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Lettre Février 2017
Newsletter February 2017
mercredi, 1er février 2017 Numéro 10
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Dans ce numéro
1. Éditorial
Incorporer le conflit :
l’alimentation un
champ de bataille ?
And in English
Embodying Conflict:
Food as a Battlefield?
2. Publications
récentes
3. Chemins
d’éthique :
Nouvelle parution
4. En ligne Online
5. Actualités du mois
de février 2017
6. Quoi de nouveau
en éthique en
France ?
7. Retenez dès à
présent
8. Appel à
contributions
9. L’AAMES
10. Soutenir l’éthique
11. Divers
Suivez en direct le forum européen
de bioéthique qui se tient à
Strasbourg d
u 30 janvier au 4
février 2017 sur le thème :
« Humain, Post-Humain »
www.forumeuropeendebioethique.eu
Editorial
Incorporer le conflit : l’alimentation un champ de bataille ?
Le temps où Barthes définissait le bifteck-frites « le signe alimentaire de la francité » est
définitivement révolu. Ni « consensuelle », encore moins -et heureusement- « patriote »,
l’alimentation constitue aujourd’hui un domaine où
s’expriment les diversités : intolérants au gluten, vegans,
mangeurs halal ou cacher, adeptes d’un régime sans sel, se
retrouvent souvent autour d’une même table. Mais les
comportements alimentaires canali
sent surtout des
conflits qui, partout en Europe, émergent et se déplacent
très vite dans des domaines différents : de la critique anti-
système à la dissension politique, religieuse et
économique, de la mise e
n cause des distinctions de genre à celle de la
médecine conventionnelle. Par
l'alimentation, des figures de la dissidence et de la résistance se donnent à voir. Elles
peuvent prendre la forme d’évictions comme dans les alimentations "sans" voire "anti"
lactose, sucre, viande…D’autres oppositions se d
éploient dans la critique aux filières de
production, dans les parcours d’approvisionnement, dans les modalités de consommation
et les pratiques de santé. Ces rapports complexes à l’alimentation ne sont pas séparables
de l’importance du corps, et notamment
du corps vulnérable, sur la scène des conflits
contemporains. Ce corps constitue le lieu d’expression de la personne, avec ses
préférences et sa sensibilité : il constitue ce par quoi on demande d’être reconnu dans sa
singularité. Il s’érige en sentinelle
à l’affut des attaques venant de l’extérieur (pesticides,
OGM) ; le conflit peut prendre la forme d’une guerre que l’organisme entretient avec lui-
même, à travers des intolérances ou des allergies alimentaires. Préserver ce corps
constitue aussi l’objecti
f de régulations publiques et de réponses collectives face à
l’incertitude des temps présents
: par exemple par les allégations santé. Choix et
controverses convoquent enfin un corps-
espèce, objet d’une conscience
« biocentrique », dans une société qui s’interroge de plus en plus sur les statuts et les
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frontières du « vivant ». En témoignent les débats autour du bien-être animal et leurs
conséquences dans les choix alimentaires. Le concept d’incorporation, « je suis ce que je
mange », fait alors jonction en
tre le singulier et le collectif, entre des propensions
individuelles et des engagements militants. Ces conflits incorporés peuvent ainsi
constituer autant l’expression d’inquiétudes, de craintes, de repli, qu’une source
d’inventivité et de changement collectif et individuel.
Le séminaire « Alimentations, conflits et dissidences
» a l’ambition d’approfondir ces
questions. La prochaine rencontre aura lieu le 9 février de 17h à 19h en Salle de la Table
Ronde à la Misha, avec Gilles Tétart, anthropologue, Université de Tours, sur « Les conflits
autour des OGM et le retour de l’action radicale ».
Nicoletta Diasio
, Faculté des Sciences Sociales, Université de Strasbourg, UMR 7367
Dynamiques européennes
And in English
Embodying Conflict: Food as a Battlefield?
The time when Barthes defined steak-frites as "the sign, in terms of food, of being French"
is definitely gone. Today, food is neither a matter of “consensus”, - and fortunately - much
less a matter of "patriotism". It is now an area where diversities a
re manifest: those
intolerant to gluten, vegans, halal or kosher eaters, people on a no-salt diet are often
found around the same table. However, eating habits particularly channel conflicts which,
throughout Europe, are emerging and moving very quickly into different domains: from
anti-
system criticism to political, religious and economic dissension, from questioning
gender distinctions to questioning conventional medicine. Through diet preferences,
statistics on dissidence and resistance can be observed.
