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Mères
E. Bacon
Inserm, Strasbourg
Caractéristiques
psychosociales et besoins
des mères souffrant
de troubles psychotiques
Londres (Grande-Bretagne)
L
es gens heureux n’ont pas
d’histoire, dit le proverbe, et la
maternité est dans une vaste
majorité des cas une affaire
sans histoire.
Dans d’autres situations, malheureusement, des problèmes
particuliers apparaissent, en
particulier pour les femmes
souffrant de psychoses. Se
posent alors, entre autres, les
problèmes de l’interruption ou
non du traitement antipsychotique, des aspects pratiques de
l’éducation des enfants, et de
l’impact de la psychose maternelle sur le développement des
enfants.
Il ne faut pas non plus oublier
la vie souvent difficile des
femmes qui ont un enfant psychotique.
Par ailleurs, Les avancées
rapides des technologies médicales et biologiques permettant la procréation assistée ou
l’interruption volontaire de
grossesse et les nouveaux
types de structure familiale
font émerger de nouveaux
questionnements.
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (18) n° 8, octobre 2001
U
n nombre non négligeable de
femmes souffrant de troubles psychotiques ont des enfants et sont impliquées
dans l’éducation de leur progéniture.
Pourtant, force est de constater qu’on ne
sait pas vraiment si ces femmes sont cliniquement différentes des femmes présentant des psychoses et qui n’ont pas
d’enfant. L’hypothèse de départ du Dr Howard
et de ses collaborateurs était que les
femmes psychotiques ayant eu des
enfants pourraient avoir un fonctionnement psychosocial plus favorable et
avoir moins de besoins que celles sans
enfants. Ils se sont donc donné plusieurs
buts dans leur étude : décrire les caractéristiques socio-démographiques et cliniques des mères souffrant de psychoses ;
déterminer chez les femmes souffrant de
troubles psychotiques les facteurs associés à la maternité chez ces femmes ;
mettre en évidence les facteurs associés
avec le fait de s’occuper soi-même de
ses enfants et les facteurs présents dans
les situations où l’enfant avait été placé
par les services sociaux (Howard L,
Kumar R et Thornicroft G. Psychosocial
characteristics and needs of mothers
with psychotic disorders. Br J Psychiatry 2001 ; 178 : 427-32). Les mères de
l’étude provenaient d’une population de
femmes souffrant de psychose, épidémiologiquement représentatives et originaires du Sud de Londres. Les analyses ont été effectuées à partir d’un
groupe de 246 femmes, d’âge moyen 43
ans (16-89 ans). Quatre-vingt-trois pour
cent d’entre elles avaient un diagnostic
de schizophrénie, 31 % souffraient d’un
trouble affectif et 30 % présentaient
d’autres pathologies psychiatriques.
Cent cinquante cinq d’entre-elles (63 %)
226
avaient un ou plusieurs enfants (de 1 à 8).
Une première constatation est donc que
beaucoup de femmes psychotiques ont
des enfants. En ce qui concerne l’environnement social, les mères ont plus de
contacts avec leur famille ou avec
d’autres personnes, comme des travailleurs sociaux. Toutefois, elles ne
sont pas cliniquement différentes des
autres femmes de l’étude et présentent
des perturbations et un appauvrissement
du réseau social similaires. Les mères
sont toutefois plus âgées et ont plus tendance à vivre dans des logements non
subventionnés. La majorité des femmes
souffrant de troubles psychotiques ont
des besoins en soins sanitaires et sociaux
reliés à la grossesse et à l’éducation des
enfants, besoins qui semblent insuffisamment reconnus par les professionnels de la santé mentale. En particulier,
les mères psychotiques ont besoin de
soutien pour la prise en charge de leurs
enfants lors des épisodes de rechute.
Cette étude montre clairement que les
femmes souffrant de psychose et ayant
des enfants sont tout aussi handicapées
et ont autant de besoins de soins et de
soutien que celles qui n’ont pas d’enfant.
Mots clés. Mères – Psychose – Enfants.
Interruption brutale des
médicaments psychotropes
lors de la grossesse
Toronto (Canada)
L
a dépression et l’anxiété sont
des troubles assez répandus chez les
femmes en âge de procréer, et antidépresseurs et benzodiazépines sont couramment prescrits le cas échéant.
