1 LE RAPPORT MONDIAL SUR LE DEVELOPPEMENT HUMAIN ET L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE : QUELQUES ENSEIGNEMENTS Par Professeur Moustapha KASSE Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 2 INTRODUCTION A l’orée du nouveau millénaire, les richesses continuent de croître de façon importante dans le monde. A contrario, les disparités s’accentuent dans la répartition de cette richesse et dans le rythme de consommation. Même dans les pays du Sud, particulièrement ceux d’Afrique Subsaharienne, on note une forte tendance à l’aggravation des inégalités. Au cours des trente dernières années, la part des 20% des personnes les plus pauvres dans le revenu mondial est tombée de 2,3% à 1,4%. Dans la même période, la part des 20% les plus riches passait de 70% à 85%. L’écart de revenu entre les 20% les plus riches et les 20% les plus pauvres a ainsi doublé passant d’un rapport de 30 (riche) sur 1 (pauvre) à un rapport de 61 sur 1. Ces inégalités sont considérées comme la conséquence d’une dynamique de marché darwiniste et discriminatoire qui récompense les plus forts et ne réserve rien pour les perdants qui proviennent principalement d’Afrique. C’est une réalité choquante qui constitue «la toile de fond de l’économie mondiale aujourd’hui» (Brisset 1993) : richesse et infortune, chance et adversité, ressources et dénuement se sont en effet partagés d’une manière de plus en plus inégale, les riches devenant plus riches et les pauvres plus pauvres. L’économie des «buffets» coexiste avec celle des «soupes populaires». Pourtant, jamais l’humanité n’a produit autant de richesses économiques, financières et technologiques mais aussi, jamais elle n’a crée autant de pauvreté et d’exclusion de tous ordres. Depuis 1990, date de la parution de son premier rapport mondial, le PNUD contribue à étudier et à approfondir régulièrement les différents aspects constitutifs du développement humain. Le débat sur la problématique du développement était dominé, jusqu’au début des années 90, par l’arsenal théorique néo-classique et néo-keynésienne de la monnaie et des relations économiques et financières internationales qui inspire et éclaire la démarche des institutions de Bretton Woods. Leurs interventions visant l’augmentation de la production dans les pays en développement s’articulent autour des réformes macroéconomiques et structurelles pour l’instauration d’une croissance économique durable. Ces réformes qui ont été présentées au début comme une série de mesures de court et moyen terme de stabilisation et d’ajustement puis de "désétatisation" recouvrent des implications majeures pour le choix des stratégies de développement et l’échelle de mesures des performances économiques. Dans la perspective de ces institutions, acceptée au fur et à mesure par les gouvernements des pays africains, les rapports de pouvoir économique surclassent les préoccupations de bien-être. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 3 Les programmes inspirés par ces institutions, loin d’être politiquement neutres et de jouer un rôle exclusif d’efficacité technique comme on le suggère, sont ainsi conçus de façon à orienter les interventions de l’Etat de manière à délaisser certaines stratégies de développement. Les stratégies non orientées vers l’exportation et celles qui favorisent des mesures redistributives et des réformes sociales sont remises en cause par le processus d’ajustement et de désétatisation. C’est ainsi que dans leur majeure partie, les pays en développement, notamment ceux d’Afrique subsaharienne, ont mis en œuvre des programmes d’ajustement inspirés par les institutions de Bretton Woods. La première génération des PAS avait pour finalité de stabiliser le cadre macroéconomique de ces pays alors marqué par des déséquilibres importants (faible épargne publique en raison du niveau élevé de la propension moyenne à consommer de l’économie, déficit budgétaire et niveau d’inflation élevés, aggravation des déficits courants). Les réformes ayant marqué cette phase des PAS se sont traduites par des politiques monétaires et surtout budgétaires très restrictives qui ont entraîné une forte compression de la demande et, en conséquence, des processus inextricables de recomposition sociale. Les modification dans la répartition des revenus des non producteurs vers les producteurs, des villes vers les campagnes, les pertes en emplois formels, l’évolution contrastée des revenus ruraux, la désynchronisation prix/salaires ont progressivement créé une dimension sociale de l’ajustement. Cette situation avait entraîné des programmes de compensation sociale consacrés à l’emploi, à l’éducation, à la santé et à l’alimentation et destinés aux groupes dits vulnérables. La deuxième génération des PAS, celle dite d’ajustement réel, avait pour objectif de relancer l’activité économique. En dépit des réformes mises en œuvre lors de cette phase, le rythme de l’activité économique n’allait pas être à la hauteur des résultats escomptés ; le taux de croissance du PIB évoluant en-dessous de celui démographique. La phase d’ajustement externe, qui s’est traduite par des mesures de dépréciations compétitives pour les monnaies à taux de change flexible et de dévaluation pour celles à parité fixe, sera dans l’ensemble marquée par une relative reprise de la croissance. Mais en dépit de celle-ci, le taux de croissance du PIB/tête est demeuré trop faible par rapport au rythme d’accroissement de la population. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 4 Cette situation allait entraîner une forte dégradation des conditions de vie des populations. Ce coût social élevé des PAS, allait très tôt être mis en relief par le PNUD au moment où les autres institutions et la plupart des analystes se concentraient sur les aspects strictement économiques de ces réformes. L’aggravation manifeste de la condition sociale des populations défavorisées dans les pays en développement dès le début des années 80 alarme les ONG aussi bien que les institutions internationales tel que le BIT, et l’UNICEF (Ajustement à visage humain 1984) accusent directement les mesures de stabilisation et d’ajustement structurel. Cette situation est attribuée à la détérioration du cadre macroéconomique et financier, à la récession économique internationale, à la dégradation des termes de l’échange et à l’endettement massif. Dans les pays soumis aux programmes d’ajustements structurels, les conséquences des mesures accentuent les difficultés de la population : le freinage de la demande et de compression des dépenses publiques se traduisent par un recul des dépenses sociales, une baisse des effectifs de la fonction publique, une réduction de la fréquentation des écoles et des centres de santé. Les réformes visant la réduction des déficits et la relance de la croissance débouchent sur une dégradation du développement humain avec une recrudescence de la pauvreté. Plusieurs ONG et institutions internationales mettent en cause les programmes d’ajustement : le BIT (1990), la FAO (1990) ainsi que des chercheurs ( P. Hugon (1989), H. Singer (1989), Loxley (19...) etc. C’est sur le terrain de la réconciliation entre la croissance économique et le développement social que le PNUD se sépare du cadre de référence dominant pour s’élever en créant le concept du Développement Humain Durable (DHD). Le premier Rapport Mondial sur le Développement Humain (RDMH) publié en 1990 par le PNUD définit un Indice composite du Développement Humain (IDH) prenant en compte l’ensemble des dimensions de la vie humaine : économique certes, mais aussi sociale, culturelle et politique. Cet indicateur est calculé en combinant le PNB par tête (instrument de mesure de la situation socio-économique d’une nation), avec d’autres indicateurs tels que : l’espérance de vie à la naissance, le taux d’alphabétisation des adultes et le taux de scolarisation. Au regard de l’évolution des RMDH, il apparaît que le défi majeur est la réduction de la pauvreté et des inégalités ainsi que l’investissement dans les ressources humaines. Les voies et moyens pour y parvenir passent entre autres par l’amélioration de la gestion des affaires publiques et la restructuration des institutions de gouvernance, la participation des populations à l’élaboration et Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 5 l’exécution des programmes les concernant, la croissance économique, le droit au développement et à la participation des femmes. Les thèmes abordés ont tour à tour porté sur des questions bien évidentes du développement : - La définition et la mesure du développement humain (1990) ; - Le financement du développement (1991) ; - Les aspects mondiaux du développement humain (1992) ; - La participation populaire au développement humain (1993) ; - Les nouvelles dimensions de la sécurité humaine (1994) ; - l’égalité sociologique entre les genres et le développement humain (1995) - Le lien croissance économique et développement humain (1996) ; - Le développement humain au service de l’éradication de la pauvreté (1997) ; - Les modes de consommation et le développement humain (1998) ; - La mondialisation à visage humain (1999) ; - Les droits de l’homme et le développement humain (2000). Le contenu des Rapports s’est enrichi et s’est techniquement amélioré au fil des années avec un affinement plus poussé de la thématique et des instruments de diagnostic ou de mesure. Le contenu du RMDH intègre progressivement la dimension sociale qui est mieux prise en charge dans l’IDH. Le Rapport de 1994 marque un tournant significatif : le concept de développement humain est complètement dissocié de celui de la croissance économique. Ce concept est fondé sur l’universalité du droit à la vie qui accorde à celle-ci une valeur intrinsèque sur laquelle s’appuient les concepts fondamentaux de liberté, d ‘égalité et de justice. «Un nouveau défi du développement devrait : i) être axé sur l’être humain, ii) considérer la croissance comme un moyen et non comme une fin, iii) préserver les perspectives offertes aux générations actuelles comme aux générations futures, et iv) respecter les écosystèmes dont dépend l’existence de tous les êtres vivants. Cette approche du développement doit permettre à tous les individus de développer pleinement leurs capacités pour les utiliser au mieux dans tous les domaines : économiques, social, culturel et politique» (RMDH, 1994). Cette prise en compte de la dimension humaine du développement par les praticiens est en correspondance avec les avancées théoriques intervenues depuis la fin des années 80 avec les théories de la croissance endogène. Plus qu’une simple notion, le développement humain durable (DHD) fait référence à un système complet de modèles : modèles de production, modèles de reproduction sociale, modèles de répartition, modèles de participation, modèles d’institutionnalisation, modèles de socialisation. Plus succinctement, il gravite autour de la réflexion théorique, la conception et la Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 6 définition de l’archétype d’un