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Que peut-on attendre de la molécule « anti-cannabis »?
Des chercheurs français de l’Inserm ont annoncé la découverte d’une molécule qui constituerait une défense naturelle contre le
cannabis. Un premier pas vers le traitement de la dépendance.
Anthony Bolante / REUTERS
Pr. Jean-Michel Delile, directeur du comité d’études et d’informations sur la drogue et les addictions de
Bordeaux, vice-président de la Fédération addictions:
« Les professeurs Piazza et Marsicano ont découvert une molécule qui peut neutraliser le principe actif du cannabis dans
notre cerveau. Leurs équipes de Bordeaux travaillent depuis une dizaine d’années sur les hormones stéroïdiennes et
leurs fonctions au niveau cérébral. On les savait très impliquées dans le processus d’addiction. Mais ce qu’ils ont
découvert à propos de l’une d’elles, la prégnénolone, est tout à fait sidérant: sa production augmente de 3 000 % lorsqu’il
y a consommation de cannabis.
Une telle augmentation laissait supposer que cette molécule jouait un rôle plus important que prévu dans le mécanisme
de défense contre cette substance. Et en effet, les chercheurs ont constaté qu’en injectant cette hormone sur des souris,
. C’est la notion de « rétrocontrôle négatif »: le principe actif de laon arrive à bloquer les effets néfastes du cannabis
drogue déclenche la production de prégnénolone qui, au-delà d’une certaine proportion, à son tour inhibe les effets du
principe actif. Concrètement, la prégnénolone en forte quantité diminue la libération de dopamine au niveau cérébral, qui
est à l’origine des effets addictifs.
Une découverte inédite
Cette découverte est inédite pour le cannabis. Et c’est en cela qu’elle est remarquable. Car on connaissait déjà des
molécules qui agissent de cette façon pour d’autres drogues. Sur l’héroïne par exemple, il y a des produits qui agissent à
la fois sur la dépendance à la drogue et sur ses effets secondaires (troubles de la mémoire, démotivation…) On peut donc
supposer, par analogie, que la prégnénolone a ce même double effet contre le cannabis, auquel cas cela ouvre des
perspectives pour une application thérapeutique.
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Les chercheurs entrent désormais dans une deuxième phase qui consiste à adapter à l’homme ce qui fonctionne sur des
souris: développement d’un médicament et application clinique, financement par l’industrie pharmaceutique, autorisation
par les pouvoirs publics… C’est un long cheminement qui prendra plusieurs années. Le professeur Piazza est un peu
optimiste de citer 2017!
Quoi qu’il en soit, c’est une grande avancée dans la compréhension de la dépendance au cannabis. D’un point de vue
strictement éthique, on ne peut que saluer cette découverte. Lorsque ce traitement existera, il servira à soigner la
dépendance. Et il est peu probable qu’il encourage des gens comme vous et moi à prendre du cannabis par simple plaisir,
au prétexte que le risque est moindre. Ce même débat s’était posé dans les années 1980 lorsqu’on a libéralisé la vente
de seringues: les avoir en libre-service n’a pas fait augmenter le nombre de toxicomanes, mais cela en a sauvé certains
qui se seraient contaminés avec du matériel usagé. En somme, ce n’est pas parce qu’on dit aux gens qu’il y a une bouée
de sauvetage qu’ils se jettent à l’eau. »
RECUEILLI PAR FLORIS BRESSY
http://www.la-croix.com/Ethique/Medecine/Que-peut-on-attendre-de-la-molecule-anti-cannabis-2014-01-10-1087547
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