L’Encéphale (2011) 37, 41—47
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP
SANTÉ PUBLIQUE
Conjoints et trouble bipolaire
Spouses and bipolar disorder
F. Ellouze, S. Ayedi, W. Cherif, T. Ben Abla, M.F. M’rad
10, rue Ahmed Tlili, Rades 2040, Tunisie
Rec¸u le 8 septembre 2009 ; accepté le 25 f´
evrier 2010
Disponible sur Internet le 24 mai 2010
MOTS CLÉS
Conjoint ;
Trouble bipolaire ;
Qualité de vie
Résumé
Introduction. — Notre objectif est d’évaluer la qualité de vie d’une population de conjoints de
patients bipolaires comparativement à celle d’une population témoin.
Patients et méthode. Nous avons comparé 30 conjoints de patients suivis pour trouble bipo-
laire I selon les critères de DSM IV à un second groupe de 30 témoins appartenant à la population
générale. Les deux groupes étaient appariés selon l’âge, le sexe, le statut marital et le niveau
socioéconomique. L’évaluation de la qualité de vie a été réalisée par la passation de l’échelle
de qualité de vie : SF-36.
Résultats. — La qualité de vie des conjoints de patients bipolaires était significativement plus
altérée que celle du groupe témoin aussi bien dans l’approche catégorielle (60 % vs 40 %) que
dans l’approche dimensionnelle (51,1 vs 68,2).
Discussion. — Notre étude confirme l’impact négatif de la maladie bipolaire sur l’entourage du
patient. Le fait d’être le conjoint de ce patient apparaît comme un facteur de risque important.
Conclusion. — Des mesures doivent être proposées pour améliorer la qualité de vie du conjoint
de bipolaire.
© L’Encéphale, Paris, 2010.
KEYWORDS
Spouse;
Bipolar disorder;
Quality of life
Summary
Objective. — To assess the quality of life of a population of spouses of bipolar patients compared
with a control population.
Patients and methods. We conducted a cross-sectional study which included two groups: a
group of 30 spouses of patients followed for bipolar I disorder according to DSM IV criteria and
a second group of 30 subjects from the general population. Both groups were matched by age,
sex, marital status and socioeconomic level. This device was designed to limit the differences
between the two groups solely those of the bipolar illness. Evaluating the quality of life was
achieved using the quality of life scale: SF-36. This is a scale that has already been translated
and validated in dialect Arabic.
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : dr ellouze [email protected] (F. Ellouze).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2010.
doi:10.1016/j.encep.2010.04.003
42 F. Ellouze et al.
Results. — Regarding sociodemographic variables, the two study groups differed only for:
recreation, friendly relations and the couple relationship that included more and better skills
among the control group. In the categorical approach, the quality of life was impaired in 60% of
spouses and 40% of controls with a statistically significant difference. The following standardi-
zed dimensions: mental health (D4), limitation due to mental health (D5), life and relationship
with others (D6) and perceived health (D8) and mental component (CM) were significantly alte-
red in patients’ spouses compared to controls. We found significant differences between the
two groups for: overall average score (51.1 vs. 68.2), mental health (D4), limitation due to
mental health (D5), life and relationship with others (D6), perceived health (D8) and perceived
health (D8) standards.
Discussion. — The impairment of quality of life of bipolar patients’ spouses is related to the
extra responsibility, stress, financial problems and health problems, stigma, and loss of security
of the person loved.
Conclusion. — Considering the consequences that the appearance of bipolar disorder on the
patient’s spouse may have, certain measures must be proposed to improve their quality of life.
© L’Encéphale, Paris, 2010.
Introduction
C’est à la suite du mouvement de désinstitutionalisation des
malades mentaux que l’intérêt porté au vécu des familles
condamnées à vivre avec un patient atteint de trouble
bipolaire s’est développé. L’entourage était alors souvent
considéré comme un groupe homogène. Il s’avère cepen-
dant que les attentes, les besoins ainsi que les capacités
supportives des différents membres de la famille du patient
bipolaire sont différentes.
La notion de caregiver, ou d’aidant naturel, a été
employée dans les années 1940. C’est Treudley qui avait
développé le concept de charge ou fardeau de la famille
(burden on the family) qui s’est trouvé au centre de
nombreux travaux de recherche consacrés à l’origine aux
démences.
