L’Encéphale (2010) 36S, D73—D82
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP
ÉPIDÉMIOLOGIE
Enquête sur la prise en charge des patients
dépressifs en soins primaires : les médecins
généralistes ont des difficultés et des solutions
Obstacles to effective treatment of depression. A general practionners’
postal survey in the north-west region of France
A. Merciera,,f, N. Kerhuela, B. Stalnikiewitzb, S. Aulanierc,
C. Boulnoisd, F. Becreta, P. Czernichowe
aDépartement universitaire de médecine générale, faculté de médecine et de pharmacie, université de Rouen,
22, boulevard Gambetta, 76000 Rouen, France
bDépartement universitaire de médecine générale, UFR de médecine et de pharmacie, université de Lille, Lille, France
cDépartement universitaire de médecine générale, UFR de médecine et de pharmacie, université de Caen, Caen, France
dDépartement universitaire de médecine générale, UFR de médecine et de pharmacie, université d’Amiens, Amiens, France
eDépartement d’épidémiologie et de santé publique, UFR de médecine et de pharmacie, université de Rouen, Rouen, France
fCIC, Inserm 0204, CHRU de Rouen, Rouen, France
Rec¸u le 2 septembre 2008 ; accepté le 27 avril 2009
Disponible sur Internet le 22 septembre 2009
MOTS CLÉS
France ;
Antidépresseur ;
Épidémiologie ;
Traitement ;
Utilisation ;
État dépressif ;
Médecine générale
Résumé
Contexte et objectif. La prise en charge de la dépression est majoritairement effectuée par
les médecins généralistes. Sa détection et sa prise en charge ne sont pas optimales. Le but de
ce travail était d’identifier les difficultés perc¸ues par les médecins généralistes en France dans
la prise en charge des patients dépressifs et d’analyser leurs propositions pour y remédier.
Méthodes. — Un questionnaire postal standardisé a été envoyé à tous les médecins généralistes
de l’interrégion nord-ouest.
Résultats. — Le profil des 2087 réponses (25 % de répondeurs) était similaire à la population
source. Globalement 28 % des généralistes connaissaient les guides de pratique clinique.
L’insuffisance de l’offre de soins spécialisés était remise en cause, mais surtout leur accès
était jugé difficile et la communication déficiente. Les généralistes proposaient des outils pour
améliorer les soins : formations centrées sur la relation d’aide, circuit privilégié pour le patient,
permanence téléphonique dédiée, annuaire sociomédical complet. Pour eux, l’amélioration de
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (A. Mercier).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2009.
doi:10.1016/j.encep.2009.04.002
D74 A. Mercier et al.
la prise en charge ne passait pas uniquement par l’amélioration de la démographie mais aussi
par une réflexion sur le rôle des intervenants, la communication et la coordination interprofes-
sionnelle afin de faciliter le circuit de soins.
Conclusion. — La prise en charge des patients dépressifs est jugée insatisfaisante en France par
les médecins généralistes, qui souhaitent à la fois des réponses alternatives (psychologues), des
aides à leur propre intervention et un recours amélioré aux soins spécialisés en psychiatrie.
© L’Encéphale, Paris, 2009.
KEYWORDS
France;
Antidepressant agent;
Mood disorder;
Epidemiology;
Treatment;
Depression;
Family practice
Summary
Context and aim. Depression is a quite common condition, and its treatment is mainly pro-
vided by General Practitioner (GP). It is already known that detection and treatment requires
significant improvement. The well known and high consumption of antidepressant drugs in
France, the highest of all other European countries, requires specific studies. The causes of
this situation are not clear and seem to be numerous: Patient’s demands, social claims; lack
of initial and continuous medical education, bad GP demographic trends, and lack of them in
rural areas; pharmaceutical company pressure; and organisation of the health care system. GP
are the main medical actors of the primary care system in France. The aim of this study was to
survey GP perceptions on secondary care services, seek the views and barriers to the provision
of good services, and ask them about perceptions and solutions they could suggest.