développement Humain Durable et le «design» de nouvelles stratégies en fournissant de nouveaux instruments d’analyse et de nouveaux systèmes de mesure et d’évaluation des conséquences des politiques économiques. Cette approche remet en question des idéologies, mythes et thèses longtemps présents dans nos sociétés. En effet, il convient de reconnaître que cette conception est plus vaste et plus rigoureuse que les théories classiques du développement économique jusqu’ici connues comme : • les modèles de croissance qui se réduisent à des arguments strictement quantitatifs avec des relations mathématiques entre les facteurs de production retenus ; • les théories des ressources humaines qui mettent en avant le l’effet cumulatif, pour la croissance, d’un facteur de production jusqu’alors mal identifié que constitue l’homme, du point de vue quantitatif et qualitatif ; • les théories du «Welfare Economics» qui considèrent des usagers et des bénéficiaires de biens collectifs sans pour autant s’interroger sur leur valorisation en tant qu’acteurs de base des processus décisionnels ; et • Les théories des besoins de base qui se penchent sur les démunis au mépris de l’expansion des capacités et des opportunités qui s’offrent aux hommes. Ces théories ont chacune une faiblesse manifeste tandis que celle du Développement humain tire sa légitimité dans une philosophie universaliste. En cela, elle se fonde sur le refus de toute forme d’injustice, d’exclusion et de discrimination. Avec elle, un recentrage systématique s’est opéré aujourd’hui, autour de la priorité aux pauvres et de l’effort d’élargissement de leur liberté de choix et de décision. Le PNUD a mis en exergue la nécessité d’obtenir un consensus social par le biais du jeu démocratique. Il a permis de déplacer le débat du libéralisme versus interventionnisme vers les questions relatives à la dignité de l’être humain dorénavant appréhendé en tant que sujet multidimensionnel et non plus objet unidimensionnel. Le RMDH allait ainsi depuis sa parution en 1990, remédier à l’hérésie qui consistait à restreindre le développement à la croissance économique. La démarche du PNUD plaçait l’individu – ses besoins, ses aspirations et ses capacités - au centre de l’effort de développement (RMDH, 1999). En ce sens, les RMDH fournissent sur les différents thèmes étudiés une démarche Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 7 alternative et novatrice par rapport aux approches conventionnelles de la problématique du développement économique et social. Ils ont fini par utiliser une méthodologie et des orientations quelque peu différentes de celles des institutions de Brettons Woods et qui permettent de disposer d’éclairages nouveaux sur les questions de développement. Ils offrent, par conséquent, des instruments d’investigation et d’analyse au service d’une autre vision qui intègre toutes les dimensions de l’activité humaine. Cette perspective des RMDH de percevoir les problèmes de développement autrement est sans doute liée au mode production du rapport marqué par une indépendance vis-à-vis des décideurs et des autres institutions. Ce degré de liberté permet ainsi d’aborder des thèmes originaux en matière de pensée du développement et d’élargir le champ de réflexion sur ces questions. Les RMDH qui se présentent, en définitive, comme un cadre de conception et d’élaboration d’instruments de lutte pour le développement humain, vont permettre la construction de plusieurs indicateurs de mesure du développement humain pour apprécier les avancées mais aussi les reculs de la condition sociale. L’Afrique est concernée au premier chef par cette approche. Le continent africain est la région du monde la plus pauvre, sa production moyenne par habitant à la fin des années 90 est inférieure à ce qu’elle était en 1960, sa part dans le commerce mondial a reculé. Au niveau social, la situation est simplement catastrophique avec 250 millions de personnes qui n’ont pas accès aux service de santé, 140 millions d’analphabètes et 2 millions d’enfants qui meurent chaque année avant leur premier anniversaire. Le continent s’intègre difficilement dans le concert des nations : en marge de l’expansion industrielle mondiale, il risque d’être exclu de la révolution mondiale des technologies de l’information et des télécommunications (Rapports de 1999 et 2001). De nombreux pays entreprennent des réformes pour relancer les enjeux du développement et de la croissance en mettant en place un mode d’organisation sociale capable d’allonger une vie «en bonne santé», de fournir l’accès au savoir, d’offrir une bonne santé et de renforcer la participation des populations aux prises de décision qui engagent leur avenir. Il est par conséquent légitime de se demander si la situation africaine de crise est bien prise en charge par les RMDH au double plan théorique et pratique. En d’autres termes, les thèmes abordés dans les différents RMDH ont-ils une pertinence avérée pour le continent et qu’apportent-ils aux acteurs du développement social : les décideurs, les chercheurs, les ONG et autres ? Les instruments d’analyse et de calcul sont-ils techniquement appropriés et permettent –ils de mieux connaître Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 8 les réalités africaines afin de mieux les transformer ? Que faire pour que les RMDH répondent au mieux aux nouveaux besoins du Continent en termes de vision nouvelle et de stratégie pour la réaliser ? I- LES DEFIS DU DEVELOPPEMENT AFRICAIN : LES REPONSES ALTERNATIVES DES RMHD SONT-ELLES SUFFISANTES Le RMDH malgré des mutations à la fois profondes et accélérées du contexte économique, politique et social tant au niveau mondial qu’à celui des pays africains prend l’initiative du débat sur certaines questions essentielles de développement économique. La globalisation devenue la principale configuration du processus productif mondial se caractérise par une triple interdépendance et une internationalisation spectaculaire des échanges, des productions et des systèmes financiers ( Rapport de 1999). Elle est servie par une révolution scientifique et technique d’une rare ampleur : les Nouvelles Technologie de l’Information et de la Communication. Aujourd’hui il faut reconsidérer le débat sur le développement sous ce faisceau de faits d’une mondialisation sous forme «d’économie d’archipel» inégalitaire et duale avec des centres constitués de réseaux horizontaux de production ; d’échanges et des périphéries souvent perçues comme une charge stérile et non plus comme un complément utile. Les RMDH offrent une bonne grille de lecture qui permet d’éviter l’engrenage des écoles des pensées et leurs controverses pas toujours adossées au réel. 1-1. Quels sont les termes du débat sur le développement ? Le débat sur le développement était dominé, jusqu’au début des années 90, par les théories néo-classiques et néo-keynésiennes qui recommandaient aux pays en développement des objectifs d’une croissance régulière, harmonieuse, équilibrée et au taux le plus élevé possible compte tenu des ressources disponibles. Les facteurs de blocage sont à chercher dans les déficits macroéconomiques, la gestion monétaire laxiste et l’appréciation du taux de change qui sont eux-mêmes liés à deux phénomènes : l’excès de la demande globale sur l’offre et les distorsions dans la formation des prix sur les divers marchés des biens et services, du travail, des capitaux et de change. Dans les années 80, suite à la crise de la dette, l’intervention des Institutions de Bretton Woods dans le débat sur le développement va s'accompagner de profondes transformations, tant dans la pratique que dans la réflexion. Une nouvelle ère en matière de développement est ouverte, que les Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 9 spécialistes vont assimiler au «consensus de Washington» qui remettait en cause la théorie du développement et la spécificité des sociétés sousdéveloppées. Il constitue en somme une sorte de revanche de la théorie néoclassique qui servent de référentiel aux nouveaux programmes. Du point de vue théorique, le consensus de Washington proclame le primat du marché dans l'allocation des ressources et l’évacuation de l’Etat dans le champ économique. Ce discours se rattache à la doctrine de l'équilibre général qui conçoit la possibilité d'une économie décentralisée suite à l'émergence des prix d'équilibre résultant de la confrontation sur le marché de l'offre et de la demande des agents économiques. D'autre part, le consensus de Washington remet à l'ordre du jour les théories de l'avantage comparatif pour critiquer les choix d'import-substitution ou d'industrialisation liée au marché interne, et pour justifier une insertion internationale basée sur la spécialisation fondée sur les dotations factorielles naturelles. Ainsi, désengagement de l'Etat, régulation marchande et avantages comparatifs pour une croissance durable seront les maîtres-mots des nouvelles réformes. En pratique les mesures des réformes se sont traduites par une détérioration des conditions de vie des populations et par un accroissement de la pauvreté. Elles ont accéléré la décomposition des normes en crise et approfondi ainsi la régression économique et sociale. Dans ce contexte, la violence, le chaos et l'insécurité deviennent les caractéristiques de grandes régions africaines Rapport de 1994). Il est évident que ces politiques ont échoué dans ce qui était leur objectif principal : l’instauration d’un processus vertueux et irréversible de croissance économique. Les faibles performances de ces politiques découlant du Consensus de Washington proviennent, comme le note J. STIGLITZ, de la confusion des moyens avec les fins : la libéralisation, la recherche des grands équilibres, les privatisations sont prises comme des fins plutôt que comme des moyens d’une croissance durable, équitable et démocratique. Ensuite, elles se sont «beaucoup trop focalisées sur la stabilité des prix plutôt que la croissance et la stabilité de la production. En outre, elles n’ont pas su reconnaître que le renforcement des institutions financières est aussi important pour la stabilité économique que la maîtrise des déficits budgétaires et de la masse monétaire. Enfin, elles se sont concentrées sur les privatisations, mais n’ont guère attaché le minimum d’importance à l’infrastructure institutionnelle nécessaire au bon fonctionnement des marchés, et particulièrement à la compétitivité. Cet échec des PAS appelle des recherches et réflexions sur une vison nouvelle et un programme alternatif pour l’avenir fondé sur le développement que l’on peut considérer comme une transformation de la société. Il allie Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 10 alors, comme le montre le schéma qui suit, les relations réciproques entre croissance économique et développement humain : Tableau 1 : Lien développement humain (DH) – croissance économique (Cr). Cycle A DH→ → Cr DEVELOPPEMENT HUMAIN Capacités des entrepreneurs, directeurs, travaille Taux de scolarité. Couverture maladie Dépenses des ménages en produits