L’Encéphale (2008) 34, 427—433
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/encep
RENCONTRE AVEC L’EXPERT
Congrès de l’encéphale - Paris, janvier 2008 -
Anxiété mineure et paroxysmes anxieux
Encephale congress - Paris - January 2008 - Minor
anxiety and anxious paroxysm
D. Servant
Consultation stress et anxiété, service de psychiatrie générale, CHRU de Lille, rue Verhaeghe, 59037 Lille cedex, France
Rec¸u le 26 mai 2008 ; accepté le 25 juin 2008
Disponible sur Internet le 28 aoˆ
ut 2008
Présentation du cas
M. B. 44 ans conducteur de TER vient consulter pour
des paroxysmes anxieux déclenchés lorsqu’il doit dormir à
l’extérieur de chez lui. Les seules situations surviennent
lorsqu’il ne peut rentrer chez lui après un trajet dans le
cadre de son travail. En dehors de ces situations, on ne
retrouve pas d’attaques de panique spontanées ni situation-
nelles ni aucune phobie. Il peut dormir en dehors de chez
lui en vacances ou dans toute autre circonstance. Les pro-
blèmes ont débuté en 2003. Aucun antécédent de troubles
anxieux ou dépressifs n’est retrouvé. Le niveau d’anxiété est
modéré et on retrouve surtout des symptômes somatiques,
par exemple lorsqu’il est enrhumé il focalise sur l’impression
d’étouffer. Tout problème physique même mineur accen-
tue son anxiété. Il se décrit comme quelqu’un de sérieux,
calculateur qui analyse beaucoup les choses. Il parle de dif-
ficulté d’aller au bout des choses de peur d’être déc¸u,ilest
casanier et aime plutôt rester chez lui.
Introduction
Beaucoup de patients anxieux expriment à travers une
symptomatologie mineure et des paroxysmes anxieux, une
Adresse e-mail : [email protected].
plainte diffuse qui s’intègre dans un fonctionnement parfois
ancien sans que l’on puisse diagnostiquer un trouble anxieux
évident. Se pose le problème de leur prise en charge tant
sur le plan médicamenteux que psychothérapeutique.
Les éléments du diagnostic
Le diagnostic de ces formes d’anxiété mineure et de
paroxysmes anxieux est souvent difficile car la plainte
anxieuse est souvent masquée par des problèmes soma-
tiques et le patient n’exprime pas de demande précise.
Elles ne correspondent pas à un diagnostic précis décrit
dans les classifications internationales comme le DSMIV. En
effet, les paroxysmes anxieux ne répondent pas à toutes
les caractéristiques sémiologiques des attaques de panique
particulièrement le fait que quatre symptômes sur dix sont
requis au minimum pour le diagnostic. Elles correspondent
à des formes dites sub syndromiques qui à minima peuvent
se confondre avec le fond anxieux. L’anxiété mineure a la
même caractéristique sémiologique que l’anxiété mais elle
est moins bruyante, moins handicapante et elle se confond
parfois avec le style de vie ou la personnalité.
On se situe donc plus dans une approche de dimension
(symptôme ou syndrome anxieux) que de catégorie (trouble
anxieux avéré).
Seul l’entretien rigoureux permettra de retenir le diag-
nostic et surtout de mettre en lumière un certain nombre
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2008.
doi:10.1016/j.encep.2008.06.007
428 D. Servant
d’éléments utiles pour la prise en charge du patient. On
retiendra principalement les antécédents, la date de début
du trouble, son évolution souvent en dents de scie, les
événements de vie et les stress récents, l’existence d’un
terrain anxieux, les comorbidités psychiatriques (principa-
lement les éléments anxieux et dépressifs) et somatiques
au cours de la vie, les traitements antérieurs (médicamen-
teux et psychothérapiques), le retentissement du trouble
anxieux et les conséquences sur la vie familiale, sociale
et professionnelle, la consommation de psychotropes et
l’altération de la qualité de vie. Certains éléments du mode
de vie comme l’activité physique, la consommation de
substances psychoactives, les rythmes de vie, le sommeil
et les autres grandes fonctions (alimentation, sexualité...)
seront évaluées.