Methods. — A structured postal questionnaire was sent to all GP of the north-west region of
France, asking physicians about obstacles perceived when taking care of depressive patients;
factors influencing the use of services, specialised advice, treatments, access to psychiatrists
and psychological care. Their psychiatric knowledge and demographic data were also assessed.
Quantitative data were analysed using Epi-Info software, and qualitative data were transcribed
and coded manually.
Results. — A total of 25% of the GP returned the questionnaire (n= 2097 in 8709). The sample
profile was the same as the studied population. Less than a third of the GP (28%) were aware
of the clinical guidelines on depression, and less than a fifth (18%) had clinical experience of
psychiatry during their studies. Lack of time was not the main obstacle assessed by the GP.
Their complaints were about lack of mental health services, difficulty in accessing services,
and about general liaison between primary and secondary health care services: they reported
difficulties obtaining quick and good response from the specialist either for emergency or non
emergency cases. Regarding secondary care, they mainly referred to the psychiatrist, rather
than to the psychologist, probably because this second option is not reimbursed by the social
security system. Not surprisingly, medication was cited as the most frequently used treatment,
followed by psychotherapy and cognitive behavioral therapy (CBT), and almost never self help
literature and self help groups. Trained GP considered they were much more comfortable coping
with depressed patients, less frequently using secondary care providers, and easily alternative
solutions rather than antidepressant drugs. This situation suggests the usefulness of medical
education, and is attested by many qualitative answers.
Discussion. — It is not sure that the low rate of knowledge of the guidelines should be judged
only as a lack of professionalism. According to the ‘‘French Society of Primary Care’’, clinical
guidelines need updating, and it is known that those available could be useful only for half
of the situations encountered in primary care. Operational propositions urgently need to be
proposed. Recent questioning of the real interest of pharmaceutical options in the treatment
of depression is another argument. Nor can we wait for a hypothetic rise in the demographic
situation. The GP have several propositions to improve these problems, e.g. continuous medi-
cal education (CME) focusing on ‘‘patient centred therapy’’, dedicated hotline or circuit for
depressed people, and an adapted sociomedical directory. They also feel that political awa-
reness about lack of physicians is required, but say that improving quality of care does not
rely only on improving demographics. They ask for funds for psychological care. When thinking
about the circuit of care, the role of all care providers, and their communication, a global
vision appears unavoidable, which would get rid of the divisions between out-patients and the
hospital.
Conclusion. — Despite an unavoidable questioning on the dysfunctions of the health care system,
quality of care and probably pharmaceutical consumption for the depressed patient might be
improved by simple tools, such as adapted CME for primary care physicians, and communication
improvement between secondary and primary care systems.
© L’Encéphale, Paris, 2009.
Enquête sur la prise en charge des patients dépressifs en soins primaires D75
Introduction
Avec 12 millions de consultations, les troubles mentaux
constituent le deuxième poste de dépenses de soins (10,6 %)
derrière les maladies cardiovasculaires [13]. La dépression
occupe une place importante en France dans ce cadre, avec
un nombre de consultations pour dépression ayant donné
lieu à un traitement de 163 sur 1000, plus élevé qu’au
Royaume-Uni (155 sur 1000) et en Allemagne (85 sur 1000)
[27,23].
Selon la Haute Autorité de santé (HAS), un avis psy-
chiatrique est recommandé dans la prise en charge des
dépressions en cas de comorbidités, de complication évo-
lutive «ou à n’importe quel moment de la prise en charge
si le patient en fait le souhaite »[6]. Le traitement devrait
associer des mesures non médicamenteuses (information,
relation d’aide, psychothérapies, hospitalisation si besoin)
et des médicaments psychotropes, principalement les anti-
dépresseurs. Toutefois, la prise en charge en pratique de
ces patients est loin d’être optimale : non-respect des
indications autorisées ou de la durée de prescription des
antidépresseurs, sur-prescription [1,6] ; certains patients
dépressifs ne seraient pas traités, d’autres patients le
seraient à tort [41] ; les psychothérapies seraient sous-
utilisées [31].