de développement humain et répartition au sein des ménages Ratios sociaux et de priorité Organisation de la production, R & D, importations et adaptations technologiques Structure de la production et des exportations Epargne étrangère Revenu des ménages et aux de pauvreté Ressources publiques et ratios de dépense Capital social Politique environnementale Distribution des revenus Stock du capital physique Cycle B Cr → DH Epargne domestique Croissance par PIB En reprenant J.Stiglitz, le développement représente une transformation de la société, le passage de relations traditionnelles, de modes de pensée traditionnels, de façons traditionnelles de traiter la santé et l’éducation, de méthodes traditionnelles de production, vers des approches plus «modernes». Par exemple, l’une des caractéristiques de la société traditionnelle est d’accepter le monde tel qu’il est. L’optique moderne reconnaît le changement, admet que nous pouvons agir individuellement et collectivement afin, par exemple, de réduire la mortalité infantile, d’augmenter l’espérance de vie et d’accroître la productivité. La clé de ces changements est l’évolution vers des modes de pensée «scientifiques», repérant les variables qui influent de façon déterminante sur la production, s’efforçant de faire des déductions fondées sur Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 11 des données fiables et sachant reconnaître ce qu’on sait et ce qu’on ne sait pas. Cette nouvelle économie du développement regroupe l'ensemble des pratiques théoriques qui s'éloignent du modèle walrassien en reconnaissant les imperfections du marché et l'incapacité des politiques de stabilisation et d'ajustement orthodoxe inspirées de ce modèle de base à opérer les transformations nécessaires à une reprise durable de la croissance dans les pays africains. La grande difficulté des politiques d’ajustement est de concilier les mesures d’ordre sectoriel pour obtenir la croissance dans l’équité. Face à cette situation, les mesures spécifiques comme la protection des couches vulnérables, ainsi que la protection des intérêts de la population à long terme ont été appuyées par la banque mondiale. Par la suite on a intégré la dimension sociale aux programmes futurs d’ajustements. Ce coût social élevé des PAS, allait très tôt être mise en relief par le PNUD. Le PNUD confirme cette orientation en mettant l’homme au cœur de la logique de l’économie politique. Egalement, il met en exergue la nécessité d’obtenir un consensus social par le biais du jeu démocratique. Le débat va se déplacer du libéralisme versus interventionnisme vers les questions relatives à la dignité de l’être humain dorénavant appréhendé en tant que sujet multidimensionnel et non plus objet unidimensionnel. 1-2. Portée et limite de la vision du développement à travers les RMDH Le PNUD à partir de son Rapport de 1994 va jouer un rôle important dans la réflexion théorique, la conception et la définition de la problématique du développement. Ce Rapport en dissociant le cycle de la croissance de celui du développement, marque un tournant significatif dans la rupture avec l’économisme dominant. Il est observé que «le nouveau paradigme du développement devra être axé sur les gens, considérer la croissance comme un moyen et non comme une fin, préserver les perspectives offertes aux générations actuelles comme aux générations futures, et respecter les écosystèmes dont dépend l’existence de tous les êtres humains. Ce paradigme du développement doit permettre à tous les individus de développer pleinement leurs capacités pour les utiliser au mieux dans tous les domaines : économique, social, culturel et politique». (PNUD, 1994). L’homme est ainsi replacé au cœur de la logique du développement. Désormais, la qualité de la vie d’une population ne se réduit plus à l’importance de son PIB. Le contenu Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 12 de ce dernier, la façon dont il est réparti avec plus ou moins d’inégalités, la capacité de chacun à pouvoir accéder aux services de base que sont l’école, la santé, le logement ou l’eau courante et la qualité des services en question, tous ces éléments jouent autant, sinon davantage que le simple niveau du PIB. Cette nouvelle orientation est-elle à mesure de prendre en charge les questions du développement économique et social qui se posent à l’ensemble des pays africains. En définitive, «ce sont les êtres humains qui sont en concurrence les uns avec les autres au niveau individuel, au niveau des entreprises ou d’états nations. Dans cette compétition, la capacité de l’homme à conquérir son environnement, à concevoir les institutions et les politiques efficaces ainsi qu’à gérer les ressources mises à sa disposition est essentielle. Les contraintes imposées par un climat instable et par la pauvreté des sols peuvent être surmontées par l’éducation, l’irrigation, la recherche scientifique et les services de vulgarisation par les infrastructures de stockages améliorés,… C’est la capacité humaine qui peut intégrer certaines contraintes imposées par la nature mais la capacité est elle même la manifestation du développement humain». II- LES QUESTIONS DU DEVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE SONT-ELLES BIEN PRISES EN CHARGE PAR LES RMDH ? Les RMDH sont des documents qui ont le monde pour cadre, en conséquence, les études et les analyses sont censées reflétées des réalités économiques, sociales et politiques extrêmement contrastées et assez hétéroclites. Du point de vue du développement humain, le mode est inégal, les écarts de revenus entre le Nord et le Sud n’ont jamais été aussi importants. La qualité de vie s’améliore dans les pays riches et se dégrade dans les pays pauvres. En exemple, de 1 à 12 en 1950, l’écart de PIB par habitant entre l’Afrique et les Etats-Unis est passé aujourd’hui de 1 à 18. Près des trois quarts de la population mondiale restent en marge de la croissance que les pays développés connaissent depuis cinquante ans : les revenus de 4,3 milliards de personnes ont diminué ou ont très faiblement progressé. Le niveau moyen de revenu par habitant en Afrique est aujourd’hui plus faible qu’il y a trente ans. Avec les pays émergents d’Asie et d’Amérique Latine, le Sud a complètement perdu de son unité. Cette diversité que doit gérer les RMDH soulève trois questions essentielles auxquelles il faut apporter des éléments de réponse. D’abord quelle est la place de l’Afrique dans les RMDH ? Les analyses faites dans ces rapports sont-elles bien adossées aux réalités africaines ? Ensuite, les thèmes sont-ils en adéquation avec les préoccupations de l’Afrique ? Enfin, les conclusions et recommandations répondent-elles aux attentes des pauvres ? Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 13 2-1. Les analyses positives comme normatives sont-elles bien adossées aux réalités africaines ? Selon G. Ranis, si l’on définit le développement humain comme le processus permettant d’élargir les choix des personnes, afin qu’elles puissent mener une vie longue, saine et créative ou encore l’amélioration des revenus, de l’espérance de vie, du système éducatif et sanitaire, ce développement humain est étroitement lié à la croissance. La croissance économique fournit les ressources nécessaires au développement humain, mais aussi, l'amélioration de la qualité de la main-d'œuvre contribue fortement à la croissance économique. Ce sont les deux cycles que les RMDH révèlent (Rapport 1996). Pourtant, il n’en va pas ainsi pour l’Afrique où les faits montrent une absence de lien automatique entre la croissance d’une part, le développement humain et l’emploi d’autre part. En effet, les réformes appliquées dans quelques pays ont permis dans la majeure partie des cas la réalisation de taux de croissance plus élevés et l’assainissement des finances publiques. Cependant les indicateurs sociaux sont à un niveau faible. Les populations vulnérables qui représentent un poids démographique important et qui sont surtout en zone rurale se sont paupérisées. Ces réformes ont ainsi contribué à l’accaparement des richesses nationales par une minorité. Cette concentration des richesses entre les mains d’une minorité montre qu’il existe de réels problèmes de distribution des fruits de l’effort collectif entre les différentes couches de la population. Une fraction de plus en plus importante de la population africaine est exclue des processus de production qui constituent le mécanisme essentiel de répartition des richesses à travers la distribution de salaires. La propension des ménages à dépenser leurs revenus après impôts dans des produits qui favorisent directement le développement humain dans les pays pauvres, comme par exemple, la nourriture, l'eau potable, l'éducation et la santé, varie non seulement en fonction des facteurs tels que le niveau et la répartition des revenus entre les ménages, mais également selon la personne qui contrôle la répartition des dépenses au sein des ménages. Les ménages pauvres dépensent généralement une plus grande part de leurs revenus dans des produits favorisant le développement humain que ceux dotés de revenus plus élevés. En définitive, la croissance économique à travers l'accroissement du produit intérieur brut (PIB), mais aussi une bonne répartition (équitable) de celle-ci en direction des plus pauvres permet à ces derniers d'augmenter leurs dépenses sociales favorisant le développement humain et de ce fait accroissent la demande globale, du moins pour les secteurs suscités. Par ailleurs, lorsque les individus deviennent en meilleure santé, mieux alimentés Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 14 et mieux instruits, ils contribuent plus à la croissance économique. L'élévation des niveaux de développement humain, en plus d'être une fin en soi, influe sur l'économie par le biais d'une hausse des moyens de chacun, qui par conséquent dispose d'une créativité et d'une productivité plus importante. 2-2. Adéquation des thèmes avec les préoccupations et les urgences de l’Afrique Des thèmes importants concernant l’impact du commerce international et la libéralisation des échanges sur le développement social et sur la lutte contre la pauvreté, la réforme du partenariat avec l’Afrique, l’immigration, la construction d’une citoyenneté africaine, le renforcement du secteur privé dynamique et compétitif, l’injustice du système de l’économie de marché et l’Afrique, les infrastructures utiles et nécessaires pour le développement, la promotion du secteur l’agriculture, l’emploi productif et l’intégration sociale. 