Mai 2007 Université de Kara du Togo L

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Université de Kara du Togo
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion
Les Grands Problèmes de l’Economie
Contemporaine
Par
Professeur Moustapha Kassé
Mai 2007
www.mkasse.com
[email protected]
Introduction
L'objectif premier de ce cours est de sensibiliser les étudiants pour qu’ils
prennent conscience de la diversité des problèmes économiques contemporains
particulièrement à l’échelle mondiale et à celle du Continent et de la Sous Région
Ouest africaine. Ceux-ci apparaissent à la fois dans leur vie quotidienne et dans les
enseignements des théories économiques. Toutefois, même dans une approche
globalisante, ces problèmes économiques qui se posent actuellement sont nombreux,
complexes et bien souvent inter corrélés, inter reliés. Leur compréhension nécessite
de disposer d’une méthodologie conséquente et des instruments d’analyse fiables et
pertinents d’abord pour les sélectionner ensuite pour les comprendre.
Cet enseignement sera centré sur une démarche multidisciplinaire afin
d’éviter toute approche strictement « économiste » forcément réductrice de certains
phénomènes qui dépassent trop souvent le cadre traditionnel de l’analyse théorique
standard néo-classique.
Deux questions préalables se posent pour dégager le contenu de cet
enseignement : Comment les sélectionner ? Comment les approcher ?
Nous procéderons à réaliser trois synoptiques pour identifier et mieux
comprendre les grandes tendances de l’économie mondiale, africaine et ouest
africaine et les risques :
- synoptique de la grille de lecture
- synoptique des grands problèmes de la mondialisation
- synoptique de la renaissance africaine
I/ Synoptique pour une grille de lecture des grands
problèmes économiques contemporains ?
Les statistiques disponibles malgré leur imprécision ne laissent aucun doute
sur le constat suivant: l’économie n’a jamais été aussi mondialisée, aussi massive
dans les sphères de la production, des échanges, des finances et de la
consommation. Egalement, les NTIC et les diverses innovations sont en train de
transformer radicalement les systèmes productifs. Toutefois, ces problèmes
économiques sont nombreux et complexes et nécessitent, en conséquence, d’être
sélectionnés et classifiés, en mettant en évidence les éléments plus marquants, en
proposant des repères et un balisage, en réduisant au minimum indispensable les
données chiffrées. Il faut alors privilégier une approche simple et lisible, sans
prétention à l’exhaustivité, pouvant à la fois fournir une synthèse accessible aux
étudiants désireux d’améliorer leur culture économique et de repérer les voies d’un
approfondissement ultérieur.
Dans ce cadre, parmi les nombreux problèmes, nous avons sélectionné et
classés ceux qui nous semblent les plus importants et sur lesquels il est indispensable
d’attirer l’attention sur leurs évolutions récentes et de signaler les controverses
majeures qui les entourent. A chaque l’espace de référence sera le monde, l’Afrique et
la Région Ouest africain
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A/ Les aspects méthodologiques de l’observation des
grands problèmes économiques contemporains.
Quels sont les grands faits économiques et sociaux du monde contemporain
qui méritent d’être étudiés ? Quels sont les critères de sélection ?
La pensée économique et les recherches universitaires classifient les faits
économiques et sociaux en deux catégories : les faits observés et les faits stylisés pour
reprendre le mot de Robert Boyer
1. Sur les faits observés.
Globalement, la science économique est une science de l’observation des faits
économiques donc se préoccupe de l’observation des activités économiques et des
cadres dans lesquels elles se déroulent ; d’études des mécanismes de la production ,
de la consommation, de la répartition Pour les besoins de l’observation en vue de
formuler les rapports constants (processus de théorisation) en sciences économiques
émet des hypothèses, construit des théories, dégage des lois et utilise nécessairement
une démarche, une méthode.
Comme pour toute science, appliquée, la nécessité de la science économique
peut se résumer en cette formule lapidaire comprendre pour agir. Les grands
problèmes sous ce rapport concernent : La mondialisation dans sa triple
compréhension d’internationalisation de la production, des échanges et de la
monnaie, les nouvelles technologies, les politiques économiques et financières les
Etats, les variables déterminantes comme l’énergie, les acteurs et les institutions, le
développement
2. Sur les faits stylisés
Ils sont constitués des faits ténus que la théorie économique n’arrive point ni à
expliquer encore moins à modifier. En effet, malgré ses avancées remarquables, le
grand public observe une sorte de désillusion sur la capacité de la science
économique à expliquer les grands faits stylisés et à proposer des solutions claires aux
grands problèmes du monde contemporain. Les multiples désaccords et controverses
des experts sur ces questions sont perçus par les citoyens comme un manque de
fiabilité de la discipline.
La science économique est traversée par de multiples interrogations de
caractère épistémologique relativement à son statut et particulièrement à ses
méthodes. Ce contexte de multiples controverses, voire même de crise lui permet –
elle d’offrir une ou des grilles de lecture qui permettent de mieux comprendre les
grands faits économiques.
Malgré ses avancées remarquables, le grand public observe une sorte de
désillusion sur la capacité de la science économique à expliquer les grands faits
stylisés et à proposer des solutions claires aux grands problèmes du monde
contemporain. Les multiples désaccords et controverses des experts sur ces questions
sont perçus par les citoyens comme un manque de fiabilité de la discipline. Même la
communauté scientifique s’interroge sur son aptitude à tenir rigoureusement son
rôle :
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crise de la prévision face aux fluctuations des marchés et des monnaies
crise de la politique économique face au chômage, à la pauvreté et à la
demande sociale. Cette crise implique celle de la pensée car si on ne sait
pas agir c’est bien parce que l’on ne sait plus bien analyser, ce qui
semble paradoxal en relation avec la surdéveloppement de l’utilisation
des techniques quantitatives.
Dans les propositions pour un nouvel esprit scientifique en science
économique les auteurs mettent l’accent sur la nécessité d’une prise en considération
plus grande des faits économiques et sociaux dans les formulations et les recherches
économiques. Dans ce sens, A.S..Eitcher note que « les économistes ont échoué à
appliquer à leur propre travail les règles épistémologiques que suivent normalement
les scientifiques pour éviter de faire des erreurs. En particulier le refus de se
soumettre au fait que les idées et les théories avancées doivent être empiriquement
confirmées. Cette critique est reprise par A. Simon quand il écrit que « les
économistes répugnent à reconnaître et à accepter les faits du monde réel qui
semblent aller à l’encontre des cette théorie de l’équilibre général ou miner ses
fondations.
Ce dont souffre principalement le savoir économique de notre temps, c’est d’un
déficit de en réalisme, certes le travail théorique est important. Certes, il existe des
personnalités et des institutions puissantes qui se consacrent à la collecte des faits et
à à leur première élaboration, mais les théories restent imperturbablement à côté des
faits
La reconstruction éventuelle d’une discipline économique qui ne prétendrait
pas exclusivement au statut de science positive, lais accepterait pleinement ses
dimensions normatives passe par la destruction du mythe scientifique de l’économie
comme science naturelle et par trois démarches :revenir à un contenu descriptif fort,
même si c’est au prix de l’abandon d’une théorie plus générale ;préférer les
investigations empiriques aux hypothèses générales de rationalité et enfin concevoir
une autre manière d’articuler, en économie les dimensions normatives et positives.
Ces deux grandes catégories de problèmes économiques contemporains seront
restituées dans un cadre ouvert en permettant l’utilisation d’une ou des grilles de
lecture. Quelles sont les grilles de lecture dont nous disposons pour justifier les choix
des grands problèmes retenus ? On peut en retenir plusieurs mais nous prendrons.
