L’Encéphale (2010) Supplément 1 au N°3, 15-19 15 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP Les représentations du «fou» du «malade mental», du «dépressif» et les opinions vis-à-vis des hôpitaux psychiatriques sont-elles homogènes selon les populations des sites enquêtés ? F. Quidu 1 , J.P. Escaffre 2 1. 2. Département Sciences Humaines et Sociales – Comportement de santé, Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, Rennes IFSIC Campus de Beaulieu, Université de Rennes 1 MOTS CLÉS psychiatrie, opinions, stigmatisations, structures psychiatriques. KEYWORDS psychiatry, opinions, stigmatisations, psychiatric hospitals. Résumé Les images du «fou «, du «malade mental» ou du «dépressif» dans la population française sont disparates. Le «dépressif» est plutôt vu comme une personne qui s’isole, le «malade mental» comme un individu déficient, au comportement ou au discours bizarre, tandis que le «fou» serait plutôt caractérisé par la violence. Ces images ne sont guère influencées par la connaissance concrète de la maladie mentale. Quant aux causes de celle-ci, une partie de la population considère qu’elle a une origine physique : la guérison est alors difficile et la prise en charge doit être hospitalière. Pour l’autre, elle a une origine non physique : la guérison est possible en ambulatoire. En revanche, pour la dépression, la cause est, pour la quasi-totalité de la population, d’origine non physique. Globalement, 41 % des Français soutiennent les hôpitaux psychiatriques. En fait, les opinions diffèrent assez largement selon les sites d’enquête. Elles ne sont guère influencées par l’image de la maladie mentale de la personne enquêtée. La façon d’organiser la sectorisation psychiatrique n’influence ni les images de la maladie mentale dans la population, ni les opinions vis-à-vis des structures hospitalières psychiatriques. On en déduit que ces images sont générées par d’autres facteurs, sans doute d’ordre culturels. Abstract Are the representations of the «madman», the «mentally ill person», the «depressive» and the opinions towards psychiatric hospitals homogeneous according to the populations of the investigated sites? Introduction : The concept of policy management in psychiatry requires knowledge representations of the «mad», the «mentally ill» and «depressed» by the people. It is therefore to highlight the diversity of definitions that it attributes to individual psychiatric disorders, particularly by cultural norms typically associated with geographic locations. To do this, we successively study the forms of stigmatisations broadly, and then by site, and the causes of thereof. But this does not suffice for the design of any policy in this area must also take into account the attitudes and behaviours of the population vis-à-vis the existing psychiatric facilities globally and per site. Design of study : The treatments were carried out using data from the socio-anthropological and epidemiological «Mental Health in the general population: images and realities» made by the French Collaborating Centre of WHO for research and training Mental Health (WHOCC, Lille, France) and the Directorate of Research, Studies, Evaluation and Statistics (DREES) with 40 000 people aged 18 and older in metropolitan France and in the departments of ‘overseas between 1999 and 2003 1 [1,2]. The techniques used range from descriptive statistics to multivariate analysis (correspondence analysis and multiple ascending hierarchical classification). Results : The images of the «madness», the «mentally ill» or the «depression» in the French population are disparate. Nevertheless, some characteristics are found with high frequency: the «depressive» is rather seen as an isolated person, the «mentally ill» as a mental defective with bizarre speech, while «crazy» would rather characterized by violence (delusions and violent towards others, beat his family, incest). The «mentally ill» is sometimes defined by these last criteria. These images are not influenced by knowledge of a relative suffering