L’analyse sémiologique reprendra les éléments
concernant les différentes dimensions de l’anxiété :
la sphère somatique où dominent souvent des signes car-
diorespiratoires mais tous les appareils (digestif, neuro
sensoriel, cutané, génito urinaire) sont concernés. Les
douleurs musculaires, les contractures et la fatigue sont
souvent rapportées par les patients. Un certain nombre
d’examens somatiques peuvent être nécessaires (ECG,
biologie...) pour éliminer un problème organique mais
il faut garder à l’esprit que le diagnostic d’anxiété ne
requiert aucun examen complémentaire et se fait unique-
ment sur l’entretien et l’analyse rigoureuse du contexte ;
La sphère psychologique ou cognitive et on cherchera à
mettre en évidence les pensées, les ruminations et les
interprétations anxieuses du sujet. Elles vont dans ce
cas souvent concerner l’état de santé et les problèmes
posés par le mal être anxieux et n’ont pas forcément de
lien avec des événements ou des peurs concrètes. Les
symptômes peuvent être perc¸us selon un mode proche
de la somatisation. C’est le cas de l’exemple de M. B. qui
perc¸oit une simple gène dûe à un encombrement rhino-
pharyngé comme une sensation anxieuse désagréable. À
côté de la sphère respiratoire, ce sont souvent les symp-
tômes cardiaques (palpitations, douleurs thoraciques...)
et neurovégétatifs (sueurs, vertiges, tremblements, bouf-
fées de chaleur...) qui sont perc¸us et amplifiés comme
dans une spirale qui peut aboutir à un paroxysme anxieux.
C’est la raison pour laquelle le patient anxieux va cher-
cher souvent une raison médicale à son problème ce qui le
conduit à différentes demandes de soins qui n’aboutiront
pas à un diagnostic. Le sujet évoque souvent le fait de ne
pas comprendre ce qui lui arrive. Pour d’autres patients,
un fond anxieux peut être mis en évidence mais qui globa-
lement leur permet de vivre sans trop de perturbations.
On recherchera une préoccupation excessive pour les évé-
nements à venir ou les dangers habituels de la vie pour
soi-même ou ses proches (accident, maladie, disparition).
Parfois le patient ressent une tension intérieure, une
fébrilité, un sentiment diffus de malaise qu’il a du mal
à définir précisément ;
Des comportements anxieux peuvent se voir et on recher-
chera particulièrement :
une agitation, une impression de ne pas tenir en place,
une irritabilité, une agressivité sont très fréquemment
associées à l’anxiété. Le patient peut ressentir une ten-
sion intérieure, une agitation motrice qui peut parfois
aller jusqu’à des crises de colère,
une inhibition anxieuse est décrite depuis très long-
temps comme un élément central de l’anxiété. Face à
une situation de la vie, les plans d’action sont bloqués
chez l’anxieux.
Un évitement phobique est à rechercher, sachant que la
phobie est une peur marquée et persistante d’objets ou de
situations qui ne présentent pas de caractère potentielle-
ment dangereux. Dans ce cas, elle n’est pas aussi systéma-
tisée que dans le trouble phobique comme dans le cas de
M. B. qui se sent mal hors de chez lui dans le cadre de son
travail, mais pas dans quasiment toutes les situations exté-
rieures comme pour un patient agoraphobe. L’exposition au
stimulus phobogène déclenche une réponse anxieuse dont
l’intensité varie mais qui peut aller jusqu’au paroxysme
anxieux. Le sujet va donc redouter la confrontation (anti-
cipation anxieuse), ce qui peut conduire à un évitement. Il
reconnaît le caractère excessif et irraisonné de sa peur.
Les troubles du sommeil sont à considérer : l’insomnie
est très fréquente dans l’anxiété mineure. Il s’agit
classiquement d’une difficulté à s’endormir (insomnie
d’endormissement) souvent due aux ruminations qui main-
tiennent éveillé. De même, l’hyper-vigilance, la tension
intérieure sont sources d’un sommeil léger avec de mul-
tiples réveils. Les rêves et les cauchemars sont souvent
rapportés par le patient anxieux comme une reviviscence
des difficultés actuelles.