B/ Les grilles de lecture des faits
Ces grilles de lecture sont multiples, nous décidons d’en retenir trois qui sont
les plus significatives mais aussi les plus usuelles à savoir :
1. la lecture factuelle
Globalement, la science économique est une science de l’observation des faits
économiques donc se préoccupe de l’observation des activités économiques et des
cadres dans lesquels elles se déroulent ; d’études des mécanismes de la production,
de la consommation, de la répartition Pour les besoins de l’observation en vue de
formuler les rapports constants (processus de théorisation) en sciences économiques
émet des hypothèses, construit des théories, dégage des lois et utilise nécessairement
une démarche, une méthode.
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Comme pour toute science appliquée, la nécessité de la science économique
peut se résumer en cette formule lapidaire comprendre pour agir. Elle recouvre deux
aspects bien distincts : compréhension et action. La compréhension consiste pour
l’économiste à décrypter et à interpréter les mécanismes reliant les variables
représentatives de la situation et de la dynamique d’un système économique
Cette lecture consiste en une analyse des faits qui déterminent ou
conditionnent la vie économique et sociale de pays ou groupes de pays. La
connaissance de ces faits dépend des statistiques disponibles et de la capacité à les
interpréter. Il faut rappeler que la science économique est avant tout une science de
l’observation des faits et mécanismes de production, de consommation, d’échange, de
répartition et de distribution.
Elle est traversée par de multiples interrogations de caractère épistémologique
relativement à son statut et particulièrement à ses méthodes. Ce contexte de
multiples controverses, voire même de crise lui permet –elle d’offrir une ou des
grilles de lecture qui permettent de mieux comprendre les grands faits économiques.
2. la lecture historique
Elle consiste à l’analyse historique de la formation des grands problèmes
économiques. L’analyse historique est assez éclairante pour l’économiste
particulièrement dans cette direction K.Marx et J. Schumpeter ont attaché un grand
rôle à l’histoire : le matérialisme historique et d’autres auteurs comme W.W. Rostow
accompli le même travail avec une méthodologie toute différente. Rappelons cette
analyse à grands traits. L’ambition de l’auteur est de présenter l’avenir des sociétés à
partir des références du passé.
a) Un exemple des étapes de la croissance de Rostow
Toute société lancée dans un processus de développement traverse cinq
étapes : la Société traditionnelle, l’apparition des conditions du démarrage, le
démarrage ou encore le « take-off » la société de la maturité et la société de la
consommation de masse. Prenons l’étape des conditions du démarrage . Elle est une
étape de transition. Du point de vue économique, le problème fondamental est celui
de l’accumulation du capital, donc l’accroissement du taux d’investissement. Le rôle
dévolu à l’agriculture est capital car elle doit approvisionner l’ensemble de la
population, acheter les produits de l’industrie et lui vendre les matières premières
nécessaires, fournir la majeure partie de de l’épargne du pays. Une telle préparation
ne peut se réaliser que s’il se produit des changements extra économiques.
Changement dans l’attitude de la société vis-à-vis de la science, de la technique du
risque. Dans l’organisation sociale, une nouvelle élite doit émerger et qui jette un
regard nouveau sur la modernisation dans l’organisation politique.
D’autres auteurs comme Robert W. Fogel et Douglass C.North ont contribué a
une analyse plus riche de l’histoire de l’économie en mêlant histoire et théorie
économique et en donnant à l’approche néo-classique une vision moins statique et
incluant dans l’analyse des phénomènes économiques le rôle fondamental des
institutions. Cette Nouvelle Ecole Historique est connue sous le nom de
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« cliométricien « Ils ont révolutionné dans les années 60, la méthodologie de
l’analyse historique.
b) La lecture par les crises : chroniques des turbulences
économiques :
En 40 ans l’économie mondiale a connu 4 crises majeures :
- La crise des années 1970-1975 qui fait suite aux « Trente glorieuses
années ». Elle est celle du premier choc pétrolier et désordre monétaire
- La crise des années 80 avec le second choc pétrolier, le resserrement de
la politique monétaire américaine (1979) et le déclenchement de la crise
de la dette.
- La crise du début des Années 90 subséquente à la politique monétaire
indûment expansionniste aux excès d’investissements avec la
multiplication des créances douteuses
- La crise issue d’un dysfonctionnement du Système financier
international
Les éléments de fragilité du système financier mondial qui a acquis un pouvoir
économique exorbitant tels qu’ils sont à même de déstabiliser les circuits de
financement et le rythme de croissance des économies : Tout cela peut conduire au
crash, à la catastrophe.. Ils sont au nombre de quatre à savoir :
- Incapacité de mesurer la qualité des moyens de paiement au niveau
mondial
- Difficultés à contrôler les activités des établissements financiers
- Montée en puissance des finances illégales provenant de la corruption,
de la rapine, de la drogue
- La montée de la finance spéculative ; les risques et les incertitudes se
multiplient.
3. la lecture théorique
La science économique connaît en moins de deux siècles un développement
fulgurant. Elle est devenue une très vaste et remarquable entreprise ce qui et la
conséquence de la conjugaison de l'ampleur des recherches et de l'importance des
ressources intellectuelles et matérielles qu’elle mobilise et qui permettent la
publication de plus d’une centaine de revues scientifiques de haut niveau et des
dizaines de milliers d’ouvrages. Cependant, le savoir économique ne permet pas
toujours d'expliquer certains phénomènes économiques majeurs et surtout de
dégager des politiques économiques et financières adéquates. Les courants et écoles
de pensée qui la constituent sont résumés dans le tableau qui suit :
MACRO
MACRO
MACRO
MACRO
ECONOMIE ECONOMIE ECONOMIE ECONOMIE MICRO ECONOMIE DE
ECONOMIE L'ENTREPRISE
(Ecole
(Ecole néo(Ecole néoclassique)
classique)
classique)
Théorie de
l'équilibre général
Modèle de Solow
Théorie du choix
social
Théorie des
Théorie des coûts Marchés financiers
fluctuations et des
comparatifs
et économie réelle
cycles
(Autres écoles)
Théorie
Keynésienne
Théorie de
l'agence
Théories des
organisations
Théorie Marxiste
Théorie des jeux
Néo-institutionalisme
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Loi des
débouchés
Fonction de
production néoclassique
Economie du bienThéorème d'HOS.
être
Synthèse
Keynésienne
Nouvelle th. du
com international
Théories du
marché du travail
Théorie des coûts de
transaction
Théorie des zones
monétaires
optimales
Théorie de la
régulation
Théorie des
anticipations
rationnelles
Théorie des
conventions
Nouvelle théorie
classique
Synthèse
marginalistes/
classiques
Théorie
monétariste
Théorie des cycles
réels
Théorie microéconomique
Relations stratégiestructure
Théorie
quantitative
Théorie monétaire
du
surinvestissement.
Les grappes
d'innovation
Théorie du
déséquilibre
Théorie du cycle
de vie
Structure
informationnelle
Théorie Classique
Inférence
statistique
Critique de Marx
Théorème
d'équivalence
Théorie de
Duesenberry
La technostructure
Le tableau
économique
Courbes IS-LM
Néokeynésianisme
Théorie des
marchés
contestables
Théorie des
contrats
Les groupes de
participants
Loi de l'avantage
absolu
Théorie de la
croissance
endogène
Courbe de
PHILLIPS
Théorie du capital
humain
Théorie de la
rationalité limitée
Loi d'Engel
Modèle de
Mundell-Fleming
Règle de
Tinbergen.
Théorie du
monopole
Théorie des
anticipations
adaptatives
Loi de Walras
Loi d'Okhun
Courbe de Laffer
Théories de la
finance
Théorie des
incitations
Théorie de la
sousconsommation
Règle d'or
Le rôle de l'Etat
Quels sont les principales théories économiques et les faits qui les portent ?