from mental illness or a psychiatric episode experienced by the interviewee. The causes of mental illness (the «madness» and «mentally ill»), two contradictory trends have expressed. Some believe it has a physical origin, and in that case the healing is difficult and care must be hospitable. Others believe it was originally a non-physical (social), and in this case, recovery is possible, and care must be ambulatory. People surveyed in some sites have homogeneous opinions in this regard: Berk, Thuir or Guéret, the first opinion is mainly expressed, whereas the opposite trend was observed in Villejuif, Niort, Lille, Poitiers, Paris15, Paris10. In contrast, for depression, the cause is, for almost the entire population, non-physical. Auteur correspondant : [email protected] Département Sciences Humaines et Sociales – Comportement de santé, Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, avenue du professeur Léon Bernard, 35043 Rennes Cedex © L’Encéphale, Paris, 2010. Tous droits réservés. 16 QUIDU F. . ESCAFFRE J.P. Overall, 41% of French people support psychiatric hospitals, while 32% oppose, preferring ambulatory solutions. In fact, opinions differ so widely among survey sites. They are not influenced by the images of people surveyed vis-à-vis the «madness», the «mentally ill» or the «depression». The way of organizing psychiatric sectorization (taken care rather intra-hospital versus extra-hospital, number of agents, etc..) does not influence either the image of «mad», the «mentally ill» or «depression» in population, nor the opinions vis-à-vis psychiatric hospitals. We deduce that these images are generated by other factors, probably cultural factors. Introduction « Toute personne dangereuse n’est pas atteinte de trouLa conception d’une politique de prise en charge en psychiatrie nécessite la connaissance des représentations du «fou», du «malade mental» et du «dépressif» par la population. Il convient donc de faire ressortir la diversité des définitions que celle-ci attribue aux désordres psychiatriques individuels, en particulier selon les normes culturelles généralement liées aux sites géographiques. Pour se faire, nous étudierons successivement les formes de stigmatisations globalement, puis par site, et les causes de celles-ci. Mais cela ne suffit pas pour la conception de toute politique dans ce domaine : il faut aussi prendre en compte les attitudes et comportements de la population vis-à-vis des structures psychiatriques existantes globalement et par site. Matériels et méthodes Les traitements ont été effectués à partir des données de l’enquête socio-anthropologique et épidémiologique «La santé mentale en population générale : images et réalités» effectuée par le Centre collaborateur français de l’OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS, Lille, France) et par la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) auprès de 40 000 personnes âgées de 18 ans et plus en France métropolitaine et dans les départements d’outre mer, entre 1999 et 2003 1 [1,2]. Les techniques employées vont de la statistique descriptive à l’analyse multidimensionnelle (analyse factorielle des correspondances multiples et classification ascendante hiérarchique). Résultats 1- Les stigmatisations se différencient-elles selon les sites enquêtés ? Analyse globale a - La structuration des images du «fou», du «malade mental» et du «dépressif» dans la population On constate l’absence d’une vision commune de ce que serait un «fou», un «malade mental» ou un «dépressif» pour 86 % des personnes enquêtées sur la base des critères présents dans l’enquête. Néanmoins, certains de ces critères sont plus retenus que d’autres. 