Quoique la plupart des études récentes
aient démontré la relative innocuité de
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ces médicaments pour le fœtus, l’anxiété
reste grande quant aux risques liés à leur
consommation chez les patientes enceintes
ou allaitant. Avec un risque de base de
1 à 3 % de malformations graves, le
hasard seul pourrait être considéré
comme responsable d’un nombre substantiel des déficiences observées à la
naissance d’enfants dont les mères ont
pris ces médicaments au début de la
grossesse. Ce concept est souvent mal
compris et, par conséquent, de nombreuses malformations ont été attribuées
à la consommation de médicaments. De
surcroît, la contribution des médias à
l’inquiétude des futures mères n’est pas
négligeable non plus. Il n’est dès lors pas
surprenant que certaines femmes, lorsqu’elles découvrent qu’elles sont
enceintes, interrompent brutalement
leur traitement, soit du fait de leur
propres peurs, soit suite à l’avis bien
intentionné de certains soignants. Cet
arrêt brutal est susceptible d’entraîner
des effets de sevrage ou de favoriser la
réapparition du trouble psychiatrique ou
psychologique de départ. Il est donc
important d’évaluer les répercussions
sur la mère et le bébé d’une interruption
soudaine de l’administration d’antidépresseurs ou de benzodiazépines pendant la grossesse. En outre, il est intéressant aussi de vérifier l’impact et les
effets des conseils d’un professionnel de
la santé (Einarson A, Selby P, Koren G.
Abrupt discontinuation of psychotropic
drugs during pregnancy : fear of teratogenic risk and impact of counselling. J
Psychiatry Neurosci 2001 ; 26 : 44-8).
Les auteurs de l’étude ont pu contacter
des jeunes femmes enceintes ou désirant
l’être grâce au programme Motherisk,
qui est un service de conseils destiné aux
femmes enceintes et à leur médecin traitant. Il leur fournit par téléphone des
informations et des conseils concernant
les risques potentiels pour le fœtus ou
l’enfant liés à l’exposition aux produits
chimiques, aux médicaments, aux maladies, aux radiations, etc. Ce service
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (18) n° 8, octobre 2001
reçoit environ 35 000 appels par an, dont
12 à 15 % concernent les médicaments
psychotropes. Toutes les femmes qui ont
consulté le programme Motherisk entre
novembre 1996 et décembre 1997, et qui
ont cessé de prendre des antidépresseurs
ou des benzodiazépines lorsque la grossesse a été confirmée, ont consenti à participer à l'étude. Les jeunes femmes ont
été interviewées, ont reçu des conseils
et rempli un questionnaire un mois après
l'appel initial, et à nouveau après l'accouchement. Sur les 36 femmes qui ont
participé à l'étude, 34 ont cessé soudainement de prendre des médicaments
parce qu'elles craignaient de nuire au
fœtus, et 28 l'ont fait sur le conseil de
leur médecin. Vingt-six femmes (70 %)
ont signalé des effets physiques et psychologiques indésirables, 11 ont signalé
des effets psychologiques uniquement,
et 11 ont signalé des idées suicidaires,
parmi lesquelles 4 ont été hospitalisées.
Suite aux conseils qui leur ont été prodigués, 22 des 36 femmes (61%) ont
recommencé à prendre leur médicament
et quatre ont constaté qu'elles n'en
avaient plus besoin. Une des femmes a
subi un avortement thérapeutique et
deux ont eu un avortement spontané. Il
y avait donc 35 bébés en bonne santé
(dont deux couples de jumeaux) nés de
33 femmes, et 14 des 21 mères ont
allaité leur bébé pendant qu'elles prenaient leurs psychotropes, sans que l'on
signale d'effet indésirable. En conclusion, on peut donc avancer que lorsqu'on évalue les risques et les avantages
de la prise de psychotropes pendant la
grossesse, les femmes et leurs médecins
devraient savoir que l'interruption soudaine de l'administration de psychotropes peut avoir des effets secondaires
sérieux. Le conseil joue un rôle efficace
en rassurant les femmes et en les incitant à se conformer au traitement.
Mots clés. Mères – Grossesses – Psychotropes – Risque tératogène.