En visitant la pensée économique contemporaine, les grands courants théoriques
dominants et qui recouvrent notre champ d’intérêt sont :
- les théories de la croissance
- les théories du développement
- les théories économiques de l’Etat et des Institutions
- les théories de la monnaie
- les théories du commerce international
- les théories du marché du travail
Nous en traiterons quelques unes pour l’exemple :
a) Les théories de la croissance économique
La notion de croissance économique n’est pas forcément simple à définir. Deux
définitions traditionnelles permettent de l’appréhender : La première consiste à dire
qu’il s’agit d’une hausse durable de la production de biens et services (donc de la
richesse) dans une économie donnée. Les statistiques habituelles ont pris l’habitude
de la matérialiser par le taux de variation du Produit Intérieur Brut ou du Produit
National Brut.
Une variante de cette mesure prend en compte non plus la production, mais la
production par habitant. Elle a comme avantage d’intégrer l’évolution de la
population dans son calcul et d’éviter de porter des jugements absurdes sur
l’évolution du niveau de vie moyen dans un pays. Cette approche peut être modulée,
en ne prenant en compte dans la population que la population active, éventuellement
que la population active employée. Dans tous les cas, ce que l’on obtient est un
indicateur de l’évolution de la productivité du travail.
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Néanmoins, même si on peut préférer cette version (qui est d’ailleurs la plus
souvent retenue dans la présentation des modèles de croissance), elle n’est pas
exempte de critiques. En faire une liste exhaustive serait trop longue. On peut
néanmoins retenir quelques grandes lignes :
- le PIB ne mesure pas correctement les évolutions de niveaux de vie réels
lorsque la qualité des produits changent et que les prix baissent. De
sorte, par exemple, qu’on peut penser que nos habitants de Benêland
ont en réalité un niveau de vie supérieur à celui de 1960 grâce à la
diversité et la qualité accrues des biens et services qu’ils consomment
40 ans plus tard. En particulier, la mesure de la production de certains
services peut poser des difficultés importantes.
- le PIB est une mauvaise mesure de la richesse. En particulier, il ne
capture que les aspects matériels de la vie. Exprimée de cette façon, la
critique n’a pas d’autre sens que ce qu’elle avance et n’est pas en rapport
avec ce qui nous intéresse, à savoir une mesure quantitative de la
richesse. En revanche, dès que l’on s’intéresse à ce qui fait qu’un taux de
croissance est élevé ou non, alors on peut retenir cette perspective
Traditionnellement, c’est par la notion de développement que l’on complète
celle de croissance économique. Le développement, selon la définition qualitative qui
en est donnée par François Perroux. Selon lui, au-delà de la croissance quantitative
que mesurent les indices de production et de revenu, le développement concerne à la
fois la transformation des structures sociales, le changement des mentalités et les
aptitudes neuves qu'une population acquiert pour l'amélioration de ses conditions de
vie.
Il y aurait donc une théorie de la croissance, qui capturerait les aspects
quantitatifs et une théorie du développement qui l’engloberait et analyserait plus
finement les rouages de l’évolution des sociétés. C’est bien cette dichotomie qui
régnait clairement dans la théorie économique jusqu’à une période récente. Depuis
peu, on peut considérer que sous l’impulsion de la nouvelle théorie de la croissance,
dite théorie de la croissance endogène, cette division n’a plus la pertinence passée.
Pour résumer, on peut dire que l’intérêt porté aux questions de capital humain,
d’institutions et de trajectoires historiques a jeté un pont entre les deux approches.
De fait, même si les modèles de croissance restent basés sur la progression du
revenu, les analyses empiriques font appel à des données qui conviennent aussi à
l’étude du développement (le petit livre de Robert Barro « Les facteurs de la
croissance économique » en donne, parmi bien d’autres, un aperçu). C’est cette
approche qui est retenue ici. La hausse de la production est due à la hausse de la
quantité des facteurs de production utilisés (capital et travail) et aux progrès réalisés
dans l’utilisation de ces facteurs (progrès technique ou productivité globale des
facteurs). On n’expliquera que très peu ici comment ces facteurs créent de la
croissance et, surtout, comment ils interagissent entre eux. C’est l’objet des modèles
de croissance eux-mêmes. On se limitera à quelques précisions élémentaires.
Le capital physique
Il est question des équipements matériels qui entrent dans la production. La
notion de capital agrégé, le capital total d’un économie a soulevé des discussions
entre néoclassiques et postkeynésiens dans ce qu’on a appelé la « querelle des deux
Cambridge » (le Cambridge du Massachusetts où se trouve le MIT – et Harvard - et
Cambridge en Grande Bretagne). Robinson et Kaldor niaient la possibilité d’agréger
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des biens de capital hétéroclites alors que Samuelson et Solow défendaient l’opinion
opposée. En apparence, les seconds ont imposé leurs vues. Mais à bien y réfléchir, les
modèles de croissance endogène avec différenciation des biens de capital illustrent
plutôt le point de vue des premiers.
Une distinction peut être faite entre capital privé et capital public. Le second
concerne les dépenses d’infrastructure financées par des dépenses publiques, sur la
base de la collecte d’un impôt (qu’il soit contemporain des dépenses ou reporté sous
forme de dette publique). Dans la littérature sur la croissance, ce capital particulier
présente un intérêt lorsqu’il concerne le financement de biens publics qui, bien
qu’utiles dans la production, ne sont pas fournis par le marché pour les raisons
habituellement évoquées à ce sujet.
Pour finir, il est important de relever que la hausse du capital disponible
contribue directement à la croissance par l’accroissement des capacités de production
et, indirectement, par sa contribution à l’incorporation du progrès technologique
dans le processus de production. C’est même cet aspect qui retient l’attention de la
théorie de la croissance endogène. C’est un premier exemple du rôle des externalités
dans la croissance.
Le travail et le capital humain
Au sens premier, il s’agit des travailleurs occupés à la production. Mais les
travailleurs ne sont pas tous dotés des mêmes compétences. Pour tenir compte de ce
fait, on peut distinguer divers types de travail. Il est ainsi possible de considérer d’un
côté les travailleurs qualifiés et d’un autre les travailleurs non qualifiés.
De manière plus générale, il est possible de considérer que chaque unité de
travail est caractérisée par un volume de capital humain, qu’on peut alors traiter
comme un facteur à part. Le capital humain rend compte de l’aptitude d’un
travailleur à s’insérer dans un processus de production. En quelque sorte, il mesure la
qualité du facteur travail. Son niveau dépend de plusieurs éléments :
 l’état de santé général,
 le niveau d’éducation qu’il s’agisse de formation initiale ou continue,
 l’apprentissage par la pratique (learning by doing), qui traduit le processus
d’apprentissage qui naît de la pratique régulière d’une activité. On notera au
passage que les chômeurs ne bénéficient pas de cette opportunité.
De même que le capital physique, le capital humain offre une double contribution à la
croissance : directement par l’adjonction de bras ; indirectement par la diffusion des
idées. C’est un autre aspect du rôle des effets externes dans la croissance.
Le progrès technique
Il est d’usage de ne distinguer que les trois facteurs évoqués au dessus (capital,
travail, progrès technique). Le caractère résiduel du progrès technique (au sens où
c’est ce que l’on mesure quand travail et capital ont été évalués) en fait un fourre-tout
peu homogène. Dans la mesure où on le définit comme tout ce qui rend la
combinaison capital-travail plus performante, tous les progrès dans la façon
d’agencer les activités humaines, alors il recouvre un ensemble d’éléments
particulièrement vaste. On distinguera deux grandes catégories de progrès
technique : les institutions et l’innovation technologique.