1 Comme le montre le graphe 1, ce qui attire le plus l’attention des personnes enquêtées sont les critères essentiellement liés à la violence (5 et 6). Quand aux critères à fréquences centrales (3, 4 et 5) ils forgent les représentations collectives du fou, du malade mental et dans une moindre mesure du dépressif. Les autres critères, à fréquence faible (1 et 2) ou très forte (6), assignent indifféremment les trois maladies mentales ; les opinions sont en effet très dispersées. b - Les représentations du «fou», du «malade mental» ou du «dépressif» sont-elles influencées par l’existence présente ou passée d’un trouble, avec ou sans recours ? Pour cela, il suffit de distinguer les personnes pour lesquelles aucun trouble n’a été repéré (en prenant ce groupe comme référence analytique), de celles qui ont subi au moins un trouble, puis parmi ces dernières, celles qui ont eu un recours (en distinguant les diverses modalités du recours). Pour cela, une Analyse Factorielle des Correspondances Multiples a été réalisée sur les variables qui caractérisent les stigmatisations (pleure, suicide, etc.…) en prenant les individus sans trouble en éléments principaux, ceux ayant connu au moins un trouble en éléments illustratifs. On ne constate aucune différence entre les nuages des individus enquêtés, et ce quel que soit le type de recours. Il s’avère que ni l’existence d’au moins un trouble, ni le type de recours éventuel, n’influencent significativement la dispersion des représentations. Par ailleurs , le croisement statistique des critères décrivant la violence (5 et 6) avec la connaissance ou non d’un proche «fou», «malade mental» ou «dépressif», ne montre pas de différence significative . On peut donc avancer l’hypothèse selon laquelle, au-delà de la connaissance concrète de troubles, les jugements seraient en fait structurés sur une base essentiellement culturelle. c - Les origines de la «maladie» Plusieurs analyses multidimensionnelles ont été réalisées en mettant en variables principales celles caractérisant le «fou », le «malade mental» et le «dépressif» (à savoir l’origine de sa maladie, sa guérison, les modes de prises en charge, etc.…), et en variables illustratives, les variables sociodémographiques [4]. Deux groupes de modalités apparaissent clairement pour le «fou» et le «malade mental» : 1- « origine physique du trouble », « pas conscient de sa maladie » et » n’est pas responsable de ses actes », « doit être soigné et hospitalisé », « la famille souffre » et « ne peut l’accueillir » ; 2- « origine non physique du trouble (événements de vie, …) », « responsable de ses actes », « guérison possible », « prise en charge ailleurs qu’à l’hôpital », « suivi socio-économique », « n’est pas exclu » et « accueil possible à la maison ». Deux conceptions semblent donc s’opposer: l’une selon laquelle, le «fou» ou le «malade mental» est à isoler socialement (hospitalisation) sans trop d’espoir de guérison du fait de l’origine physique du trouble (comportement que nous dénommerons par la suite «fermeture»), et l’autre pour laquelle, le « fou » ou le « malade men- L’enquête a aussi été réalisée en Algérie, en Belgique, aux Comores, en Grèce, à Madagascar, à Maurice et en Mauritanie. Les résultats décrits dans cette présentation ne concernent que la France. Les représentations du «fou» du «malade mental», du «dépressif» et les opinions vis-à-vis des hôpitaux psychiatriques 17 sont –elles homogènes selon les populations des sites enquêtés tal » est à intégrer socialement avec espoir de guérison sans doute, du fait de l’origine non physique du trouble (comportement que nous dénommerons par la suite « ouverture »). Certains facteurs influencent ces deux conceptions. Les modalités « ne connaît pas un «fou », ou « malade mental » , « n’est jamais entré dans un hôpital psychiatrique », « pas d’autre lieu de soins que l’hôpital » ; les niveaux scolaires de « inférieurs » à « secondaire terminé » sont corrélés avec la première conception. Les modalités « un fou », « malade mental » connu (collègue, ami, voisin, proche) », « déjà entré dans un hôpital psychiatrique », « préférence pour une prise en charge hors hôpital (maison, famille, lieu de vie) », « soins par médication ou par psychothérapie », ainsi que les modalités du niveau scolaire « université » et « secondaire terminé » sont, elles corrélées avec la seconde. Concernant le « dépressif », l’origine non physique du trouble est largement admise. 