227
Risque de récurrence
de troubles bipolaires
liés à l’arrêt du lithium
chez les femmes enceintes
et les autres
Boston (États-Unis)
L
es troubles bipolaires (de type I
et II) affectent 1 à 2 % de la population, et
sont également assez communs chez les
femmes en âge d’avoir des enfants. En
dépit de cette prévalence relativement élevée, on sait peu de choses sur le risque de
rechute des troubles bipolaires au cours de
la grossesse, quoique les troubles affectifs
sérieux au cours de la grossesse soient
assez fréquents. Un point de vue traditionnel, qui se base en fait sur des données
très parcimonieuses, est que la grossesse
protège de la récurrence de la plupart des
troubles affectifs et du suicide. Le suivi
des femmes enceintes souffrant de trouble
bipolaire pose un dilemme clinique
sérieux. Les agents antimanie (lithium,
valproate et carbamazépine) présentent
tous des risques tératogènes au début de la
grossesse et des effets secondaires à la fin
et lors de l’accouchement. Mais, l’impact
de l’interruption d’un traitement antipsychotique durant la grossesse n’est pas
négligeable non plus. En outre, l’arrêt brutal de la médication est associé à un risque
élevé de rechute, risque qui peut dépasser
la rythmicité naturelle des maladies
maniaco-dépressives non traitées. Cette
étude est la première à avoir comparé le
risque de récurrence de troubles bipolaires
après l’interruption du traitement par le
lithium dans une population importante de
femmes enceintes et non enceintes. Les
auteurs ont également comparé les taux de
récurrence au cours de la grossesse après
l’arrêt du traitement avec les taux de récurrence des mêmes patientes au cours de la
période précédant l’arrêt du traitement.
(Viguera A, Nonacs R, Cohen L et al. Risk
of recurrence of bipolar disorder in pregnant and nonpregnant women after dis-
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continuing lithium maintenance. Am J
Psychiatry 2000 ; 157 : 179-84). Cent une
femmes atteintes de troubles bipolaires
selon le DSM-IV (68 de type I et 33 de
type II) ont été enrôlées dans l’étude. Les
données enregistrées couvraient la grossesse et le post-partum pour 42 des
femmes, et des durées équivalentes (les
semaines 1-40 et 41-64) pour 59 patientes
non enceintes, appariées en fonction de
l’âge. L’arrêt du traitement par lithium
avait été réalisé soit de manière rapide
(entre 1 et 14 jours), soit de manière progressive (entre 15 et 30 jours). Les taux de
récurrence lors de l’année précédant
l’étude ont également été pris en compte.
Les taux de récurrence observés lors des
40 semaines suivant l’arrêt du lithium
étaient similaires entre les femmes
enceintes (52 %) et non enceintes (58 %).
Ces taux se révélaient bien plus faibles
pour les deux groupes (21 %) au cours de
l’année précédant l’interruption du traitement. Parmi les patientes qui étaient
restées stables pendant les 40 semaines
consécutives à l’arrêt du traitement par le
lithium, les récurrences au cours du postpartum (70 %) étaient près de 3 fois plus
fréquentes que celles observées chez les
femmes non enceintes entre la 41e et la
64e semaine. La prévalence des épisodes
dépressifs ou mixtes-dysphoriques était
par ailleurs plus élevée chez les femmes
enceintes (63 %) que chez les autres
(38%). Le risque de récurrence était plus
important lorsque l’arrêt du traitement
avait été rapide, et chez les patientes ayant
présenté un plus grand nombre d’épisodes
de troubles affectifs préalables. Il était toutefois similaire pour les diagnostics de
type I ou II. On constate donc que les taux
de rechute au cours des 40 semaines suivant l’arrêt du traitement par le lithium
sont similaires, que les femmes soient
enceintes ou non, mais ce taux augmente
ensuite de manière marquée au cours du
post-partum. Il est important d’observer
que le risque de rechute est moindre
lorsque l’arrêt du traitement se fait graduellement. Les cliniciens qui suivent des
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (18) n° 8, octobre 2001
femmes soufrant de troubles bipolaires et
souhaitant avoir un enfant ont à prendre
en compte les risques relatifs d’exposition
du fœtus aux stabilisateurs de l’humeur
par rapport au risque élevé de rechute
associé à l’interruption du traitement.
Mots clés. Mères – Troubles bipolaires –
Arrêt du traitement – Rechutes.
