L’Encéphale (2008) 34, 544-549 REVUE DE PRESSE Chefs de rubrique : D. Gourion Ph. Gorwood Avancées et recherches D. Gourion (1) Mémoire de soi, mémoire des autres : une perspective neurocognitive de la schizophrénie Self and Other in Schizophrenia : A Cognitive Neuroscience Perspective. Melissa Fisher, Ph.D., Kelly McCoy, M.A., John H. Poole, Ph.D., and Sophia Vinogradov, M.D. Am J Psychiatry 2008 ; 165 : 1465-1472. cessus sont associés et conjointement altérés dans la schizophrénie. MÉTHODE 91 patients schizophrènes et 30 sujets sains ont été évalués sur la base de mesures de la cognition sociale et de la mémoire (la source des mots préalablement appris était de trois ordres : auto-générés, présentés de façon externe, nouveaux mots). RÉSULTATS Les patients schizophrènes présentaient des capacités mnésiques moindres pour les mots auto-générés (mémoire auto-référentielle) par comparaison aux sujets sains, alors que leur mémoire basée sur une source externe (mots présentés) était comparable à celle des sujets sains. Dans les deux groupes de sujets, schizophrènes et sains, on retrouvait une corrélation forte entre mémoire autoréférentielle et cognition sociale. L’hypothèse d’un trouble du système neurocognitif qui sous-tend la mémoire auto-référentielle et la cognition sociale fournit un modèle simple permettant de rendre compte de symptômes cliniques liés à la perte du sens de l’identité. COMMENTAIRE Ce qui semble intéressant et pertinent dans cette étude, c’est l’idée qu’un soustype spécifique de mémoire, plus exactement une forme particulière de mémoire, dite auto-référentielle, pourrait s’avérer spécifiquement impliquée dans la détermination d’une part du profil neurocognitif des patients schizophrènes. Il ne s’agit donc pas d’une étude « catalogue » énumérant la longue liste de déficits cognitifs que l’on identifie grâce aux batteries habituelles, mais d’une tentative de modélisation fine. La mémoire auto-référentielle, dont les auteurs montrent ici qu’elle est fortement liée à la cognition sociale, est sous-tendue par une structure cérébrale précédemment localisée en fMRI : le cortex préfrontal médial. INTRODUCTION Les neurosciences cognitives offrent aujourd’hui plusieurs modèles de schizophrénie. Parmi les processus neurocognitifs suspectés dans la schizophrénie, la conscience de soi (plus précisément, les processus auto-référentiels) et la cognition sociale sont d’un intérêt particulier car ils dépendent des mêmes circuits neuronaux. Les auteurs ont évalué la mémoire auto-référentielle et la cognition sociale dans un vaste échantillon de patients schizophrènes comparés à des sujets sains, de façon à comparer si ces pro(1) CH Sainte-Anne, Paris. Évolution temporelle du volume cérébral chez le schizophrène : une étude de jumeaux monozygotes discordants CONCLUSIONS Les troubles de la mémoire auto-référentielle représentent un déficit cognitif spécifique de la schizophrénie. De plus, la corrélation entre ce type particulier de mémoire et la cognition sociale s’observe mais de façon moins marquée dans la schizophrénie, probablement du fait du déficit cognitif général. Heritability of Changes in Brain Volume Over Time in Twin Pairs Discordant for Schizophrenia. Rachel G. H. Brans, MS ; Neeltje E. M. van Haren, PhD ; G. Caroline M. van Baal, PhD ; Hugo G. Schnack, PhD ; René S. Kahn, MD, PhD ; Hilleke E. Hulshoff Pol, PhD. Arch Gen Psychiatry. 2008 ; 65 (11) : 12591268. Revue de presse 545 teurs génétiques liés à la maladie. Cette contribution génétique semble non négligeable. COMMENTAIRE CONTEXTE Certaines anomalies cérébrales structurales identifiées dans la schizophrénie sont également retrouvées chez certains apparentés sains à risque pour la maladie. Il semble par ailleurs que la diminution de volume cérébral observée dans la maladie soit lentement progressive au cours de l’évolution de celle-ci. Mais on ignore dans quelle mesure cette atrophie cérébrale progressive est liée totalement ou partiellement au support génétique de la