Avancées et recherches REVUE DE PRESSE Mémoire de soi, mémoire

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L’Encéphale (2008) 34, 544-549
REVUE DE PRESSE
Chefs de rubrique : D. Gourion
Ph. Gorwood
Avancées et recherches
D. Gourion (1)
Mémoire de soi, mémoire
des autres : une perspective
neurocognitive
de la schizophrénie
Self and Other in Schizophrenia : A Cognitive Neuroscience Perspective.
Melissa Fisher, Ph.D., Kelly McCoy, M.A.,
John H. Poole, Ph.D., and Sophia Vinogradov, M.D.
Am J Psychiatry 2008 ; 165 : 1465-1472.
cessus sont associés et conjointement
altérés dans la schizophrénie.
MÉTHODE
91 patients schizophrènes et 30 sujets
sains ont été évalués sur la base de mesures de la cognition sociale et de la mémoire
(la source des mots préalablement appris
était de trois ordres : auto-générés, présentés de façon externe, nouveaux mots).
RÉSULTATS
Les patients schizophrènes présentaient des capacités mnésiques moindres
pour les mots auto-générés (mémoire
auto-référentielle) par comparaison aux
sujets sains, alors que leur mémoire basée
sur une source externe (mots présentés)
était comparable à celle des sujets sains.
Dans les deux groupes de sujets,
schizophrènes et sains, on retrouvait une
corrélation forte entre mémoire autoréférentielle et cognition sociale.
L’hypothèse d’un trouble du système
neurocognitif qui sous-tend la mémoire
auto-référentielle et la cognition sociale
fournit un modèle simple permettant de
rendre compte de symptômes cliniques
liés à la perte du sens de l’identité.
COMMENTAIRE
Ce qui semble intéressant et pertinent
dans cette étude, c’est l’idée qu’un soustype spécifique de mémoire, plus exactement une forme particulière de mémoire,
dite auto-référentielle, pourrait s’avérer
spécifiquement impliquée dans la détermination d’une part du profil neurocognitif
des patients schizophrènes. Il ne s’agit
donc pas d’une étude « catalogue » énumérant la longue liste de déficits cognitifs
que l’on identifie grâce aux batteries habituelles, mais d’une tentative de modélisation fine. La mémoire auto-référentielle,
dont les auteurs montrent ici qu’elle est
fortement liée à la cognition sociale, est
sous-tendue par une structure cérébrale
précédemment localisée en fMRI : le cortex préfrontal médial.
INTRODUCTION
Les neurosciences cognitives offrent
aujourd’hui plusieurs modèles de schizophrénie. Parmi les processus neurocognitifs suspectés dans la schizophrénie,
la conscience de soi (plus précisément,
les processus auto-référentiels) et la
cognition sociale sont d’un intérêt particulier car ils dépendent des mêmes circuits neuronaux.
Les auteurs ont évalué la mémoire
auto-référentielle et la cognition sociale
dans un vaste échantillon de patients
schizophrènes comparés à des sujets
sains, de façon à comparer si ces pro(1) CH Sainte-Anne, Paris.
Évolution temporelle du volume
cérébral chez le schizophrène :
une étude de jumeaux
monozygotes discordants
CONCLUSIONS
Les troubles de la mémoire auto-référentielle représentent un déficit cognitif
spécifique de la schizophrénie. De plus,
la corrélation entre ce type particulier de
mémoire et la cognition sociale s’observe
mais de façon moins marquée dans la
schizophrénie, probablement du fait du
déficit cognitif général.
Heritability of Changes in Brain Volume
Over Time in Twin Pairs Discordant for Schizophrenia.
Rachel G. H. Brans, MS ; Neeltje E. M. van
Haren, PhD ; G. Caroline M. van Baal, PhD ;
Hugo G. Schnack, PhD ; René S. Kahn,
MD, PhD ; Hilleke E. Hulshoff Pol, PhD.
Arch Gen Psychiatry. 2008 ; 65 (11) : 12591268.
Revue de presse
545
teurs génétiques liés à la maladie. Cette
contribution génétique semble non négligeable.
COMMENTAIRE
CONTEXTE
Certaines anomalies cérébrales structurales identifiées dans la schizophrénie
sont également retrouvées chez certains
apparentés sains à risque pour la maladie.