2-3. Conclusions et recommandations face aux attentes des pauvres Toutes les grandes instances internationales y compris les acteurs des RMDH, à l’exception des ONG et des organisations qui luttent pour les plus démunis s’accordent sur les mêmes conclusions comme un mot de passe sur plusieurs thèmes :la libéralisation globale des échanges devient subitement dans toutes les conférences une solution à tous les maux économiques dont souffrent les milliers d’habitants de la planète. Ce qui est de plus en plus dit et écrit et repris dans les rapports est que la levée des barrières doit entraîner une multiplication des échanges, et partant, une augmentation de la croissance, voire même la prospérité et surtout doit atténuer les problèmes sociaux, améliorer les structures sanitaires, etc. Dans le texte final du sommet de Copenhague du 06-12 mars 1995 (Sommet mondial des Nations Unies sur le développement social), il est écrit que l’intensification des échanges est l’un des facteurs de la globalisation et que ce processus ouvre en soi, de nouvelles perspectives de croissance économiques soutenue dans les pays en développement. Cette assertion rejoint la majorité des conclusions des RMDH qui sont souvent dénoncées par les groupes de travail sur le développement en faveur des pauvres. La libéralisation des échanges accentue la concurrence. Dans les cas des pays de l’Afrique subsaharienne, les produits importés sont vendus à des prix très réduits ce qui limite les possibilités des petits exploitants agricoles d’intensifier ou de moderniser leur production pour répondre aux besoins de l’industrie. La libéralisation des importations menace la sécurité alimentaire. la majorité de la population étant rurale dans les pays Africain, le type de Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 15 soutien prévu par l’accord de l’Uruguay round à l’intention des produits agricoles ne suffira pas à instaurer des politiques nationales garantissant une agriculture durable ,la éloigne de plus en plus des milliers de pauvres dans leur lutte pour la survie. Les RMDH soulignent les possibilités de création d’emploi dans le processus de globalisation ou de mondialisation ce qui apparaît moins optimiste aux regards de plusieurs facteurs qui ont tendance à limiter l’emploi dans les pays en développement. Le commerce même étant régi par la concurrence, la rationalisation de la production tend à supprimer les emplois plutôt que d’en créer. Les multinationales ne sont pas souvent mentionnées dans les conclusions des RMDH or les répercussions de leur rôle majeur des multinationales entraînent des conséquences bien négatives sur les pays en développement. Quelques exemples portent sur la propriété intellectuelle qui touche au commerce par lesquels les prix des médicaments peuvent être augmentés et limitant ainsi l’accès des pauvres aux soins de santé. L’adoption des nouvelles règles communautaires sur le chocolat pourraient avoir des incidences négatives sur les producteurs de cacao du tiers monde, en Afrique sub-saharienne, les pays comme la Côte d’ivoire, le Cameroun subissent déjà d’énormes difficultés dans ce secteur. Les multinationales contrôlent une part très importante de la production mondiale, leur puissance économique est égale ou supérieur aux PIB de nombreux pays Africains. La question de pauvreté n’apparaît pas seulement comme une question morale mais surtout comme une question de sécurité internationale. Les mesures prises dans les RMDH ne semblent pas être à la hauteur des objectifs à atteindre : le dysfonctionnement de l’économie de marché creuse le fossé entre riches et pauvres. Les pays en développement et en particulier l’Afrique Sub saharienne comptabilisent près des trois quart de la population dans une pauvreté absolue alors qu’en Europe seulement 15%de la population vivent au dessous du seuil de pauvreté. Trouver un emploi est un rêve , le trafic de la drogue regagne du terrain et la criminalité s’accentue. Les mesures ne peuvent pas seulement se limiter aux conclusions pour simple informations à tout un chacun pour combattre la famine, promouvoir l’éducation pour tous. L’urgence aujourd’hui est l’objectif d’un monde plus juste. Le développement humain a certes progressé mais il garde encore un caractère sélectif. Il faut aller au cœur des dysfonctionnements et prendre des résolutions fermes. Les RMDH prônent un développement juste et équitable mais ils restent inactifs et silencieux devant les dépenses militaires qui sont égales au Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 16 revenu annuel cumulé de la moitié des êtres humains. Les 86% des livraisons d’armement sont effectués par les cinq membres permanents du conseil de sécurité. Les dépenses militaires de l’Afrique Subsaharienne augmentent d’année en année pourtant c’est la région la plus pauvre du globe. Les pays Africains ne pourront s’intégrer dans une économie mondiale de très haute compétition à cause des fortes disparités socio-économiques qui limitent leur possibilités et leurs moyens. Toutes les sources de financement ne seront efficaces que si parallèlement les relations plus constructives et justes pour une redistribution plus juste et plus humaine mettent fin aux situations instables et explosives. III- Pertinence du RMDH par rapport à la problématique du développement en Afrique subsaharienne La lecture des différents RMDH permet de faire trois observations : - d’abord, si la pauvreté est une préoccupation dominante ce qui est largement justifié, ses mécanismes de formation comme les moyens de son éradication sont encore mal maîtrisés ; - ensuite, il est clairement établi que c’est la croissance qui permettra de réduire les déficits et de donner les moyens pour financer toute politique sociale, toutefois, ses liens réciproques avec le développement humain ne sont pas explicités ; - et enfin les différents thèmes ne se présentent pas comme les facettes d’ une vision globale du développement et ne permettent, en conséquence, de dégager une stratégie de sortie de crise par le développement humain durable. Sur un autre plan beaucoup de questions qui constituent des urgences pour l’Afrique ne sont pas encore prises en charge par les réflexions du RMDH. 3-1. Les faiblesses au niveau des thèmes des RMDH 1°) Vision, évaluation et politiques de lutte contre la pauvreté L’Afrique avec plus de 400 millions de personnes ayant 0,65 dollar par jour pour subsister et leur nombre qui croît plus vite que la production des richesses a un problème prioritaire de lutte contre la pauvreté. Ce phénomène aussi massif est étudié par les RMDH avec beaucoup de raison et de pertinence pour en connaître la substance et la mesure . Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 17 Pendant une bonne décennie, les RMDH se sont attelés à la conception et à la construction d’indicateurs de mesure et de comparaison des niveaux de pauvreté et de développement humain dans le monde qui dépasse le cadre restrictif du PNB. L’élaboration ces indicateurs a permis de mesurer l’énorme retard des pays d’Afrique subsaharienne en matière de développement humain et conséquemment l’état de la pauvreté.. Tableau 1 : Indicateurs économiques et sociaux dans le monde Pays de l’OCDE Europe de l’Est et CEI Amérique Latine Asie de l’Est (Chine incluse) Pays arabes Asie du Sud (Inde incluse) Afrique subsaharienne Ensemble du monde PIB/hbt en 1998 (en francs français de 1999) 134 000 40 900 43 000 23 500 Espérance de vie (en années) Taux d’alphabétisation des plus de 15 ans (en %) IDH 76,4 68,9 69,7 70,2 97,4 98,6 87,7 83,4 0,89 0,78 0,76 0,72 27 300 13 900 66 63 59,7 54,3 0,63 0,56 10 600 43 000 48,9 66,9 58,5 78,8 0,46 0,71 Source : Rapport mondial sur le développement humain, 2000 Le RMDH de 2000 révèle ainsi que l’IDH de l’Afrique subsaharienne atteint en moyenne 0,46 ; ce qui traduit un gap de 0,536 en terme de développement humain. Depuis 1990, environ 35 des 50 pays classés dernier en fonction de l’IDH sont africains. Compte tenu de l’aggravation de la pauvreté et des inégalités dans le monde, et particulièrement dans les PVD, il apparaît aujourd’hui nécessaire d’aller au-delà de l’aspect statistique des analyses menées pour adopter une démarche dynamique qui fasse le lien entre ces indicateurs de qualité de vie et le profil de la croissance économique. Cela renvoie aux différents acteurs pouvant améliorer le niveau des indicateurs. En effet, on peut difficilement nier qu’il est plus facile d’être en bonne santé dans un pays riche que dans un pays de l’OCDE : l’ensemble des pays de cet espace affiche un niveau d’IDH plus élevé (0,9 soit 10 % en dessous du meilleur niveau). En revanche, pour la quarantaine de pays les moins avancés du point de vue du revenu par tête, l’IDH moyen est à 0,44. De plus, on constate que les vingt pays où l’IDH a reculé depuis 1990 sont tous des pays où le revenu par tête a également diminué, à l’exception du Botswana. On ne peut arguer qu’il existe forcément un lien de cause à effet. Seulement, la pandémie du sida qui frappe massivement l’Afrique subsaharienne provoque à la fois une chute de l’espérance de vie et une baisse de la capacité productive des pays concernés. Alors qu’à l’inverse, les pays où l’IDH a le plus augmenté sont aussi ceux où la croissance du revenu par tête a été particulièrement forte telle la Corée. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 18 Le bilan de 10 années de recherche et de lutte contre la pauvreté est fortement contrasté. Les actions de lutte conte la misère et la famine ont donné quelques résultats positifs indéniables avec l’augmentation de la production alimentaire du système périphérique et le recul de la faim. Toutefois, depuis les années 70, le nombre de pauvres augmente au même rythme que la population (Kankwenda,1999) sans que l’on soit à mesure de répondre aux questions fondamentales à savoir : i) Comment mesurer la pauvreté ? ii) Quels sont les groupes les plus vulnérables ? iii) Quelles sont les conditions de vie des pauvres et des très pauvres ? iv) Quelle politique efficace faut-il mettre en œuvre ? Les analyses sur la pauvreté sont marqués par trois visions qui peuvent coexister ou alterner dans un même pays : une vision technocratique, une vision assistantielle et une vision caritative. La vision technocratique est celle des organisations internationales. Elle est selon Bruno Lautier «exprimée sur le mode de la pathologie et emploie souvent un langage mi-médical, mi-guerrier : la pauvreté est une maladie, à éradiquer et pour cela il faut mettre en place des stratégies pour les pauvres». Il s’agit d’une maladie du corps social et en conséquence, le réalisme imposant de limiter se ambition, il faut scinder la pauvreté en deux ou trois, pour éliminer «une pauvreté absolue» qu’il est nécessaire de supprimer en premier. Il est donc normal que cette vision mette l’accent sur les éléments de quantification en vue de déterminer la proportion de pauvreté absolue qu’une société peut supporter sans risque de faire imploser son ordre social. Cette vison implicite n’est pas appuyée par une bonne connaissance des mécanismes et des facteurs de la pauvreté : les causes macroéconomiques et structurelles (économie mondiale, politiques internes introduites par les PAS, l’endettement) et les causes sociales (double explosion démographique et urbaine, exclusion économique et sociale, absence de protection sociale et rupture des solidarités traditionnelles). En l’absence d’études factuelles sur ces questions, les modes de régulation étatiques ou privés manqueront toujours d’efficacité. 