Distinction conceptuellement discutable, elle est utilisée ici par commodité.
Ces deux ensembles entretiennent le plus souvent des rapports étroits, se recoupent
largement et, surtout, ils ont pour point commun fondamental de faire partie de ce
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que l’on peut appeler (improprement au regard de la version platonicienne du
concept) le monde des idées. On notera aussi que le capital public est à l’interface de
la notion de capital et de progrès technique : puisqu’il est mis en place pour favoriser
la productivité des facteurs privés, alors il est un élément de progrès technique. Tout
ceci n’est décidément pas simple...
Les Trente Glorieuses : Taux de croissance annuel moyen en % dans les pays développés à travers 5
périodes différentes dont la dernière 1945/1973









Période des 30 glorieuses clairement identifiée : croissance exceptionnelle et généralisée
entre 1950 et 1973
Phénomène de rattrapage des pays développés par rapport aux Etats-Unis (et le RoyaumeUni)
Net ralentissement en 1973 : baisse de moitié de la croissance
Sur les 180 années, avec un taux de croissance de 2.5%, la richesse a été multipliée par
1.025180 = 85
sortie définitive des situations précaires des sociétés avec 3 maux : famine, épidémies et
guerres; le problème économique de base (contraintes alimentaires) résolu
Que signifie les taux de croissance moyens ?
Un individu né en 1950 aurait vu à 23 ans son revenu multiplié par
6 au Japon
2,5 en France
Un individu né en 1973 aurait vu à 23 ans son revenu multiplié par 1,5 seulement en France
Phénomène visible de développement: chauffage central, réfrigérateur, machine à laver,
téléphone, télévision, augmentation du trafic automobile, explosion des biens de
consommation accessibles question importante contemporaine : causes du ralentissement de
la croissance
La croissance appauvrissante.
Cette situation peut se produire lorsqu’un pays pratique le libre-échange et
qu’il connaît une amélioration de ses techniques de productions et/ou une
amélioration de sa dotation factorielle. Ces améliorations entraînent une baisse du
prix mondial du bien exporté d’où une détérioration des termes de l’échange. Cette
situation a d’autant plus de chances de se produire que la croissance provient
essentiellement du seul secteur des exportations, que l’élasticité élevée, que le pays en
question a été le seul à connaître ces améliorations.
Comment calculer le taux de croissance et les autres notions
Le taux de croissance
Augmentation de la quantité totale de biens et services
produit sur une période de temps (un an)
Quantité totale : PIB ou PNB noté Y
Taux de croissance :
La croissance réelle
production en quantité et non en valeur
il faut soustraire la croissance des prix
Le taux de croissance du PIB/tête
Pourquoi : pour avoir une idée de la croissance de la richesse par individu
Utile pour comparer les pays développés par rapport aux PVDs
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b) Les théories du développement
Qu’est ce que le développement ?
Selon Kuznets, la notion de développement économique qui se distingue de la
croissance économique (élévation du revenu par tête et du produit intérieur brut)
combine trois éléments : une croissance économique auto-entretenue, des
changements structurels de la production et le progrès technologique. Les
historiens du développement, les théoriciens du développement de la nouvelle école
institutionnelle et les économistes néoclassiques du développement ajoutent à ces
éléments la modernisation institutionnelle qui permet aux marchés d’orienter
rationnellement les décisions économiques des individus. Les théoriciens de la
modernisation ajoutent le développement politique et social la liste tandis que l’école
de l’esprit d’entreprise insiste sur l’évolution socioculturelle. Enfin, les défaillances du
processus de croissance qu’ont connu les pays en développement ont amené certains
à ajouter l’augmentation du bien-être au bénéfice du plus grand nombre à la liste des
caractéristiques du développement économique.
Cinquante ans de développement qu’avons –nous appris ?
Lors de la seconde conférence européenne le développement organisée par la
Banque mondiale et le Conseil d’analyse économique qui s’est déroulée à Paris des 26
au 28 juin 2000, Irma Adelman, dans sa communication intitulée : « Fifty Years of
Economic Development : What Have we learned ? ».
Cinquante ans de
développement : qu’avons nous appris »), recense huit leçons :
1. Le développement économique des pays en développement est
possible, ce qui dans les années cinquante n’était pas aussi évident que cela peut
l’être aujourd’hui ;
2. Le processus du développement économique est à la fois
multidimensionnel et non son linéaire. Il correspond à un changement
dynamique non seulement au niveau de la structure de production et de la
technologie mais également au niveau des institutions sociales, politiques et
économiques aussi bien qu’au niveau des éléments constitutifs du développement
humain ;
3. Il existe pour les gouvernements un éventail de choix en matière
d’institutions de politiques de développement et de stratégies de mise
en œuvre dans le temps, et cela même à des niveaux de développement
identiques. Les choix faits, à leur tour, génèrent les conditions initiales pour un
développement ultérieur C’est pourquoi comprendre comment le développement
s’est enclenché est tout à fait essentiel à l’analyse des différentes situations ;
4. Le développement a lieu de manière inégale, les différents aspects
du processus changement par sauts et conduisent à jeu continuel de
rattrapage. Les réussites de chaque phase constituent les conditions initiales
de la phase suivante ainsi que des défis. L’évolution créatrice, les modifications
de trajectoires mais aussi la destruction constituent l’essence même d’un
développement réussi à long terme ;
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5. Les
changements
technologiques,
démographiques
et
économiques, les conditions sociales et institutionnelles fournissent
l’impulsion principale du processus de développement. Ils entraînent à
la fois de nouveaux défis et de nouvelles opportunités pour le développement du
pays. Ils ont de multiples implications et enclenchent des effets de seuil et de
modifications de trajectoires dans le développement ;
6. Les facteurs nécessaires au développement sont à la fois de nature
matérielle et immatérielle. Par ordre d’importance, ce sont : l’engagement
des autorités politiques en faveur du développement économique ; le niveau du
capital social ( qui inclut les ressources humaines, le degré de cohésion sociale et
la volonté d’agir en coopération) ; les biens matériels (infrastructure capital
physique et humain, investissement et système financiers) ; des politiques
appropriées notamment en ce qui concerne la politique commerciale, la politique
d’investissement et la gestion macroéconomique (ces politiques pouvant être
modulées dans le temps et en fonction des secteurs ; les institutions et la culture ;
l’adaptation sociale et institutionnelle) ;
7. La relation entre croissance et répartition dépend principalement du
facteur intensif de la croissance et de la manière dont est réparti le plus
important des facteurs de production ;
8. Les facteurs culturels jouent un rôle significatif à former les institutions et
les réponses sociétales aux nouveaux défis et opportunités.
c) Les théories de l’Etat et des Institutions
L’interventionnisme social
n chercherait en vain une doctrine précise: le réformisme qui l’inspire a pris
lui-même différents aspects suivant les écoles politiques, philosophiques ou
religieuses. Parmi elles, le catholicisme social se présente comme le corps de principe
le plus cohérent (respect des personnes, sauvegarde de la famille, liberté
d’association, préférence accordée aux " corps intermédiaires ", etc.). C’est
évidemment la justice qui commande tout ce mouvement et notamment la justice
distributive, dans la répartition de la richesse.
La première forme de l’interventionnisme a été celle de la législation
protectrice du travail, en réaction contre les graves abus de la révolution industrielle
sous le régime du capitalisme libéral. L’extension en a été très progressive, allant des
sujets du contrat de travail (enfants, femmes) aux conditions d’exécution (durée,
hygiène, accidents) pour aboutir à la détermination du taux minimum des salaires.
