REVUE DE PRESSE dirigé par le Dr M. François Traitement par corticoïdes de la surdité observée en cas d’aqueduc du vestibule élargi L’anomalie radiologique la plus fréquente chez les enfants atteints d’une surdité de perception est l’élargissement de l’aqueduc du vestibule, qui mesure plus de 1,5 mm d’épaisseur ou qui est plus large que le canal semi-circulaire postérieur sur le scanner. La surdité de ces enfants est en général progressive, parfois initiée ou aggravée par un traumatisme crânien mineur. Elle serait due à une lésion des cellules ciliées par une hyperpression du liquide céphalo-rachidien transmise aux liquides endolabyrinthiques ou par un reflux dans la cochlée de liquide hyperosmolaire, commençant dans les deux cas par une réponse inflammatoire sur laquelle il serait possible d’agir. Les auteurs ont fait une étude rétrospective chez 12 enfants qui avaient une telle anomalie radiologique et qui ont eu une aggravation brutale de leur audition. Cinq d’entre eux ont reçu des corticoïdes à raison de 0,5 à 1 mg/kg de prednisone pendant 1 à 3 semaines. Quatre ont eu une amélioration de l’audition d’au moins 10 dB sur au moins 2 fréquences. L’amélioration a été en moyenne de 17 dB, avec un suivi moyen de 1 an (de 1 mois à 4,5 ans). Sur les 7 enfants qui n’ont pas reçu de traitement par corticoïdes à l’occasion d’une aggravation brutale de leur surdité, un seul s’est amélioré. M. François, service d’ORL, hôpital Robert-Debré, Paris. Commentaire Ces résultats encourageants demandent à être confirmés par une étude prospective à effectuer sur une plus large série. Référence bibliographique Grimmer JF, Hedlund G, Park A. Steroid treatment of hearing loss in enlarged vestibular aqueduct anomaly. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 2008;72:1711-5. Immunothérapie sublinguale Les antihistaminiques et les corticoïdes locaux ne constituent qu’un traitement palliatif de l’allergie respiratoire. Le traitement curatif passe par la désensibilisation, qui a pour effet de diminuer la réponse immunitaire des lymphocytes Th2 (ce qui se traduit par une augmentation des immunoglobulines E [IgE], des éosinophiles et des cytokines IL-4, IL-5 et IL-13), tout en augmentant la réponse des lymphocytes Th1 (avec une augmentation des IgG, en particulier des IgG4). La désensibilisation parentérale nécessite des injections hebdomadaires pendant 2 à 3 ans, et peut comporter des effets adverses sérieux (choc anaphylactique). Depuis quelques années, pour quelques allergènes, la désensibilisation peut être effectuée par voie orale. Les essais cliniques randomisés versus placebo ont montré une efficacité de la désensibilisation sublinguale tant sur les symptômes de la rhinite allergique que sur l’asthme, chez l’adulte comme chez l’enfant. Une étude à long terme, menée sur 10 ans, a montré la stabilité du résultat plusieurs années après la fin du traitement. L’effet indésirable le plus fréquent est une sensation de prurit buccal qui peut durer quelques mois. MF Commentaire La désensibilisation est un traitement long. Pour qu’il soit efficace, il faut que le patient prenne très régulièrement ses comprimés pendant 2 à 3 ans. Ce traitement ne peut pas être efficace si la compliance est mauvaise ; il faut alors revenir au traitement palliatif. Référence bibliographique Toskala E. A contemporary review of sublingual immunotherapy. Laryngoscope 2009;119:2178-81. Reconstruction de trachée à partir d’une culture de chondrocytes Les auteurs présentent les résultats de leurs travaux sur la reconstruction de la trachée chez le lapin. Ils prélèvent du cartilage du pavillon de l’oreille, enlèvent le périchondre pour ne pas avoir de contamination par des fibroblastes, et préparent le cartilage pour faire une culture de chondrocytes. Ces cellules sont ensuite transférées sur un substrat qui permet la constitution de plaques de cartilage qui peuvent atteindre 1 mm d’épaisseur. Ces plaques sont ensuite implantées dans le cou des lapins, sur un tube formé par un lambeau musculaire bipédiculé entourant un tube en silicone. Le lambeau musculaire a pour but de nourrir le cartilage. Douze à 14 semaines plus tard, les tubes en silicone sont retirés et les néotubes de cartilage sont utilisés pour remplacer 2 cm de trachée. La technique opératoire a été progressivement modifiée en fonction des complications observées chez les premiers animaux opérés. Avec la dernière version, qui a consisté en une ablation du muscle nourricier avant de greffer la néotrachée, l’animal a survécu 39 jours. MF 32 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 319 -octobre-novembre-décembre 