They can take the form of
boycotting as in cases of diets "without" or even "anti"-
lactose, sugar, meat ... Other
forms of opposition are deployed in criticisms directed at production chains, supply
routes, as well as consumption and health practices. These complex relations to food are
not separable from the importance of the body, especially the vulnerable body, on the
scene of contemporary conflicts. This body constitutes the place of expression of the
person, with his/her preferences and sensitivity: it
constitutes that by which one seeks to
be recognized in one’s singularity. It sets itself up as a sentinel on the lookout for attacks
coming from the outside (pesticides, GMOs); conflict can take the form of a war that the
organism fights within itself, t
hrough intolerances to foods or allergies. Preserving this
body is also the objective of public policies and collective responses to the uncertainty of
the present times: through health entitlements for example. Choices and controversies
finally bring together a body-species which is the object of a "biocentric" consciousness, in
a society that is increasingly self-interrogating on the status and boundaries of the “life”
and the living beings. This is reflected in the debates around animal welfare and their
implications for food choices. The concept of incorporation, "I am what I eat", then
constitutes the junction between the singular and the collective, between individual
propensities and activist engagements. These embodied conflicts can thus be the
expre
ssion of anxiety, of fears, of withdrawal, as well as a source of inventiveness,
collective and individual change.
The seminar series on "Food, Conflicts and Dissents" aims to explore these issues. The
next meeting will hold on February 9, 2017 from 5 pm to 7 pm in the Salle de la table
ronde (room of the round table) at MISHA, with Gilles Tétart, an anthropologist from the
University of Tours, on the topic: "Conflicts around GMOs
and the return of radical
action".
Nicoletta Diasio, Faculty of Social Sciences, University of Strasbourg, UMR 7367 European
Dynamics
Translation by Mic Erohubie
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Publications récentes
Publications récentes
Ed. André Blais, Jean-
François Laslier, Karine Van
Der Straeten. Voting Experiments,
Springer, 2016,
333 pages.
Cet ouvrage collectif rassemble 16 contributions
présentées lors d’un workshop qui s’est tenu à Montréal
en 2014 dans le cadre du projet
Making Electoral
Democracy Work
financé par le Conseil de Recherche en
Sciences Humaines canadien et s’étalant de 2009 à 2016.
L’objectif premier de ce projet a été d’étudier la manière
dont les modes de scrutin influencent la manière de voter
des électeurs, et donc les résultats d’une élection. Les
travaux reproduits dans l’ouvrage utilisent trois voies
d’expérimentation pour ce faire
: des expériences en
laboratoires, des enquêtes d’opinion et des
expérimentations sur le terrain.
Rappelons que les travaux expérimentaux en laboratoires
relatifs au vote ont pris leur essor dans les années 1970, notamment à l’instigation de
Charles Plott. Leurs objectifs partagent ceux de l’économie expérimentale, c’est-à-dire
observer les comportements individuels (ici, la manière dont les participants votent) dans
des situations où les préférences (ici, électorales) sont construites via les gains monétaires
(ici, les gains auxquels les participants
sont susceptibles d’accéder en fonction de l’option
sélectionnée par le groupe à l’aide de telle ou telle méthode de vote). Il s’agit ensuite de
valider ou d’invalider les prédictions issues des modèles théoriques. Cependant, ces
travaux offrent les mêmes biais que toute étude expérimentale de laboratoire : les
individus sont placés dans des situations artificielles
et l’on peut aisément imaginer que
leurs comportements électoraux réels sont autres. C’est la raison pour laquelle les
chercheurs œuvrant dans ces domaines tentent en outre d’observer le comportement des
électeurs par le biais d’enquêtes d’opinion d’une part, sur le terrain d’autre part. Cette
troisième voie d’expérimentations, plus récente et originale, consiste à test
er de
nouveaux modes de scrutin en parallèle de grandes élections officielles, dans des bureaux
de vote expérimentaux, et ce, afin de capter la réaction des individus face à ces nouveaux
modes sachant leurs préférences électorales véritables.