Ces dernières allocations traduisent le fait que, du monde du travail,
l’intervention s’est peu à peu étendue à toutes les catégories défavorisées: outre les
chômeurs, les malades, les familles nombreuses, les indigents ont bénéficié de la
justice redistributive mise en oeuvre par l’Etat au cours de la seconde moitié du XXe
siècle.
Beaucoup des risques sociaux sont, aujourd’hui, pris en charge par la sécurité
sociale, généralisée après la guerre dans la plupart des pays. C’est dans la mère patrie
du libéralisme, la Grande-Bretagne, que le système de sécurité sociale, fut par son
caractère étatique le plus proche de celui de l’ex-URSS. Dans tous les pays également,
l’Etat intervient en faveur des logements sociaux par le biais d’aides diverses à la
construction. S’ajoutant au droit social, la politique fiscale est devenue un instrument
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privilégié de l’interventionnisme. La justice " par l’impôt " fut un thème très à la mode
au cours du siècle ; il s’est agi de réduire les inégalités sociales par de lourdes taxes
sur les grandes fortunes (très lourds impôts sur les successions en Grande-Bretagne)
ou sur les revenus élevés (Grande-Bretagne, France, Etats-Unis, ...). Le socialisme
suédois fut fondé essentiellement sur l’adaptation de la fiscalité. Certains pays (PaysBas) ont tenté d’englober les interventions touchant la répartition dans une politique
générale des revenus ; mais celle-ci n’a guère dépassé le stade d’une politique des
salaires.
Dépassant le niveau des revenus, l’Etat est intervenu dans la propriété même
du capital : la France et la Grande-Bretagne ont nationalisé de très grandes
entreprises (1936, 1945, 1981 pour la France), même si aujourd’hui, chacun sait que la
logique entrepreneuriale se doit d’échapper aux vestiges mythologiques d’une
idéologie étatique périmée. L’intervention dépassait alors le domaine social
proprement dit pour accéder au domaine économique.
L’Etat protecteur
Il constitue donc la seconde forme de l’interventionnisme étatique. L’Etat-Nation ne
s’est jamais désintéressé des relations commerciales de ses ressortissants avec
l’étranger. D’où les tendances protectionnistes observées dès le XIXe siècle
notamment vis-à-vis des industries naissantes.
Ce protectionnisme, porté à l’extrême à la veille de la Seconde Guerre mondiale, est
aujourd’hui pratiquement disparu entre les pays de la communauté économique
européenne. La réalité protectionniste joue désormais de bloc à bloc : Union
européenne, Japon, pays de l’Association de libre-échange nord-américain
(l’ALENA), s’affrontant au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce (l’OMC a
succédé au GATT, le General Agreement on Tarifs and Trade en 1995 à la suite des
accords de décembre 1993 entre les quelques 120 pays membres) sur les questions
agricoles et sur les services.
Mais c’est à l’intérieur même des frontières que l’interventionnisme a pris,
pendant l’entre-deux guerres, des formes nouvelles qui devaient s’étendre par la
suite. En France, par exemple, un revenu semi-public est alors apparu avec les
" sociétés d’économie mixte " (ainsi nommées notamment parce qu’elles consistaient
pour une collectivité publique à aider la création de sociétés anonymes exploitant des
ressources d’intérêt général).
La crise de 1929 a renversé les positions traditionnelles des entreprises privées
à l’égard de l’interventionnisme : jadis, elles le repoussaient, désormais, elles l’ont
réclamé pour remédier à leurs difficultés (subventions, rachats, " recapitalisation ",
fixation de prix, ententes imposées, ...). Sur le plan agricole, le dirigisme est manifeste
à l’échelon européen qu’il s’agisse des quantités ou des prix.
L’interventionnisme serait cependant resté un ensemble de procédés empiriques s’il
n’avait été érigé en théorie par J.M. Keynes en 1936. L’auteur de la Théorie générale
de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie lui a donné tout à la fois une méthode : la
macro-analyse, un but : le plein emploi, un moyen : à savoir le maintien de
l’investissement à un niveau élevé grâce à une politique de crédit et de monnaie
dirigée et à une politique de dépenses publiques.
L’interventionnisme est alors devenu monétaire puis financier et s’est notamment
exprimé par l’action exercée par les organismes d’Etat sur le marché financier ou le
crédit à moyen terme. Les émissions d’emprunts publics ou semi-publics mobilisent
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toute une partie de l’épargne en particulier en vue de financer des investissements
exécutés par l’Etat ou par des entreprises nationales.
En pénétrant plus intimement dans la vie économique, l’Etat s’est ainsi laissé
pénétrer par elle et des liens réciproques se sont noués transformant les relations
entre puissance publique et entreprises privées en un partenariat.
L’État partenaire
Cette nouvelle forme d’intervention s’est manifestée d’abord par une volonté
" d’économie concertée ". Cette interpénétration du public et du privé s’exprime
également par l’action stimulatrice de l’Etat. Jadis à la traîne du progrès technique,
certaines entreprises publiques se situent aujourd’hui à la pointe de celui-ci. En
outre, dans tous les pays, la recherche-développement est devenue partie intégrante
du secteur public ; les dépenses militaires, improductives par essence, sont par là
devenues productives.
D’avantage encore : pour résister à la concurrence étrangère, l’Etat favorise les
concentrations et fusions. Enfin, l’Etat-partenaire a entrepris d’associer les
entreprises privées à son action stabilisatrice par des engagements réciproques (par
exemple : mesures d’incitation pour l’emploi). On mesure ainsi l’évolution
considérable qu’a subi l’interventionnisme: du simple " droit social " à " l’économie
concertée " et de celle-ci à " l’économie contractuelle
L’interventionnisme a ainsi changé profondément de forme : il n’impose plus,
mais il se propose et il compose. On passe en d’autres termes de l’ère ‘règlementale’ à
l’ère conventionnelle, cette dernière correspondant au degré de maturation le plus
élevé de la société postindustrielle et traduisant le changement de nature de la
puissance publique dans son action économique
Rôle de l’Etat : résumé
 Production de biens publics : fonctions régaliennes (Police, justice, armée) et substituts
au secteur privé (entreprises publiques)
 Redistribution : collecte des impôts et diminue les disparités avec des transferts vers agents
les moins bien dotés (allocations chômage, familiales, aides financières, ...)
 Régulation et Stabilisation économique : tente de réduire fluctuations conjoncturelles
en soutenant l’activité économique durant les périodes de récession
 Fondement doctrinal : les idées de Keynes durant les 30’s qui voit les dépenses publiques
comme nécessaires pour adéquation entre offre potentielle et demande.
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d) Les théories du commerce international
Objectif.
Ce niveau d’analyse introduit de manière simple quelques-uns des concepts
théoriques et des arguments généralement utilisés dans les discussions ayant trait
aux politiques du commerce extérieur. Les concepts et arguments qui y sont
présentés concernent le commerce en général mais ils seront autant que possible
étayés par des exemples provenant du secteur agricole de façon à mettre en valeur
leur intérêt dans l’étude du commerce des produits agricoles.
Problèmes clés
-
La participation au commerce international est susceptible de procurer
certains bénéfices car elle permet à un pays de tirer parti de ses avantages
comparatifs, d’exploiter des économies d’échelle et de garantir le jeu de la
concurrence, ce qui renforce la diversité des produits et, potentiellement, la
stabilité des marchés.
- Il est peu probable que les bénéfices résultants des échanges commerciaux
se répartissent également entre pays ou en leur sein; c’est ce qui explique
l’opposition aux politiques de libre-échange.
