salaire est ramené alors vers le minimum de
subsistance.
L’analyse d’A Smith met en évidence l'aspect cumulatif de la croissance dont on
trouve aujourd'hui des échos dans les théories de la croissance endogène. Elle
montre également que la puissance publique contribue à la croissance
économique à travers ses dépenses publiques (infrastructures, dépenses en
éducation) qui génèrent des externalités positives, sources de croissance
économique.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
13/07/2017
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Aperçu des programmes de SES
En terminale ES dans le thème: Mondialisation, finance internationale et intégration
européenne .
Thèmes et
questionnements
Notions
Indications complémentaires
2.1 Quels sont les
fondements du
commerce
international et de
l'internationalisati
on de la
production ?
Avantage
comparatif,
dotation
factorielle, libreéchange et
protectionnisme,
commerce intrafirme,
compétitivité prix
et hors prix,
délocalisation,
externalisation,
firmes
multinationales,
spécialisation.
En partant d'une présentation stylisée des évolutions du
commerce mondial et en faisant référence à la notion
d'avantage comparatif, on s'interrogera sur les déterminants des
échanges internationaux de biens et services et de la
spécialisation. On analysera les avantages et les inconvénients
des échanges internationaux pour les producteurs comme pour
les consommateurs. On présentera à cette occasion les
fondements des politiques protectionnistes et on en montrera
les risques. On s'interrogera sur les effets d'une variation des
taux de change sur l'économie des pays concernés. En
s'appuyant sur des données concernant le commerce intrafirme et sur des exemples d'entreprises multinationales, on
abordera la mondialisation de la production. On analysera les
choix de localisation des entreprises et leurs stratégies
d'internationalisation. On étudiera à cette occasion les
principaux déterminants de la division internationale du travail,
en insistant sur le rôle des coûts et la recherche d'une
compétitivité hors prix. Acquis de première : gains à
l'échange.
Stage SES/Philosophie, M Gosse, S Parayre académie AixMarseille 2015
13/07/2017
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