Il semble par ailleurs que la diminution de
volume cérébral observée dans la maladie soit lentement progressive au cours
de l’évolution de celle-ci. Mais on ignore
dans quelle mesure cette atrophie cérébrale progressive est liée totalement ou
partiellement au support génétique de la
maladie et/ou aux facteurs liés ou secondaires à la maladie elle-même.
La façon la plus élégante de répondre à
cette question est de réaliser une étude
de jumeaux monozygotes discordants
pour la maladie. Le jumeau sain ayant un
patrimoine génétique identique à son
jumeau malade, on peut ainsi isoler l’effet
intrinsèque du processus maladie par
soustraction de l’effet purement lié au
« background » génétique. L’atrophie liée
à la maladie elle-même, et non au support
génétique de celle-ci, pourrait s’avérer
médié par la toxicité neuronale directe
du processus physiopathologique, par
l’exposition aux neuroleptiques, et/ou par
la diminution du niveau de stimulation
affective et socio-professionnelle des
sujets souffrant de la maladie.
À la redécouverte
de la personnalité narcissique :
sous-types et comorbidités
MÉTHODE
Il s’agit d’une partie d’une étude longitudinale réalisée à Utrecht et portant sur le
suivi sur 5 ans de jumeaux monozygotes et
dizygotes discordants pour la schizophrénie, et de sujets sains, en utilisant l’imagerie
cérébrale par résonance magnétique. Un
total de 92 sujets a complété l’étude, dont
9 paires de jumeaux monozygotes et
10 paires de dizygotes discordants pour la
schizophrénie.
RÉSULTATS
Les patients schizophrènes et leur
jumeau monozygote sain présentaient
une diminution globale de volume cérébral par comparaison aux paires de
jumeaux sains. Une modélisation par
équations structurelles montrait une
influence génétique additive significative
sur cette diminution de volume cérébrale,
de l’ordre de 60-70 %.
CONCLUSION
La diminution progressive de volume
cérébral trouvée chez les patients schizophrènes et leurs jumeaux sains est au
moins partiellement attribuable aux fac-
Refining the Construct of Narcissistic Personality Disorder : Diagnostic Criteria and
Subtypes.
Eric Russ, M.A., Jonathan Shedler, Ph.D.,
Rebekah Bradley, Ph.D., and Drew Westen, Ph.D.
Am J Psychiatry 2008 ; 165 : 1473-1481.
CONTEXTE
En dépit de sa sévérité et de sa remarquable stabilité diagnostique, la personnalité narcissique fait l’objet de bien peu
d’études récentes. L’objectif de cette
étude était d’identifier les critères les plus
distinctifs de cette personnalité et d’en
identifier les sous-types et leurs comorbidités respectives.
La littérature récente suggère qu’il
existe deux grands sous-types de personnalité narcissique : grandiose et vul-
nérable. Le narcissique grandiose est
arrogant, envieux, manipulateur, tandis
que le vulnérable est inhibé, modeste
bien qu’habité intérieurement de grandes
espérances de réussite.
MÉTHODE
Dans cette étude, les auteurs ont utilisé plusieurs outils, une check-list des
critères de l’axe II du DSM-IV, ainsi que
le Shedler-Westen Assessment Procedure-II (SWAP-II).
L’objectif était d’identifier l’agrégation
de critères la plus pertinente en termes
de sensibilité et de spécificité. Par exemple, le manque d’empathie est l’un des
critères centraux de la personnalité narcissique, mais il manque de spécificité,
puisqu’on le retrouve dans presque tous
les types de personnalité pathologique.
Les auteurs ont contacté un échantillon national représentatif de psychiatres
et psychologues tirés au sort membres de
l’APA et ont ainsi recueilli des données sur
la personnalité de 1 201 patients suivis
par ces praticiens, dont 255 répondant
aux critères de personnalité narcissique.
RÉSULTATS
Un résultat clé correspond à la
notion de vulnérabilité interpersonnelle
sous tendue par une dimension d’instabilité émotionnelle. Le narcissique
typique tend à être hypersensible au
rejet et à l’abandon, à se sentir mal compris, mal traité, et à se victimiser ; il surréagit face à la moindre critique qui le
rend déprimé, inquiet, malheureux. Les
autres critères principaux sont la colère
et l’hostilité, la difficulté à réguler les
émotions, la compétition interpersonnelle. Ces critères ne font pas partie de
la description du DSM.