- Les décisions de politique portent rarement sur l’acceptation ou le refus
absolu de participer au commerce international mais plutôt sur
l’instauration de barrières commerciales. Les arguments en faveur du
protectionnisme reposent sur des fondements aussi bien économiques
qu’extra économiques, y compris sur la question de la sécurité alimentaire.
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-
-
En règle générale, les mesures commerciales ne constituent ni les moyens
les plus directs, ni les moyens les plus efficaces pour atteindre ces objectifs.
La libéralisation du commerce extérieur peut s’inscrire dans un cadre
régional ou multilatéral. Les dispositions commerciales régionales sont de
plus en plus fréquentes même si la place qui y est accordée à l’agriculture
est souvent problématique.
L’ordre du jour des négociations sur le commerce reflète de plus en plus
souvent les nouvelles préoccupations des groupes de consommateurs et
d’ONG des pays de l’OCDE, et de moins en moins les préoccupations
classiques du déclin des termes de l’échange et de l’échange inégal
exprimées par les pays en développement.
1) Les bénéfices économiques résultant de la participation au
commerce international : Pourquoi les pays s’engagent-ils dans
les échanges commerciaux?
En quoi les échanges commerciaux sont-ils avantageux? Qu’est-ce qui pousse
les individus et les entreprises à s’y engager volontairement? Pourquoi les Etats le
favorisent-ils? Et pour quelles raisons les économistes le défendent-ils? Comme vu
dans le module I.1 Les principales tendances du commerce international et du
commerce des produits agricoles, la tendance à long terme des flux commerciaux
internationaux de la plupart des produits n’a cessé de croître au cours des deux
derniers siècles et a fait l’objet d’une spectaculaire accélération depuis la Deuxième
Guerre mondiale. Celle-ci ne résulte cependant pas seulement de la formidable
amélioration des divers moyens de transport et de communication mais aussi de ce
qu’on peut retirer des bénéfices des échanges commerciaux.
Les économistes ont avancé un grand nombre d’arguments en faveur du
commerce international des produits. Certains sont manifestes et relèvent du bon
sens tandis que d’autres sont moins évidents à saisir. Ces arguments peuvent être
regroupés en trois grandes catégories en fonction des critères sur lesquels ils
reposent, à savoir: (i) l’augmentation induite par le commerce du montant total de
biens et de services disponibles pour la population du pays (thèse de l’accroissement
de la consommation); (ii) la diversité de biens et de services auxquels la population
peut accéder grâce au commerce (thèse de la diversification); et (iii) la stabilité de
l’offre et des prix des biens et services qui résulte du commerce (thèse de la stabilité).
.
2) La théorie des avantages comparatifs
Une des raisons qui fait que le commerce international peut augmenter le
volume des biens et services disponibles dans un pays donné et à un moment donné
est que celui-ci permet d’acheter des biens et services dans les lieux où leurs coûts de
production sont comparativement moindre. Les ressources locales qui, en l’absence
de commerce, étaient employées à la production de certains biens sont dès lors
libérées ce qui permet que d’autres biens soient produits en une proportion plus
importante. Si les Etats-Unis sont capables de produire à la fois des puces
électroniques et du sucre mais qu’ils sont bien meilleurs dans la fabrication des puces
électroniques que dans la production du sucre et que le Brésil est capable de produire
à la fois des puces électroniques et du sucre mais qu’il est bien meilleur dans la
production de sucre, chacun de ces pays aura alors intérêt à échanger ces deux
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produits. Le montant total des ressources nécessaires pour produire la quantité totale
de sucre et de puces consommée par les Etats-Unis et le Brésil sera alors moindre
dans chacun de ces pays si le Brésil se spécialise dans la production de sucre et les
Etats-Unis dans celle de puces et que les deux font commerce de ces produits.
3) Les bénéfices tirés des échanges commerciaux
Ce bénéfice combiné sera partagé entre les Etats-Unis et le Brésil et la façon
dont il sera effectivement réparti dépendra du rapport entre le cours mondial des
puces électroniques et celui du sucre - c’est ce que les économistes appellent les
termes de l’échange au niveau international. En l’absence de commerce
international, chaque pays a son propre rapport d’échange intérieur entre chacun de
ces produits. Ce rapport vaudra, par exemple, 50 kg de sucre aux Etats-Unis pour une
puce électronique standard et 100 kg de sucre au Brésil. On remarquera que ces deux
rapports d’échange témoignent de la meilleure efficacité relative qu’il y a à produire
du sucre au Brésil et des puces aux Etats-Unis. Les termes de l’échange se situeront
dès lors dans l’intervalle compris entre le rapport d’échange des Etats-Unis et celui du
Brésil car si ce n’était pas le cas, l’un au moins des deux pays ne serait pas intéressé
aux échanges. En outre, le commerce favorisera d’autant plus un pays que les termes
de l’échange seront différents de son propre ratio intérieur1.
Dans notre exemple, une puce électronique s’échange contre 90 kg de sucre, le
gain résultant de la participation au commerce international va plutôt aux Etats-Unis
qu’au Brésil. En vendant une puce électronique au Brésil, les Etats-Unis obtiennent
90 kg de sucre, c’est-à-dire 40 kg de plus (80 pour cent de plus) que s’ils l’avaient
produit eux-mêmes. En vendant 90 kg de sucre aux Etats-Unis, le Brésil obtient une
puce électronique, c’est-à-dire 0,1 puce de plus (11,1% de plus) que s’ils l’avaient
produite chez eux.
L’exemple ci-dessus reprend le schéma classique de la théorie des coûts
comparés du commerce international; théorie également connue sous le nom de
théorie des avantages comparatifs et formulée par David Ricardo au début du XIXe
siècle. Il est fort utile de la présenter en détail car elle constitue l’explication la plus
solide des économistes sur les bénéfices résultant de la participation au commerce
international.
suit :
Plusieurs éléments méritent l’attention et seront donc soulignés dans ce qui
Le gain résultant de la participation au commerce international résulte
des différences de coûts d’opportunité : Ce sont les avantages relatifs et
non les avantages absolus qui constituent la clé du commerce
international
 Premièrement, le gain découle de l’existence de différents rapports d’échange
intérieurs entre les deux produits dans chacun des pays. Ces rapports résultent
des différences dans les conditions de production propres aux deux produits
dans les deux pays. Dans cet exemple, comparativement à ce qui leur est
nécessaire pour fabriquer une puce électronique, les Etats-Unis utilisent ainsi
proportionnellement plus de ressources pour produire un kilo de sucre que ce
qu’utilise le Brésil. Cette proportion est deux fois plus élevée selon les
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hypothèses simplifiées qui ont été retenues. De façon plus générale, si des
ressources sont rares et qu’elles peuvent être utilisées indifféremment à la
fabrication de deux produits, A et B, la valeur de B à laquelle on renonce en
utilisant une partie des ressources pour produire une unité de A correspond à
ce que les économistes appellent le coût d’opportunité (de A exprimé en
fonction de B). Dans notre exemple, le coût d’opportunité de la puce
électronique (en fonction du sucre) est ainsi plus élevé aux Etats-Unis qu’au
Brésil car, toujours selon les hypothèses retenues, il faut cesser de produire
100 kg de sucre au Brésil pour fabriquer une puce électronique contre
seulement 50 kg aux Etats-Unis. Le gain résultant de la participation au
commerce international provient donc de ce que les coûts d’opportunité du
sucre et de la puce électronique sont différents aux Etats-Unis et au Brésil.
