ECHOGRAPHIE DE L’ŒIL À CATARACTE CHEZ LE CHIEN 389
Revue Méd. Vét., 2005, 156, 7, 386-390
de 16,6 % (29/176) estimée pour le décollement de rétine est
légèrement supérieure à celle de 11 % précédemment rap-
portée dans l’étude portant sur 277 cas [17]. A l’image de
cette étude [17], nous avons observé que l’incidence du
décollement de rétine a augmenté avec les stades évolutifs de
la cataracte. Toutefois, l’analyse statistique de nos résultats a
montré que la relation entre stade évolutif et décollement de
rétine était seulement significative pour la cataracte hyper-
mûre.
Une dégénérescence du vitré a été vue à l’échographie
chez 16,6% (29/176) des yeux étudiés. Elle était présente
chez 13,9%, 16,5% et 20,0% des yeux avec respectivement
une cataracte immature, mûre et hypermûre. Cette apparente
augmentation de l’incidence de la transformation vitréenne
avec le stade d’évolution de la cataracte n’a toutefois pas été
confirmée statistiquement. Dans l’étude portant sur 277 cas,
précédemment citée [17], la prévalence de la dégénérescence
du vitré a été évaluée à 23 % (63/277). De même que dans
notre étude, l’incidence de la dégénérescence du vitré n’a pas
été statistiquement corrélée à l’évolution de la maturation de
la cataracte. Dans une étude menée à Zurich [5], et associant
l’examen échographique en modes A et B de 124 yeux à
cataracte, la présence d’une dégénérescence du vitré a été
diagnostiquée dans 77% (95/124) des cas. Cette différence
avec nos résultats et ceux de l’étude américaine [17] est pro-
bablement liée à l’utilisation du mode A qui, de par son
mode de représentation graphique sous forme de pics, peut
plus aisément distinguer les modifications de l’organisation
du gel vitréen. Dans l’étude susnommée [5], il a également
été trouvé que l’incidence de la dégénérescence du vitré aug-
mentait significativement avec le stade d’évolution de la
cataracte, pour atteindre 100% avec les cataractes hyper-
mûres.
Nos observations concernant la coexistence possible d’une
cataracte et d’un décollement de rétine ou d’une dégénéres-
cence vitréenne chez le chien, sont en accord avec des études
cliniques précédemment publiées [3, 5, 17]. D’un point de
vue pratique, il est difficile, voire impossible, de déterminer
la genèse et la chronologie de ces associations, mais plu-
sieurs hypothèses pathogéniques existent. La plupart mettent
en avant le rôle déterminant de la dégénérescence du vitré
qui peut être physiologiquement lié à l’âge ou secondaire à
une inflammation, ou hyalite [15]. Cette dernière pourrait
être une complication de l’uvéite phacolytique, et elle pour-
rait avoir pour conséquence de créer des brides de traction
vitréorétiniennes ou d’entraîner une synérèse, c’est-à-dire
une liquéfaction, du vitré. Dans le premier cas, la hyalite
pourrait être responsable de décollement de rétine par trac-
tion, et dans le second de décollement rhegmatogène [13,
14]. En effet, la synérèse liée à la dégradation de l’acide hya-
luronique et des fibrilles de collagène constituant le vitré,
crée des espaces remplis d’un liquide proche de l’humeur
aqueuse. [13,15]. Les déplacements du vitré liquéfié, provo-
qués par des mouvements brusques de l’oeil ou de la tête,
entraînent des tractions sur la rétine qui peuvent aboutir à sa
déchirure. La liquéfaction du vitré peut aussi conduire à sa
rétraction, qui permet à la membrane hyaloïde qui limite le
vitré de se détacher de la rétine (décollement postérieur du
vitré). Celle-ci n’étant plus attachée qu’à la base du vitré, il
s’exerce dans cette zone des tractions telles que la neuroré-
tine peut se déchirer lors des mouvements du vitré [13]. Dans
les deux cas, la déchirure rétinienne va aboutir à un décolle-
ment rhegmatogène si le vitré liquéfié s’engouffre dans l’es-
pace sous-rétinien et décolle la neurorétine [13, 15]. Dans la
présente étude, nous n’avons pas observé de déchirure réti-
nienne associée aux décollements. Cette lésion a pu toutefois
échapper à l’examen échographique si elle se trouvait en
périphérie de la rétine. Même si l’on n’a jamais mis en évi-
dence de corrélation statistiquement significative entre
l’existence d’une uvéite phacolytique et la présence d’un
décollement de rétine ou une dégénérescence du vitré lors de
cataracte chez le chien [5, 17], on peut faire l’hypothèse que
si la cataracte est primitive et s’accompagne d’une uvéite
phacolytique, cette dernière pourrrait favoriser la dégénéres-
cence du vitré qui pourrait ensuite créer un décollement de
rétine rhegmatogène ou par traction. A l’inverse, il est égale-
ment envisageable qu’un décollement de rétine, qu’elle
qu’en soit l’origine, puisse se compliquer secondairement de
cataracte [15]. Dans un cas comme dans l’autre, l’important
pour le clinicien est d’identifier par l’échographie le décolle-
ment de rétine car il constitue une contre-indication à la chi-
rurgie de la cataracte, qu’il soit partiel ou total [1, 9]. La
contre-indication à la chirurgie de la cataracte devient rela-
tive si l’échographie oculaire identifie une dégénérescence
de vitré sans décollement de rétine. En effet, cette modifica-
tion du vitré peut, par les mécanismes précédemment évo-
qués, favoriser l’apparition du décollement de rétine après la
phaco-exérèse, surtout s’il existe une uvéite post-chirurgi-
cale. Si l’opération de la cataracte est décidée pour un chien
ayant une dégénérescence vitréenne, la chirurgie doit être
accompagnée d’une rétinopexie transclérale au laser diode
ou à la cryode afin de prévenir les déchirures rétiniennes
périphériques [14]. Notre étude a également montré que
l’échographie a permis de visualiser des anomalies congéni-
tales, comme le vitré primitif hyperplasique ou le lenticône
postérieur qui représentent des situations particulières si la
chirurgie de la cataracte est décidée, car le chirurgien doit
systématiquement prévoir de réaliser un capsulorhexis pos-
térieur et une vitrectomie [8].
En conclusion, ces résultats montrent que des lésions
acquises ou congénitales du segment postérieur de l’œil peu-
vent être présentes sur les yeux à cataracte. L’échographie
oculaire faite en phase de décision pré-opératoire permet de
les identifier et de déterminer la pertinence d’une interven-
tion chirurgicale ou les conditions de sa réalisation.
Remerciements
Les auteurs remercient Xavier Lescure, Société Dioptrix
(31240 l’Union) pour son aide matérielle.
Références bibliographiques
1. — ADKINS E.A., HENDRIX D.V. : Cataract evaluation and treatment
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3. — BELTRAN W., JEGOU J.P. : Décollement rétinien associé à une