Les causes de ces dysfonctionnements semblent mul-
tiples : demandes des patients, pression sociale, manque
de formation des médecins, démographie médicale défa-
vorable ; ces causes impliquent les différents acteurs
du système de soins [12,31]. La consommation éle-
vée de médicaments psychotropes [33] et en particulier
d’antidépresseurs [10,24,39] semble au moins en partie
imputable aux pressions exercées par l’industrie pharma-
ceutique [19]. Toutefois, la prise en charge de ces patients
peut aussi relever de difficultés d’organisation et de particu-
larités du système de soins [35] et dans les pratiques de soins
primaires [36], puisque les généralistes sont les principaux
acteurs de prise en charge de ces patients [25]. La percep-
tion de ces difficultés ou insuffisances par les intéressés est
un préalable à toute recherche de solution.
Le but de ce travail était d’identifier les difficultés
perc¸ues par les médecins généralistes en France dans la
prise en charge des patients dépressifs et de leur deman-
der quelles solutions ils envisagent pour améliorer cette
situation.
Méthodes
Un questionnaire standardisé a été envoyé par voie pos-
tale à tous les médecins généralistes installés dans les
régions de Basse-Normandie, Haute-Normandie, Picardie et
Nord—Pas-de-Calais1. Ce questionnaire portait sur les obs-
tacles perc¸us aux soins du patient dépressif, les facteurs
pouvant influencer l’utilisation des services concernés, les
problèmes perc¸us en cas d’avis spécialisé jugé nécessaire,
dans les situations urgentes ou non, les thérapeutiques uti-
lisées et le recours aux autres professionnels. Par ailleurs,
1Nous remercions tous les médecins ayant répondu au question-
naire.
des données démographiques et relatives aux connaissances
en psychiatrie des médecins étaient recueillies. Ce ques-
tionnaire était adapté d’une enquête similaire réalisée en
Grande Bretagne [38] (Annexe 1) après un test sur quelques
médecins. Sur le plan statistique, les différents items ont été
comparés selon les régions et les caractéristiques des méde-
cins : âge et genre, niveau d’activité (moins de 25 patients,
de 25 à 35 patients et plus de 35 patients par jour) et
formation déclarée en psychiatrie (diplôme et formation
continue) ; les différences éventuelles ont été analysées par
le test du Chi2au seuil de signification de 1 %, compte tenu
du nombre de tests réalisés. Des tests ajustés sur l’âge et le
genre ont été effectués pour tenir compte de ces facteurs
de confusion. La saisie et l’analyse statistique ont été effec-
tuées sur le logiciel «Epi-Info ». Afin de présenter au mieux
les situations les plus frappantes et pour des raisons de lisibi-
lité, nous avons décidé de regrouper les réponses indiquant
une situation très fréquente (comme «toujours »et «très
souvent ») comparés aux autres cas de réponse («jamais »,
«parfois »et «souvent ») de la même fac¸on que l’étude de
Telford et Hutchinson [38].
L’analyse de la question libre2a été effectuée, selon les
règles de l’analyse qualitative [29], par région puis de fac¸on
globale. Ce type d’analyse, sans but statistique, a une valeur
explicative et compréhensive des problèmes identifiés et
des solutions proposées. Les réponses ont toutes été colli-
gées, codées puis classées par catégories, lesquelles ont été
formées au fur et à mesure du recueil, de fac¸on inductive.
Résultats
Sur 8709 questionnaires envoyés aux médecins, 2118 ont
été retournés et 2097 étaient exploitables, soit un taux
de 24,3 %. Les caractéristiques des médecins de l’enquête
(âge médian 52 ans, 76,2 % d’hommes, installation depuis
21 ans en moyenne) ne différaient pas notablement de celles
fournies par les Urcam des quatre régions (Tableau 1).