C’est à la suite des travaux de Hoenig et Hamilton et de
Grad et Sainsbury, que le concept de charge a été individua-
lisé en charge objective et charge subjective [8,11].
La charge objective était constituée par «tout ce qui sur-
vient comme un facteur de perturbation de la vie familiale
dû à la maladie du patient ». Elle incluait ainsi les com-
portements problèmes repérés par l’aidant chez le patient
et les modifications de la vie quotidienne et familiale.
Quatre domaines en particulier du fonctionnement familial
étaient étudiés (finances, santé des membres de la famille,
effets sur les enfants, effets sur la vie domestique). Platt
et Hirsch ont ultérieurement proposé de retenir la défini-
tion suivante : «une perturbation de la vie familiale qui est
potentiellement observable et vérifiable »[17].
La sensation de charge perc¸ue par les aidants constitue-
rait quant à elle la charge subjective ; elle se traduirait par
les réactions psychologiques de détresse, voire les symp-
tômes psychiques présentés par les aidants [17].
Le conjoint du patient bipolaire est celui qui est
confronté au quotidien, aux conséquences de la maladie
bipolaire. C’est souvent lui qui doit gérer au quotidien les
accès de colères d’impulsivité, de désinhibition, d’insomnie
lors des accès maniaques et supporter le retrait social, la
tristesse d’humeur, les critiques et parfois les idées suici-
daires lors des accès dépressifs.
Ce qui ne serait pas sans retentir sur la qualité de vie
du dit conjoint. Dans cette étude, nous avons cherché à
vérifier l’hypothèse d’une altération de la qualité de vie du
conjoint de patient bipolaire. Cette altération serait en rap-
port avec le fardeau que peut représenter la maladie dont la
stigmatisation, le comportement pathologique du malade,
le surplus de responsabilité, l’altération de la vie affective,
les problèmes psychiques et somatiques.
Patients et méthodes
Type d’étude
Il s’agit d’une étude transversale. Elle s’est étalée sur neuf
mois. Nous avons comparé la qualité de vie de 30 conjoints
de patients bipolaires de type I (diagnostic porté selon les
critères du DSM IV dans sa version révisée) à celle d’un
groupe témoin de la population générale tunisienne. Les
deux groupes étaient appariés pour l’âge, le sexe, le statut
marital et le niveau socioéconomique.
Populations étudiées
Groupe d’étude : conjoints de bipolaires
Critères d’inclusion Critères d’exclusion
Conjoints suivis pour
trouble bipolaire
Présence d’antécédents personnels
de suivis psychiatriques avant
l’installation de la maladie bipolaire
Accord préalable Présence d’antécédents somatiques
avant l’installation de la maladie
bipolaire
Âge inférieur ou égal
à 65 ans
Épouse ou époux bipolaire
hospitalisé(e) ou en phase de
décompensation thymique au
moment de l’enquête
Époux ou épouse
bipolaire en phase
euthymique, non
hospitalisé au
moment de
l’enquête
Conjoints et trouble bipolaire 43
Groupe témoin : échantillon de la population générale
Critères d’inclusion Critères d’exclusion
Accord préalable Présence d’antécédents personnels
de suivis psychiatriques
Sujets mariés Présence d’antécédents somatiques
Âge inférieur ou égal
à 65 ans
Époux ou épouse suivis pour maladie
somatique chronique ou suivis en
milieux psychiatriques
Méthodes
Pour les deux groupes, l’exploration a porté sur :
les caractéristiques sociodémographiques, la relation de
couple, les loisirs, les relations amicales...;
la qualité de vie par la SF-36. Cette échelle comprend
36 questions divisées en huit dimensions correspondant
chacune à un aspect différent de la santé. En Tunisie, cet
instrument a été récemment traduit et validé en une ver-
sion arabe dialectale, de plus il permet une comparaison
entre sujets sains [1].
Nous avons dans un deuxième temps séparé les huit
dimensions en deux composantes : composante physique
(CP) incluant les dimensions (D1), activité physique, (D2)
limitations dues à l’état physique, (D3) douleurs physiques,
(D7) vitalité et (D8) santé perc¸ue et composante mentale
(CM), comportant les dimensions (D4) santé psychique, (D5)
limitations dues à l’état psychique, (D6) vie et relation avec
les autres, (D7) vitalité et (D8) santé perc¸ue.