2°) La croissance économique au service de l’éradication de la pauvreté Il est établi que même si croissance économique, la pauvreté et la qualité de vie ne sont pas automatiquement liées, elles vont souvent de pair. Dans ce sens Certaines recherches tentent d’établir que pour empêcher simplement la hausse du nombre de pauvres absolus pendant les 15 prochaines années, il faudra un taux de croissance de 5%. Réaliser l’objectif de développement international qui consiste à réduire de moitié l’incidence de la grande pauvreté d’ici 2015, exige une croissance d’au moins 7% par et une Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 19 plus juste répartition des revenus. Si les termes de l’échange de l’Afrique continue de se détériorer, la réduction de la pauvreté demandera une croissance encore plus élevée. Toutes les réformes initiées par les gouvernements, en partenariat avec les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux, ces deux dernières décennies, visent principalement à la relance de la croissance économique. Elles ont permis dans la majeure partie des cas la réalisation de taux de croissance plus élevés et l’assainissement des finances publiques. Cependant, les indicateurs sociaux restent toujours à un niveau faible traduisant une paupérisation des populations vulnérables qui sont surtout en zone rurale. De plus, ces réformes ont aussi contribué au creusement des inégalités par accaparement des richesses nationales par une minorité. Cette forme de répartition des richesses soulève la question de distribution équitable des fruits de l’effort collectif entre les différentes couches de la population. Une fraction de plus en plus importante de la population africaine est exclue des processus de production qui constituent le mécanisme essentiel de répartition des richesses à travers la distribution de salaires. Il convient, par conséquent, d’identifier les composantes les plus prépondérantes des indicateurs de développement humain, et singulièrement de l’IDH – l’indicateur le plus synthétique du développement humain - selon les zones afin de concevoir à partir de celles-ci des instruments de politique, sur la base du lien IDH – croissance économique afin d’élargir le champ des opportunités des individus et donc d’améliorer les niveaux de développement humain des régions défavorisées, particulièrement de l’Afrique subsaharienne. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 20 3°) La confusion de genre capital humain et capital social La pertinence des thèmes du RMDH face aux priorités africaines peut être appréciée par rapport à l’évolution, depuis 1990, du développement humain soutenable, vers la reconnaissance de formes sociales informelles qui caractérisent les sociétés africaines. On est alors passé d’une dimension institutionnelle du développement à une dimension où l’homme est le point nodal aussi bien dans les objectifs que dans les méthodes. Ce phénomène de capacité à gérer le développement, recherché à travers le développement humain, fait que l’ «Humain» se réduit difficilement à la construction d’un indice global ou composite qui n’intègre pas souvent les activités sociales liées par exemple à des occasions économiques (micro-marchés) ou familiales (mariages, funérailles, tontines, …) ou culturelles (divertissements et loisirs divers), lesquelles sont déterminantes dans la société africaine en ce qu’elles peuvent détruire totalement le surplus économique. Cependant, rarement la totalité des revenus et des composantes du capital social n’a été abordé dans les enquêtes à l’occasion d’autres préoccupations statistiques (emploi/revenu). Chaque personne, même la plus pauvre possède un portefeuille d’actifs et d’activités lesquelles recèlent des revenus potentiels et effectifs. Ces ressources constituent une structure d’encaisses fragiles dans la mesure où elles dépendent d’autres personnes, de leur altruisme et de celui de l’intéressé. 4°) Etudes et suivi des recommandations Sur l’ensemble des rapports produits depuis 1990, l’Afrique n’a fait l’objet que de 21 études de base sur les 164 réalisées au cours de la période, soit 12,8 % de celles-ci . La place encore marginale de l’Afrique dans les différentes éditions du rapport pourrait également tirer sa source de la faible présence de l’expertise africaine au sein de l’équipe de coordination et des concepteurs de la grille thématique du RMDH. Mais il convient de relever que dans bien de cas, les rapports entre les décideurs et le PNUD via leurs représentations sont souvent heurtés en raison de divergences sur les sources statistiques et sur les résultats établis par le rapport. En effet, le choix de l’indépendance du rapport ne favorise pas une démarche participative des acteurs du développement humain et, donc une adhésion des décideurs aux diagnostics établis par le PNUD. Cela se ressent dans la qualité des politiques menées en faveur du développement humain dès lors que ceux qui ont la charge des politiques de développement n’adhèrent pas aux conclusions du PNUD. Un décalage apparaît bien souvent entre les diagnostics établis par le RMDH et les Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 21 politiques mises en œuvre. Seule une coopération entre cette institution et les décideurs dans la réalisation de l’objectif de développement humain pourrait y remédier. Autrement, il se posera un problème d’internalisation des réformes préconisées par le PNUD. De plus, peu d’efforts sont faits pour évaluer de façon critique les politiques gouvernementales mises en œuvre afin de promouvoir le développement et, particulièrement les programmes de lutte contre la pauvreté. Enfin, les Rapports ne font pas assez ressortir, dans l’optique d’un partenariat potentiel avec le PNUD, l’importance des administrations décentralisées qui apparaissent de plus en plus comme des vecteurs du développement humain surtout après la disqualification instrumentale de l’Etat. 3-2. Des questions prioritaires du développement économique et social du continent africain échappent à la diligence des RMDH Les analyses des RMDH traitent des questions de développement en général qui pour la plus part ne reflètent pas les réalités du continent. Au mieux ces analyses ne prennent pas en considération des questions urgentes et déterminantes pour le développement et le progrès social de l’Afrique. 1°) La non couverture des coûts de l’homme Les coûts de l’homme résultant de l’objectif de développement et de croissance sont abordés avec beaucoup de légèreté et ne révèlent pas exactement les réalités que vivent le peuple de ce continent. Ces coûts peuvent porter sur plusieurs points et de nombreux facteurs engendrent des situations qui échappent à la quantification de ces coûts. On peut citer entre autres les coûts ci- après : la mortalité élevée dans le milieu professionnel et dans l’environnement de chaque individu. Dans le milieu professionnel, il n’existe pas de mesures de préventions ou autres dans la majorité des entreprises, certains travailleurs sont en plus ignorants des risques qu’ils courent et sont même loin de comprendre qu’ils exercent des activités qui écourtent leur espérance de vie. Dans la vie quotidienne chacun survit au hasard. Plusieurs facteurs empêchent à la population d’atteindre un niveau une vie élémentaire normale. Il y a une quasi-insistance d’activité permanente de campagne de préventions hygiéniques, la population ne connaît pas les premiers soins d’urgence parce qu’il n’existe pas des couvertures de soins de santé primaire. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 22 2°) Le chômage n’est pas traité comme une urgence Le chômage est analysé comme si c’était un problème qui ne concerne que des pays développés alors que la montée de l’économie informelle dans les différents pays est une cause de ce fléau qui concerne plus de 70% de chaque population dans la majorité des pays. Aucun programme n’est prévu pour des diplômés qui doivent intégrer la vie active. 3°) Les éléments qui permettent une vie humaine comme l’instruction, le loisir, le repos (les vacances) sont absents des analyses Dans les politiques d’ajustement structurels, les dépenses pour le développement humain sont relayés au second plan, les plans d’ajustement bien que cherchant à réparer les déséquilibres financiers expriment une vision du développement issue de l’économie néo-libérale dans laquelle l’économie retrouvera son dynamisme en libérant les forces du marché. « Cette conception suppose que les pays concernés privilégient l’extraversion de leur économie, affin de maximiser leurs avantages comparatifs dans le commerce international et rompt avec les conceptions autocentrés du développement qui avaient prévalu dans les années 1960. De son côté, L’Etat doit laisser la concurrence assurer l’ajustement optimal de l’offre et de la demande avec la fixation de la valeur des monnaies et des prix sur le marché.» 4°) L’exclusion du principal acteur du développement humain : l’Etat et ses démembrements Cette situation d’impuissance des Etats es à l’origine aujourd’hui de querelles ethniques, des conflits inter-états qui renaissent. «La situation d’infra-Humaine inacceptable» les peuples de L’Afrique subsaharienne vivent des situations bien malheureuses qui brisent et limitent l’existence de milliers d’individus. Beaucoup n’ont pas accès à l’instruction, ni au minimum vital et les sorties à l’extérieur pour une plus grande ouverture d’esprit sur le monde reste bien difficile. En général le continent se voit refuser toute confiance et tout respect. Leur dignité est bafouée en permanence et beaucoup d’autres aspects que les indicateurs statistiques peuvent difficilement mesurer sont autant de facteurs qu’on ne, tient pas compte dans les variables du développement humain. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 23 5°) Le problème de la dette n’apparaît pas comme prioritaire dans les analyses des RMDH Pourtant, l’Afrique a besoin de financements pour la satisfaction des besoins sociaux au niveau planétaire, une des démarches de ce financement pourrait passer par l’annulation de la dette .Dans les années 1980,l’évolution de la dette était considérable, dette et croissance constituent en elle-même un dilemme. Le dilemme selon les termes de la Banque mondiale c’est le lien entre la dette et les besoins non réalisés du développement. Le poids de la dette africaine n’a pas fait l’objet de beaucoup d’attention parce qu’elle ne constituait pas une menace pour le système monétaire et financier international. Les Rapports ont aussi négligé ce problème urgent de l’époque qui mérite qu’on s’y attarde parce que les économies africaines sont plus vulnérables aux crises financières. Leur part d’échanges commerciaux dans le PIB et leur ratio de solvabilité par rapport aux exportations sont bien supérieurs à ceux des pays asiatiques à faible revenu et les expose davantage aux fluctuations internationales. Les économies sont tournée vers l’agriculture et dont plus sujettes aux variations climatiques, les productions connaissent fréquemment des variations fortes de termes de l’échange que les exportateurs de bien manufacturés ;La situation ne laisse envisager aucune perspective d’avenir de relèvement de niveau de vie même si la croissance les pays de l’OCDE se poursuit. La conjoncture est très défavorable, des taux d’intérêts réels élevés le tableaux des chiffres justifiait la nécessité de l’ajustement structurel qui a aggravé la situation des pauvres dans la majorité des pays .Les RMDH ne se prononcent pas sur les solutions urgentes de la dette. Ce sont toujours des solutions classiques qui reviennent pendant que le montant de la dette continue à croître et perpétue le continent dans l’éternel cercle vicieux endettement –ajustement- pauvreté- mondialisation. Doit on s’accorder avec René Dumont pour dire que l’Afrique est perdue ? Ou alors se résigner à la déclaration du RMDH selon laquelle si le problème de l’endettement ne s’améliore pas ainsi que le taux de change nous sommes perdus ? 