Concernant l’activité quotidienne, 27,4 % des médecins
déclaraient voir moins de 25 patients, 49,9 % de 25 à
35 patients et 20,4 % plus de 35 patients. La participation
à une formation médicale continue sur la dépression était
déclarée par 46,4 %, et 28,6 % connaissaient l’existence de
guides de pratique clinique pour la dépression, plus sou-
vent les médecins de moins de 50 ans (33,6 %, p< 0,006).
Par ailleurs, 8 % avaient suivi une formation diplômante
en psychiatrie en complément de leur cursus de médecine
générale, plus souvent les médecins après 50 ans (10,7 %,
p< 0,005) et 18 % en avaient l’expérience clinique lors d’un
stage, la plupart en formation initiale.
Concernant les difficultés perc¸ues pour les soins
des patients dépressifs (Tableau 2), venaient en tête
l’insuffisance des services spécialisés, attestée par 47,3 %
d’entre eux (plus souvent pour les femmes médecins 53,5 %
contre 43,6 %, p< 0,009) et les difficultés d’accès à ces ser-
vices, (47,2 %) (moins souvent pour les médecins de 55 ans
et plus (40,7 %, contre 50 % pour les classes d’âge infé-
rieures, p< 0,00007). Les médecins formés en psychiatrie
étaient moins nombreux à considérer les formes sévères
2Voir Annexe 1.
D76 A. Mercier et al.
Tableau 1 Comparaison des 2097 médecins de l’enquête et de l’ensemble des médecins des quatre régions.
Âge moyen (ans) Femmes (%) Ancienneté d’installation (années)
Basse-Normandie 50,5 22,3 18,7
URCAM 50,8 21,5 19,8
Enquête
Haute-Normandie 51,1 26 18,8
URCAM 51,4 23,4 20,2
Enquête
Picardie 50,8 25,8 18,7
URCAM 51,2 23,7 21,1
Enquête
Nord—Pas-de-Calais 50,2 20,6 18,5
URCAM
Enquête 49,8 21,3 19,4
Difficultés générales déclarées par 2097 médecins généralistes pour les soins des patients dépressifs (enquête dans le nord-ouest de la
France, 2007).
Tableau 2 Difficultés générales déclarées par 2097 médecins généralistes pour les soins des patients dépressifs (enquête dans
le nord-ouest de la France, 2007).
Fréquence perc¸ue Jamais/parfois/souvent Très souvent/toujours
Obstacles déclarés % (n)%(n)
Manque de services spécialisés 52,7 (1106) 47,3 (991)
Difficultés d’accès à ces services 52,8 (1107) 47,2 (990)
Cas sévères trop exigeants 71,4 (1498) 28,6 (599)
Services non adaptés à la demande 72,0 (1510) 28,0 (587)
Pas assez de temps 82,5 (1730) 17,5 (367)
Trop de travail 86,7 (1819) 13,3 (278)
Connaissances insuffisantes 95,5 (2002) 4,5 (95)
Expérience insuffisante 96,7 (2028) 3,3 (69)
Difficultés déclarées par 2097 médecins généralistes pour les recours aux soins spécialisés des patients dépressifs (enquête dans le
nord-ouest de la France, 2007).
de dépression comme exigeantes pour eux (23,2 % contre
30,7 %, p< 0,0006), contrairement aux femmes médecins
plus nombreuses dans cette perception (33,3 contre 27,2 %,
p<10
—6). L’expérience personnelle, les connaissances, ou la
disponibilité n’étaient citées comme difficultés que moins
d’une fois sur cinq, (17,5 %), sauf chez les médecins plus
jeunes (20,2 % pour les moins de 45 ans, contre 14,7 % après
55 ans, p< 0,0006) et chez ceux ayant une activité moyenne
ou importante (33 % contre 14,5 %, p<10
—6) après ajuste-
ment sur l’âge. Aucune différence interrégionale n’était
observée à ce sujet. Le manque de temps ou les limites
de compétence personnelle n’apparaissaient pas comme un
élément important de décision. Les conseils d’instauration
d’un traitement et l’évaluation du risque (en particulier
Tableau 3 Difficultés déclarées par 2097 médecins généralistes pour les recours aux soins spécialisés des patients dépressifs
(enquête dans le nord-ouest de la France, 2007).
