Amoebose
L’amoebose (entamoebose, amibiase) est une parasitose
due àEntamoeba histolytica,seule amibe réellement
pathogène pour l’homme. Maladie liée au péril fécal,
l’amibiase, bien que cosmopolite, sévit de manière
endémique en zones tropicales et intertropicales (Asie
du Sud-Est, régions deltaïques de l’Inde, Afrique inter-
tropicale). Dans les climats tempérés (Europe, États-
Unis), la plupart des cas sont importés et limités àde
petits foyers.
Agent causal
Entamoeba hystolytica est un protozoaire de la lumière
intestinale de l’homme. Ce parasite peut revêtir plu-
sieurs aspects morphologiques différents et évoluer
selon deux modalités distinctes :uncycle non patho-
gène lié aux formes minuta de l’amibe, et un cycle
pathogène résultant de sa transformation en formes his-
tolytica,hématophages et nécrosantes. Ces formes
histolytica ne sont plus strictement localisées àla
lumière intestinale, mais sont susceptibles de dissémina-
tion par la circulation mésentérique.
Cycle évolutif
La contamination se fait par ingestion de kystes mûrs,
éliminés dans les selles et résistants dans le milieu exté-
rieur, surtout dans les climats chauds et humides. La
transmission interhumaine est le plus souvent indirecte,
par l’intermédiaire d’eau de boisson ou de fruits et
légumes souillés. Ingéré avec l’eau ou la nourriture
souillée, le kyste infestant d’Entamoeba histolytica
minuta perd, au niveau de l’intestin grêle, la coque qui
le protège. Une division nucléaire donne naissance à
huit amibes qui se transforment en formes végétatives
ou trophozoïtes ;ces formes minuta peuvent redonner
des kystes qui sont éliminés avec les selles. C’est l’amoe-
bose infestation.
Dans certaines conditions, les amibes peuvent passer de
la forme minuta àlaforme histolytica pathogène. Elles
pénètrent dans la muqueuse colique où elles créent des
ulcérations avec des microabcès sous-muqueux. De là,
elles peuvent essaimer par voie sanguine vers d’autres
organes. C’est l’amoebose maladie. Ces formes sont
incapables de s’enkyster et, pour ce faire, doivent reve-
nir àlaforme minuta.
Des données biochimiques, immunologiques et géné-
tiques confirment que les caractéristiques morpho-
logiques des formes minuta et des kystes sont
communes àdeux espèces :Entamoeba histolytica et
Guide des analyses spécialisées
Entamoeba dispar. Seule l’espèce histolityca est capable
de provoquer une maladie invasive. L’espèce dispar
n’est pas pathogène.
Clinique
—Amoebose intestinale aiguë
ou dysenterie amibienne
D’apparition brutale, la forme typique se traduit par
l’émission de selles nombreuses, afécales, faites de
glaires et de sang ;lepatient est apyrétique mais
souffre de douleurs coliques et de ténesmes.
Les formes atténuées sont beaucoup plus fréquentes,
elles se résument àdes diarrhées modérées pas tou-
jours sanglantes.
Àl’inverse, des formes graves mais rares ont été
décrites :l’amoebose colique maligne. Le malade en
état de subocclusion ou de péritonite asthénique se
présente dans un état de choc infectieux avec déshy-
dratation. Cette forme s’observe chez les sujets dénu-
tris et fragilisés, mais aussi chez les femmes enceintes
et les accouchées en Afrique.
Parmi les complications :l’amoebome constitue une
tumeur inflammatoire du côlon qui peut se dévelop-
per longtemps après une amoebose aiguë, mais aussi
de façon inaugurale.
—Amoebose extra-intestinale
C’est une complication de l’amoebose intestinale en
relation avec l’essaimage des formes histolytica.
L’amoebose hépatique est la plus fréquente. La forme
typique réalise la triade de Fontan :douleurs, fièvre
et hépatomégalie.
Des amoeboses pleuropulmonaires secondaires àune
atteinte hépatique résultent de la diffusion des amibes
par contiguïté ou par voie sanguine ou lymphatique.
Ce sont des manifestations pleurales suppurées ou
non, des pneumopathies aiguës de la base droite ou
des abcès pulmonaires.
Des atteintes rares mais gravissimes sont aussi pos-
sibles :péricardites, atteintes cérébrales, spléniques,
urogénitales.