Enfin il ne faut pas oublier la sphère émotionnelle, la
colère, les peurs mais aussi la culpabilité et la tristesse
doivent être repérées. La dimension émotionnelle est
aujourd’hui considérée comme centrale dans l’anxiété.
Même si le patient en a conscience, l’émotion échappe au
raisonnement et au contrôle. La répétition des émotions
anxieuses crée peu à peu un mode de réaction automatique
dont le patient peut avoir plus ou moins conscience. Face à
des situations parfois banales et pas seulement stressantes,
le sujet ne peut les accepter et le refus s’exprime par une
émotion négative. De nombreuses situations au travail sont
susceptibles de générer des émotions négatives dans le sens
où les contraintes et les changements sont de moins en
moins acceptés. Cela n’est pas toujours exprimé mais peut
être recherché avec le patient à partir de l’analyse de situa-
tions concrètes. Pour M. B. l’accent pourrait être mis sur les
conditions actuelles de son travail et les nouvelles exigences
qu’il doit accepter. Les crises, lorsqu’il est seul, pourraient
être interprétées comme une forme de refus «émotionnel ».
Enfin, on éliminera définitivement des troubles anxieux
et dépressifs en posant des questions d’orientation simples.
Ce sont surtout le trouble anxieux généralisé où la dimension
d’intolérance à l’incertitude face aux événements à venir
domine, le trouble de l’adaptation avec anxiété qui corres-
pond à un tableau de réaction anxieuse où un événement
datant de moins de trois mois est mis en évidence, le trouble
panique marqué par des attaques de panique complètes
avec au moins quatre symptômes récurrents entraînant la
peur de refaire une crise sur une période continue d’au
minimum quatre semaines qui peuvent poser des problèmes.
Bien que dans tout état anxieux, on peut noter un
découragement, une lassitude, un émoussement passager
pour le plaisir, on éliminera un état dépressif franc où
Anxiété mineure et paroxysmes anxieux 429
domine une vision pessimiste du monde et de soi même
associé à une perte de goût évoluant de fac¸on durable.
Les modalités de prise en charge
L’anxiété mineure et les paroxysmes anxieux pourraient
être facilement négligés une fois le diagnostic fait. Exclu du
domaine médical par le généraliste, exclu de la psychiatrie
par le psychiatre, ces états conduisent souvent à une errance
pour le patient. On sait que l’anxiété dans son ensemble,
du fait de sa fréquence et de son retentissement, est un
problème non négligeable de santé. Ces formes mineures
n’échappent pas à la règle, elles peuvent se compliquer et
surtout elles peuvent être soulagées ce qui est un argument
supplémentaire à l’utilité de leur prise en charge.
Cependant ces états bien que moins graves que beaucoup
de tableaux psychiatriques ne sont pas si simples à prendre
en charge et plusieurs points méritent d’être abordés :
La prise en charge implique souvent différents acteurs,
médecins traitants, psychiatres, psychologues, voire
d’autres professionnels de santé. La coopération entre ces
différents intervenants est essentielle tout le long de la
prise en charge.
Le patient demande avant tout, à aller mieux, à être
soulagé et que ses symptômes disparaissent. Il ne vient pas
forcément dans une démarche psychologique de change-
ment et c’est pour cela que pour beaucoup de patients, le
passage au psychiatre ou au psychologue n’est pas évident.
Le médecin généraliste va être confronté à des situations
très différentes et il devra affiner la demande réelle du
patient. Dans beaucoup de cas, il assurera le suivi seul.
Certains patients ont la conviction que leurs symp-
tômes sont d’origine organique et sont dans l’attente
d’examens complémentaires. Inutile pour eux de trop
évoquer d’emblée une origine psychologique qui ne sera
pas entendue. En faisant le point, en reconnaissant la
représentation organique du trouble, le patient va pouvoir
progressivement accepter qu’il souffre d’un problème
différent d’un problème somatique classique et que l’on
est plus dans le registre fonctionnel et émotionnel.