Dans l’approche catégorielle, nous avons retenu la valeur
seuil de Lean de 66,7 signifiant une qualité de vie altérée
au dessous, alors que dans l’approche dimensionnelle, nous
avons retenu une valeur seuil de 50.
La saisie et l’analyse des données ont été réalisées par
le logiciel «SPSS »dans sa version 11. Les comparaisons des
moyennes sur séries appariées ont été effectuées par le test
tde Student, celles des pourcentages sur séries appareillées
par le test de Mac Nemar, et en cas de non validité, par la
loi binominale. Le seuil de signification a été fixé à 0,05.
Résultats
Les caractéristiques sociodémographiques
Nous n’avons pas trouvé de différence significative entre
le groupe des conjoints de patients bipolaires et le groupe
témoin constitué d’un échantillon de la population générale
pour les variables : âge (moyenne 45 ans et 6 mois ±10,82),
sex-ratio (0,66), niveau socioéconomique (bas : 33,3 %) et
statut marital (tous mariés). Les deux groupes étaientt jus-
tement appariés pour ces variables.
Nous n’avons pas non plus trouvé de différence signifi-
cative entre les deux groupes pour les variables : profession
(avec profession : 73,7 % vs 60 %), niveau d’instruction (bas
46,7 % vs 36,8 %), zone de résidence (urbaine 73,3 % vs
76,7 %), nombre d’enfants (2,8 vs 2,4), durée du mariage
(inférieure à 20 ans : 53,3 % vs 46,6 %), habitudes (sans 53,3 %
vs 40 %), congés de maladie durant l’année (46,2 % vs 33,3 %)
ou couverture sociale (80 % vs 86,7 %).
Concernant les congés de maladie, les deux taux (46,2 %
et 33,3 %) pourraient sembler élevés mais nous avons en
fait considéré tous les congés de maladie dont la durée a
été supérieure à trois jours (incluant ainsi les congés de
maladie ordinaire et les congés de maladie longue durée
durant l’année écoulée). Pour le groupe des conjoints, ce
taux correspondait pour la plupart à des congés motivés
par la maladie bipolaire alors que pour le groupe témoin,
il s’agissait plus de congés ordinaires.
La différence entre les deux groupes concernait plutôt
la vie sociale, puisque les conjoints de patients bipolaires
se caractérisaient par significativement moins de relations
amicales (34 % vs 63,3 %, p= 0,0007), moins de loisirs (43,9 %
vs 63,3 %, p= 0,007) et par une moindre entente dans le
couple (20 % vs 46,6 %, p= 0,0001). Parmi les conjoints qui
ont décrit leur relation de couple comme conflictuelle, 30 %
ont envisagé à un moment donné le divorce (Tableau 1).
Tableau 1 Comparaison des données sociodémographiques entre les deux groupes d’étude.
Variables sociodémographiques Groupe des conjoints Groupe des témoins p
Âge en moyenne 45 ans et 6 mois ±10,82 45 ans et 6 mois ±10,82 NS appareillement
Sex-ratio 0,66 0,66 NS appareillement
Niveau socioéconomique bas 33,3 % 33,3 % NS appareillement
Taux de mariage 100 % 100 % NS appareillement
Avec profession 73,7 % 60 % NS
Niveau d’instruction bas 46,7 % 36,8 % NS
Zone de résidence urbaine 73,3 % 76,7 % NS
Nombre d’enfants 2,8 2,4 NS
Durée du mariage inférieure à 20 ans 53,3 % 46,6 % NS
Sans habitudes de vie 53,3 % 40 % NS
Congés de maladie durant l’année 46,2 % 33,3 % NS
Couverture sociale 80 % 86,7 % NS
Relations amicales 34 % 63,3 % 0,0007
Activités de loisirs 43,9 % 63,3 % 0,007
Entente dans le couple 20 % 46,6 % 0,0001
44 F. Ellouze et al.
Tableau 2 Comparaison des scores moyens standardisés de la SF-36 pour les groupes de conjoints et témoins.
