Médecine
& enfance
décembre 2016
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système nerveux (3 fois) ou d’autres or-
ganes : agénésie rénale, hypertension
artérielle par sténose de l’artère rénale,
troubles du rythme cardiaque [1]. En de-
hors de notre observation, une agénésie
pulmonaire n’avait jamais été décrite,
sauf dans le cas rapporté par H. Dorchy
en 2004 [2].
La consultation du site Orphanet [3, 4]
indique que l’asymétrie faciale aux
pleurs, due à une agénésie ou à une hy-
poplasie du muscle triangulaire des
lèvres, est associée dans plus de 50 %
des cas à d’autres malformations, qui
portent sur la tête et le cou (50 %), le
cœur (40 %), le squelette (20 %), l’ap-
pareil génito-urinaire (20 %), le systè-
me nerveux central (10 %) et/ou l’ap-
pareil digestif (6 %). De nombreuses
anomalies mineures sont possibles
(8 %). Des troubles du développement
psychomoteur et un retard mental peu-
vent apparaître dans 6 à 10 % des cas.
Une délétion 22q11.2 a été observée
dans plusieurs cas d’agénésie ou d’hy-
poplasie du muscle triangulaire des
lèvres (muscle abaisseur des lèvres),
s’intégrant dans le cadre du syndrome
de Cayler. D’ailleurs, même si G.G. Cay-
ler envisageait une possible « théorie vi-
rale » (rubéole congénitale, infection
maternelle à cytomégalovirus) ou la
prise par la mère de toxiques comme le
LSD (diéthylamide de l’acide lyser-
gique), il avait mis en évidence des frac-
tures chromosomiques et/ou des micro-
délétions dans les 3 cas où un caryotype
avait été effectué [1].
Avec la publication de nouveaux cas et
une meilleure connaissance de leur évo-
lution, il apparaît que le phénotype du
syndrome de délétion 22q11.2 est va-
riable, incluant des anomalies modé-
rées à sévères. En sus des malforma-
tions classiques, plus de 75 % des pa-
tients ont des malformations palatines
(fente palatine ou labio-palatine, insuf-
fisance vélo-pharyngienne). Les dys-
morphies faciales sont fréquentes (ptô-
sis, hypertélorisme, épicanthus, nez
proéminent, hypoplasie malaire), ainsi
que les anomalies vertébrales. La préva-
lence de l’immunodéficience (75 %),
liée à une aplasie/hypoplasie thymique,
était peu ou non signalée au cours des
premières descriptions. Les autres
risques associés sont le purpura throm-
bopénique immunologique, l’arthrite
juvénile idiopathique, l’hypocalcémie
néonatale. Les autres malformations
sont gastro-intestinales (imperforation
anale), rénales (agénésie), dentaires
(hypoplasie de l’émail), auditives (sur-
dité), psychiques (syndrome d’hyperac-
tivité, schizophrénie), etc.
Naguère, on considérait que ces ano-
malies étaient liées à des syndromes
distincts (syndrome de Di George, syn-
drome vélo-cardio-facial, syndrome
cardio-facial). En fait, ces syndromes
sont identiques et regroupés sous le
phénotype CATCH 22 (cardiac defects,
abnormal facies, thymic hypoplasia, cleft
palate, and hypocalcemia, and a variable
deletion on chromosome 22) [5] ou délé-
tion 22q11.2, due à une recombinaison
méiotique non allélique pendant la sper-
matogenèse ou l’ovogenèse.
Le diagnostic, suspecté devant l’asymé-
trie faciale aux pleurs, étayé par la dé-
couverte de malformations associées, est
confirmé par la détection de la délétion
22q1.2, en particulier par l’hybridation
fluorescente in situ. Il faut éliminer plu-
sieurs syndromes dysmorphiques, com-
me le syndrome CHARGE, le syndrome
de Smith-Lemli-Opitz (SLO), le syndro-
me VATER/VACTERL, le syndrome
d’Alagille, celui de Goldenhar, etc.
La prévalence du phénotype CATCH 22
est estimée entre 1 p. 2000 et 1 p. 4 000
naissances vivantes, la même que celle
de l’hypothyroïdie congénitale, laquelle
bénéficie d’un dépistage à huit jours de
vie sur l’éluat de sang prélevé sur papier
buvard après piqûre au talon. Selon la
plupart des auteurs, en sus de la re-
cherche de la délétion 22q11.2 et d’une
exploration cardiologique (électrocar-
diogramme, radiographie du thorax,
échographie cardiaque), une radiogra-
phie de l’ensemble du squelette, une
échographie rénale et un examen ORL
sont indispensables [6, 7].
첸
G. Dutau déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.
Références
[1] CAYLER. G.G. : « Cardiofacial syndrome. Congenital heart di-
sease and facial weakness, a hitherto unrecognized associa-
tion », Arch. Dis. Child., 1969 ; 44 : 69-75.
[2] DORCHY H. : « Association of asymmetric crying facies and
pulmonary agenesis : a new syndrome ? », Eur. J. Pediatr., 2004 ;
163 : 698.
[3] « Hypoplasie unilatérale congénitale du muscle abaisseur de
l’angle de la bouche », www.orpha.net/consor/www/cgi-bin/
index.php?lng=FR.
[4] « Syndrome de délétion 22q11.2 », www.orpha.net/consor/
www/cgi-bin/index.php?lng=FR.
[5] SERGI C., SERPI M., MULLER-NAVIA J et al. : «CATCH 22 syn-
drome : report of 7 infants with follow-up data and review of the
recent advancements in the genetic knowledge of the locus
22q11 », Pathologica, 1999 ; 91 : 166-72.
[6] PAWAR S.J., SHARMA D.K., SRILAKSHMI S. et al. : « Cayler
cardio-facial syndrome : an uncommon condition in newborns »,
Iran. J. Pediatr., 2015 ; 25 : e502.
[7] BELLAICHE J., CORREIA N., BOUCHE PILLON PERSYN M.A.
et al. : « Syndrome de Cayler : à propos d’un cas et revue de la
littérature », Ann. Chir. Plast. Esthet., 2016 ; 61 : 307-10.
Syndrome cardio-facial de Cayler
Au repos, les traits du visage sont symétriques. Aux pleurs, la commissure labiale est
attirée vers la gauche par le muscle triangulaire présent. Le triangulaire des lèvres est
absent à droite.
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