Des usagers de cannabis vus en consultation spécialisée 229
de l’entretien clinique, puis les diagnostics sont portés
dans un deuxième temps au cours d’un entretien clinique
semi-structuré selon les critères du DSM-IV [3]. En plus du
cannabis, les substances renseignées sont :
•l’alcool ;
•les benzodiazépines et les hypnotiques ;
•l’ecstasy ;
•les psychostimulants ;
•les hallucinogènes (champignons, LSD, datura...);
•l’héroïne (les autres opiacés sont très rarement rappor-
tés) ;
•la cocaïne (le crack est également rarement rapporté) ;
•les solvants et les poppers.
Le diagnostic d’abus actuel est porté si le sujet répond
à au moins un des quatre critères d’abus définis par le DSM-
IV dans les 12 derniers mois. Le diagnostic de dépendance
actuelle est porté si le sujet répond à au moins trois des sept
critères de dépendance définis par le DSM-IV dans les 12 der-
niers mois. Bien que le DSM-IV ne propose pas de symptômes
physiologiques fiables de manque et ne reconnaît pas de syn-
drome de sevrage pour le cannabis, nous avons repris les six
principaux symptômes de manque proposés par Budney et
al. [7] :
•la perte d’appétit ou de poids ;
•l’irritabilité ;
•la nervosité ou l’anxiété ;
•la colère ou l’agressivité ;
•l’agitation ;
•les troubles du sommeil ou rêves pénibles.
Si un sujet rapporte au moins trois des six symptômes, le
critère de sevrage au cannabis a été considéré présent. L’âge
de première prise du produit et la prévalence de l’usage
sur la vie sont renseignés. L’évaluation de la consomma-
tion cannabique comprend également la quantification de
la consommation dans les six derniers mois :
•le nombre de joints quotidiens ;
•la part de haschisch (résine) et de marijuana (herbe) ;
•le nombre de grammes de cannabis hebdomadaires et
coût mensuel.
Les antécédents familiaux d’abus et de dépendance aux
substances psychoactives sont évalués par la question : «À
votre connaissance, avez-vous dans votre famille un ou plu-
sieurs apparenté(s) ayant eu au cours de sa vie un problème
d’abus ou de dépendance à l’alcool ou à une autre substance
psychoactive ? »
L’usage du cannabis est également évalué par un auto-
questionnaire de dépistage de consommation problématique
de cannabis : le Cannabis Use Disorders Identification Test
(CUDIT) [2]. Les représentations et les attentes vis-à-vis du
cannabis sont évaluées grâce au Marijuana Effect Expec-
tancy Questionnaire (48 items) [1].Ces deux échelles ont été
traduites par nos soins.
Troubles psychiatriques
L’histoire d’un suivi antérieur par un psychologue ou un psy-
chiatre avec ou sans rapport avec le cannabis est renseignée.
Les diagnostics de troubles psychiatriques dans les 12 der-
niers mois chez les usagers (troubles de l’humeur, troubles
anxieux et troubles des conduites alimentaires) sont évalués
avec le Mini-International Neuropsychiatric Interview (MINI)
(version 4.4 vie entière) [18] qui permet de porter des diag-
nostics selon le DSM-IV. Le diagnostic de schizophrénie est
porté à partir d’un entretien semi-structuré selon les cri-
tères du DSM-IV. Les patients schizophrènes sont cotés avec
la PANSS [15]. Les antécédents familiaux psychiatriques sont
évalués par la question : «À votre connaissance, avez-vous
dans votre famille un ou plusieurs apparenté(s) ayant eu au
cours de sa vie un trouble psychiatrique comme un trouble
de l’humeur, une psychose, un trouble grave de la person-
nalité, s’est suicidé ou a fait une tentative de suicide ? »
Analyses statistiques
Des analyses descriptives ont tout d’abord été réalisées
avec le calcul des pourcentages pour les variables quali-
tatives et des moyennes et écart-types pour les variables
dimensionnelles. Des tests tde comparaison de moyennes
ont ensuite été effectués pour les comparaisons entre
groupes pour les variables dimensionnelles et des tests de
Khi-2 pour les comparaisons de pourcentages. Les résultats
présentés portent sur l’ensemble des données recueillies.
Le seuil de significativité de ces tests a été fixé à p= 0,05.
Résultats
Données sociodémographiques
Les caractéristiques sociodémographiques sont présentées
dans le Tableau 1. Sur les 90 usagers, on compte 60 hommes
et 30 femmes (67 % versus 33 %). L’âge moyen des usagers
est de 27,5 ans (±8,4). Le sujet le plus jeune est âgé de
15 ans et le plus âgé de 51 ans. Les femmes sont signifi-
cativement plus âgées que les hommes (30,2 ans versus
26,2 ans ; p= 0,03). Deux tiers des personnes (63 %) sont
venus d’elle-même. Les femmes sont significativement
plus nombreuses que les hommes à faire une démarche
personnelle de soins (83 % versus 52 % ; p= 0,01). Les
usagers dont la démarche de soins est personnelle sont
significativement plus âgés que ceux dont la demande
émane d’un tiers (30,5 ans versus 22,8 ans ; p< 0,001). Il
n’y a pas d’autres différences significatives selon le sexe
(données non montrées). Le lieu de résidence est Paris pour
59 % des usagers et pour le reste les autres départements
d’Île-de-France. Plus de la moitié des usagers (59 %) sont
célibataires ou divorcés et seuls 14 % ont des enfants. Les
parents sont séparés ou ont divorcé chez environ la moitié
(47 %) des usagers. Le niveau scolaire atteint est :
•le bac ou des études supérieures (46 %) ;
•un CAP ou BEP (13 %) ;
•14 % des usagers n’ont pas validé les études secondaires ;
•27 % sont étudiants.