2 - Les stigmatisations se différencient-elles selon les sites enquêtés? Les sites enquêtés2 , mis en variables illustratives, ont été projetés sur les plans factoriels des analyses précédentes. On constate que les sites de Villejuif, Niort, et Poitiers ont stigmatisé essentiellement le « malade mental ». Paris 14e, Roubaix, Sarreguemines, Guéret, Esquirol ont surtout stigmatisé les « fous ». Les personnes enquêtées à Rennes, seul site dans ce cas, ne stigmatisent ni le « fou », ni le « malade mental », ni le « dépressif ». Quant aux causes physiques ou non physiques des troubles, certains sites montrent des opinions plutôt affirmées : - concernant l’image du « fou » : Limoges, Thuir, Semur et Berck se distribuent dans les modalités principales décrivant la « fermeture » ; En revanche, Paris 14e, Poitiers, Bondy, Lille Est, Paris 20e, Hagueneau, Lille2, Niort, et surtout Paris 15e et 10e sont plutôt caractérisés par des opinions qui définissent « l’ouverture ». Pour les autres sites, les opinions sont très partagées. - concernant l’image du « malade mental » : on retrouve les mêmes regroupements : « fermeture/ouverture », « non connaissance/connaissance », niveaux de formation « pas de scolarité à secondaire non achevé/ secondaire achevé et universitaire ». Comme précédemment, certains sites montrent des opinions plutôt structurées : côté « fermeture »: Guéret, Thuir, Dreux, Melun, Roubaix ; côté « ouverture »: Lille Est, Niort, Poitiers, Paris 15e, et surtout Villejuif. Les opinions de la population des autres sites enquêtés sont beaucoup plus dispersées. - concernant le « dépressif » : à l’exception de la Guadeloupe et de la Martinique, tous les autres sites expriment l’opinion que la dépression n’a pas d’origine physique. Elle est guérissable hors des murs de l’hôpital psychiatrique pour la plupart des personnes enquêtées sur les sites de Villejuif, Le Havre, Paris 15e, Dreux, Nantes. On remarquera cependant que les opinions de la population des sites de Paris 10e et Paris 20e se partagent entre une origine physique et une origine non physique de la dépression. Au final, en tendance, certains sites révèlent des opinions plutôt homogènes (tant pour le « fou » , le « malade mental » ou le « dépressif ») vis à vis de ce que nous avons dénommé « l’ouverture » (origine non physique, guérissable, soins hors hôpital psychiatrique) : c’est le cas de Villejuif, Niort, Lille, Poitiers, Paris 15e, Paris 10e. 2 On constate une homogénéité opposée, en tendance, pour les sites de Berck, Thuir et Guéret. Les autres sites, fortement majoritaires, se caractérisent par des opinions très diversifiées. 3 - La stigmatisation vis-à-vis des structures se différencie-elle selon les sites ? Le spectre global des opinions de la population enquêtée vis à vis de l’hospitalisation psychiatrique, des plus favorables aux plus hostiles (avec pourcentage de la population) peut être synthétisée par le graphe 2 ci-dessous : La quantification tous sites confondus montre que 31,8% de la population (« irréductibles» + «opposants ») accepte « naturellement » les alternatives à l’hospitalisation psychiatrique. Il ne sera donc pas nécessaire de mener des campagnes d’explication importantes sur la politique de sectorisation. En revanche, elles doivent être intenses et rassurantes pour convaincre un tiers de la population (les « coopératifs »). Il n’y a pas lieu de préparer des stratégies de sensibilisation auprès des « indifférents » du fait de leur très faible effectif, stratégies en général les plus lourdes et les plus délicates à mener dans d’autres domaines d’activités [6]. Selon les sites, les opinions vis-à-vis de l’hôpital psychiatrique se répartissent de la manière suivante : En terme stratégique, ce sont les populations des sites de Limoges, Melun et Berck qui affirment les opinions les plus positives (« engagés + coopératifs »), vis-à-vis de leur hôpital psychiatrique. A l’inverse, celles de Paris 15e, Roubaix, Tourcoing et Nantes ont les opinions les plus négatives. Liste des sites : Angers, Angoulème, Arras, Berck, Bondy, Cadillac, Cherbourg, Clermont-Ferrand, Dijon, Dreux, Esquirol, Guadeloupe, Guéret, Haguenau, La Réunion, Le Havre, Lille Est, Lille 2, Limoges, Longjumeau, Lunéville, Lyon, Marseille, Martinique, Melun, Montauban, Montfavet, Montluçon, Nantes, Nice, Niort, Paris10, Paris14, Paris15, Paris20, Poitiers, Queue en Brie, Rennes, Roubaix, Sarreguemines, Semur, Thuir, Thouars, Toulouse, Tourcoing, Vallée Lys,Villejuif. 