Une analyse spécifique (Q-factor)
parvenait à identifier trois sous-types
congruents de personnalité narcissique :
grandiose/agressif, fragile/défensif, de
haut niveau de fonctionnement/ostentatoire. Ces derniers recherchent à attirer
l’attention en permanence, sont dans la
compétition, la provocation ou la séduction sexuelle, et ont un certain nombre
d’« atouts » psychologiques (énergiques, habiles socialement, réussite
sociale élevée, brillants, etc.).
Le sous-type grandiose est particulièrement comorbide d’un autre trouble
de la personnalité : paranoïaque (67 %).
Le narcissique fragile souffre plus fré-
546
D. Gourion
quemment de dépression (comorbidité :
57 %), de troubles anxieux et de personnalité évitante. Le narcissique de haut
niveau est celui qui présente le moins de
comorbidités.
Composite Descriptions of Narcissistic Personality Disorder, Based on Raw or Standardized SWAP-II Scores
and Diagnoses According to an Axis II Checklist or Personality Disorder Construct Ratingsa
Basis and Diagnostic Method Used
SWAP II Item
Raw Scores
Axis II
Checklist
Standardized Scores
Construct
Ratings
Axis II
Checklist
1
Construct
Ratings
Has an exaggerated sense of self-importance (e.g., feels special, superior, grand, or envied)
3
1
1
Appears to feel privileged and entitled ; expects preferential treatment
8
2
3
3
Tends to be critical of others
2
4
15
18
Tends to get into power struggles
7
5
19
20
Tends to blame own failures or shortcomings on other people or circumstances ; attributes
his or her difficulties to external factors rather than accepting responsibility for own
conduct or choices
9
10
13
17
Tends to be controlling
11
11
16
12
Tends to be manipulative
17
16
12
19
Tends to be dismissive, haughty, or arrogant
26
18
2
5
Has little empathy ; seems unable or unwilling to understand or respond to other’s needs
or feelings
22
12
9
9
Seeks to be the center of attention
30
21
8
10
Tends to be competitive with others (whether consciously or unconsciously)
12
9
23
13
Tends to be angry or hostile (whether consciously or unconsciously)
1
3
31
25
Is articulate ; can express self well in words
6
6
116
123
Tends to have extreme reactions to perceived slights or criticism (e.g., may react with rage,
humiliation, etc.)
5
7
29
28
Tends to feel misunderstood, mistreated, or victimized
4
8
59
69
Tends to hold grudges ; may dwell on insults or slights for long periods
16
14
39
38
Tends to fear he or she will be rejected or abandoned
14
17
160
165
Tends to feel unhappy, depressed, or despondent
10
15
173
187
Lacks close friendships and relationships
20
13
90
70
Emotions tend to spiral out of control, leading to extremes of anxiety, rage, etc.
13
22
74
109
When upset, has trouble perceiving both positive and negative qualites in the same person
at the same time (e.g., may see others in black or white terms, shift suddenly from seeing
someone as caring to seeing him or her as malevolent and intentionally hurtful, etc.)
15
19
45
52
Tends to feel anxious
18
20
183
185
Seems to treat others primarily as an audience to witness own importance, brilliance, beauty, etc.
44
31
4
2
Tends to believe he or she can only be appreciated by, or should only associate with, people
who are high status, superior, or otherwise “special”
51
33
5
4
Has fantasies of unlimited success, power, beauty, talent, brilliance, etc.
37
28
6
6
Takes advantage of others ; has little investment in moral values (e.g., puts own needs first,
uses or exploits people with little regard for their feelings or welfare, etc.)
43
32
7
8
11
Experiences little or no remorse for harm or injury caused to others
72
49
11
Tends to seek power or influence over others (whether in beneficial or destructive ways)
36
23
10
7
Tends to elicit dislike or animosity in others
42
40
18
14
118
106
22
15
46
41
20
16
121
127
14
24
31
43
17
35
Attempts to dominate a significant other (e.g., spouse, lover, family member) through
violence or intimidation
Tends to be emotionally intrusive (e.g., may not respect other people’s needs for autonomy,
privacy, etc.)
Tends to show reckless disregard for the rights, property, or safety of others
Tends to be oppositional, contrary, or quick to disagree
a. SWAP-II = Shedler-Westen Assessment Procedure-II. Values in the table reflect the rank order of the SWAP-II item means (Ns ranged from 122 to 255).