maladie et/ou aux facteurs liés ou secondaires à la maladie elle-même. La façon la plus élégante de répondre à cette question est de réaliser une étude de jumeaux monozygotes discordants pour la maladie. Le jumeau sain ayant un patrimoine génétique identique à son jumeau malade, on peut ainsi isoler l’effet intrinsèque du processus maladie par soustraction de l’effet purement lié au « background » génétique. L’atrophie liée à la maladie elle-même, et non au support génétique de celle-ci, pourrait s’avérer médié par la toxicité neuronale directe du processus physiopathologique, par l’exposition aux neuroleptiques, et/ou par la diminution du niveau de stimulation affective et socio-professionnelle des sujets souffrant de la maladie. À la redécouverte de la personnalité narcissique : sous-types et comorbidités MÉTHODE Il s’agit d’une partie d’une étude longitudinale réalisée à Utrecht et portant sur le suivi sur 5 ans de jumeaux monozygotes et dizygotes discordants pour la schizophrénie, et de sujets sains, en utilisant l’imagerie cérébrale par résonance magnétique. Un total de 92 sujets a complété l’étude, dont 9 paires de jumeaux monozygotes et 10 paires de dizygotes discordants pour la schizophrénie. RÉSULTATS Les patients schizophrènes et leur jumeau monozygote sain présentaient une diminution globale de volume cérébral par comparaison aux paires de jumeaux sains. Une modélisation par équations structurelles montrait une influence génétique additive significative sur cette diminution de volume cérébrale, de l’ordre de 60-70 %. CONCLUSION La diminution progressive de volume cérébral trouvée chez les patients schizophrènes et leurs jumeaux sains est au moins partiellement attribuable aux fac- Refining the Construct of Narcissistic Personality Disorder : Diagnostic Criteria and Subtypes. Eric Russ, M.A., Jonathan Shedler, Ph.D., Rebekah Bradley, Ph.D., and Drew Westen, Ph.D. Am J Psychiatry 2008 ; 165 : 1473-1481. CONTEXTE En dépit de sa sévérité et de sa remarquable stabilité diagnostique, la personnalité narcissique fait l’objet de bien peu d’études récentes. L’objectif de cette étude était d’identifier les critères les plus distinctifs de cette personnalité et d’en identifier les sous-types et leurs comorbidités respectives. La littérature récente suggère qu’il existe deux grands sous-types de personnalité narcissique : grandiose et vul- nérable. Le narcissique grandiose est arrogant, envieux, manipulateur, tandis que le vulnérable est inhibé, modeste bien qu’habité intérieurement de grandes espérances de réussite. MÉTHODE Dans cette étude, les auteurs ont utilisé plusieurs outils, une check-list des critères de l’axe II du DSM-IV, ainsi que le Shedler-Westen Assessment Procedure-II (SWAP-II). L’objectif était d’identifier l’agrégation de critères la plus pertinente en termes de sensibilité et de spécificité. Par exemple, le manque d’empathie est l’un des critères centraux de la personnalité narcissique, mais il manque de spécificité, puisqu’on le retrouve dans presque tous les types de personnalité pathologique. Les auteurs ont contacté un échantillon national représentatif de psychiatres et psychologues tirés au sort membres de l’APA et ont ainsi recueilli des données sur la personnalité de 1 201 patients suivis par ces praticiens, dont 255 répondant aux critères de personnalité narcissique. RÉSULTATS Un résultat clé correspond à la notion de vulnérabilité interpersonnelle sous tendue par une dimension d’instabilité émotionnelle. Le narcissique typique tend à être hypersensible au rejet et à l’abandon, à se sentir mal compris, mal traité, et à se victimiser ; il surréagit face à la moindre critique qui le rend déprimé, inquiet, malheureux. Les autres critères principaux sont la colère et l’hostilité, la difficulté à réguler les émotions, la compétition interpersonnelle. Ces critères ne font pas partie de la description du DSM. Une analyse spécifique (Q-factor) parvenait à identifier trois sous-types congruents de personnalité narcissique : grandiose/agressif, fragile/défensif, de haut niveau de fonctionnement/ostentatoire. Ces derniers recherchent à attirer l’attention en permanence, sont dans la compétition, la provocation ou la séduction sexuelle, et ont un certain nombre d’« atouts » psychologiques (énergiques, habiles socialement, réussite sociale élevée, brillants, etc.). Le sous-type grandiose est particulièrement comorbide d’un autre trouble de la personnalité : paranoïaque (67 %). Le narcissique fragile souffre plus fré- 546 D. Gourion quemment de dépression (comorbidité : 57 %), de troubles anxieux et de personnalité évitante. Le narcissique de haut niveau est celui qui présente le moins de comorbidités. Composite Descriptions of Narcissistic Personality Disorder, Based on Raw or Standardized SWAP-II Scores and Diagnoses According to an Axis II Checklist or Personality Disorder Construct Ratingsa Basis and Diagnostic Method Used SWAP II Item Raw Scores Axis II Checklist Standardized Scores Construct Ratings Axis II Checklist 1 Construct Ratings Has an exaggerated sense of self-importance (e.g., feels special, superior, grand, or envied) 3 1 1 Appears to feel privileged and entitled ; expects preferential treatment 8 2 3 3 Tends to be critical of others 2 4 15 18 Tends to get into power struggles 7 5 19 20 Tends to blame own failures or shortcomings on other people or circumstances ; attributes his or her difficulties to external factors rather than accepting responsibility for own conduct or choices 9 10 13 17 Tends to be controlling 11 11 16 12 Tends to be manipulative 17 16 12 19 Tends to be dismissive, haughty, or arrogant 26 18 2 5 Has little empathy ; seems unable or unwilling to understand or respond to other’s needs or feelings 22 12 9 9 Seeks to be the center of attention 30 21 8 10 Tends to be competitive with others (whether consciously or unconsciously) 12 9 23 13 Tends to be angry or hostile (whether consciously or unconsciously) 1 3 31 25 Is articulate ; can express self well in words 6 6 116 123 Tends to have extreme reactions to perceived slights or criticism (e.g., may react with rage, humiliation, etc.) 5 7 29 28 Tends to feel misunderstood, mistreated, or victimized 4 8 59 69 Tends to hold grudges ; may dwell on insults or slights for long periods 16 14 39 38 Tends to fear he or she will be rejected or abandoned 14 17 160 165 Tends to feel unhappy, depressed, or despondent 10 15 173 187 Lacks close friendships and relationships 20 13 90 70 Emotions tend to spiral out of control, leading to extremes of anxiety, rage, etc. 13 22 74 109 When upset, has trouble perceiving both positive and negative qualites in the same person at the same time (e.g., may see others in black or white terms, shift suddenly from seeing someone as caring to seeing him or her as malevolent and intentionally hurtful, etc.) 15 19 45 52 Tends to feel anxious 18 20 183 185 Seems to treat others primarily as an audience to witness own importance, brilliance, beauty, etc. 44 31 4 2 Tends to believe he or she can only be appreciated by, or should only associate with, people who are high status, superior, or otherwise “special” 51 33 5 4 Has fantasies of unlimited success, power, beauty, talent, brilliance, etc. 37 28 6 6 Takes advantage of others ; has little investment in moral values (e.g., puts own needs first, uses or exploits people with little regard for their feelings or welfare, etc.) 43 32 7 8 11 Experiences little or no remorse for harm or injury caused to others 72 49 11 Tends to seek power or influence over others (whether in beneficial or destructive ways) 36 23 10 7 Tends to elicit dislike or animosity in others 42 40 18 14 118 106 22 15 46 41 20 16 121 127 14 24 31 43 17 35 Attempts to dominate a significant other (e.g., spouse, lover, family member) through violence or intimidation Tends to be emotionally intrusive (e.g., may not respect other people’s needs for autonomy, privacy, etc.) Tends to show reckless disregard for the rights, property, or safety of