LE RAPPORT MONDIAL SUR LE DEVELOPPEMENT HUMAIN ET L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE :

Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE
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LE RAPPORT MONDIAL SUR LE DEVELOPPEMENT
HUMAIN ET L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE :
QUELQUES ENSEIGNEMENTS
Par
Professeur Moustapha KASSE
Le Rapport Mondial sur le Développement Humain (...) Professeur Moustapha KASSE
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INTRODUCTION
A l’orée du nouveau millénaire, les richesses continuent de croître de
façon importante dans le monde. A contrario, les disparités s’accentuent dans
la répartition de cette richesse et dans le rythme de consommation. Même
dans les pays du Sud, particulièrement ceux d’Afrique Subsaharienne, on note
une forte tendance à l’aggravation des inégalités.
Au cours des trente dernières années, la part des 20% des personnes les
plus pauvres dans le revenu mondial est tombée de 2,3% à 1,4%. Dans la
même période, la part des 20% les plus riches passait de 70% à 85%. L’écart
de revenu entre les 20% les plus riches et les 20% les plus pauvres a ainsi
doublé passant d’un rapport de 30 (riche) sur 1 (pauvre) à un rapport de 61 sur
1. Ces inégalités sont considérées comme la conséquence d’une dynamique de
marché darwiniste et discriminatoire qui récompense les plus forts et ne
réserve rien pour les perdants qui proviennent principalement d’Afrique. C’est
une réalité choquante qui constitue «la toile de fond de l’économie mondiale
aujourd’hui» (Brisset 1993) : richesse et infortune, chance et adversité,
ressources et dénuement se sont en effet partagés d’une manière de plus en
plus inégale, les riches devenant plus riches et les pauvres plus pauvres.
L’économie des «buffets» coexiste avec celle des «soupes populaires».
Pourtant, jamais l’humanité n’a produit autant de richesses économiques,
financières et technologiques mais aussi, jamais elle n’a crée autant de
pauvreté et d’exclusion de tous ordres.
Depuis 1990, date de la parution de son premier rapport mondial, le
PNUD contribue à étudier et à approfondir régulièrement les différents
aspects constitutifs du développement humain. Le débat sur la problématique
du développement était dominé, jusqu’au début des années 90, par l’arsenal
théorique néo-classique et néo-keynésienne de la monnaie et des relations
économiques et financières internationales qui inspire et éclaire la démarche
des institutions de Bretton Woods. Leurs interventions visant l’augmentation
de la production dans les pays en développement s’articulent autour des
réformes macroéconomiques et structurelles pour l’instauration d’une
croissance économique durable.
Ces réformes qui ont été présentées au début comme une série de
mesures de court et moyen terme de stabilisation et d’ajustement puis de
"désétatisation" recouvrent des implications majeures pour le choix des
stratégies de développement et l’échelle de mesures des performances
économiques. Dans la perspective de ces institutions, acceptée au fur et à
mesure par les gouvernements des pays africains, les rapports de pouvoir
économique surclassent les préoccupations de bien-être.
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Les programmes inspirés par ces institutions, loin d’être politiquement
neutres et de jouer un rôle exclusif d’efficacité technique comme on le
suggère, sont ainsi conçus de façon à orienter les interventions de l’Etat de
manière à délaisser certaines stratégies de développement. Les stratégies non
orientées vers l’exportation et celles qui favorisent des mesures redistributives
et des réformes sociales sont remises en cause par le processus d’ajustement
et de désétatisation.
C’est ainsi que dans leur majeure partie, les pays en développement,
notamment ceux d’Afrique subsaharienne, ont mis en œuvre des programmes
d’ajustement inspirés par les institutions de Bretton Woods.
La première génération des PAS avait pour finalité de stabiliser le cadre
macroéconomique de ces pays alors marqué par des déséquilibres importants
(faible épargne publique en raison du niveau élevé de la propension moyenne
à consommer de l’économie, déficit budgétaire et niveau d’inflation élevés,
aggravation des déficits courants). Les réformes ayant marqué cette phase des
PAS se sont traduites par des politiques monétaires et surtout budgétaires très
restrictives qui ont entraîné une forte compression de la demande et, en
conséquence, des processus inextricables de recomposition sociale. Les
modification dans la répartition des revenus des non producteurs vers les
producteurs, des villes vers les campagnes, les pertes en emplois formels,
l’évolution contrastée des revenus ruraux, la désynchronisation prix/salaires
ont progressivement créé une dimension sociale de l’ajustement. Cette
situation avait entraîné des programmes de compensation sociale consacrés à
l’emploi, à l’éducation, à la santé et à l’alimentation et destinés aux groupes
dits vulnérables.
La deuxième génération des PAS, celle dite d’ajustement réel, avait
pour objectif de relancer l’activité économique. En dépit des réformes mises
en œuvre lors de cette phase, le rythme de l’activité économique n’allait pas
être à la hauteur des résultats escomptés ; le taux de croissance du PIB
évoluant en-dessous de celui démographique.