Lors des recours non urgents Lors des recours urgents
Importance du problème Absent ou mineur (%) Majeur (%) Absent ou mineur (%) Majeur (%)
Obtention d’un rendez-vous rapide 47,8 (1003) 52,2 (1094) 31,0 (651) 69,0 (1446)
Accès aisé au professionnel choisi 52,1 (1093) 47,9 (1004) 41,7 (874) 58,3 (1223)
Retour d’information par ce professionnel 54,6 (1144) 45,4 (953) 52,5 (1101) 47,5 (996)
Obtention de conseils téléphonique ou d’orientation 64,7 (1356) 35,3 (741) 56,1 (1177) 43,9 (920)
Qualité du lien avec ce professionnel 72,0 (1509) 28,0 (588) 67,0 (1404) 33,0 (693)
Suivi bien adapté par ce professionnel 82,8 (1737) 17,2 (360) 77,2 (1619) 22,8 (478)
Approches thérapeutiques déclarées par 2097 médecins généralistes pour les soins des patients dépressifs (enquête dans le nord-ouest
de la France, 2007)
Enquête sur la prise en charge des patients dépressifs en soins primaires D77
Tableau 4 Approches thérapeutiques déclarées par 2097 médecins généralistes pour les soins des patients dépressifs (enquête
dans le nord-ouest de la France, 2007).
Fréquence déclarée d’utilisation Jamais/rarement Souvent/toujours
Approches thérapeutiques % (n) % (n)
Médicaments 5,2 (109) 94,8 (1988)
Thérapies comportementales et cognitives 55,7 (1169) 44,3 (928)
Psychothérapies conventionnelles 64,3 (1348) 35,7 (749)
Groupes d’entraide/counselling 87,4 (1833) 12,6 (264)
Livres grand public 88,2 (1850) 11,8 (247)
Catégories, difficultés, solutions proposées par les médecins.
suicidaire) étaient les principaux motifs cités de recours aux
soins spécialisés, plus souvent chez les médecins de moins
de 50 ans (25 % contre 18 %, p< 0,002), moins souvent chez
ceux formés en psychiatrie (8,9 % contre 12,8 %, p<10
—6),
sans différence interrégionale.
En dehors des difficultés de recours à des soins spécia-
lisés hors urgence et de l’obtention d’un rapide et aisé
recours au professionnel choisi, les généralistes mettaient
en relief leurs difficultés à obtenir un retour d’information
du spécialiste (Tableau 3). Ces difficultés étaient plus sou-
vent citées par les femmes médecins (54,1 % contre 45,9 %,
p< 0,001), moins souvent pour les médecins de Basse-
Normandie (40,4 % contre 43 % en moyenne pour les autres
régions, p= 0,002) ; le retour d’information et l’obtention de
conseils téléphoniques étaient plus souvent cités comme dif-
ficiles par les médecins de Haute-Normandie (49,5 % contre
40,5 % en moyenne pour les autres régions, p= 0,002). La
qualité du lien avec le spécialiste était peu citée comme un
«problème majeur », sauf par les femmes médecins (39,4 %
contre 31 %, p= 0,001). Toutes ces difficultés perc¸ues étaient
plus marquées dans le contexte des soins urgents.