6°) Le développement humain et la mondialisation : la gestion des risques et des turbulences Les RMDH n’analysent de manière fine les incidences de la mondialisation afin de mieux s’attaquer aux incertitudes et à la gestion des risques pour les populations du système périphérique. Le RMDH de 1999 Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 24 établit que «Les pays laissées pour compte sont malgré tout bien intégrés dans les échanges mondiaux». Seulement, cette intégration apparente rend la région extrêmement vulnérable face aux risques et turbulences des systèmes financiers et aux caprices des marchés des produits de base. C’est vrai que L’Afrique subsaharienne affiche un ratio exportation /PIB de 29 % dans les années 1990, supérieur à celui de l’Amérique Latine 15 % la même année, est ce que cela suffit pour parler de l’intégration de la région concernée ? Les conditions qu’un pays puisse s’insérer dans l’économie mondiale impliquent plusieurs facteurs qui sont entre autres : l’existence de produits compétitifs, des entreprises efficaces, des facteurs de production efficients, une intervention étatique cohérente. Tous ces facteurs semblent bien absents en Afrique. Les activités exportatrices restent concentrés sur les produits de base et les investissements directs étrangers sont faibles parfois quasi inexistants pour la plupart des pays. On est passé certes à une régulation par les marchés à l’échelle planétaire, le financement est mondialisé mais les espaces monétaires nationaux n’ont pas disparu dans les stratégies proposées pour relever le défis de la mondialisation, La contribution du système bancaire n’est pas abordé alors que l’apport des banques est importante pour accompagner les stratégies nationales envisagées comme réponse aux problèmes qui assaillent le continent africain. Leur rôle dans les opérations internationales (commerce internationale, changes, investissement direct international) leur influence sur l’ensemble de l’appareil productif (financement des investissements, couverture des besoins de trésorerie, les opérations de fusion acquisitions) leur contribution à la mobilisation de l’épargne sont d’une importance capitale. Par ailleurs, la solidité, la rentabilité et la solvabilité des banques constituent en elles même un élément de la performance d’une économie d’une meilleure intégration or cette dimension du système financier n’est pas tenue compte. La globalisation financière correspond à un marché unique de l’argent au niveau planétaire, en effet on devait s’attendre à une allocation du capital dans l’économie mondiale, mais on assiste au dysfonctionnement de l’économie si on se réfère aux crises mexicaines des années 1995, et les récentes crises en Asie de l’Est. de 1997 et de l’Argentine. En effet, les marchés sont qualifiés d’incertains et imparfaits. Comme l’indique J. Stiglitz «une théorie de marché qui part de l’idée que les marchés sont imparfaits et incertains, si d’une part elle peut servir de légitimations aux spéculations financières (prise de risque)peut aussi justifier l’intervention étatique comme réducteur d’incertitudes. Or le néolibéralisme contemporain pensant le marché sans penser le pouvoir a masqué le pouvoir inscrit dans le marché». Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 25 Aujourd’hui les contraintes du marché mondialisé font tourner à vide la démocratie représentative. Ce qui apparaît le plus menaçant aujourd’hui c’est l’absence du pouvoir. C’est précisément un sentiment généralisé d’impuissance et comment dans ce contexte on peut réussir les défis de la mondialisation et réduire la pauvreté ? Une étude de P. Vocker ancien Président de la Réserve Fédéral Bank américaine attribue pour moitié à l’accroissement de la spéculation le ralentissement de la croissance depuis les années 1970. Le PNUD lutte pour une croissance soutenue dont les effets porteurs pourront diminuer la pauvreté. Peut- on alors affirmer dans de telle situation que les stratégies proposées sont sur la bonne voie ? Dans la nouvelle régulation mondiale, les critères sont exclusivement financiers et c’est de l’économie financière que provient la norme de rentabilité à laquelle doit se plier l’économie réelle c’est à dire obtenir la confiance des marchés. L’allocation du capital attendu de la mondialisation ne peut raviver pleinement les espoirs et dans ces conditions d’où proviendront les ressources dont les pays en développement ont besoin pour éradiquer la pauvreté dans cette mondialisation à visage humain. Le défis de la mondialisation est une question de volonté politique de la communauté internationale si on veut partager équitablement les fruits de la richesse mondiale le danger est de voir non seulement une géographie contrastées, mais une société à deux vitesses : «Have more et have less (12)», c’est-à-dire un écart de plus en plus accentué entre les riches et pauvres contrairement aux espoirs qu’on croit attendre de la mondialisation. 7°) Les questions culturelles entre marginalisation et oubli Le secteur de divertissement dans la culture mondiale est dominé par les Etats Unis. Le divertissement a un impact sur le reste de la planète et en l’occurrence les plus pauvres. .Les images sont imposées sans discernement, la Censure a t’elle disparu au niveau de l’audio visuel ? le marché de l’audiovisuel qui parmi les marchés prisés des grandes puissances .Il ne faut pas réfuter le fait que Les individus sont loin d’être semblables de part leur origine et leur mœurs. Il y a des émissions, des publicités, des images qui portent atteintes à l’éthique communautaire et sociale, à la culture de certains groupes. Comment concilier cultures et divertissement ? Le problème devrait être posé, ainsi que le débat culture locale et culture mondiale. Le rapport n’est pas très explicite sur la progression de la culture de consommation mondiale. Les produits culturels non seulement continuent à creuser des Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 26 écarts que les institutions n’arrivent pas à résoudre mais risquent encore de créer de graves problèmes dans l’avenir. IV - LA PERTINENCE ET LES LIMITES DES OUTILS D’ANALYSE UTILISES PAR LE RMDH Un des constats qu’on peut dresser à la lecture du RMDH est qu’autant elles sont riches en statistiques, autant, à contrario, elles sont pauvres en études empiriques. Celles-ci y sont insuffisantes voire rares notamment pour les pays d’Afrique subsaharienne confrontés à des problèmes ardus de développement humain. Même si la fiabilité des statistiques collectées par le rapport est souvent controversée, on peut difficilement contester leur aptitude à servir de base aux études thématiques ; les résultats qu’on peut en tirer pouvant servir à titre indicatif à la formulation de mesures de politiques économiques. En effet, compte tenu des divers aspects du développement humain abordés par le rapport (genre, pauvreté, mode de consommation, financement du développement humain…), la tentation est grande, en partant d’hypothèses standard, d’aboutir à une uniformisation des résultats et donc des recettes de politiques économiques. Or la nature des contraintes au développement humain est différente selon les pays et selon les zones. Cela tend à suggérer que, du point de vue des études thématiques, la problématique du développement peut se poser différemment selon que l’on est en Afrique subsaharienne ou ailleurs (ex. problème lié à l’équité homme/femme dans l’accès aux ressources productives, dans l’accès à l’éducation, problèmes liés à l’excision et à la liberté des femmes, à l’analphabétisme, à la stabilité politique, aux droits de l’homme, aux fléaux naturelles, à la pauvreté récurrents en Afrique subsaharienne). 4-1. Modélisation et mesurabilité des indices soulèvent des question techniques A ce stade, les problèmes les plus importants résident dans la modélisation, comment par exemple simuler les effets sur un tableau d’activité d’une perturbation liée à l’introduction d’une activité labour intensive ? Prenons un autre exemple plus usuel relatif à la quantification de la pauvreté. Le calcul de ce seuil et sa signification son à la fois difficile et complexe. Les méthodes de construction de seuil de pauvreté les plus couramment utilisés sont indiqués dans l’encadré suivant : Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 27 Encadré: L’exemple de la pluralité des approches d’une ligne de pauvreté. Définition Une ligne de pauvreté permet de distinguer les «pauvres» des «non pauvres» à partir d’un critère normatif de revenu réel (par exemple, 1$ par jour en PPA, selon la méthodes des «besoins fondamentaux»). Elle permet d’estimer la distribution des pauvres en deçà de cette ligne, entre «plus pauvres des pauvres» et «plus riches des pauvres», en tenant compte éventuellement des sentiments altruistes (sympathie ou aversion) engendrés par cette distribution. 1ère Approche : Approche de Foster-Greer-Thorbecke (1984) [z -zRi ] α Pα = 1/n Σ Avec z : ligne de pauvreté (par exemple 1$/jour) Ri : revenu de la ième personne pauvre : i = 1, ….. q n : la population totale q : nombre de personnes pauvres (i.e en dessous de la ligne de pauvreté) α : le degré d’aversion pour la pauvreté, qui peut prendre différentes valeurs (0,1,2). Dans sa version actuelle, l’indice FGT souligne que l’efficacité du dollar marginal d’aide sera évidente pour les plus «riches des pauvres» et nulle pour les plus «pauvres des pauvres». 2°) Approche : l’indice de Sen Il combine dans un indicateur unique trois éléments : - l’incidence de la pauvreté, c’est-à-dire, le nombre ou la part des personnes qui se situent en dessous d’un seuil de «bas revenus», ou encore la proportion de pauvres = T ; - l’intensité de la pauvreté : distance au seuil de pauvreté = 1 ; - la distribution des bas revenus : distribution des bas revenu : distribution des revenus au sein de la population à bas revenus ; soit l’indice de Gini, G. Sen = T[I + (1-I)G] Si tous les revenus sont supérieurs au seuil de pauvreté, l’indice a la valeur minimum 0. Si tous les revenus se situent en-dessous du seuil de pauvreté et si la distribution est parfaitement inégalitaire, l’indice a la valeur maximum 1. 