La phase d’ajustement externe, qui s’est traduite par des mesures de
dépréciations compétitives pour les monnaies à taux de change flexible et de
dévaluation pour celles à parité fixe, sera dans l’ensemble marquée par une
relative reprise de la croissance. Mais en dépit de celle-ci, le taux de
croissance du PIB/tête est demeuré trop faible par rapport au rythme
d’accroissement de la population.
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Cette situation allait entraîner une forte dégradation des conditions de
vie des populations. Ce coût social élevé des PAS, allait très tôt être mis en
relief par le PNUD au moment les autres institutions et la plupart des
analystes se concentraient sur les aspects strictement économiques de ces
réformes.
L’aggravation manifeste de la condition sociale des populations
défavorisées dans les pays en développement dès le début des années 80
alarme les ONG aussi bien que les institutions internationales tel que le BIT,
et l’UNICEF (Ajustement à visage humain 1984) accusent directement les
mesures de stabilisation et d’ajustement structurel. Cette situation est
attribuée à la détérioration du cadre macroéconomique et financier, à la
récession économique internationale, à la dégradation des termes de l’échange
et à l’endettement massif. Dans les pays soumis aux programmes
d’ajustements structurels, les conséquences des mesures accentuent les
difficultés de la population : le freinage de la demande et de compression des
dépenses publiques se traduisent par un recul des dépenses sociales, une
baisse des effectifs de la fonction publique, une réduction de la fréquentation
des écoles et des centres de santé. Les réformes visant la réduction des
déficits et la relance de la croissance débouchent sur une dégradation du
développement humain avec une recrudescence de la pauvreté. Plusieurs
ONG et institutions internationales mettent en cause les programmes
d’ajustement : le BIT (1990), la FAO (1990) ainsi que des chercheurs ( P.
Hugon (1989), H. Singer (1989), Loxley (19...) etc.
C’est sur le terrain de la réconciliation entre la croissance économique
et le développement social que le PNUD se sépare du cadre de référence
dominant pour s’élever en créant le concept du Développement Humain
Durable (DHD). Le premier Rapport Mondial sur le Développement Humain
(RDMH) publié en 1990 par le PNUD définit un Indice composite du
Développement Humain (IDH) prenant en compte l’ensemble des dimensions
de la vie humaine : économique certes, mais aussi sociale, culturelle et
politique. Cet indicateur est calculé en combinant le PNB par tête (instrument
de mesure de la situation socio-économique d’une nation), avec d’autres
indicateurs tels que : l’espérance de vie à la naissance, le taux
d’alphabétisation des adultes et le taux de scolarisation.
Au regard de l’évolution des RMDH, il apparaît que le défi majeur est la
réduction de la pauvreté et des inégalités ainsi que l’investissement dans les
ressources humaines. Les voies et moyens pour y parvenir passent entre autres
par l’amélioration de la gestion des affaires publiques et la restructuration des
institutions de gouvernance, la participation des populations à l’élaboration et
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l’exécution des programmes les concernant, la croissance économique, le
droit au développement et à la participation des femmes. Les thèmes abordés
ont tour à tour porté sur des questions bien évidentes du développement :
- La définition et la mesure du développement humain (1990) ;
- Le financement du développement (1991) ;
- Les aspects mondiaux du développement humain (1992) ;
- La participation populaire au développement humain (1993) ;
- Les nouvelles dimensions de la sécurité humaine (1994) ;
- l’égalité sociologique entre les genres et le développement
humain (1995)
- Le lien croissance économique et développement humain (1996) ;
- Le développement humain au service de l’éradication de la
pauvreté (1997) ;
- Les modes de consommation et le développement humain (1998) ;
- La mondialisation à visage humain (1999) ;
- Les droits de l’homme et le développement humain (2000).
Le contenu des Rapports s’est enrichi et s’est techniquement amélioré
au fil des années avec un affinement plus poussé de la thématique et des
instruments de diagnostic ou de mesure. Le contenu du RMDH intègre
progressivement la dimension sociale qui est mieux prise en charge dans
l’IDH. Le Rapport de 1994 marque un tournant significatif : le concept de
développement humain est complètement dissocié de celui de la croissance
économique. Ce concept est fondé sur l’universalité du droit à la vie qui
accorde à celle-ci une valeur intrinsèque sur laquelle s’appuient les concepts
fondamentaux de liberté, d ‘égalité et de justice. «Un nouveau défi du
développement devrait : i) être axé sur l’être humain, ii) considérer la
croissance comme un moyen et non comme une fin, iii) préserver les
perspectives offertes aux générations actuelles comme aux générations
futures, et iv) respecter les écosystèmes dont dépend l’existence de tous les
êtres vivants. Cette approche du développement doit permettre à tous les
individus de développer pleinement leurs capacités pour les utiliser au mieux
dans tous les domaines : économiques, social, culturel et politique» (RMDH,
1994). Cette prise en compte de la dimension humaine du développement par
les praticiens est en correspondance avec les avancées théoriques intervenues
depuis la fin des années 80 avec les théories de la croissance endogène.
Plus qu’une simple notion, le développement humain durable (DHD)
fait référence à un système complet de modèles : modèles de production,
modèles de reproduction sociale, modèles de répartition, modèles de
participation, modèles d’institutionnalisation, modèles de socialisation. Plus
succinctement, il gravite autour de la réflexion théorique, la conception et la
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