sein du muscle thyroaryténoïdien de particules de polytétrafluo-
roéthylène. Les réactions aiguës connues faisant suite à une injec-
tion intracordale de Téflon®sont l’érythème et l’œdème de la
corde vocale (au moins un cas clinique de décès par asphyxie
dans les 48heures suivant une injection intracordale de Téflon®
a été documenté dans la littérature, et le pourcentage de trachéo-
tomies postinjection est estimé à 0,5%), les douleurs cervicales,
l’odynophagie, la toux et l’apparition d’adénopathies cervicales.
À ce jour, aucune réaction de type allergique et aucune cancéri-
sation n’a été documentée après injection intracordale de Téflon®.
La principale complication rencontrée après la réalisation d’une
injection intracordale de Téflon®pour pallier les conséquences
d’une paralysie laryngée unilatérale est la survenue d’un granu-
lome. La réaction chronique au Téflon®consiste en un granulome
à corps étranger avec cellules géantes. La formation d’un tel gra-
nulome témoigne d’une réaction à corps étranger intracordale et
a pour conséquence une altération importante de la vibration
muqueuse du bord libre de la corde vocale qui conduit à un mau-
vais résultat phonatoire. Pour Gardner et al. (16), cette compli-
cation est notée dans 36% des cas et apparaît d’autant plus fré-
quemment que le délai qui fait suite à l’injection est important.
Le silicone a été largement utilisé au Japon en raison de l’impos-
sibilité pour les oto-rhino-laryngologistes japonais de se procu-
rer le Téflon®lors de l’apparition de ce matériau (15, 16). Selon
Iwatake et al. (17), le volume de silicone à injecter varie de 0,5
à 2ml (valeur médiane: 0,8ml). Le silicone injecté ne doit pas
être placé près du bord libre de la corde vocale mais, comme le
Téflon®, au sein du muscle thyro-aryténoïdien.
La thyroplastie de type I est une intervention qui consiste en la
mise en place d’un implant rigide au travers de l’aile cartilagi-
neuse thyroïdienne ipsilatérale au décours d’une cervicotomie (3,
5). Le très grand avantage de cette méthode est sa réalisation sous
anesthésie locale, permettant ainsi au patient et au chirurgien
d’évaluer en temps réel le résultat phonatoire. Les troubles de la
coagulation sont la seule contre-indication relative à la réalisa-
tion d’une thyroplastie, en raison du risque de survenue d’un
hématome intralaryngé. À l’heure actuelle, divers matériaux non
résorbables (silastic, silicone, hydroxylapatite, Gore-tex®, Vital-
lium®, titane) sont utilisés pour médialiser la corde vocale para-
lysée lors de la réalisation d’une thyroplastie et ont très avanta-
geusement remplacé le cartilage autologue initialement employé.
Plusieurs études récentes soulignent la qualité et la stabilité du
résultat phonatoire après thyroplastie (3, 5). Le résultat “défini-
tif” est obtenu dès la fin du premier mois postopératoire, une fois
que l’inflammation induite par l’abord chirurgical et la mise en
place de l’implant phonatoire a régressé.
La réalisation d’une thyroplastie se heurte cependant à deux situa-
tions difficiles : le positionnement incorrect du cartilage aryté-
noïde, qui conduit à une mauvaise fermeture de la glotte posté-
rieure en phonation, et le défaut de fonctionnement du muscle
crico-thyroïdien ipsilatéral (présent lors de l’atteinte simultanée
des nerfs laryngés supérieur et inférieur), qui entraîne une flac-
cidité et un raccourcissement de la corde vocale paralysée limi-
tant l’étendue du timbre. Pour pallier ces limitations, plusieurs
techniques peuvent être associées à la thyroplastie. Le défaut de
fermeture de la glotte postérieure peut être traité par la réalisa-
tion d’une adduction aryténoïdienne ou par la mise en place d’un
implant dont la conformation agit sur le cartilage aryténoïde ipsi-
latéral paralysé, tel l’implant mis au point par le Dr Montgomery.
L’atteinte du muscle crico-thyroïdien peut aussi être compensée
par la réalisation d’une subluxation crico-thyroïdienne ipsilaté-
rale. Enfin, en présence d’une atteinte isolée du nerf laryngé supé-
rieur lors de la chirurgie thyroïdienne (en particulier chirurgie
des goitres thyroïdiens) responsable d’une altération de la sensi-
bilité pharyngo-laryngée (favorisant la survenue de fausses routes
à la déglutition, en particulier des liquides) et d’une paralysie du
muscle crico-thyroïdien ipsilatéral (objectivée par l’impossibi-
lité pour le patient de réaliser une montée dans les aigus et par
une rotation du larynx du côté non paralysé), un travail récent de
la Mayo Clinic aux États-Unis suggère que la combinaison d’une
thyroplastie de type IV (suture antérieure du cricoïde au thyroïde)
et de la mise en place d’un implant phonatoire (thyroplastie de
type I) permettrait d’améliorer la symptomatologie (18).
Les complications après thyroplastie de type I sont rares. Wein-
man et al. (19), dans une série de 332 patients, ont souligné que
le pourcentage de trachéotomies était nul après thyroplastie de
typeI isolée, mais atteignait 3,5 % lorsqu’une thyroplastie de type I
était associée à une adduction aryténoïdienne ipsilatérale. Dans
tous les cas, le problème respiratoire survenait dans les 24 pre-
mières heures postopératoires. Ces données leur ont fait conclure
que la thyroplastie de type I isolée pouvait être réalisée sans
crainte en hôpital de jour alors que la combinaison thyroplastie
de type I et adduction aryténoïdienne nécessitait une hospitali-
sation de 24 heures (19).
Quelle stratégie chirurgicale faut-il adopter ?
La multiplicité des techniques disponibles à l’heure actuelle rend
difficile la systématisation de la stratégie chirurgicale à adopter
pour pallier les conséquences phonatoires d’une paralysie laryn-
gée unilatérale survenant après chirurgie de la glande thyroïde.
De nombreux facteurs (âge, profession, comorbidité, type de trau-
matisme initial, position du larynx paralysé, présence de synci-
nésies, troubles de la déglutition associés, évolutivité de l’affec-
tion responsable de la paralysie laryngée, délai par rapport au
traumatisme initial) ainsi que l’état psychologique du patient et
l’expérience des opérateurs doivent être pris en compte.
Quelle que soit la méthode employée, le praticien doit :
–faire comprendre aux patients que l’amélioration symptoma-
tique postopératoire portera avant tout sur la réduction de l’essouf-
flement et de la fatigue vocale et seulement parfois sur les troubles
de la déglutition ;
–souligner que la rééducation orthophonique reste une solution
non invasive alternative ;
–évoquer les risques exceptionnels (en particulier les risques de
trachéotomie et d’infection) ainsi que les risques inhérents à la
réalisation d’une anesthésie, qu’elle soit locale ou générale.
Schématiquement, la réalisation d’une injection intracordale d’un
matériau plus ou moins résorbable sous anesthésie générale
semble tout à fait indiquée chez le grand enfant (le petit enfant
et le nourrisson doivent être mis à part ; les risques d’obstruction
respiratoire sont au premier plan et il résulte de ce risque que
même les matériaux à faible taux de résorption ne sont pas indi-
15
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no299 - juillet-août 2005