L’ouvrage s’
efforce de rendre compte de l’avancée des travaux utilisant ces trois voies
expérimentales. La première partie de l’ouvrage présente des expérimentations étudiant
comment l’information relative aux différents candidats influence la manière de voter des
éle
cteurs. Les deuxième et troisième parties de l’ouvrage s’intéressent à l’influence des
sondages. La deuxième partie étudie leur influence sur la participation électorale, tandis
que la troisième examine leur impact sur le choix final des votants. La quatrième partie de
l’ouvrage, plus méthodologique, présente des expérimentations interrogeant les
protocoles et/ou proposant des innovations méthodologiques en comparant, par
exemple, des résultats issus d’expériences en laboratoires avec d’autres provenant du
terrain, mais testant des modes de scrutin similaires.
Herrade Igersheim, Chargée de Recherche CNRS et BETA, Université de Strasbourg
Liliann Manning, Le self, normalité et pathologie. Malakoff, éditions Armand Colin,
2016, 249 p.
Liliann Manning est professeure de neuropsychologie cognitive clinique à l’Université de
Strasbourg où elle a créé un Master dans cette discipline en 2005. Elle est rattachée à
l’unité Inserm 1114 dédiée à la neuropsychologie cognitive et la physiopathologie de la
schizophrén
ie. Et cet ouvrage bénéficie largement de ses capacités pédagogiques mais
également de sa capacité à prendre en compte la globalité de la personne humaine. En
tentant de répondre à la lancinante question de savoir qui nous sommes, en convoquant
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les sciences cognitives autant que la phénoménologie,
l’auteur rejoint le questionnement
éthique tout entier
tourné vers la question du sens, de l’identité, du soi…
Le sens du self est défini comme « un ensemble de
processus neurocognitifs permettant les sentiments de
cohérence, individualité et unité qui nous définissent
comme personnes.
» Il s’intéresse à la question du vécu
individuel sans éluder les interrogations concernant la
continuité personnelle et le sens de la continuité
temporelle. La première fait référence au sentiment d’être
soi-
même malgré les différentes facettes du self, tandis que
la seconde tient du constat que le self reste unitaire : l’on
reste soi-même à 5 ans, 30 ans, aujourd’hui.
L’ouvrage est construit en six chapitres et avant d’aborder le
self dans la pathologie, l’auteure commence par aborder le
self dans la normalité. Cette dernière ne signifie cependant pas une perspective
exclusivement neuroscientifique. Depuis le congrès de l’académie des sciences de New
York en 2002, l’on a mieux compri
s la complexité du self et la difficulté, voire
l’impossibilité, de comprendre le self uniquement à partir des neurosciences. Le premier
chapitre synthétise les fondements philosophiques avant que le second
ne traite de
l’interaction entre phénoménologie e
t neurosciences cognitives, ce qui permet aussi
d’aborder le sens de l’ownership et certains troubles dans la reconnaissance d’un
membre. Le chapitre 3 se centre sur le self narratif, en somme l’être humain conteur
d’histoires. Le chapitre 4 aborde les relations entre le sens du self e
t la mémoire
autobiographique.
Les deux derniers chapitres peuvent alors être consacrés à la
pathologie que l’auteur aborde via l’analyse phénoménologique interprétative. Une
première question vise en effet à savoir si la perte ou l’altération des souvenirs personnels
qui sont le socle de l’identité de soi dans le temps, provoque la « disparition » du choix.
Pour ce faire l’auteure applique sa méthode à la maladie d’Alzheimer et à la sclérose en
plaques. La seconde question cherche à déterminer dans quelle mesure le sens du self qui
a pu, dans certains troubles psychiatriques, être perturbé au cours du développement,
détermine ou influence la formation déficitaire des souvenirs autobiographiques. Le
dernier chapitre est ainsi entièrement consacré à la schizophrénie.
Cet ouvrage relativement technique s’avérera fort riche pour tous ceux qui cherchent à
clarifier la notion de self, cliniciens, psychologues, gérontologues… Et évidemment, les
étudiants !
Marie-Jo Thiel, Directrice du CEERE
Marianne Heimbach-Steins (dir.),
Jahrbuch für Christliche
Sozialwissenschaften
, Sozialethik der Pflege und
Pflegepolitik. Aschendorff Verlag, Münster, tome 57, 2016,
391 pages.