 Deuxièmement, le volume des ressources nécessaires à la production des
deux biens pourra être plus élevé dans l’un des pays, le commerce restera
pourtant avantageux pour les deux parties. Ainsi, pour continuer avec le même
exemple, on peut supposer que les Etats-Unis dépenseront à la fois moins de
ressources que le Brésil pour fabriquer des puces électroniques (ce qui est
probablement le cas) et moins que le Brésil pour produire du sucre (ce qui est
moins évident en pratique mais peut toutefois être le cas). Le Brésil peut ainsi
avoir besoin de quatre fois plus de ressources que les Etats-Unis pour
fabriquer des puces électroniques et de deux fois plus pour produire du sucre;
ce qui revient à dire, qu’en valeur absolue, il est nettement moins efficace dans
chacun des deux secteurs.
Les avantages comparatifs doivent parfois être provoqués
 Troisièmement, cette théorie est statique car elle explique le commerce
international et les gains qu’on en tire à partir des avantages comparatifs à un
moment donné. Il peut cependant arriver que les avantages comparatifs entre
les pays évoluent sous l’effet, entre autres, des politiques mises en œuvre. Dans
ce cas, détenir un avantage comparatif pour un produit donné ne signifie pas
pour autant qu’on doive se spécialiser dans la production de ce bien au
détriment d’autres lignes de production. En fait, de nouvelles industries
(souvent appelées les industries naissantes) ne disposent pas d’avantage
comparatif au moment de leur démarrage et doivent donc, comme on le verra
plus bas, être protégées jusqu’à ce qu’elles aient atteint la taille requise pour
pouvoir tirer profit d’économies d’échelle. Dans l’exemple retenu, le Brésil
pourrait fort bien ne pas se limiter à la seule production de sucre, ni
totalement renoncer à la production de puces électroniques si il sent qu’il a les
moyens de développer une industrie rentable de puces électroniques. En fait,
ce genre de raisonnement pourrait conduire le Brésil à imposer des barrières
commerciales à l’importation de matériel informatique de façon à profiter à
long terme du développement de sa propre production d’ordinateurs. On
notera en conséquence que, lorsque d’autres politiques industrielles sont
possibles et plus directes, la politique du commerce extérieur n’est
évidemment pas nécessairement le meilleur levier pour développer une
capacité de production nationale. Certains pays peuvent aussi perdre leurs
avantages comparatifs du fait de l’évolution internationale des technologies
(c’est ce qu’on appelle le problème des industries déclinantes ou obsolètes).
Par ailleurs, les cours mondiaux se modifient en permanence ce qui a une
incidence certaine sur les avantages comparatifs d’un pays.
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Le commerce extérieur a un impact important sur la répartition des
richesses
 Quatrièmement, cette théorie montre bien que, globalement, les pays
bénéficient du commerce international mais elle ne fait aucune inférence sur la
façon dont les divers groupes sociaux de chaque pays profitent ou sont au
contraire lésés par ce commerce extérieur. Or, comme on le verra aussi plus
loin, le commerce extérieur peut avoir des répercussions considérables sur la
répartition des revenus, ce qui introduit une dimension sociale à la question.
Et c’est précisément à cause de cette incidence potentiellement négative du
commerce sur les revenus de certaines catégories sociales que les Etats-Unis
ont traditionnellement protégé leur industrie sucrière en limitant les
importations par un système de quotas.
4) Les économies d’échelle : le commerce extérieur permet de réaliser
des économies d’échelle
Une autre raison pour laquelle le commerce extérieur peut améliorer
l’efficacité, c’est qu’il permet à une industrie d’étendre son marché au-delà des limites
de l’économie nationale. Grâce aux exportations, une industrie peut produire plus et,
s’il existe des économies d’échelle, le coût moyen de ses produits tendra alors à
diminuer.
Au niveau industriel, les économies d’échelle peuvent intervenir de deux
façons qui vont en général de paire. La première correspond au cas de certains
moyens de production qui, au niveau de l’entreprise et de par leurs caractéristiques
technologiques, sont indivisibles. C’est le cas, par exemple, des robots utilisés dans
l’industrie automobile. Et cela concerne les techniques qui ne sont rentables qu’à
partir d’un certain seuil de production. Dans ce cas, on parle alors d’économies
d’échelle internes à l’entreprise dans le secteur concerné. La seconde correspond
au cas où on économise sur des coûts grâce à l’expansion de l’activité car celle-ci
s’accompagne d’une amélioration des services fournis, que ce soit par des tierces
parties ou par le milieu industriel ou commercial environnant. C’est ce que les
économistes appellent les effets externes. Dans ce cas, les économies d’échelle sont
dites externes à l’entreprise mais internes au secteur d’activité. A titre
d’exemple, on peut citer le renforcement des qualifications de la main d’œuvre, la
spécialisation des fournisseurs d’intrants, le caractère compétitif du contexte
environnant ou encore le partage du savoir-faire technique; tous ces facteurs ayant
tendance à réduire les coûts de production.
Une chose intéressante à propos des économies d’échelle est que lorsque
celles-ci sont significatives, des pays disposant de ressources ou de niveaux
techniques comparables et présentant par conséquent des coûts de production
similaires, auront tout intérêt à se spécialiser dans des productions différentes et à
commercer entre eux. En se spécialisant, les deux pays tireront parti des économies
d’échelle qui concernent le bien qu’ils produisent et abaisseront ainsi leurs coûts de
production. Combinés à la dynamique de différenciation des produits (voir plus loin),
les économies d’échelle permettent d’expliquer la pratique du commerce interne à
une même branche d’activité, c’est-à-dire les situations où des pays font
commerce entre eux de produits similaires mais néanmoins distincts, comme c’est
par exemple le cas avec des importations et exportations de différents types de
voitures.
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5) Participer aux échanges commerciaux permet de bénéficier des effets
positifs de la concurrence
Une autre façon par le biais de laquelle le commerce extérieur contribue à
améliorer l’efficacité de la production est qu’il suscite la concurrence. En ouvrant
leurs frontières aux transactions commerciales, les pays forcent leurs entreprises à
être concurrentielles avec les biens et services produits à l’étranger et, donc, à rester
compétitives en répercutant la baisse des coûts de production dans leurs prix de
vente au consommateur. Cet élément est particulièrement décisif lorsqu’il s’agit
d’entreprises qui, de par les caractéristiques de leurs procès de production
(importance des coûts initiaux, substantielles économies d’échelle, dépendance vis-àvis d’un composant spécialisé dont l’offre est limitée), tendent à occuper une position
de monopole ou d’oligopole. Les industries de l’automobile et des
télécommunications en sont de bons exemples. La participation au commerce
international peut alors être un bon moyen de stimuler la concurrence et de renforcer
l’efficacité de ces activités. Cet aspect bénéfique du commerce extérieur ne s’applique
pas directement à l’agriculture car, pour un même produit agricole, la production des
exploitations agricoles est extrêmement peu différenciée; en outre, l’agriculture est
une activité qui ne se prête guère à une véritable concentration. Par contre, les
agriculteurs peuvent tirer parti de l’amélioration de l’efficacité des industries
productrices d’intrants et des entreprises de transformation des produits agricoles,
induite par le commerce extérieur.
6) Commerce et accès aux produits - la thèse de la diversification
Le commerce extérieur accroît la diversité de l’offre de produits
Une autre raison pour laquelle le commerce extérieur a un impact bénéfique
est qu’il offre aux consommateurs et aux producteurs nationaux un choix de biens et
de services qui ne seraient pas disponibles autrement. Dans la mesure où cela
concerne aussi bien des produits de consommation finale que des biens
intermédiaires et des intrants, le commerce extérieur apparaît donc à la fois comme
favorable aux consommateurs et au développement de la capacité de production
nationale.