Certaines demandes vont être plus facilement démas-
quées, c’est le cas de patients soumis à des stress ou des
contextes difficiles ou se reconnaissant dans un tempéra-
ment anxieux. Ils vont plus facilement accepter l’idée que
les manifestations sont du registre anxieux et accepter une
autre voie d’approche psychologique.
Beaucoup de patients vont accepter facilement une
approche orientée vers la gestion des symptômes anxieux
et sont prêts à «collaborer »avec le médecin ; en revanche
d’autres resteront dans une attitude passive et souhaiteront
recevoir uniquement un soin ; ils seront moins enclins pour
s’engager dans un travail «éducatif »de changement.
L’information du patient
L’information est pour l’anxiété autant du domaine du
généraliste que du psychiatre.
L’information concerne :
la nature du trouble anxieux, ses manifestations, sa fré-
quence, ses causes, les difficultés du diagnostic ;
les différents traitements, incluant les psychothérapies,
avec leurs avantages et leurs inconvénients ;
pour les médicaments : le délai d’action, la nécessité
d’adapter la dose efficace sous contrôle médical, de res-
pecter la régularité des prises, d’éviter l’escalade de
doses, les effets indésirables, le risque de syndrome de
sevrage en cas d’arrêt brutal, les signes de sevrage et les
signes de rebond de l’anxiété éventuels ;
une bibliographie (ouvrages, documents) adaptée au
trouble anxieux du patient ;
la sensibilisation du patient, de sa famille et de ses aidants
sur l’existence d’associations de patients et de familles et
sur l’intérêt de les contacter.
Si nécessaire, l’entourage du patient doit également
recevoir ces informations avec l’accord du patient et en sa
présence.
En psychiatrie, les premiers contacts, au cours desquels
le patient demande avant tout un conseil, se multiplient
en raison d’un accès de plus en plus spontané de la part
des patients qui ont dépassé beaucoup de tabous. De plus,
en raison d’une forte médiatisation actuellement de la
«psy », le patient se présente parfois avec certaines idées
préconc¸ues. Il faut cependant parfois aider le patient à
modifier certaines représentations et attributions fausses
qu’il fait de son problème. L’échange en face à face est
la forme la plus habituelle ; elle est celle qui favorise la
meilleure relation thérapeutique. Mais souvent elle ne
se fait pas en une seule séance et réclame un peu de
temps.
Self-help et bibliothérapie : une aide possible
Baptisée par les Anglo-Saxons self-help cognitive behavioral
therapy, cette approche propose des méthodes simples
basées sur les TCC de gestion des symptômes et de chan-
gement des interprétations et des comportements anxieux
qui sont réalisés en grande partie par le patient lui-même.
Selon la Haute Autorité de santé (HAS), la thérapie
«self-help », ou gestion de l’anxiété par soi-même, met
l’accent sur l’information du patient et les moyens de chan-
ger par lui-même. La plupart des programmes incluent un
ouvrage pratique conc¸u comme des guides d’autothérapie
(bibliothérapie). Les objectifs sont dirigés vers les symp-
tômes : anxieux, somatiques, émotionnels, cognitifs et
comportementaux. Ils proposent des exercices concrets à
faire soi- même (relaxation, contrôle respiratoire, gestion
émotionnelle, exposition, affirmation de soi...). Le contact
avec le thérapeute reste indispensable. La formation
initiale du patient et l’évaluation en cours de thérapie sont
essentielles.
L’approche de self-help thérapie a pour but de favoriser
l’accès aux soins et de permettre, à partir de support écrit,
de limiter les contacts, et au patient de suivre une TCC
structurée. Elle semble bien indiquée en soin primaire,
dans des cas d’intensité légère à moyenne et un nombre
minimum de contact est nécessaire. Plusieurs études
rapportent que des programmes associant un guide de
thérapie à des contacts téléphoniques avec une infirmière
ou une psychologue s’avèrent supérieurs à un suivi habituel
du médecin généraliste. À partir de l’ouvrage Master your
430 D. Servant
anxiety and panic de David Barlow, il a été montré que les
patients adhéraient bien à ce type de pratique, tiraient un
bénéfice thérapeutique et globalement étaient satisfaits.