Diagnostic biologique
—Diagnostic parasitologique
Les selles doivent être émises au laboratoire et l’examen
effectué immédiatement afin d’éviter la lyse des formes
végétatives :
l’examen àl’état frais permet l’observation des
amibes et de leurs mouvements amiboïdes. La pré-
sence d’hématies dans une amibe confirme la patho-
génicité de celle-ci ;
les techniques de coloration au lugol ou par le mer-
thiolate iode formol (MIF) sont réalisées pour diffé-
rencier Entamoeba histolytica des amibes non
pathogènes ;
les techniques de concentration sont parfois néces-
saires :technique de Bailenger ou technique modifiée
de Ritchie ;
la culture de protozoaires est conseillée pour recher-
cher des formes végétatives et si l’examen microsco-
pique est négatif ;elle est cependant rarement
pratiquée ;
l’amplification génique par des techniques PCR per-
met de détecter et de différencier les deux espèces
directement àpartir d’un échantillon de selles. La sen-
sibilité obtenue est comparable àcelle obtenue après
culture. Cependant, elle n’est pas utilisée en routine ;
la détection antigénique par l’utilisation d’anticorps
monoclonaux spécifiques permet la détection diffé-
rentielle des antigènes des deux espèces directement à
partir d’un échantillon de selles. La commercialisa-
tion de ces anticorps débute.
—Diagnostic sérologique
De nombreuses techniques ont été proposées :
l’immunofluorescence indirecte (IFI) réalisée avec des
amibes Entamoeba histolytica obtenues àpartir de
cultures axéniques et fixées sur lame. Cette réaction
n’est significative que pour des dilutions supérieures
ou égales au 1/100 ;
l’hémagglutination passive utilise des hématies de
mouton sensibilisées par un antigène soluble Enta-
moeba histolytica.Elle est considérée comme signifi-
cative pour des dilutions supérieures ou égales au
1/320 ;
la double diffusion sur acétate de cellulose (électro-
synérèse) est une technique rapide, semi-quantitative
et très spécifique, par la mise en évidence d’un arc de
continuité en présence d’un sérum positif de réfé-
rence ;
l’immunoélectrophorèse, qui présente par ailleurs
l’inconvénient d’utiliser des quantités importantes
d’antigène, se caractérise par sa très grande spéci-
ficité ;
des tests ELISA, mieux adaptés au dépistage de
masse, ont des résultats comparables àceux de
l’immunofluorescence.
Il est recommandé de toujours utiliser deux techniques
complémentaires (par exemple l’hémagglutination pas-
sive et l’immunofluorescence). En outre, un résultat
isolé est parfois difficile àinterpréter. En cas de doute,
un second examen devra être effectué 15 à21jours plus
tard.
Les formes purement intestinales s’accompagnent dans
80 à90%des cas d’un taux faible àmodéré d’anti-
corps sériques. Des taux élevés peuvent être observés
lors d’amoeboses dysentériques ;mais le diagnostic de
ces dernières est essentiellement parasitologique.
Dans les formes extra-intestinales, le diagnostic
immunologique présente un intérêt capital :dans
l’amoebose hépatique, la sérologie est fortement posi-
tive, dans près de 100 %des cas après 1semaine d’évo-
lution.
La guérison s’accompagne d’une négativation du taux
des anticorps en 6mois àunan. Cette décroissance des
titres varie avec les techniques ;l’immunofluorescence
est la méthode la plus adaptée au suivi thérapeutique.
Tandis qu’en hémagglutination, les titres diminuent
plus lentement et la négativation est tardive.
Traitement
Les amoebicides tissulaires sont efficaces contre la
forme histolytica :métronidazole (Flagyl
®
), tinidazole
(Fasigyne
®
), ornidazole (Tiberal
®
), secnidazole
(Flagentyl
®
).
L’association tiliquinol-tilbroquinol (Intetrix
®
)possède
une activité amoebicide de contact vis-à-vis de la forme
minuta.
En pratique, la dysenterie amibienne se traite par un
dérivé imidazole per os,suivi d’une cure d’intétrix pen-
dant 10 jours.
Les sujets asymptomatiques porteurs de kystes doivent
être traités par intétrix pendant 10 jours afin d’éviter la
dissémination, surtout si leur profession est en rapport
avec la chaîne alimentaire.
(Bourée P.
Amibiase intestinale :une affection parfaitement curable aujourd’hui.
RevuePrat–Médecine Générale2005 ;19/688 :425-429.
Nozais JP.
Amibiase.
In :NozaisJP, DatryA,DanisM.
Traité de parasitologie médicale.
Paris:ÉditionsPradel, 1996 ;pp. 249-264.
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