Enfant mort-né et PTSD
Londres (Grande-Bretagne)
S
elon un recensement de 1998,
la naissance d’enfant mort-né après
24 semaines de gestation survient à une
fréquence d’environ 0,5 % des naissances
en Angleterre et au Pays de Galles. On a
observé des cas de PTSD (stress posttraumatique) suite à des procédures obstétriques ou gynécologiques, mais à ce
jour, leur éventualité n’a pas encore été
établie chez les femmes qui ont eu un bébé
mort-né. Les données épidémiologiques
montrent que, dans la majorité des cas, les
symptômes de PTSD disparaissent après
2 ou 3 ans. Cependant, étant donné que
près de la moitié des femmes ayant eu un
enfant mort-né sont à nouveau enceintes
dans les 12 mois qui suivent, il n’est pas
impossible que la nouvelle grossesse
puisse entraîner la réactivation du stress,
et les femmes en question pourraient avoir
plus de risque de présenter des symptômes lors de la grossesse suivante. Cela
peut être source de détresse pour la
femme, mais pourrait aussi avoir des
implications pour l’enfant si les symptômes persistent après la naissance. Cette
étude s’est focalisée sur l’incidence, les
corrélats, et les éventuels prédicteurs d’un
PTSD, pendant et après la grossesse
consécutive à la naissance d’un enfant
mort-né (Turton P, Hughes P, Evans C,
Fainman D. Incidence, correlates and
228
predictors of post-traumatic stress disorder in the pregnancy after stillbirth. Br J
Psychiatry 2001 ; 178 : 556-60). Les sujets
composaient une cohorte de 66 femmes
enceintes, âgées de 20 ans et plus, dont la
grossesse précédente s’était soldée par un
enfant mort-né. Leur âge moyen était de
30 ans (de 20 à 46 ans), toutes vivaient
avec un compagnon et n’avaient pas
d’autre enfant vivant. Les femmes qui au
moment de l’étude étaient soignées pour
des problèmes physiques ou mentaux
avaient été exclues du groupe. La dépression, l’anxiété et les symptômes de PTSD
avaient été établis par des entretiens et à
l’aide de plusieurs échelles d’évaluation
au cours du 1e trimestre de la grossesse et
un an post-partum. Les résultats montrent
une prévalence des symptômes de PTSD
au cours du 3e trimestre de la grossesse
suivant l’enfant mort-né chez 21 % des
femmes. Le niveau de gravité du syndrome était associé avec la dépression,
l’anxiété de trait, le sentiment d’un
manque de soutien social au moment de
la perte de l’enfant, et lorsque la conception avait eu lieu peu de temps celle-ci. Il
semble que le fait de voir et de toucher
l’enfant mort-né soit un facteur aggravant,
quoique ce facteur n’ait pas atteint de
valeur statistiquement significative. Pour
presque toutes les femmes, les symptômes
se résolvaient d’eux- mêmes dans l’année
suivant la naissance d’un enfant sain.
Cette observation est toutefois à considérer avec précaution, étant donné qu’une
petite proportion de femmes continuaient
à souffrir de symptômes chroniques. Les
femmes sont donc vulnérables au PTSD
lors de la grossesse succédant à la naissance d’un enfant mort-né, en particulier
quand la conception a eu lieu peu de
temps après la perte du premier enfant.
Des études longitudinales sont nécessaires pour contrôler la rémission et le
risque de rechute, en particulier lors des
grossesses ultérieures.
Mots clés. Mères – PTSD – Enfant mort-né.
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Mères de schizophrènes
adultes
Hawaii (États-Unis)
L’
hospitalisation d’un proche
souffrant d’une maladie mentale préoccupante, et qui est potentiellement dangereux
pour lui-même et pour les autres, pose toujours un problème grave pour les membres
de la famille. En dépit de leur implication
évidente, l’expérience des familles et la
façon dont elles vivent et assument leurs
obligations familiales dans de telles situations n’ont été l’objet que de peu d’attention. Le Dr Chrisanti s’est intéressé à
l’expérience de mères confrontées à l’hospitalisation sur leur demande, de leur
enfant adulte atteint de schizophrénie.
(Crisanti A. Experiences with unvoluntary
hospitalization : a qualitative study of
mothers of adult children with schizophrenia. Schizophrenia Research 2000 ;
45 : 79-81). L’auteur a choisi les mères,
car ce sont en général elles qui s’occupent
principalement des enfants schizophrènes
devenus adultes. Elle a interrogé trois
mères qui par le passé avaient tenté de faire
hospitaliser leur enfant schizophrène
adulte.Il s’agissait de deux fils et une fille.