Un ouvrage en franc¸ais Soigner le stress et l’anxiété par
soi-même est utilisé dans notre unité spécialisée dans
des programmes structurés individuels et de groupe en
cours de validation. Le développement récent des nou-
velles technologies de l’informatique et de l’internet a
permis de proposer des programmes de self-help plus
sophistiqués que les ouvrages en proposant une certaine
interactivité à partir de support audio, vidéo et de sup-
port écrit interactif mais qui ne sont encore disponibles
en France.
Sans se substituer au contact direct indispensable avec
le soignant, la self-help thérapie peut permettre d’élargir
l’offre de soins dans certains cas insuffisants et permettre
au patient d’agir plus facilement par lui-même.
La gestion des paroxysmes anxieux
Une des premières demandes du patient est souvent
centrée sur les paroxysmes anxieux et sur la fac¸ondeles
traiter. Cette demande peut être motivée dans le cadre de
l’urgence où l’on est amené à rencontrer le patient au cours
d’une consultation où le patient va demander comment
faire, si une crise survient.
Dans un premier temps, il importe d’être rassurant et de
l’informer sur la nature anxieuse des crises, mais beaucoup
de patients demandent un soulagement rapide et gardent
un doute quant à l’origine médicale du phénomène. Le
patient attribue très souvent ses crises à un problème
médical et est demandeur d’examens complémentaires et
de traitements. Ce n’est qu’après un temps d’information
qu’il pourra accepter une attribution «psychologique »à
son problème et modifier la perception de son trouble et la
fac¸on de le prendre en charge. Il apparaît, tant au niveau
de l’urgence que du soin primaire ou spécialisé, que si ce
temps d’information manque, le patient est conforté dans
l’organicité de son trouble ce qui le conduit à réitérer les
demandes de soins et en fait, à ne pas traiter correctement
son problème.
Il importe souvent de prendre en compte la dimension
physiologique et fonctionnelle du paroxysme anxieux et
de l’inscrire dans un dérèglement émotionnel bien réel
dont l’origine est multifactorielle. Le modèle de l’anxiété
proposé peut être celui d’une «alarme émotionnelle hyper-
sensible ». Les raisons de ce dysfonctionnement ne sont pas
évidentes dans bon nombre de cas. On proposera dans ce
temps initial et limité de se centrer sur la fac¸on de mieux
contrôler cette alarme plutôt que de rechercher les causes
organiques ou psychologiques. Ce temps de reconnaissance
et d’information est indispensable et peut en partie donner
au patient le sentiment d’avoir été compris, ne pas être
seul avec son problème et de se voir proposer des moyens
concrets pour y faire face. Parmi les moyens à mettre en
place, les techniques de contrôle respiratoire et de relaxa-
tion rapide peuvent vraiment offrir au patient un moyen
simple de faire face au paroxysme anxieux. Des protocoles
sont aujourd’hui disponibles pour les thérapeutes et pour
les patients.
Schématiquement, le contrôle respiratoire va consister
à apprendre à éviter l’hyperventilation. Pour cela le sujet
doit s’entraîner en dehors des crises pour pouvoir mettre
en application dans un second temps en situation anxieuse.
C’est un fait important auquel le patient doit adhérer : il
doit apprendre la technique et c’est seulement une fois
acquise qu’il pourra faire face. Quelques conseils peuvent
lui être utiles d’emblée comme l’inutilité de s’agiter, le
fait que la crise finit par passer d’elle-même. Une approche
cognitive autour des conséquences des symptômes et de
l’utilité de s’exposer aux symptômes et de ne pas essayer
de chercher à lutter contre eux, peut être utile pour
désactiver la spirale bien que moins facilement réalisable
que dans le cadre de trouble panique constitué.
Les autres techniques de relaxation (voir plus loin)
peuvent également l’aider à faire face instantanément à la
crise.
L’apprentissage des consignes lors d’une consultation
prend quelques minutes sauf si le patient est en crise. Il
doit accepter de s’entraîner par lui-même.