Items in the unshaded top third of the table are highly characteristic and highly distinctive of narcissistic personnality disorder. Items in the shaded region
in the middle third of the table are highly descriptive of the disorder but not specific to it. Items in the shaded region in the bottom third of the table are
specific to the disorder but not necessarily characteristic of it.
Revue de presse
547
Clinique et thérapeutique
Ph. Gorwood (1)
Nouvel épisode dans la guerre
froide entre antipsychotiques
et neuroleptiques
Double-Blind Comparison of First- and
Second-Generation Antipsychotics in EarlyOnset Schizophrenia and Schizo-affective
Disorder : Findings From the Treatment of
Early-Onset Schizophrenia Spectrum Disorders (TEOSS) Study.
Am J Psychiatry. 2008 Nov ; 165 (11) :
1420-31.
Sikich L, Frazier JA, McClellan J, Findling
RL, Vitiello B, Ritz L, Ambler D, Puglia M,
Maloney AE, Michael E, De Jong S,
Slifka K, Noyes N, Hlastala S, Pierson L,
McNamara NK, Delporto-Bedoya D,
Anderson R, Hamer RM, Lieberman JA.
CONTEXTE
Les mega-trials se sont déversées
dans la littérature mondiale ces dernières
années. Le début remonte à l’étude
CATIE (plus de 1 000 schizophrènes
randomisés, mais sans aveugle, pour le
traitement, et suivis pendant plusieurs
mois) qui a permis à Lieberman de montrer que les neuroleptiques conventionnels n’étaient pas à mettre à la poubelle.
Cette étude, largement critiquée, a donc
suscité, entre autres, la Britannique
CUTLASS et l’Européenne l’EUFEST.
Cette dernière avait particulièrement
remis en cause les résultats de l’étude
CATIE, montrant que si l’Haldol est le
(1) Hôpital Louis Mourier, Colombes.
comparateur, et que les sujets sont au
début de leur maladie, alors les bénéfices
des nouveaux traitements étaient bien
plus nets. Lieberman revient à la charge
pour un nouvel épisode de la saga, portant cette fois chez l’enfant…
MÉTHODE
Puisque la précocité de la maladie est
si importante, l’étude porte cette fois sur
des sujets qui entrent dans un premier
épisode, traités par Olanzapine (en
moyenne 11 mg), Risperidone (en
moyenne 3 mg) ou Molindone (Moban,
en moyenne 60 mg), neuroleptique
n’ayant pas l’AMM en France.
La Molindone est un produit indolique, donc de la famille du Sertindol et de
la Ziprazidone. Ce traitement a surtout la
particularité de ne pas induire de prise de
poids, ce qui explique probablement ce
choix comme comparateur.
Le recrutement porte cette fois sur
des enfants, de 8 à 19 ans, mais ayant
clairement un diagnostic de schizophrénie (précoce), schizo-affectif ou de trouble schizophréniforme. Après avoir analysé 200 sujets incluables, trois groupes
de 40 ont été constitués.
RÉSULTATS
Si l’on garde la philosophie CATIE (le
fait que les patients restent sous le
même traitement serait le meilleur
garant de leur efficacité), pas de grande
différence après 6 semaines, mais plutôt en défaveur de l’Olanzapine (50 %
d’interruption).
Si l’on prend la mesure plus conventionnelle de la réponse au traitement
(baisse de 20 % de la PANSS), la palme
revient à… la Molindone (50 % de
réponse), puis au Risperdal (46 %) puis
à l’Olanzapine (34 %), ces différences
n’étant pas significatives. La tolérance
extra-pyramidale, était, sans surprise,
meilleure pour l’Olanzapine et pire pour
la Molindone, mais, probablement du fait
de la co-prescription possible de correcteurs et du faible effectif global, sans différence significative pour l’apparition de
symptômes extra-pyramidaux. Le poids,
ainsi que les changements métaboliques, étaient par contre préservés avec
ce dernier traitement (et non avec les
deux autres).
CONCLUSIONS
La Molindone est à peu près aussi
bien tolérée au niveau extra-pyramidal
(en partie grâce aux correcteurs), mais
mieux au niveau métabolique et du poids,
et aurait plutôt une efficacité supérieure… Donc un point de plus pour Lieberman, avec une jolie parade contre
l’étude EUFEST qui concluait que les
résultats de CATIE étaient faux pour les
premiers épisodes. Lieberman peut
maintenant répondre non, c’est aussi vrai
pour les premiers épisodes… chez les
sujets jeunes.