Le nombre d’années passées depuis le premier diagnostic de la maladie s’étalait de
12 à 20 ans. Les entretiens étaient conçus
de manière à identifier la façon dont les
mères percevaient et rendaient compte de
leur expérience. Les questions posées se
focalisaient sur quatre types d’événements
chronologiques concernant l’expérience
de demande d’hospitalisation : ceux ayant
précédé l’hospitalisation, le processus
d’admission, le séjour à l’hôpital, et la sortie de l’hôpital. Les entretiens ouverts
étaient menés en face à face et le discours
transcrit verbatim. L’analyse des transcriptions se faisait grâce à l’identification
dans le discours d’expressions descriptives
et la localisation d’éléments communs,
selon la méthodologie proposée par Kaam
pour l’analyse de données phénoménologiques. La synthèse des éléments com-
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (18) n° 8, octobre 2001
muns révèle cinq thèmes majeurs dans le
vécu des mères concernant l’hospitalisation sous contrainte de leur enfant adulte.
Elles ont ressenti la démarche de demande
d’hospitalisation d’une personne aimée
comme avilissante, elles se sont senties
déconcertées, victimes, anxieuses et injustement jugées. Dans l’ensemble, les mères
ont eu le sentiment d’être insuffisamment
et mal soutenues par le système de santé
mentale, et elles ont éprouvé les rencontres
avec les professionnels comme très négatives. Étant donné l’importance du rôle des
mères dans la vie et les soins apportés aux
schizophrènes adultes, les soignants
devraient tenir compte de l’impact sur
elles de cette expérience et chercher à
rendre cette situation moins pénible.
Mots clés. Mères – Schizophrénie – HSDT.
Réponses psychologiques
de femmes
après un avortement
lors du 1er trimestre
de grossesse
Santa Barbara (États-Unis)
L
es grossesses non désirées et
l’avortement constituent des enjeux
de santé publique importants. Depuis
1973, date de la décision de la Cour
suprême autorisant l’avortement, environ
1,5 millions d’avortements légaux ont été
pratiqués chaque année aux États-Unis.
Environ une femme américaine sur 5 en
âge de procréer a subi un avortement
légal. Néanmoins, une controverse persiste quant aux risques mentaux associés
à cet acte. Pour certains, l’avortement est
susceptible d’entraîner un syndrome post
avortement similaire à un PTSD. Pour
d’autres, l’avortement, en tout cas lorsqu’il a été volontairement choisi et qu’il
229
a eu lieu au cours du 1er trimestre de la
grossesse, ne représente pas de risque particulier pour la santé mentale de la femme.
Il était temps de clarifier la situation.
C’est ce qu’ont entrepris le Dr Major et
ses collaborateurs (Major B, Cozzarellei C,
Cooper L, Zubek J et al. Psychological
responses of women after first-trimester
abortion. Arch Gen Psychiatry 2000 ;
57 : 777-84). Les auteurs ont proposé de
participer à l’étude à 1 043 femmes ayant
subi une interruption volontaire de grossesse par aspiration au cours du 1er trimestre de celle-ci entre février et septembre 1993. Quatre-vingt-cinq pour cent
d’entre-elles, soit 882 femmes, ont
accepté. Parmi celles-ci, 442, soit 50 %,
ont été suivies pendant 2 ans. Elles ont
participé à quatre sessions de recueil de
données qui ont eu lieu respectivement
une heure avant l’avortement puis une
heure, un mois et deux ans plus tard. Les
données enregistrées incluaient la dépression pré et post avortement, l’estime de
soi, les émotions ressenties après l’avortement, la satisfaction éprouvée par rapport à la décision prise, la perception du
bénéfice et du préjudice liés à cet événement, et l’existence éventuelle d’un
PTSD. Certaines données démographiques et l’état mental préalable ont également été pris en compte et considérés
comme des prédicteurs potentiels de
troubles psychologiques ultérieurs. Deux
ans après l’interruption volontaire de
grossesse, 72 % des femmes s’estimaient
satisfaites de leur décision de ne pas avoir
mené cette grossesse à terme. Soixantedix pour cent prétendaient qu’elles avorteraient à nouveau si nécessaire cependant
que 20 % affirmaient qu’elles ne le
feraient plus. Soixante-douze pour cent
considéraient que cette décision leur avait
apporté plus de bénéfices que de préjudices. Les scores de dépression étaient
toujours plus faibles après l’avortement
qu’avant. Les auteurs ont décelé un épisode de dépression au cours des 2 ans suivant l’interruption de grossesse chez 78
des femmes de l’échantillon, soit 20 %.
