Episode 1 : Un animal étrange a été trouvé dans la rade de Villefranche.
En janvier et février des morceaux de tubes gélatineux d’environ 10 à 12 cm flottaient à la surface
de la rade et il ne se passait pas un jour sans que l’on apporte 1 ou 2 de ces objets au laboratoire. A
l’intérieur du tube, on pouvait voir, à l’œil nu, un autre tube de texture plus ferme, plus consistante, mais
qui contenait, lui aussi, une substance gélatineuse. Avec une loupe on constatait qu’il porte des
bourgeons plus ou moins alignés sur la face que nous appellerons ventrale. Et en regardant plus
soigneusement le tube interne on pouvait voir à côté de ces bourgeons qui sont des amas de petites
cellules, de grosses cellules amiboïdes qui semblent se promener librement dans cette matière
gélatineuse.
Sur certains morceaux de tube, il y a de grosses protubérances, de gros bourgeons, qui semblent
fixées par un pédoncule sur le tube interne. Ce sont des individus, d’environ 7 mm de long, légèrement
teintés de rouge, séparés les uns des autres. Ils paraissent posséder une branchie et des organes dont la
structure évoque un appareil digestif et des gonades.
D’autres morceaux de tube portaient des protubérances plus petites, de 4 mm de long. A la loupe on
remarquait sur leur pédoncule quelques points rouges, ainsi que sur des papilles situées à l’entrée d’une
sorte de pharynx. On pouvait reconnaître un appareil digestif mais il n’y avait aucune trace de gonades.
Il était difficile de conserver, dans un bocal d’eau de mer, ce tube muqueux intact plus d’une heure.
Il se dissociait et les individus étaient alors dispersés. Aussitôt récolté, il devait être fixé. Dans ces
conditions il était alors possible de faire des coupes histologiques qui sont indispensables pour
comprendre la structure de cet ensemble de bourgeons énigmatiques. L’histologie est maintenant une
technique de pointe qui complète les dissections et on peut trouver des microtomes dans tous les
laboratoires.
Ces tubes gélatineux sont certainement des morceaux d’un animal de grande taille. On en avait
aussi été rencontré en hiver, à Naples, mais à la « Stazione Zoologica », où on pêche quotidiennement les
animaux planctoniques, personne n’avait de nom pour ces choses. L’animal en entier est encore inconnu,
mais les individus que portent ses morceaux ressemblent étrangement à des tuniciers.
Jules Barrois pouvait écrire ces remarques en 1885.
Suite résumée pour ceux qui sont pressés : clic
Figure 1:Voici un morceau de tube gélatineux ,d’envirion 12 cm, récolté pendant l’hiver
1883-1884. Dans son axe se trouve un autre tube contenant des cellules, ou des groupes de
cellules, de différentes tailles. (d’après la reproduction lithographique des dessins de Jules
Barrois (1885), planche VIII, figure 1. On a ajouté des cercles pour souligner le volume du
tube gélatineux et à l’intérieur du tube prolifère portant les bourgeons).
(à suivre)