Variables Modalités Conjoints (%) Témoins (%) p
Score moyen global Altérée 60 40 0,007
Bonne 40 60
Composante physique Altérée 32,7 46 NS
Bonne 67,3 54
Composante mentale Altérée 59 26,5 <10
4
Bonne 41 73,5
Santé physique
D1 standardisée
Altérée 26,7 37 NS
Bonne 73,3 63
Limitations dues à la santé
physique D2 standardisée
Altérée 50 46,7 NS
Bonne 50 53,3
Douleur physique
D3 standardisée
Altérée 23,3 23,3 NS
Bonne 76,7 76,7
Santé psychique
D4 standardisée
Altérée 76,7 46 <10
4
Bonne 23,3 54
Limitations dues à la santé
psychique D5 standardisée
Altérée 68,5 34 <10
4
Bonne 31,5 66
Vie et relation avec les autres
D6 standardisée
Altérée 83,3 43,3 <10
4
Bonne 16,7 56,7
La vitalité D7 standardisée Altérée 43,3 53,3 NS
Bonne 56,7 46,7
La santé perc¸ue
D8 standardisée
Altérée 61,2 34,3 <10
4
Bonne 38,8 65,7
Évaluation de la qualité de vie des conjoints en
comparaison à la population générale
Selon une approche catégorielle
Le groupe des conjoints présente une qualité de vie moindre
par rapport au groupe témoin (qualité de vie altérée
parmi 60 % des conjoints contre 40 % pour les témoins) :
la différence est significative (p= 0,007). L’altération étant
significativement marquée pour les dimensions CM (59 % vs
26,5 %), santé psychique D4 standardisée (76,7 % vs 46 %),
limitations dues à la santé psychique D5 standardisée (alté-
rée parmi 68,5 % vs 34 %), vie et relation avec les autres
D6 standardisée (83,3 % vs 43,3 %) ainsi que la santé perc¸ue
D8 standardisée (61,2 % vs 34,3 %).
Il n’existait pas en revanche de différence entre les deux
groupes pour les variables : composante physique (32,7 % vs
46 %), la santé physique D1 standardisée (26,7 % vs 37 %),
limitations dues à la santé physique D2 standardisée (50 % vs
46,7 %), douleur physique D3 standardisée (23,3 % vs 23,3 %),
la vitalité D7 standardisée (43,3 % vs 53,3 %). (Tableau 2).
Selon une approche dimensionnelle
Dans l’approche dimensionnelle, les conjoints présentaient
une altération significative de la qualité de vie par rapport
aux témoins (score moyen global 51,1 vs 68,2). Cette alté-
ration intéresse en particulier la CM standardisée (41,3 vs
59,8), D4 santé psychique (47,4 vs 69,6), D4 santé psychique
standardisée (42,6 vs 61,5), D5 limitations dues à la santé
psychique (51,1 vs 66,3), D5 limitations dues à la santé psy-
chique standardisée (46,3 vs 54,3), D6 vie et relation avec les
autres (56,7 vs 71), D8 la santé perc¸ue (50,6 vs 68,5), ainsi
que D8 la santé perc¸ue standardisée (47,8 vs 65,2).
Il n’existait pas de différence significative entre les
deux groupes pour la composante physique standardisée
(52,9 vs 54,7), D1 santé physique (88,3 vs 88,1), D1 santé
physique standardisée (54,4 vs 49,7), D2 limitations dues à
la santé physique (68,9 vs 64,1), D2 limitations dues à la
santé physique standardisée (42,3 vs 53,4), D3 douleur phy-
sique (66,5 vs 71), D3 douleur physique standardisée (46,7 vs
44,4), D6 vie et relation avec les autres standardisée (52,4 vs
45,2), D7 la vitalité (41,3 vs 51,1) et D7 la vitalité standardi-
sée (40,1 vs 43,2) (Tableau 3).
Discussion
Limites de notre étude
Notre travail est une étude de type transversal qui a
l’avantage d’être facile à exécuter mais qui ne permet pas
d’avoir une vision longitudinale en matière de qualité de vie.
Le nombre réduit de notre population de conjoints constitue
une autre limite à ce travail.
Conjoints et trouble bipolaire 45
Tableau 3 Comparaison des scores moyens de la SF-36 entre les groupes de conjoints de bipolaires et témoins.