others Tends to be oppositional, contrary, or quick to disagree a. SWAP-II = Shedler-Westen Assessment Procedure-II. Values in the table reflect the rank order of the SWAP-II item means (Ns ranged from 122 to 255). Items in the unshaded top third of the table are highly characteristic and highly distinctive of narcissistic personnality disorder. Items in the shaded region in the middle third of the table are highly descriptive of the disorder but not specific to it. Items in the shaded region in the bottom third of the table are specific to the disorder but not necessarily characteristic of it. Revue de presse 547 Clinique et thérapeutique Ph. Gorwood (1) Nouvel épisode dans la guerre froide entre antipsychotiques et neuroleptiques Double-Blind Comparison of First- and Second-Generation Antipsychotics in EarlyOnset Schizophrenia and Schizo-affective Disorder : Findings From the Treatment of Early-Onset Schizophrenia Spectrum Disorders (TEOSS) Study. Am J Psychiatry. 2008 Nov ; 165 (11) : 1420-31. Sikich L, Frazier JA, McClellan J, Findling RL, Vitiello B, Ritz L, Ambler D, Puglia M, Maloney AE, Michael E, De Jong S, Slifka K, Noyes N, Hlastala S, Pierson L, McNamara NK, Delporto-Bedoya D, Anderson R, Hamer RM, Lieberman JA. CONTEXTE Les mega-trials se sont déversées dans la littérature mondiale ces dernières années. Le début remonte à l’étude CATIE (plus de 1 000 schizophrènes randomisés, mais sans aveugle, pour le traitement, et suivis pendant plusieurs mois) qui a permis à Lieberman de montrer que les neuroleptiques conventionnels n’étaient pas à mettre à la poubelle. Cette étude, largement critiquée, a donc suscité, entre autres, la Britannique CUTLASS et l’Européenne l’EUFEST. Cette dernière avait particulièrement remis en cause les résultats de l’étude CATIE, montrant que si l’Haldol est le (1) Hôpital Louis Mourier, Colombes. comparateur, et que les sujets sont au début de leur maladie, alors les bénéfices des nouveaux traitements étaient bien plus nets. Lieberman revient à la charge pour un nouvel épisode de la saga, portant cette fois chez l’enfant… MÉTHODE Puisque la précocité de la maladie est si importante, l’étude porte cette fois sur des sujets qui entrent dans un premier épisode, traités par Olanzapine (en moyenne 11 mg), Risperidone (en moyenne 3 mg) ou Molindone (Moban, en moyenne 60 mg), neuroleptique n’ayant pas l’AMM en France. La Molindone est un produit indolique, donc de la famille du Sertindol et de la Ziprazidone. Ce traitement a surtout la particularité de ne pas induire de prise de poids, ce qui explique probablement ce choix comme comparateur. Le recrutement porte cette fois sur des enfants, de 8 à 19 ans, mais ayant clairement un diagnostic de schizophrénie (précoce), schizo-affectif ou de trouble schizophréniforme. Après avoir analysé 200 sujets incluables, trois groupes de 40 ont été constitués. RÉSULTATS Si l’on garde la philosophie CATIE (le fait que les patients restent sous le même traitement serait le meilleur garant de leur efficacité), pas de grande différence après 6 semaines, mais plutôt en défaveur de l’Olanzapine (50 % d’interruption). Si l’on prend la mesure plus conventionnelle de la réponse au traitement (baisse de 20 % de la PANSS), la palme revient à… la Molindone (50 % de réponse), puis au Risperdal (46 %) puis à l’Olanzapine (34 %), ces différences n’étant pas significatives. La tolérance extra-pyramidale, était, sans surprise, meilleure pour l’Olanzapine et pire pour la Molindone, mais, probablement du fait de la co-prescription possible de correcteurs et du faible effectif global, sans différence significative pour l’apparition de symptômes extra-pyramidaux. Le poids, ainsi que les changements métaboliques, étaient par contre préservés avec ce dernier traitement (et non avec les deux autres). CONCLUSIONS La Molindone est à peu près aussi bien tolérée au niveau extra-pyramidal (en partie grâce aux correcteurs), mais mieux au niveau métabolique et du poids, et aurait plutôt une efficacité supérieure… Donc un point de plus pour Lieberman, avec une jolie parade contre l’étude EUFEST qui concluait que les résultats de CATIE étaient faux pour les premiers épisodes. Lieberman peut maintenant répondre non, c’est aussi vrai pour les premiers épisodes… chez les sujets jeunes. 