18 QUIDU F. . ESCAFFRE J.P. L’existence d’une corrélation éventuelle entre les opinions « ouverture/fermeture », « origine physique/non physique » des maladies psychiatriques, et celles vis-à-vis des structures hospitalières n’est pas confirmée. 4 - Les caractéristiques des secteurs psychiatriques inuencent-elles les opinions ? a - Caractéristiques des secteurs psychiatriques L’objectif est ici de répondre à la question : les caractéristiques des secteurs psychiatriques publics influencentelles les opinions de la population vis à vis du « fou », du « malade mental » et du « dépressif »? Pour cela, nous nous sommes appuyés sur la typologie en neuf classes des secteurs psychiatriques de J. Mousquès3 (classes dénommées par la suite « classes JM »). Les caractéristiques de ces neufs classes peuvent être résumées, selon nous, de la façon suivante (graphe 3) : Sur les 47 sites métropolitains de l’enquête CCOMS, nous en avons sélectionné 21 qui correspondent à des secteurs psychiatriques uniques. Ces sites couvrent sept classes de la typologie sur les neuf (tableau II). Notons que les deux classes manquantes (4 et 7), qui se situent donc parmi les 26 sites «intersecteurs», ont des caractéristiques proches : faible nombre d’habitants, recours moyens, pas d’activité de liaison. Elles se distinguent en revanche par le volume des moyens déployés (densité de soignants, lits et places) : les secteurs de la classe 4 ont d’importants moyens, inversement pour les secteurs de la classe 7. La classe 1 se caractérise par de vastes territoires à populations faibles, dotée de moyens importants, avec un fort recours aux soins psychiatriques mais avec une activité de liaison faible. Les sites correspondants (Montauban, Niort) se situent du côté de la stigmatisation de la « maladie mentale ». Par contre, Limoge stigmatise plutôt le « dépressif ». La classe 3 est formée par les secteurs comprenant de nombreux psychiatres et de soignants, de peu de lits hospitaliers mais de nombreuses places alternatives ; ils connaissent des recours nombreux aux soins psychiatriques. Les sites correspondants (Montfavet, Angoulême, Haguenau) se situent du côté de la stigmatisation du «fou», alors que le site de Poitiers, de la même classe, stigmatise plutôt la «maladie mentale». La classe 6 est caractérisée par un recours moyen de la population aux soins psychiatriques, des capacités en personnels et en lits de niveau intermédiaire, et des places alternatives en faible nombre. Les sites correspondants s’étalent sur l’ensemble du plan, montrant que ces caractéristiques n’influencent guère, dans ce cas, les opinions locales sur les stigmatisations. Les sites d’Esquirol et de Paris 14e se situent du côté de la stigmatisation du « fou ». Les secteurs correspondants font partie de la classe 8 : population très importante qui recourt moyennement aux soins psychiatriques, densité moyenne de psychiatres et de soignants, lits hospitaliers en nombre faible mais nombre très important de places alternatives. Les classes 2, 5 et 9 ne sont composées que d’un seul site sélectionné. On ne peut donc pas en déduire des caractéristiques générales. Ces résultats montrent qu’il ne semble pas que d’une manière générale le type de structuration des secteurs psychiatriques ait un impact sur la formation des opinions vis à vis de la stigmatisation du «fou», du «malade mental», et du «dépressif». b - spectre des opinions vis-à-vis des structures hospitalières selon la typologie des secteurs La distribution des «classes JM» de secteurs (en pourcentage arrondi de l’ensemble de la population enquêtée