Variables étudiées Conjoints de patients bipolaires Témoins p
Score moyen global 51,1 68,2 0,002
Composante physique standardisée 52,9 54,7 NS
Composante psychique standardisée 41,3 59,8 0,0003
D1 Santé physique 88,3 88,1 NS
D1 Santé physique standardisée 54,4 49,7 NS
D2 Limitations dues à la santé physique 68,9 64,1 NS
D2 Limitations dues à la santé physique standardisée 42,3 53,4 NS
D3 Douleur physique 66,5 71 NS
D3 Douleur physique standardisée 46,7 44,4 NS
D4 Santé psychique 47,4 69,6 0,004
D4 Santé psychique standardisée 42,6 61,5 < 104
D5 Limitations dues à la santé psychique 51,1 66,3 0,003
D5 Limitations dues à la santé psychique standardisée 46,3 54,3 0,002
D6 Vie et relation avec les autres 56,7 71 <104
D6 Vie et relation avec les autres standardisée 52,4 45,2 NS
D7 La vitalité 41,3 51,1 NS
D7 La vitalité standardisée 40,1 43,2 NS
D8 La santé perc¸ue 50,6 68,5 < 104
D8 La santé perc¸ue standardisée 47,8 65,2 < 104
Étude de la qualité de vie chez les conjoints de
patients bipolaires comparativement au groupe
témoin
Les études qui se sont intéressées à la qualité de vie des
conjoints de patients bipolaires notaient son altération au
long cours [7,15], bien que ce constat soit enregistré de
manière plus manifeste en phase de décompensation.
À travers notre étude, il apparaît que l’altération de
cette qualité de vie est notée en phase euthymique. Il
s’avère en effet que le retentissement de la maladie
bipolaire dépasse les périodes de décompensations pour
inclure aussi les phases de rémissions, notamment avec la
stigmatisation, la modification de la vie affective et les
responsabilités. Cela est expliqué, d’une part, par le fait
que le trouble bipolaire soit considéré de plus en plus
comme une «maladie à temps plein »en raison de la fré-
quence des symptômes subsyndromiques entre les épisodes,
de l’importance de la comorbidité, et, d’autre part, du fait
même du caractère cyclique de cette maladie qui ne per-
mettrait pas une bonne adaptation du conjoint [3,4].
Dans notre étude, les conjoints des patients bipolaires
avaient une qualité de vie significativement plus altérée
que les témoins aussi bien dans l’approche catégorielle
(60 vs 40) que dans l’approche dimensionnelle (51,1 vs
68,2). De cette double comparaison, il s’avère globalement
que c’est la composante psychique qui en est responsable.
L’altération de la qualité de vie des aidants naturels
(y compris des conjoints) de patients bipolaires serait en
rapport avec un surplus de responsabilité, de stress, de
problèmes financiers et de problèmes de santé, de stigmati-
sation, de perte de la sécurité et de la personne aimée [9].
Stigmatisation
Dans notre étude, les conjoints ont rapporté une réduction
significative de leur cercle relationnel (66 % vs 3,6 %) et de
leurs activités de loisir (56,1 % vs 36,6 %). Une des premières
causes de l’augmentation de la charge de l’aidant est la
stigmatisation. [13,19].
La stigmatisation des malades mentaux est un phéno-
mène mondial, les membres de la famille qui s’occupent
de ces patients en souffrent aussi. Cette stigmatisation per-
sisterait même durant les phases de rémission [19].
En cas de maladie bipolaire, la stigmatisation prive le
conjoint du soutien accordé par les membres de la famille.
La maladie le prive du soutien de son partenaire malade
[12]. En effet, dans notre étude, la relation de couple est
décrite comme altérée dans 80 % des cas parmi les conjoints
de bipolaires.
Comportements pathologiques du malade et perte de la
sécurité
Il ne semblerait pas que la nature de l’épisode thymique
(maniaque ou dépressif) ait plus d’impact sur le conjoint
du patient bipolaire. Les études sont divergentes sur ce
point [4] ; ce qui est cependant reconnu unanimement,
c’est l’existence d’un certain nombre de symptômes qui
«dérangent »l’entourage du patient bipolaire : durant la
phase maniaque, les comportements impulsifs du patient,
l’agressivité, la violence, l’agitation, la désinhibition et
l’insomnie sont la principale source de stress [18,20].En
phase dépressive, la baisse de l’estime de soi, l’isolement,
l’asthénie, les idées et les tentatives de suicide sont les plus
mis en avant par la famille [4].
Problèmes financiers
Ils peuvent être dus à l’impact de la maladie sur l’emploi
du patient bipolaire. D’un autre côté, l’emploi du conjoint
est aussi menacé par les absences ou les retards que peut
engendrer l’état du patient [4]. Dans notre étude, 46,2 %
des conjoints étaient en congé de maladie contre 33,3 % des
témoins.
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