548
COMMENTAIRE
Nouvel épisode du « c’était mieux avant »
de Lieberman, cette fois avec des enfants
souffrant de schizophrénie. Lieberman a
la grande particularité de tester des neuroleptiques conventionnels… bien atypiques. Celui-ci, n’ayant pas non plus l’indication en France, se démarque par une
bonne tolérance générale. À nouveau il
n’est pas très fair-play de ne pas utiliser
l’Haloperidol comme comparateur, bien
plus utilisé partout dans le monde. Mais
à nouveau, ce type de résultat n’est certainement pas inutile, montrant si besoin
il y a, que du chemin reste à parcourir
avant de considérer que les antipsychotiques ont été révolutionnés.
P. Gorwood
Quetiapine), et peut être même thymorégulateur. Le gain exact que l’on peut
attendre à rajouter un antipsychotique
pour des phases maniaques résistantes
à un thymorégulateur est analysé ici.
traitement. Point important, on n’observe
pas de prise de poids différente dans les
deux bras sur cette courte période.
MÉTHODE
La moitié des patients était sous
Lithium, l’autre moitié sous Valproate
pour un épisode maniaque ou mixte. Les
400 sujets recrutés étaient alors suivis
pendant 2 semaines pour vérifier
l’absence de réponse satisfaisante
(YMRS > 16), et que les dosages sanguins ont bien été dans les fourchettes
thérapeutiques. La cohorte est ensuite
randomisée, pour les 2/3 à l’Ariprazol, et
pour 1/3 au placebo. L’effet final est
observé après 6 semaines de traitement.
L’Ariprazol possède
une efficacité démontrée chez
les bipolaires en phase
maniaque, non répondeurs
aux thymorégulateurs
CONCLUSIONS
Seuls 7 patients doivent être traités
(number needed to treat = 7) pour que
l’on puisse dire que l’un d’entre eux
bénéficie clairement de l’Aripripazol et
non du placebo, ce qui est un résultat plutôt puissant. En dehors de l’akatisie, le
traitement est bien toléré. L’Aripiprazol se
révèle donc bien un traitement intéressant dans le trouble bipolaire, et s’inscrit
bien dans l’habitus actuel des cliniciens
qui associent volontiers aux thymorégulateurs (s’ils sont insuffisants) des antipsychotiques.
COMMENTAIRE
RÉSULTATS
Efficacy of adjunctive aripiprazole to either
valproate or lithium in bipolar mania patients
partially nonresponsive to valproate/lithium
monotherapy : a placebo-controlled study.
Am J Psychiatry. 2008 Oct ; 165 (10) :
1316-25.
Vieta E, T’joen C, McQuade RD, Carson
WH Jr, Marcus RN, Sanchez R, Owen R,
Nameche L.
CONTEXTE
L’utilisation exclusive des thymorégulateurs dans les troubles bipolaires est
souhaitée, mais rarement observée. Les
antipsychotiques sont souvent associés,
du fait de leur effet antimaniaque fréquent,
voire antidépresseur (comme pour la
Comme souvent dans ce type
d’étude, le placebo semble un excellent
traitement… 10 points de gagner sur la
YMRS n’est pas négligeable, d’où
l’importance de ne pas oublier qu’en
matière de trouble bipolaire, il faut savoir
laisser le temps au temps. Malgré cet
effet important, l’Aripirazol apporte un
plus qui se manifeste dès la première
semaine et qui perdure en augmentant
durant les 6 semaines du suivi. L’amélioration du score global se traduit logiquement en plus de réponse (63 % versus
48 %) et plus de rémission (66 % versus
51 %). Cette efficacité ne s’obtient pas
au dépends de problème majeur au
niveau tolérance, puisque le nombre de
sorties d’essai est à peu près comparable dans les deux groupes. On notera
tout de même plus d’effets indésirables
de type akatisie dans le groupe sous Aripirazol (19 % versus 5 % sous placebo)
dont il est important de faire part au
patient avant l’instauration de ce type de
Un autre antipsychotique est donc disponible dans le traitement de la phase
maniaque des troubles bipolaires. La
question se posera, si elle ne l’est déjà,
de savoir quand l’arrêter. La conservation
des antipsychotiques à distance de l’épisode maniaque se révèle en effet peut être
bénéfique au long terme, s’éloignant
d’effets antimaniaques pour se rapprocher d’effets thymorégulateurs. Le fait
qu’en 6 semaines seulement les sujets
sous Aripiprazol aient deux fois moins
d’émergence dépressive que sous placebo est plutôt en faveur. Ces effets sont
cependant nettement plus complexes à
démontrer…
Un antagoniste des récepteurs
opioïdes delta prometteur
dans le traitement de l’alcoolodépendance sur un modèle
de rat
A Novel Delta Opioid Receptor Antagonist,
SoRI-9409, Produces a Selective and
Long-Lasting Decrease in Ethanol Consumption in Heavy-Drinking Rats.
