La Lettre du Pneumologue • Vol. XVIII - n° 6 - novembre-décembre 2015 | 277
MISE AU POINT
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schéma 2 : prednisolone 0,75 mg/kg/j pendant
6 semaines, puis 0,5 mg/kg/j pendant 6 semaines,
puis diminution par paliers de 5 mg toutes les
6 semaines jusqu’à l’arrêt (5, 10).
Si la corticothérapie à court terme permet de réduire
la fréquence des exacerbations et d’améliorer la
fonction pulmonaire et la qualité de vie des patients,
elle présente cependant de nombreux effets indési-
rables à long terme et expose à des risques infectieux
sévères.
L’omalizumab a une place dans la prise en charge
de certains patients atteints d’asthme sévère, en
réduisant les symptômes, les exacerbations de
l’asthme et les hospitalisations, avec un effet sur
l’épargne des corticoïdes. Dans l’ABPA, l’omalizumab
pourrait entraîner une diminution de la fréquence
des exacerbations et permettre la réduction de la
corticothérapie (11).
◆Amélioration du débit d’air des voies
respiratoires grâce à la réduction du mucus
et de l’obstruction
La réalisation d’un drainage bronchique pluri-
quotidien par le patient lui-même ainsi que par
kinésithérapie respiratoire est souhaitable chez
les patients dont les sécrétions bronchiques sont
abondantes.
En cas d’atélectasie, il est recommandé de traiter
initialement par corticothérapie systémique et anti-
fongiques pendant 2 ou 4 semaines ; si l’atélectasie
n’est pas résolue, une bronchoscopie thérapeutique
à visée de désobstruction doit être réalisée (1).
◆Réduction de la charge fongique
Les traitements antifongiques par voie systémique
ont été recommandés en association avec la
corticothérapie, afin de diminuer, voire d’éradiquer,
la colonisation aspergillaire bronchique, avec
pour effet la diminution, voire l’arrêt, de la
corticothérapie. L’itraconazole est l’antifongique
de référence dans cette indication. Il est utilisé
lors de la première rechute de l’ABPA et dans les
ABPA corticodépendantes. Deux essais contrôlés
randomisés ont rapporté l’intérêt de l’itraconazole
dans l’ABPA :
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Une étude en double-aveugle chez 55 patients
corticodépendants atteints d’une ABPA et traités
par itraconazole à la dose de 400 mg/j pendant
16 semaines versus placebo. Les résultats montrent
une supériorité du traitement par itraconazole,
avec une réduction des doses de corticoïdes,
une diminution de l’hyperéosinophilie sanguine,
des IgE totales et l’amélioration des paramètres
fonctionnels respiratoires (12). Dans cette étude,
les patients non répondeurs à l’issue de la période en
double insu étaient ensuite traités par itraconazole
à demi-dose (200 mg/j pendant 16 semaines) en
ouvert ; 31 % des malades du groupe itraconazole
et 40 % de ceux du groupe placebo étaient à
nouveau répondeurs à ce schéma thérapeutique.
Ces résultats suggèrent l’intérêt d’un traitement
antifongique d’entretien prolongé au-delà de
16 semaines. Depuis, cette notion a été renforcée
par des données récentes suggérant de prolonger les
antifongiques au-delà de 6 mois pour observer un
bénéfice thérapeutique clinique, et jusqu’à 12 mois
au moins pour un bénéfice clinique, immunologique
et radiologique (13).
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Une étude en double-aveugle contre placebo chez
29 patients ABPA stables traités par itraconazole
à la dose de 400 mg/j pendant 16 semaines. Les
résultats montrent également une supériorité du
traitement par itraconazole, avec une diminution de
l’hyperéosinophilie sanguine, des IgE totales et de la
fréquence des exacerbations sur 16 semaines (14).
Le dosage de l’itraconazolémie est indispensable
pour vérifier la bonne absorption du traitement, per-
mettant l’efficacité thérapeutique et la prévention
du développement de résistances d’Aspergillus spp.
L’utilisation de l’itraconazole soulève plusieurs pro-
blèmes, tels que les interactions médicamenteuses,
le risque d’insuffisance surrénalienne en association
avec les corticoïdes inhalés – ce risque concernant
jusqu’à 50 % des patients traités (13) –, la toxicité
hépatique et les troubles digestifs (13). Le vorico-
nazole ou le posaconazole peuvent être utilisés en
cas d’échec de l’itraconazole ou de résistance isolée
à cet antifongique azolé.
Le bénéfice de l’amphotéricine B par voie nébulisée
dans la prise en charge de l’ABPA a été suggéré, avec
une efficacité clinique, biologique et fonctionnelle
respiratoire, et notamment la possibilité de diminuer
les doses de corticoïdes (15).
L’intérêt de la nébulisation de l’amphotéricine B
liposomale est d’obtenir des concentrations in situ
élevées, de s’affranchir des interactions médicamen-
teuses, et de diminuer les toxicités potentielles des
antifongiques systémiques, en raison de l’absence de
passage plasmatique. Cette stratégie permet aussi
de limiter l’émergence de souches résistantes aux
azolés (15). Deux essais randomisés sur l’efficacité et
la tolérance de la nébulisation de l’ampho téricine B
liposomale en traitement d’entretien dans la prise
en charge de l’ABPA sont actuellement en cours de
recrutement, dont un en France (clinicaltrials.gov:
NCT01857479 ; NCT02273661).
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