3°) Approche : l’indicateur de pauvreté humaine, PNUD, 1997 La nature des principaux «manques», variant en fonction des conditions socio-économiques, le PNUD a choisi de construire en premier lieu cet indicateur essentiellement pour les pays en développement. Trois aspects essentiels sont envisagés : P1 : la longévité (risque de décéder avant 40 ans). P2 : l’instruction (pourcentage d’adultes analphabètes) P3 : l’accès à des conditions de vie décente (santé, ….= 3 3 3 IPH = [1/3 (P 1 + P 2 + P 3)]1/3 Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 28 L’indice proposé est calculé certes sur la base de trois éléments essentiels de la vie de l’homme à savoir : l’espérance de vie à la naissance, le niveau d’éducation, le revenu désagrégé par sexe. Mais l’espérance de vie ne rend pas compte de l’espérance de vie en bonne santé, l’éducation mesurée par l’alphabétisation est une mesure approximative des capacités techniques indispensables au développement technique. Le revenu mesuré au niveau des PIB ne rend pas compte des disparités des revenus. 4-2. L’IDH et les limites relatives aux statistiques Quels enseignements peut-on tirer de L’IDH que les RMDH tentent d’améliorer chaque année ? Indicateur composite, l’IDH comprend trois éléments : la durée de vie, mesurée d’après l’espérance de vie à la naissance, le niveau d’instruction mesuré par un indicateur alliant pour deux tiers le taux d’alphabétisation des adultes et pour un tiers le taux brut de scolarisation combiné (tous niveaux confondus) et enfin le niveau de vie mesuré d’après ke PIB réel par habitant exprimé en PPA, ou parité de pouvoir d’achat).Il est ainsi égal à la moyenne arithmétique de la somme des trois indices. Valeur réelle Xi -Valeur minimale Xi Indicateur = Valeur maximale Xi – Valeur minimale Xi Indicateur de l’espérance de vie A : (52,7 - 25) / ( 85-25) = 0,46 Indicateur de niveau d’éducation B : [ 2( 35,5/100) + 36/100] 3 = 0,36 Indicateur de PIB/habitant [2] C : log(1307) - log100) / log(40 000)-log (100) = 0,43 Index du développement humain : IDH = (A+B+C) /3 Sous cette forme, cet indicateur appelle quelques observations quant à sa significativité. D’abord, l’état actuel des statistiques montre que les bases de données sociales sont inexistantes ou alors totalement dérisoires. Les deux premiers indicateurs peuvent être évoqués pour illustrer les problèmes liés à la qualité des données et le dernier à sa significativité quant on sait que non seulement les revenus et leur répartition sont inconnus mais que les activités du secteur informel pouvant aller jusqu’à 60% du PNB sont non prises en compte dans l’évaluation de l’indice. Le PNUD n’utilise que les données disponibles or pour avoir l’espérance de vie à la naissance, il faut disposer d’une table de Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 29 mortalité récente qui se calcule lors de l’analyse des données de recensement. Or la plupart des pays Africains n’ont pas respecté la périodicité décennale des recensements, par exemple le dernier recensement du Togo date de 1984, celui de la République démocratique du Congo date de 1984, celui du Cameroun date de 1987, celui du Sénégal date de 1988 pour ne citer que ceux-là. On a besoin des effectifs de la population récente pour avoir le dénominateur de la plupart des indicateurs qui rentrent dans le calcul de L’IDH, les effectifs sont obsolètes ce qui augmente l’imprécision de la qualité des résultats. Ensuite, à l’échelle globale, l’IDH présente un grand intérêt en ce qu’il permet de classer les pays mais au plan strictement intérieur demande des corrections multisectorielles. Si par exemple un pays est dernier du point de vue de L’IDH, sur quelle variable devra t’il s’appuyer pour redresser sa situation ? Il existe d’autres indicateurs spécifiques du développement humain : pour mieux faire ressortir les disparités entre sexes ou inégalités de genre, les indicateurs de base (espérance de vie à la naissance, alphabétisation et taux de scolarisation, revenus) ont été ajustés en tenant compte des écarts entre hommes et femmes. Enfin, une limite de l’IDH est l’importance secondaire accordée aux revenus dans le calcul de l’indice. En prenant l’exemple de la France et de l’Argentine, le premier pays a un revenu de 18430 dollars par habitant (corrigé PPA) avec une note de 0,948 et le second pays a un PIB de 5120 dollars avec une note IDH de 0,948. La différence de 13310 entre ces deux pays se réduit à 225 dollars une fois l’ajustement calculé. En fait la déflation des revenus rend l’indice très peu expressif. En définitive, il apparaît nettement que l’IDH est un instrument de comparaison internationale. Cependant, cet indicateur ne permet pas de savoir quelle est sa composante qui sera la cible du programme pour améliorer le niveau ou le classement du pays dans la hiérarchie internationale établie. Si l’indicateur est performant pour faire des comparaisons entre pays, il l’est moins au niveau opérationnel dans le pays. On sait que dans tel pays, ou tel district sanitaire la qualité des soins est mauvaise, mais on ne sait pas sur quelle variable jouer pour améliorer la qualité des soins (7). Sur un autre plan, on peut constater à la lecture du RMDH qu’autant ils sont riches en statistiques, autant, à contrario, ils sont pauvres en études empiriques. Celles-ci y sont insuffisantes voire rares notamment pour les pays d’Afrique subsaharienne confrontés à des problèmes ardus de développement humain. Même si la fiabilité des statistiques collectées par le Rapport est Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 30 souvent controversée, on peut difficilement contester leur aptitude à servir de base aux études thématiques ; les résultats qu’on peut en tirer pouvant servir à titre indicatif à la formulation de mesures de politiques économiques. En effet, compte tenu des divers aspects du développement humain abordés par le rapport (genre, pauvreté, mode de consommation, financement du développement humain…), la tentation est grande, en partant d’hypothèses standards, d’aboutir à une uniformisation des résultats et donc des recettes de politiques économiques. Or, la nature des contraintes au développement humain est différente selon les pays et selon les zones. Cela tend à suggérer que, du point de vue des études thématiques, la problématique du développement devrait se poser différemment selon le continent de résidence ou le milieu culturel dans lequel on vit (ex. Problème lié à l’équité homme/femme dans l’accès aux ressources productives, dans l’accès à l’éducation, problèmes liés à l’excision et à la liberté des femmes, à l’analphabétisme, à la stabilité politique, aux droits de l’homme, aux fléaux naturelles, à la pauvreté récurrents en Afrique subsaharienne). 4-3. Quelle est la capacité des indices multidimensionnalité des faits humains ? à exprimer la Tous ces indicateurs nous permettent de distinguer les pauvres des non pauvres. En d’autres termes, ils permettent de mieux situer la «classe de pauvres». Cependant, la question est de savoir quelle est la pertinence de ces indicateurs à aider à accroître la capacité des individus à mieux fonctionner c’est-à-dire à vivre mieux et à s’épanouir en saisissant les opportunités qui se présentent à eux ? Cette question est d’autant plus fondée que ces indicateurs ainsi cités semblent mesurer plus les inégalités que la pauvreté elle-même. Si nous considérons les particularités et les différence dans cette même «classe des pauvres», ces mêmes indicateurs pourraient à nouveau y être appliqués pour déterminer «les plus pauvres des pauvres», et ainsi de suite. Le problème est dans cette situation loin d’être résolu car, si une chose est de situer (identifier) le pauvres, une autre chose est de leur offrir la possibilité de vivre longtemps et en bonne santé, d’acquérir les connaissances qui les aideront dans leurs choix et d’avoir accès aux ressources leurs assurant un niveau de vie décent. Quelle est la capacité de ces indicateurs à intégrer dans le raisonnement économique les multiples dimensions de bien-être des populations africaines, que celles-ci soient d’ordre économique, social, culturel, politique ou éthique ? Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 31 La réponse à cette question impose de privilégier les dotations en capital des personnes sous leurs différentes formes (physique, financière, humaine, sociale, etc.), d’encourager les aptitudes personnelles à utiliser ces dotations, enfin de favoriser les opportunités d’utilisation de ces dotations en minimisant les contraintes ou les interdictions sociales. Ainsi, les différentes dimensions du bien-être que le développement humain est sensé réaliser et les formes de pauvreté qu’il est, en conséquence, appelé à combattre sont repris dans le tableau suivant : Tableau 3: multidimensionnalité du développement durable Dimensions du bien-être et formes de pauvreté Pauvreté d’accessibilité (manques et absences de satisfaction) Pauvreté de potentialités (absence d’opportunités d’accumulation) Dimensions économiques Monétaire Conditions de vie Dimension sociale Manque d’accès à Manque d’accès à la Exclusion sociale. l’emploi. Absence de santé, à une alimentation Rupture du lien revenu. équilibrée, à l’éducation, social. Impossibilité d’acheter au logement, etc. Problèmes de genre. des produits Absence de capital physique (équipement, terrains, biens durables) et financier (épargne, crédit) Insuffisance de capital humain (peu d’éducation, mauvaise santé) Insuffisance de capital social (manque de cohésion sociale, relation de faible niveau) Dimension culturelle Non reconnaissance identitaire. Déracinement. Insuffisance de «capital culturel». Absence de fond culturel commun. Sous-culture. V- LES SILENCES DES RMDH SUR LES STRATEGIES A PROMOUVOIR ET LES STRUCTURES INSTITUTIONNELLES D’ENCADREMENT Les limites des RMDH au triple niveau institutionnel, de la mise en œuvre des recommandations, du suivi et évaluation, entraîne vers une réflexion sur les silences en ce qui concerne les besoins de stratégies et de structures d’encadrement. 5-1. L’affaiblissement de l’Etat et la confiance incidente à la main invisible L’Etat et les institutions sont les grandes oubliées des RMDH or ce sont justement les agents principaux de promotion des sphères non économiques du développement qui sont par définition hors du champ de l’économie marchande. Le caractère composite de développement humain durable exige des actions correctives dans tous les domaines (économiques, social, culturel, politique, …) que le marché ne peut point faire. D’où la nécessité d’une réinsertion de l’Etat dans le champ du développement Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 32 humain. La critique radicale contre le fonctionnement de l’Etat, a complètement occulté les problèmes de fond concernant le rôle de l’Etat et ses missions nouvelles dans le développement humain durable. Les mécanismes de marché ne peuvent point corriger les fortes inégalités de revenus et garantir les liens intergénérationnels caractéristiques du développement durable. Le miracle asiatique a montré que le développement était possible et qu’il pouvait s’accompagner d’une réduction de la pauvreté, d’une amélioration largement partagée du niveau de vie et même d’un processus de démocratisation. Mais, comme l’observe J. Stigltz, l’expérience de ces pays est considérablement dérangeante car ils ne sont pas conformés aux prescriptions habituelles. Dans la plupart des cas, les Etats et les institutions ont joué un rôle déterminant dans la formation à la fois du capital physique et du capital humain. 