Les moyens utilisés le plus souvent (Tableau 4) étaient les
médicaments. Venaient ensuite les psychothérapies compor-
tementales et cognitives, plus souvent citées par les femmes
médecins (54,3 % contre 42,1 %, p<10
—5), les médecins ayant
déclaré avoir suivi une formation continue sur la dépres-
sion et ceux qui avaient validé une formation diplômante
(52,5 % contre 47,5 % p= 0,00006) et ceux du Nord—Pas-de-
Calais (48,3 % contre 39,5 % en moyenne pour les autres
régions, p= 0,002) et enfin les psychothérapies analytiques.
Les groupes d’entraides et les livres «grand public »étaient
rarement cités sauf chez les médecins formés en psychia-
trie (20,4 % contre 12,4 % ; p= 0,001 et 18,6 % contre 11,3 %,
p= 0,005, respectivement).
Dans l’ensemble, 87,3 % des généralistes (n= 1831)
déclaraient solliciter volontiers un psychiatre, 71 % un
psychologue (n= 1443) plus souvent cité par les femmes
médecins (81,4 % contre 68 %, p<10
—7) ; 46 % des médecins
seulement déclaraient avoir recours à une assistante sociale
et 36,9 % (n= 752) à une infirmière psychiatrique, plus sou-
vent en Basse-Normandie (61,4 % et 31 % en moyenne pour
les autres régions, p<10
—6).
Ces conclusions doivent cependant être nuancées :
comme celle des généralistes, les densités des psy-
chiatres varient de fac¸on importante entre les régions
étudiées, parfois de 50 % (source :DRESS, 2001 [10]). Il est
donc ardu, compte tenu de ces disparités de répartition
interrégionales, d’en déduire de quelle fac¸on les soins sont
réellement accessibles. Une analyse fine en fonction de la
densité des médecins n’a pas été possible et c’est une limite
de cette étude. Toutefois, la comparaison des réponses
interrégionales ne montre pas de différences statistique-
ment significatives.
Concernant les données qualitatives3(Tableau 5), les pra-
ticiens ont invoqué la mauvaise gestion de l’offre et de la
répartition des soins, aussi bien la leur que celle de leurs
confrères psychiatres. Ils attestaient de leurs insuffisances
de compétences et semblaient prêts à se former, surtout
dans le domaine de la relation d’aide.
Concernant la demande d’outils pratiques pouvant les
aider, un annuaire des intervenants disponibles, un circuit
de consultation rapide sur demande du généraliste, la créa-
tion d’un «SAMU psychiatrique »et d’un numéro de conseil
type «numéro vert »dédié aux professionnels était notable.
Une «lettre clé »dédiée à ces consultations longues et
une rémunération du temps d’écoute téléphonique étaient
demandées.
Enfin les praticiens proposaient la constitution de
«véritables réseaux »de proximité, permettant un «vrai tra-
vail en collaboration », avec une communication efficace ;
étaient également citées comme changements souhaitables
la remise en cause de la sectorisation psychiatrique, vécue
comme un archaïsme ; la lutte contre la stigmatisation des
troubles psychiatriques, perc¸ue comme un obstacle consé-
quent aux soins ; l’augmentation de l’offre de traitements
non pharmacologiques ; une aide au remboursement des
soins de psychologues et psychanalystes ; enfin, une recon-
naissance et une définition précises des rôles et tâches des
différents intervenants.
Discussion
Comme pour toute enquête postale, le taux de réponse était
faible ; pour autant, les caractéristiques des répondants,
proches de celles de la population source, suggèrent que les
résultats observés ne comportent pas de biais de sélection
majeur. Cependant, les obstacles désignés sont ceux perc¸us
3Soixante-dix pour cent des médecins ont fait des commentaires
en réponse à la question libre. Ce taux important permet de juger
de l’implication des généralistes pour trouver des solutions. Cepen-
dant, cette analyse est qualitative et doit être interprétée de fac¸on
compréhensive, il ne s’agit pas d’une analyse statistique.
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