Revue de presse
Biol Psychiatry. 2008 Dec ; 64 (11) : 974981.
Nielsen CK, Simms JA, Pierson HB, Li R,
Saini SK, Ananthan S, Bartlett SE.
549
bien plus de l’homme, et requiert un
temps d’apprentissage et d’habituation
avant une consommation importante
d’alcool contrairement aux souris équivalentes. Les animaux ont le choix entre
deux récipients, avec alcool (10 % ou
20 %) ou sucrose, en les alternant pour
qu’il y est au moins une consommation
initiale. L’antagoniste des δ (4 doses) est
comparé à la Naltrexone (μ) et à la
Naltrindol (δ).
RÉSULTATS
Naltrindol. De manière intéressante, cet
effet n’est retrouvé que chez le rat fort
consommateur d’alcool. L’effet apparaît
dès 24 heures de traitement, se maintient pendant les 28 jours d’essai, et
semble même être relativement pérenne,
puisque la consommation d’alcool ne
revient pas au niveau initial après l’interruption du traitement. L’effet spécifique
sur les récepteurs delta a pu être clairement montré par des études de binding,
et l’effet général sur la réduction de la
consommation concernait les deux types
de consommation, modérée (10 %)
comme majeure (20 %), en exposition
continue comme épisodique.
CONCLUSIONS
Le nouvel antagoniste des récepteurs
delta, dont l’affinité est bien plus importante que pour les précédents, semble
avoir un effet robuste et puissant sur la
consommation d’alcool, faible comme
forte, continue comme itérative, et immédiate comme différée. Il manque des études chez l’homme, de l’effet bien sûr,
mais d’abord de la tolérance.
CONTEXTE
La Naltrexone est l’un des deux traitements d’aide au maintien de l’abstinence chez des sujets alcoolo-dépendants, avec un effet démontré, mais
modeste, n’ayant d’effet que dans une
sous-population (voire étude COMBINE)
et associé parfois à une mauvaise tolérance. L’idée des récepteurs opioïdes
doit être bonne (effet démontré), mais
reste frustrante… L’équipe de Bartlett à
San Francisco s’est penchée sur le problème en testant une molécule dérivée de
la Naltrexone qui devient un puissant
antagoniste des récepteurs Delta (δ),
bien plus que l’antagoniste disponible
(Naltrindol), et perd sa spécificité pour les
récepteurs Mu (μ).
MÉTHODE
Les rats utilisés pour les analyses sont
les Long-Evans, classiques pour les études sur la consommation d’alcool. Le rat
est un modèle bien plus pertinent que
celui de la souris pour tout ce qui concerne le comportement. Le rat a en effet
un peu de préfrontal, ce qui le rapproche
COMMENTAIRE
Le nouvel antagoniste des récepteurs
delta est trois fois plus efficace pour
réduire la consommation d’alcool de ces
rats vulnérables, autant par rapport à la
Naltrexone, que par rapport à l’ancien
L’utilisation du modèle animal est toujours
utile, efficace et porteur de nouveauté,
mais il est aussi souvent bien difficile de
prédire la juste applicabilité chez l’homme
des résultats retrouvés. Plusieurs faits
sont ici rassurants, de l’effet retrouvé de
la Naltrexone (qui sert de comparateur) à
la stabilité des résultats selon les modèles
utilisés. Il est clair que l’attente est forte,
vue la rareté des traitements dans
l’alcoolo-dépendance, et il semble qu’il
existe ici une piste bien intéressante, à
côté de la quelle sont passées les études
précédentes pour des raisons d’affinité
insuffisante des molécules testées.
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