sur les 21 sites sélectionnés) est la suivante (tableau III): Nous avons repris la typologie des « stigmatisations » détectée par les analyses multidimensionnelles, et mis les sites avec leurs classes en variables illustratives, ce qui les positionnent sur les plans factoriels de la manière suivante (graphe 4 : plan F2-F3) : 3 Nous remercions vivement Julien Mousquès de nous avoir fourni les chiers nécessaires à notre étude. Les représentations du «fou» du «malade mental», du «dépressif» et les opinions vis-à-vis des hôpitaux psychiatriques 19 sont –elles homogènes selon les populations des sites enquêtés Sur les 21 sites enquêtés, on ne constate pas de distributions différentes des opinons par classe. Les caractéristiques des secteurs psychiatriques n’influencent donc pas la formation des opinions de la population vis à vis des prises en charge dans les hôpitaux psychiatriques. Conclusion Les images du « fou », du « malade mental » ou du « dépressif » dans la population française sont disparates. Néanmoins, quelques caractéristiques se révèlent avec une forte fréquence : le « dépressif » est plutôt vu comme une personne qui s’isole, le « malade mental » comme un individu déficient, au comportement ou au discours bizarre, tandis que le « fou » serait plutôt caractérisé par la violence (délire, violent envers les autres, bat ses proches, inceste). Le «malade mental» est parfois aussi défini par ces derniers critères. Ces images ne sont guère influencées par la connaissance d’un proche atteint d’une maladie mentale, ou par un épisode psychiatrique vécu par la personne enquêtée. Quant aux causes de la maladie mentale (le «fou» et le « malade mental »), deux tendances contradictoires se sont exprimées. Les uns considèrent qu’elle a une origine physique, et dans ce cas la guérison est difficile et la prise en charge doit être hospitalière. D’autres sont d’avis qu’elle a une origine non physique (sociale), et dans ce cas la guérison est possible, la prise en charge doit être ambulatoire. Les personnes enquêtées dans certains sites ont des opinions homogènes à cet égard : à Berk, Thuir ou Guéret, la première opinion est surtout exprimée, tandis que la tendance inverse se constate à Villejuif, Niort, Lille, Poitiers, Paris 15e, Paris 10e. En revanche, pour la dépression, la cause est, pour la quasi-totalité de la population, d’origine non physique. Globalement, 41 % des Français soutiennent les hôpitaux psychiatriques, tandis que 32 % s’y opposent préférant des solutions ambulatoires. En fait, les opinions diffèrent assez largement selon les sites d’enquête. Elles ne sont guère influencées par les images des personnes enquêtées vis-à-vis du « fou », du « malade mental » ou du « dépressif ». La façon d’organiser la sectorisation psychiatrique (prise en charge plutôt en intra-hospitalière versus extrahospitalière, nombre d’agents, etc.) n’influence ni les images du « fou », du « malade mental » ou du « dépressif » dans la population, ni les opinions vis-à-vis des structures hospitalières psychiatriques. On en déduit que ces images sont générées par d’autres facteurs, sans doute d’ordre culturels. Références [1] BELLAMY V, ROELANDT JL, CARIA A et al. L’enquête santé mentale en population générale : une enquête «pas comme les autres». Colloque francophone sur les sondages Montréal 2005. [2] BELLAMY V. Troubles mentaux et représentations de la santé mentale. Etudes et Résultats DREES octobre 2004 ; n°347. [3] ESCAFFRE JP, QUIDU F. Focalisations de la population française sur le fou, le malade mental et le dépressif, troubles et recours aux soins. Rapport d’étude au CCOMS juillet 2007. [4] ESCAFFRE JP, QUIDU F. La santé mentale en population générale: images et réalités. Analyses statistiques multidimensionnelles. Rapport général CCOMS Juin 2006. [5] QUIDU F, ESCAFFRE JP. La population Française et ses institutions psychiatriques. Journal d’Economie Médicale Octobre 2006 ; 24(6) : p297-306. [6] ESCAFFRE JP. Le contrôle de gestion des Unités de Soins Hospitalières. Economica, Paris, France ; 2008