Si ces principes d’informations et de contrôle respira-
toire s’avèrent insuffisants, et si le patient est en demande
de soulagement rapide, le traitement médicamenteux peut
s’avérer utile. Les benzodiazépines sont indiquées lorsque
le contrôle rapide de l’anxiété est nécessaire, car elles ont
un effet anxiolytique significatif et rapide. Elles peuvent
être utilisées au coup par coup en cas de crise en utili-
sant la voie per os ou sub linguale ou parfois pendant une
période courte si les paroxysmes anxieux sont fréquents
(pluriquotidien).
Gestion de l’anxiété par la relaxation
La relaxation peut être proposée comme une alternative aux
traitements médicamenteux et apporter une réponse favo-
rable et durable dans le temps. En revanche, elle nécessite
une implication de la part du patient bien supérieure à celle
de la simple observance au traitement.
Il existe de nombreuses techniques et seuls la relaxa-
tion musculaire progressive, la méditation de pleine
conscience, le yoga et l’hypnose ont été étudiés dans
l’anxiété. Cependant de nombreux problèmes méthodolo-
giques existent. Les méta-analyses concluent à l’intérêt
évident de la relaxation dans l’anxiété mais la nécessité
de savoir de quoi on parle et d’études mieux validées
notamment qui incluent des populations homogènes de
patients.
Une nouvelle approche de la relaxation, qui propose un
apprentissage plus rapide, l’implication active du patient
et l’application concrète des techniques face à des symp-
tômes anxieux, pourrait être intéressante dans la prise en
charge de l’anxiété mineure et des paroxysmes anxieux.
L’apprentissage se fait à partir de quatre techniques de
base : le contrôle respiratoire, la détente musculaire, la
méditation de pleine conscience et la visualisation. Les exer-
cices sont courts et facilement reproductibles par le patient
seul qui peut s’aider de support de self-help sous forme
d’ouvrages ou de documents audio pour s’entraîner aux
exercices.
À partir de ces quatre techniques de base, le patient
va apprendre à induire assez rapidement une réponse de
Anxiété mineure et paroxysmes anxieux 431
relaxation et ainsi permettre de réguler son état émotion-
nel. L’apprentissage du cycle dure huit à 12 semaines. La
relaxation va permettre au patient de réduire la sympto-
matologie physique et la tension musculaire de l’anxiété
mineure sans avoir recours à des traitements médicamen-
teux et de faire face aux paroxysmes anxieux grâce à des
techniques flash.
Le contrôle respiratoire évite l’hyperventilation en main-
tenant une fréquence respiratoire lente, abdominale et
favorisant le temps expiratoire pour ainsi stimuler naturel-
lement le tonus vagal. Cette simple technique, si elle est
pratiquée régulièrement, permet de réduire l’hyperactivité
sympathique et de maintenir la balance sympathovagale à
un bon équilibre.
L’obtention d’une détente musculaire peut être obtenue
à partir d’exercice de contraction-décontraction musculaire
dans un premier temps et ensuite une fois l’exercice mémo-
risé par une autosuggestion d’une sensation de détente et
de calme.
La méditation de pleine conscience n’a rien à voir et
ne doit pas être confondue avec la médiation concen-
trative (type méditation transcendantale). Il s’agit de se
concentrer pleinement dans le moment présent et sur
l’action. Des exercices de concentration sur la respira-
tion, sur le balayage corporel, sont très accessibles et
vont permettre ainsi de déclencher rapidement une réponse
de relaxation. Ensuite le patient pourra se concentrer sur
des actions de la vie de tous les jours (manger, se laver,
marcher ...).
Enfin la visualisation d’image apaisante comme l’espace
de sécurité permet aussi d’induire rapidement un état de
relaxation et de permettre de faire face à des situations de
stress.