2009 Commentaire Ces travaux sont très encourageants. En effet, une greffe de trachée effectuée avec les propres chondrocytes du patient permettra de traiter les sténoses trachéales étendues (de plus de 50 % de la trachée chez l’adulte, 30 % chez l’enfant) pour lesquelles la seule solution actuellement est la trachéotomie définitive. Référence bibliographique Weidenbecher M, Tucker HM, Gilpin DA, Dennis JE. Tissueengineered trachea for airway reconstruction. Laryngoscope 2009;119:2118-23. dirigé par le Dr M. François REVUE DE PRESSE Implantation cochléaire bilatérale simultanée chez l’enfant Les implants cochléaires ont transformé la vie des enfants sourds profonds. L’implantation s’est faite d’abord sur une seule oreille, puis certaines équipes ont proposé d’implanter le deuxième côté pour améliorer la localisation spatiale des sons, et surtout la compréhension dans le bruit ; enfin, plus récemment, certaines équipes ont implanté simultanément les deux cochlées. L’équipe de Toronto rapporte les résultats d’une étude prospective comparant 50 enfants implantés simultanément des deux côtés à 55 enfants implantés du deuxième côté, 6 à 12 mois après le premier côté (17 enfants) ou plus de 2 ans après (38 enfants). Comme on pouvait s’y attendre l’intervention et le temps d’occupation de la salle d’opération sont plus longs pour un implant bilatéral (en moyenne 5 heures et quart) que pour un seul côté (en moyenne 3 heures et demie), mais le temps cumulé de deux interventions est plus important que celui d’une implantation bilatérale. La consommation d’antalgiques, reflet de la douleur postopératoire, les prescriptions d’antiémétiques et la durée d’hospitalisation étaient les mêmes que l’implantation ait été uni- ou bilatérale. Il y a eu 4 complications immédiates sur les 55 implantations bilatérales (2 fièvres, 1 nausée et 1 otorrhée). Sur les 110 implantations unilatérales il y a eu 4 complications immédiates (2 fièvres, 1 nausée et 1 fuite de liquide céphalo-rachidien) et 3 complications mineures tardives (1 otite moyenne aiguë, 1 fièvre prolongée et 1 abcès mastoïdien). MF Commentaire Cette étude montre que, si finalement un enfant doit être implanté des deux côtés, il est plus intéressant, d’un point de vue économique et sur le plan des suites opératoires, de faire l’intervention en un seul plutôt qu’en deux temps. On attend avec impatience les premiers résultats quant à l’efficacité de cette stratégie sur le développement du langage et les performances scolaires… Référence bibliographique Ramsden JD, Papsin BC, Leung R, James A, Gordon KA. Bilateral simultaneous cochlear implantation in children: our first 50 cases. Laryngoscope 2009 [Epub ahead of print]. Complications de la trachéotomie classique chez l’adulte Les deux indications de la trachéotomie chez l’adulte sont l’obstacle sur les voies aériennes supérieures et la ventilation au long cours. La trachéotomie percutanée n’a pas complètement remplacé la trachéotomie classique, en particulier dans les cas difficiles tels que goitre, anomalies de la colonne cervicale, cou court, obésité morbide ou instabilité hémodynamique. Les auteurs ont comparé le taux et la nature des complications de la trachéotomie chirurgicale réalisée dans ces cas difficiles (82 cas) et dans des cas plus standard (221 cas). La moitié des patients ont été décanulés 1 à 3 semaines après la trachéotomie ; les autres sont restés canulés beaucoup plus longtemps. Les auteurs ont observé des complications en rapport avec la trachéotomie chez 39 patients, 14 se trouvant dans le groupe à risque (17 %) et 25 dans l’autre groupe (11 %, différence statistiquement non significative). Les complications les plus fréquentes ont été l’hémorragie, qui n’a été grave que dans deux cas (ces patients n’avaient pas une hémostase normale), et 33 infections péricanulaires ayant nécessité une antibiothérapie, dont 18 chez des patients immunodéprimés. Il n’y a eu que 2 décanulations accidentelles, 2 emphysèmes sous-cutanés et un emphysème médiastinal, sans conséquence. Dans cette série, il n’y a eu aucun décès imputable à la trachéotomie. Commentaire Les complications de la trachéotomie sont très différentes chez l’adulte et chez l’enfant, où les complications les plus redoutées sont le pneumothorax peropératoire et la décanulation intempestive. Référence bibliographique Straetmans J, Schlöndorff G, Herzhoff G, Windfuhr JP, Kremer B. Complications of midline-open tracheotomy in adults. Laryngoscope 2009 [Epub ahead of print] MF La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 319 -octobre-novembre-décembre 2009 | 33