Cet ouvrage sur la thématique Soins et Politique du soin
représente le 57e tome d’une collection publiée par l’Institut
pour des sciences sociales chrétiennes pour laquelle chaque
année un thème est déterminé et des recherches mobilisées.
Le présent thème a été retenu parce qu’il fait également
l’objet de débats en Allemagn
e au niveau national. Si
l’objectif de la politique des soins reste leur qualité,
comment les garantir, en particulier pour les personnes qui
en ont le plus besoin, en raison de leur âge ? Comment les
encadrer juridiquement et éthiquement
? Comment
mobilis
er les différentes parties prenantes, publiques et
privées ? En posant ces questions, il ne faudrait pourtant pas oublier que la charge la plus
lourde de ces soins repose sur les familles des personnes très dépendantes. A quoi
5
Collection Chemins
d’éthique
s’ajoutent aujourd’hui des difficultés liées au recrutement, au côté des professionnels,
d’aidants familiaux issus de l’immigration au statut extrêmement précaire.
Les questions autour du soin et des politiques de soin concernent donc l’ensemble de la
population mais dans des proport
ions variables, alors que peu d’études leurs sont
consacrées. Les études présentées ici répondent aussi à un projet de recherche entre l’
institut des sciences sociales chrétiennes de l’université de Münster et l’Institut Nell-
Breuing à Francfort-saint-George (cf. contributions de M. Heimbach-
Steins et B.
Edmunds). L’ouvrage comporte 4 parties. La première, la plus longue, est totalement et
directement consacrée au thème Soins et politique du soin, avec des contributions pour
présenter la problématique et en
osant un comparatif avec la France, puis des
contributions issues de la recherche menée sur le terrain, enfin une revue de la littérature
sur le sujet.
La deuxième partie de l’ouvrage regroupe des chapitres autour de l’éthique sociale : une
analyse critique de la réception de l’approche par les capabilités dans l’éthique sociale
chrétienne allemande, et des réflexions sur l’adoption pour des couples de même sexe. La
troisième partie ne comprend qu’une contribution
: l’éthique sociale chrétienne en
Irlande
. La quatrième et dernière partie propose un retour sur les différentes rencontres
et colloques en 2015-2016.
Une réflexion consistante qui illustre à sa manière comment deux pays même voisins
n’optent pas exactement pour les mêmes priorités dans leur système de santé… Les soins
sont en Allemagne, bien plus qu’en France, une réelle priorité qui devrait nous inspirer en
cette période électorale qui remet la santé dans les points à discuter.
Marie-Jo Thiel, Directrice du CEERE
Collection « Chemins d’Ethique
» aux Presses
Universitaires de Strasbourg
Un nouveau volume vient de paraître dans la
collection :
Éd. Marc Feix, L'argumentation éthique, Hommage à Re
Heyer, PUS Collection - Chemins d'éthique, Novembre 2016,
182p, 21
Comment envisager l'argumentation éthique dans une société
et une époque qui dit-on ne permettent plus le consensus
éthique, moral ou social ? Les positions et les attitudes les plus
opposées peuvent s’exprimer au grand jour. Beaucoup ne
savent plus quoi penser, ni quelle attitude ou quelles conduites
adopter face aux grandes questions. Faut-il alors se résigner à
ne rien dire ou ne rien faire ?
Un premier axe de réflexion s’intéresse aux « écritures de
l’éthique », selon deux modalités inverses : d’une part
l’éthique passe à travers des formes d’expression très variées, narratives aussi bien que
spéculatives, et elle commande autant des réactions spontanées qu’elle en appelle à la
raison ; d’autre part, en milieu chrétien et comme éthique théologique, elle prétend
trouve
r dans des Écritures, précisément, ce qui lui servira de normes ou justifiera le
dépassement des normes.
Un deuxième axe de réflexion s’intéresse aux « courants de pensée et formes
d’argumentation » et confronte morale reçue et morale cherchée, morale méconnue et
morale reconnue, communauté morale et prétention à l’universalité.
Le présent volume d’hommage s’attache à refléter la riche carrière universitaire du doyen
René Heyer, professeur d’éthique et de théologie morale de la Faculté de théologie
catholique de l’Université de Strasbourg, au moment de son départ en retraite.
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