548 COMMENTAIRE Nouvel épisode du « c’était mieux avant » de Lieberman, cette fois avec des enfants souffrant de schizophrénie. Lieberman a la grande particularité de tester des neuroleptiques conventionnels… bien atypiques. Celui-ci, n’ayant pas non plus l’indication en France, se démarque par une bonne tolérance générale. À nouveau il n’est pas très fair-play de ne pas utiliser l’Haloperidol comme comparateur, bien plus utilisé partout dans le monde. Mais à nouveau, ce type de résultat n’est certainement pas inutile, montrant si besoin il y a, que du chemin reste à parcourir avant de considérer que les antipsychotiques ont été révolutionnés. P. Gorwood Quetiapine), et peut être même thymorégulateur. Le gain exact que l’on peut attendre à rajouter un antipsychotique pour des phases maniaques résistantes à un thymorégulateur est analysé ici. traitement. Point important, on n’observe pas de prise de poids différente dans les deux bras sur cette courte période. MÉTHODE La moitié des patients était sous Lithium, l’autre moitié sous Valproate pour un épisode maniaque ou mixte. Les 400 sujets recrutés étaient alors suivis pendant 2 semaines pour vérifier l’absence de réponse satisfaisante (YMRS > 16), et que les dosages sanguins ont bien été dans les fourchettes thérapeutiques. La cohorte est ensuite randomisée, pour les 2/3 à l’Ariprazol, et pour 1/3 au placebo. L’effet final est observé après 6 semaines de traitement. L’Ariprazol possède une efficacité démontrée chez les bipolaires en phase maniaque, non répondeurs aux thymorégulateurs CONCLUSIONS Seuls 7 patients doivent être traités (number needed to treat = 7) pour que l’on puisse dire que l’un d’entre eux bénéficie clairement de l’Aripripazol et non du placebo, ce qui est un résultat plutôt puissant. En dehors de l’akatisie, le traitement est bien toléré. L’Aripiprazol se révèle donc bien un traitement intéressant dans le trouble bipolaire, et s’inscrit bien dans l’habitus actuel des cliniciens qui associent volontiers aux thymorégulateurs (s’ils sont insuffisants) des antipsychotiques. COMMENTAIRE RÉSULTATS Efficacy of adjunctive aripiprazole to either valproate or lithium in bipolar mania patients partially nonresponsive to valproate/lithium monotherapy : a placebo-controlled study. Am J Psychiatry. 2008 Oct ; 165 (10) : 1316-25. Vieta E, T’joen C, McQuade RD, Carson WH Jr, Marcus RN, Sanchez R, Owen R, Nameche L. CONTEXTE L’utilisation exclusive des thymorégulateurs dans les troubles bipolaires est souhaitée, mais rarement observée. Les antipsychotiques sont souvent associés, du fait de leur effet antimaniaque fréquent, voire antidépresseur (comme pour la Comme souvent dans ce type d’étude, le placebo semble un excellent traitement… 10 points de gagner sur la YMRS n’est pas négligeable, d’où l’importance de ne pas oublier qu’en matière de trouble bipolaire, il faut savoir laisser le temps au temps. Malgré cet effet important, l’Aripirazol apporte un plus qui se manifeste dès la première semaine et qui perdure en augmentant durant les 6 semaines du suivi. L’amélioration du score global se traduit logiquement en plus de réponse (63 % versus 48 %) et plus de rémission (66 % versus 51 %). Cette efficacité ne s’obtient pas au dépends de problème majeur au niveau tolérance, puisque le nombre de sorties d’essai est à peu près comparable dans les deux groupes. On notera tout de même plus d’effets indésirables de type akatisie dans le groupe sous Aripirazol (19 % versus 5 % sous placebo) dont il est important de faire part au patient avant l’instauration de ce type de Un autre antipsychotique est donc disponible dans le traitement de la phase maniaque des troubles bipolaires. La question se posera, si elle ne