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Entre avant et après l’avortement, la
dépression diminuait et l’estime de soi
augmentait chez les femmes, mais les
émotions négatives et la satisfaction par
rapport à la décision avaient tendance à
diminuer avec le temps. Un passé de
dépression était un facteur de risque pour
une dépression ultérieure, ainsi que pour
une plus faible estime de soi et une évolution plus négative à deux ans. L’âge plus
précoce et le nombre d’enfants avant
l’avortement étaient également des prédicteurs d’une évaluation plus négative de
l’acte. Les résultats montrent que la
détresse psychologique chez les femmes
après une interruption de grossesse volontaire est assez rare. La plupart, mais pas
toutes, ne présentaient pas de problèmes
psychologiques et ne regrettent pas leur
acte deux ans plus tard. En fin de compte,
les risques psychologiques de l’interruption volontaire de grossesse doivent être
comparés à ceux de la seule alternative
possible pour la femme, mener à terme une
grossesse non désirée. Chacune des options
peut être source de détresse et de regret…
Mots clés. Interruption volontaire de grossesse – Dépression – PTSD.
Pour en savoir plus
✓ Brewaeys A. Parent-child relationship
and child development in donor insemination families. Hum Reprod Update
2001 ; 7 : 38-46.
Une étude de suivi menée récemment
auprès d’enfants nés par insémination
artificielle et élevés par des couples de
femmes n’a pas permis d’identifier d’effets négatifs sur le développement des
enfants de ce type particulier de structure familiale. Toutefois, les enfants
étant encore jeunes, notre connaissance
sur les effets à long terme reste incomplète.
✓ Dethieux JB, Abadie I, Grandjean H,
Raynaud J.P. Crise narcissique et prédiction de la dépression du post-partum :
élaboration d'un auto-questionnaire.
Les auteurs se sont intéressés aux répercussions psychiques de la maternité en
rapport avec le narcissisme en posant l'hypothèse d'un lien entre les troubles du
déroulement et/ou du dépassement de la
crise narcissique inaugurale au cours de la
grossesse et la survenue de troubles
dépressifs pendant le post-partum.
✓ Kurstjens S, Wolke D. Effects of maternal depression on cognitive development
of children over the first 7 years of life.
J Child Psychol Psychiatry 2001 ; 42 :
623-36.
Les auteurs se sont intéressés aux performances cognitives d’enfants de mères
dépressives. La dépression maternelle en
soi semble avoir peu d’effets sur le développement cognitif des enfants. Des effets
à long terme peuvent être observés lorsque
la dépression maternelle est chronique,
lorsque l’enfant est un garçon, ou si la
famille présente d’autres facteurs de
risques sociaux.
✓ Jacquemain F, David D, Golse B.
Recherche sur la prédiction des dépressions maternelles du post-partum en
période anténatale : mise en place d’un
outil de dépistage en vue d’une prévention primaire et secondaire. Ann
Psychiatry 2000 ; 15 : 129-41.
Le diagnostic et la prise en charge de la
dépression du post-partum sont tout à fait
insuffisants par rapport à son incidence, estimée entre 10 et 20 % des femmes. Les
auteurs ont recherché des indicateurs anténataux prédictifs du risque de dépression du
post-partum et fabriqué un auto questionnaire
simple, utilisable et cotable par les professionnels de santé, dont la validation est en
cours.
✓ Kunugi H, Nanko S, Murray R.
Obstetric complications ans schizophrenia : prenatal underdevelopment and
subsequent neurodevelopment impairment. Br J Psychiatry 2001 ; 178 : 25-9.
Un poids faible à la naissance est un facteur de risque prédictif modéré, mais net,
pour la schizophrénie.
Voir aussi dans nos colonnes
✓ Goldschmidt L, Day N, Richardson G.
Effects of marijuana exposure on child
behavior problem at age 10. Neurotoxicology
and Teratology. 2000 ; 22: 325-36.
L’exposition prénatale à la marijuana a un
effet sur les problèmes comportementaux
des enfants à l’âge de 10 ans (cet article a
fait l’objet d’une analyse détaillée dans
notre revue de presse : les effets des psychotropes chez les enfants. Act Med Int
Psychiatrie 2001 ; 18 : 6).
Le thème de la revue de presse
du mois de novembre sera :
La violence à l’école
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (18) n° 8, octobre 2001
230
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