Certains exercices peuvent mieux convenir à certains
sujets et à certains symptômes anxieux. Cette diversité
d’exercices permet à beaucoup de patients et, particuliè-
rement ceux qui ont du mal à lâcher prise, d’apprendre
concrètement les exercices de relaxation ce qui n’est
pas forcément possible dans les méthodes plus anciennes
(Training autogène de Schultz, Relaxation musculaire de
Jacobson...). De plus, le patient doit s’approprier la tech-
nique qui n’est pas seulement un moyen de détente
mais une technique de gestion de l’émotion anxieuse.
Au total, les techniques de relaxation et de méditation
permettront :
d’obtenir une réponse de relaxation en un temps court
(gestion des paroxysmes anxieux par la relaxation flash et
des symptômes mineurs) ;
de se décentrer des pensées parasites et de se recentrer
sur le moment présent par la méditation ;
de s’exposer par visualisation à des situations anxiogènes
et phobogènes ;
d’accepter mieux des situations afin de prévenir les réac-
tions émotionnelles.
À quel moment prescrire un psychotrope et
lequel ?
Dans les formes évoluant de fac¸on durable et résistante aux
mesures informatives et psychoéducatives que nous venons
d’aborder, se pose la question de la prescription médica-
menteuse.
Quelle molécule choisir ?
En se référant à l’AMM, les anxiolytiques sont les psy-
chotropes les plus indiqués dans l’anxiété mineure car
les antidépresseurs sont indiqués dans certains troubles
anxieux diagnostiqués selon les critères du DSMIV (TOC,
trouble panique, anxiété généralisée, syndrome de stress
post-traumatique). Les benzodiazépines offrent le plus large
choix de molécules. La prescription d’anxiolytique doit
être encadrée des précautions d’usage et il est nécessaire
d’impliquer le patient dans une utilisation courte soit au
coup par coup, soit sur quelques jours ou quelques semaines
si l’anxiété même d’intensité mineure est mal supportée par
le patient. Elles exposent alors à un risque de rebond de
l’anxiété à l’arrêt, risque qui est diminué par le sevrage
progressif. Outre la dépendance physique et psychique,
les autres effets indésirables sont notamment une amnésie
antérograde, une baisse de la vigilance, une confusion, des
chutes chez le sujet âgé.
D’autres molécules à effet anxiolytique sont utilisables :
comme certains antihistaminiques et la buspirone.
Pendant combien de temps ?
La durée de traitement maximale préconisée pour les anxio-
lytiques est de 12 semaines, sevrage progressif inclus.
Cependant dans de nombreux cas, soit la durée est prolon-
gée, soit le patient une fois l’arrêt est amené à reprendre
le traitement en raison d’une recrudescence des symp-
tômes. Tout traitement prolongé supérieur à trois mois doit
conduire à réévaluer l’anxiété et proposer systématique-
ment d’autres moyens non médicamenteux que nous avons
abordés.
Aborder le terrain ou l’environnement ?
L’auto entretien d’une symptomatologie mineure peut être
en partie liée à deux facteurs très importants : la person-
nalité du sujet et les stress environnants. Beaucoup de
patients présentant ce type de symptomatologie mineure
avec des paroxysmes anxieux répondent à certains traits
anxieux qui évoluent depuis de nombreuses années, proches
d’un style de vie ou d’une perception du monde qui rappelle
la notion de personnalité anxieuse. Parmi les traits les plus
souvent reconnus, on note la dépendance, l’hyperémotivité,
le perfectionnisme, l’hyper-contrôle, la timidité. Ces traits
marquent une personnalité anxieuse qui ne correspond pas
forcément aux troubles de la personnalité tels qu’ils sont
décrits dans le DSMIV dans le Cluster C mais crée un terrain
vulnérable évident.
Dans le DSM, l’axe II correspond aux troubles de la per-
sonnalité et propose donc une approche catégorielle. Selon
le DSM-IV-TR, les traits de personnalité désignent des moda-
lités durables d’entrer en relation avec, de percevoir et de
penser son environnement et soi-même, qui se manifestent
dans un large éventail de situations sociales et profession-
nelles. Les traits de personnalité ne constituent des troubles
que lorsqu’ils sont rigides et inadaptés et qu’ils causent une
souffrance subjective et/ou une altération significative du
fonctionnement.
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