l’est déjà, de savoir quand l’arrêter. La conservation des antipsychotiques à distance de l’épisode maniaque se révèle en effet peut être bénéfique au long terme, s’éloignant d’effets antimaniaques pour se rapprocher d’effets thymorégulateurs. Le fait qu’en 6 semaines seulement les sujets sous Aripiprazol aient deux fois moins d’émergence dépressive que sous placebo est plutôt en faveur. Ces effets sont cependant nettement plus complexes à démontrer… Un antagoniste des récepteurs opioïdes delta prometteur dans le traitement de l’alcoolodépendance sur un modèle de rat A Novel Delta Opioid Receptor Antagonist, SoRI-9409, Produces a Selective and Long-Lasting Decrease in Ethanol Consumption in Heavy-Drinking Rats. Revue de presse Biol Psychiatry. 2008 Dec ; 64 (11) : 974981. Nielsen CK, Simms JA, Pierson HB, Li R, Saini SK, Ananthan S, Bartlett SE. 549 bien plus de l’homme, et requiert un temps d’apprentissage et d’habituation avant une consommation importante d’alcool contrairement aux souris équivalentes. Les animaux ont le choix entre deux récipients, avec alcool (10 % ou 20 %) ou sucrose, en les alternant pour qu’il y est au moins une consommation initiale. L’antagoniste des δ (4 doses) est comparé à la Naltrexone (μ) et à la Naltrindol (δ). RÉSULTATS Naltrindol. De manière intéressante, cet effet n’est retrouvé que chez le rat fort consommateur d’alcool. L’effet apparaît dès 24 heures de traitement, se maintient pendant les 28 jours d’essai, et semble même être relativement pérenne, puisque la consommation d’alcool ne revient pas au niveau initial après l’interruption du traitement. L’effet spécifique sur les récepteurs delta a pu être clairement montré par des études de binding, et l’effet général sur la réduction de la consommation concernait les deux types de consommation, modérée (10 %) comme majeure (20 %), en exposition continue comme épisodique. CONCLUSIONS Le nouvel antagoniste des récepteurs delta, dont l’affinité est bien plus importante que pour les précédents, semble avoir un effet robuste et puissant sur la consommation d’alcool, faible comme forte, continue comme itérative, et immédiate comme différée. Il manque des études chez l’homme, de l’effet bien sûr, mais d’abord de la tolérance. CONTEXTE La Naltrexone est l’un des deux traitements d’aide au maintien de l’abstinence chez des sujets alcoolo-dépendants, avec un effet démontré, mais modeste, n’ayant d’effet que dans une sous-population (voire étude COMBINE) et associé parfois à une mauvaise tolérance. L’idée des récepteurs opioïdes doit être bonne (effet démontré), mais reste frustrante… L’équipe de Bartlett à San Francisco s’est penchée sur le problème en testant une molécule dérivée de la Naltrexone qui devient un puissant antagoniste des récepteurs Delta (δ), bien plus que l’antagoniste disponible (Naltrindol), et perd sa spécificité pour les récepteurs Mu (μ). MÉTHODE Les rats utilisés pour les analyses sont les Long-Evans, classiques pour les études sur la consommation d’alcool. Le rat est un modèle bien plus pertinent que celui de la souris pour tout ce qui concerne le comportement. Le rat a en effet un peu de préfrontal, ce qui le rapproche COMMENTAIRE Le nouvel antagoniste des récepteurs delta est trois fois plus efficace pour réduire la consommation d’alcool de ces rats vulnérables, autant par rapport à la Naltrexone, que par rapport à l’ancien L’utilisation du modèle animal est toujours utile, efficace et porteur de nouveauté, mais il est aussi souvent bien difficile de prédire la juste applicabilité chez l’homme des résultats retrouvés. Plusieurs faits sont ici rassurants, de l’effet retrouvé de la Naltrexone (qui sert de comparateur) à la stabilité des résultats selon les modèles utilisés. Il est clair que l’attente est forte, vue la rareté des traitements dans l’alcoolo-dépendance, et il semble qu’il existe ici une piste bien intéressante, à côté de la quelle sont passées les études précédentes pour des raisons d’affinité insuffisante des molécules testées.