5-2. Une mise en œuvre incontrôlée des recommandations des RMDH Le processus de mise en œuvre des recommandations déduites des RMDH n’est pas clairement défini dans les pays africains. Le PNUD ne saurait se substituer aux structures de mises en œuvre de programme de développement économique et social. L’analyse et l’évaluation du développement humain débouchent souvent sur des propositions de mesures spécifiques susceptiles d’apporter des corrections éventuelles mais aucune contrainte ne pèse sur les gouvernements pour leur application. C’est dire que les Etats ne sont pas engagés par les constats faits dans les RMDH. Le PNUD n’a pas la capacité de la Banque mondiale pour imposer des conditionnalités en vue de l’application des recommandations déduites des RMDH. De plus avec les changements qui interviennent dans les modes de calcul des différents indices (IDH, ISDH) des RMDH, il n’existe pas de mécanisme de suivi et d’évaluation permettant d’étudier les modifications qui interviennent dans la période décennale, puisque les indices ne sont pas comparables d’une année à l’autre. En effet, les changements de mode de calcul peuvent modifier la classification hiérarchique des pays en terme de développement humain. Les RMDH peuvent–ils continuer de s’arrêter au simple constat. 5-3. Les besoins de stratégie à moyen et long terme Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 33 Les RMDH présentent des analyses et des réflexions sur des thèmes qui sont au cœur du développement économique et social de l’ensemble d’une planète encore configurée en une pluralité de nations d’inégal développement et évoluant dans des structures d ‘encadrement différenciés. Selon R. Boyer, en «en dépit de la pluralité des facteurs de déstabilisation, les espaces nationaux sont loin de s’être fondus dans un nouvel ensemble complètement mondialisé». Le temps des nations n’est donc pas fini. Le consensus de Washington n’avait pas tord d’élaborer et de proposer des stratégies d’instauration d’une économie libérale de marché régulée par «la main invisible» pour déclencher un processus vertueux associant croissance économique et modernisation. Si les politiques se sont avérées peu performantes c’est comme le note J. STIGLITZ, parce qu’elles ont confondu les moyens avec les fins. Après plus d’une décennie, les RMDH doivent maintenant s’atteler a avoir une vision stratégique du développement économique qui aille bien au delà du simple exercice de calcul d’indices qui catégorisent les pays sans leur indiquer la direction à suivre et les moyens à mettre en œuvre. L’émergence des pays d’Asie de l’Est à partir d’une croissance rapide montre que le développement est possible et qu’il peut s’accompagner d’une réduction de la pauvreté, d’une amélioration largement partagée du niveau de vie et même d’un processus de démocratisation. Ils ne sont pas conformés aux prescriptions habituelles mais ont élaboré des stratégies solides qui ont permis en l’intervalle d’une génération de construire des systèmes économiques performants et progressivement de mettre en place des régimes politiques démocratiques. Certains des éléments de leur modèle et de leur stratégie sont maintenant bien connus : le rôle central de l’Etat «pro», c’est-à-dire promoteur, producteur, prospecteur et programmeur, de la communauté et de l’individu, du secteur privé, du secteur public, des paramètres culturels et sociaux. L’étude et l’analyse de questions évidentes de développement comme ceux répertoriés dans les différents RMDH sont insuffisantes pour tenir lieu de stratégie et de politique. Il existe un besoin pressant de stratégie à moyen et long terme qui s’articule autour de trois questions importantes : - l’analyse économique du développement qui présenterait un projet cohérent des politiques à mener pour une croissance durable et équitable, - la régulation économique car «plus de marché et moins de réglementation n’est pas incompatible avec plus et mieux de maîtrise des processus économique», ce qui suppose une réhabilitation de la planification et des techniques modernes de programmation ; Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 34 - des institutions appropriées et fonctionnelles capables d’encadrer et de faire participer de manière démocratique les différents acteurs du jeu économique et politique. CONCLUSION Relever les défis du développement est impossible sans de réformes internes bien adaptées aux différents pays. Le cheminement du développement est multiple et parsemé de contradictions et les différentes théories et modèles qu’ils soient liées à l’idéologie marxiste léniniste des planificateurs ou à l’idéologie libérales se sont avérées inadéquates pendant plus de trente bonnes années. Les faiseurs de modèles doivent penser un développement avec des macrodécisions entraînantes dans chaque pays le développement doit résulter des dynamiques endogènes d’entreprises et d’activités pour constituer le tissus de base. L’ampleur des défis nécessite une conception de la société qui s’appuie sur des points d’ancrage culturels et sociaux. D’après le PNUD le concept de développement humain prend en compte, pour chaque pays non seulement le produit national brut mais aussi l’éducation, la santé, l’espérance de vie, l’accès à l’eau potable, le libertés politiques, cette nouvelle approche oblige à considérer le développement comme un tout : les individus ne sauraient être réduits à leur seule dimension d’homoeconomicus. Les hommes vivent et se développement dans des cadres spécifiques scrutés par l’histoire et la géographie, tout comme ils adoptent des comportements et attitude conditionnés par leur culture. De solides références historiques sur la pensée du développement montrent que les structures d’encadrement de même que les incompatibilités des structures peuvent constituer des freins à la croissance pour ne prendre que cette donnée quantitative. On peut évoquer à ce propos les travaux de Max Weber sur l’influence de l’éthique protestante dans le développement et la consolidation du capitalisme européen et les travaux de Sombart sur la mentalité juive. Trois attitudes intellectuelles paraissent essentielles pour le développement économique et social : - l’attitude à l’égard du progrès matériel : la recherche de ce progrès estelle tenue pour une fin valable de l’activité humaine ? - l’attitude à l’égard du temps : le temps est-il un élément sur lequel l’homme n’a aucune prise ou le temps est-il un bien rare qui doit être aménagé et qui a un prix ? - l’attitude à l’égard de l’accumulation : la richesse est-elle source de consommation, moyen de prestige ouest-elle un instrument de progrès économique par accumulation et investissement ? Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 35 Il existe trop de paramètres extra-économiques qui peuvent commander ou orienter l’activité économique et qui obéissent à un espace local, national ou régional. La gravité de la crise africaine se prolonge et devrait donner lieu à des réflexions bien adossées au réel. Les chances d’un véritable nouveau départ passent par la mise en œuvre de stratégies qui répondent aux besoins de l’Afrique. Les RMDH devraient concevoir des modèles adaptés. Les pauvres d’Afrique manquent d’opportunités, d’insertion et de sécurité matérielle. La solution s’inscrit dans la recherche d’un modèle de société juste dans un environnement sain qui contribuera à une espérance de vie longue en bonne santé. Un schéma institutionnel fondé sur le marché (individualisme méthodologique) et qui oublie la communauté (holisme méthodologique) risque d’être hors jeu. Ainsi, même si les RMDH affichent des préoccupations générales relatives à des questions de développement dans le monde, celles-ci sont encore loin de s’intéresser à la problématique des économies et des populations africaines. Pour y palier, les Rapports devraient corriger les macros analyses, trop global et trop pluriel, pour cerner les réalités de plus prés. Le changement de cadre s’impose car les problèmes de développement humain sont principalement des problèmes africains. Ils seraient mieux abordé dans un espace local, régional ou sous-régional par nature plus homogène. Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 36 Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE 37 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES I- OUVRAGES 1- Banque mondiale L’Afrique peut-elle revendiquer sa place dans le 21ème siècle Washington Dc 2-Banque mondiale Un programme d’action concertée pour le développement stable de l’Afrique au sud du Sahara octobre 1984 3-Banque mondiale, BIRD Nouvel engagement planétaire en faveur de la lutte contre la pauvreté 2000-2001 4-Banque mondiale Pour un développement durable Résumé publié par et l’Environnement (exercice 1994). 5-R.J.Berg et Jennifer ,S. Whitaker Stratégies pour un nouveau développement en Afrique, Nouveau Horizons. , (1986), 6-Centre des Nations-Unies sur les sociétés transnationales Critères pour la gestion d’un développement durable (New-York 1991). 7-A. Cheneau, Loquay, P. Matarasso Approche du développement durable en milieu rural africain Edition : L’harmattan. 8-M. Gillis/Dwight H. Perkins, M.l Roemer/Donald R. Snodgraass Economie du développement éd. 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Professeur Moustapha KASSE 39 II- ARTICLES 1-Attact (200), Les peuples entrent en résistance. 2-Abdellatif Benachnou Environnement et développement Revue : Tiers – Monde, Tome XXXIII N° 130 p.247 – 264, puf. 3-Abdellatif Benachnou Défis, savons, décisions dans le contexte du développement durable Revue : Tiers-Monde, Tome XXXIII n° 130, p.373-392 puf. 4-M.Damian, B. Candliri et P.Berthand. La libération des échanges est-elle une change pour un développement durable ? Revue : Tiers-Monde Tome XXXVIII n°150, p.427-443. 5-C. Delclach Développement économique et développement social en Amérique Latine Problèmes économiques n°2564 du 15/04/1998 6-Louis Fontvieille La dimension humaine dans les théories du développement Revue Economies et sociétés, F 38, Mars 2001 7-M.Kassé Intégration des indicateurs sociaux dans un système planifié Institut du Sahel, Bamako, 1985 8-Problèmes économiques Développement, une nouvelle approche ? n°2, 684 – 18 octobre 2000. 9-G.Ranis, F. Stewart, A. Ramirez. 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