La diversité renvoie à la disponibilité des biens qui ne peuvent être produits
dans le pays ou qui ne pourraient l’être qu’à des conditions très particulières et très
onéreuses (par exemple, des mangues en Scandinavie). Elle renvoie aussi aux divers
types et marques de biens réellement produits dans un pays (comme par exemple les
différentes variétés de pommes, les types de pompes à moteur ou les morceaux de
viande) et aux biens qui ne sont pas produits dans le pays mais qui pourraient l’être à
un prix de revient encore convenable. Grâce à la différenciation de leurs
produits, les pays peuvent donc s’investir dans des créneaux d’activités (tels qu’un
type donné de voitures) et engager ainsi avec des partenaires commerciaux exerçant
dans ce domaine d’activité des opérations commerciales propices à chacune des deux
parties. Ce type de commerce interne à la branche d’activité est assez fréquent dans le
cas des biens de consommation. Il est par contre moins courant dans le cas des
produits agricoles car la dotation en ressources naturelles joue alors un rôle
important et est généralement assez homogène pour une même spéculation.
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7) Commerce et fluctuations - la thèse de la stabilité : Par rapport à
l’autarcie, le commerce extérieur permet de stabiliser les marchés...
Le commerce extérieur peut aussi servir à lisser des excédents transitoires de l’offre
ou de la demande sur le marché intérieur et empêcher ainsi, ou réduire, les
fluctuations des cours et les ruptures d’approvisionnement. A cet égard, les produits
agricoles peuvent particulièrement bénéficier du commerce international car les
marchés agricoles ont tendance à être relativement plus instables du fait de la rigidité
de l’offre (la production agricole a besoin d’un certain temps pour réagir aux
mouvements du marché), des facteurs exogènes qui influencent fortement la
production (comme le climat ou les maladies), et de la faible sensibilité de la
demande alimentaire aux variations de prix (ce qu’on appelle la faible élasticité).
Dans les années d’abondance, un pays capable de subvenir largement à ses besoins en
produits agricoles et alimentaires devra faire face à des excédents agricoles qui auront
tendance à faire baisser fortement les prix au producteur. Le marché international
pourra alors servir à résorber ces excédents avec un minimum d’interférence sur les
prix intérieurs et les revenus. Et lors de mauvaises années, ce sera le contraire qui se
produira.
Le commerce peut-être une source d’instabilité
Il faut toutefois souligner que le commerce peut aussi être une source d’instabilité
pour les prix. Lorsqu’un pays est ainsi fortement spécialisé dans la production de
certains biens d’exportation et qu’il dépend très largement des importations d’autres
produits, il devient très sensible aux fluctuations des prix internationaux. En outre,
en l’absence de mesures destinées à isoler les prix nationaux des variations des cours
mondiaux, ces fluctuations affecteront également les biens d’exportation qui ne sont
que très marginalement exportés ou importés. Traditionnellement, et même si les
effets ont été variables, l’agriculture est le principal secteur où de telles mesures ont
été appliquées. Cela n’est guère surprenant si l’on considère l’instabilité
caractéristique des cours internationaux des produits agricoles et l’importance
qu’attachent les gouvernements à stabiliser les prix des aliments et les revenus des
agriculteurs.
II/
Synoptique
mondialisation
des
problèmes
de
la
Chance pour les uns, menace pour les autres, le phénomène de la mondialisation qui,
pour beaucoup de monde, semble déterminer désormais l’avenir de la planète suscite de plus
en plus de débats passionnés, de controverses savantes et de harangues politiques aussi
simplistes que péremptoires. Mais d’abord, de quoi s’agit-il lorsqu’on parle de
mondialisation ? A première vue, la mondialisation est présentée comme une nouvelle
configuration de l’économie mondiale.
Deux faits empruntés à Robert REICH dans son ouvrage « L’économie mondialisée »1 illustrent
parfaitement bien cette vision de la globalisation:
1
Robert REICH (1993): L’économie mondialisée, collection NH, 336p.
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Le premier fait : L’équipement de Hockey sur glace est conçu en Suède, financé au Canada,
assemblé à Cleaveland et distribué en Europe et en Amérique du Nord.
Le deuxième fait : Un microprocesseur est conçu en Californie et financé en Allemagne, il
contient des mémoires à accès aléatoire fabriqués en Corée du Sud.
Voilà pourquoi, à l’origine, la mondialisation était essentiellement perçue
comme un fait économique et financier qui indiquait la suppression progressive de
barrières douanières et réglementaires pour les entreprises industrielles,
commerciales et financières permettant la délocalisation des activités dans l’espace
mondial. Les multinationales se trouvent ainsi au cœur d’un processus productif
mondial commandé par l’exploitation des dotations factorielles naturelles des pays.
Aujourd’hui, le phénomène s’est élargi et touche à la fois les domaines culturel, social
et politique, conduisant à une série d’interrogations.
Considérée comme une chance pour les uns, une menace pour les autres, le
phénomène de la mondialisation qui, pour beaucoup de monde, semble déterminer désormais
l’avenir de la planète suscite des débats passionnés, des controverses savantes et des
proclamations politiques aussi simplistes que péremptoires. Mais d’abord, de quoi s’agit-il
lorsqu’on parle de mondialisation ?
A l’origine, la mondialisation était essentiellement perçue par les auteurs comme un
fait économique et financier qui indiquait la suppression progressive de barrières douanières
et réglementaires pour les entreprises industrielles, commerciales et financières ce qui
permettait le déploiement sans entrave et la délocalisation des activités dans l’espace mondial.
Les firmes multinationales se trouvaient ainsi au cœur d’un processus productif de dimension
mondiale commandé par la recherche d’un profit optimal axé sur l’exploitation des dotations
factorielles naturelles des pays. Le phénomène s’est par la suite élargi au point d’affecter
aujourd’hui le politique, le social et le culturel. Cela soulève beaucoup d’interrogations.
Pourtant, le concept malgré son utilisation abusive fait l’objet de plusieurs
compréhensions tant au niveau des chercheurs qu’à celui du grand public. Le sujet est vaste,
complexe, largement débattu, souvent diabolisé au détriment d’analyses robustes avec des
statistiques crédibles. Selon la remarque de R. BOYER, «quand des ouvriers d’un abattoir de
poulets se mettent en grève pour contester un aménagement de leurs horaires de travail, on
décrète qu’ils se battent contre la mondialisation qui impose sa rationalité aux entreprises de
ce secteur étroitement dépendant de ses performances à l’exportation. Lorsqu’un
gouvernement choisit de renoncer à exercer ses prérogatives pour s’aligner sur les positions
des lobbies favorables au tout-déréglementation, il se justifie en se fondant sur les nouvelles
exigences de la mondialisation2 ».
Bien que les termes de « mondialisation », « globalisation », « internationalisation »
soient à la fois flous et empreints d’ambiguïté, chacun pense que leurs conséquences (sans
pouvoir les cerner précision) sont importantes. Pour certains économistes, l’entrée dans la
mondialisation se mesure par un pourcentage significatif du PIB de la nation réalisé avec
l'extérieur alors que pour d'autres, ce pourcentage est moins significatif que la «dépendance »
ou «l’indépendance» de la nation vis-à-vis de décisions prises par des acteurs de l'étranger :
firmes ou Etats compte tenu du caractère de "price taker" ou de "price maker" que détiennent
ces acteurs sur le marché mondial. Pour d'autres enfin, la mondialisation s’exprime à travers
l’ensemble des « mécanismes d’accumulation à l’échelle mondiale » qui enrichit les
partenaires les plus riches et appauvrit les autres par l’échange inégal caractéristique des
2
R. Boyer et al : Mondialisation au-delà des mythes, Edit. La Découverte, 1997, 174p.
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distorsions dans le processus de formation des marchés internationaux et de distribution des
revenus.
Malgré sa forte présence dans plusieurs secteurs et dans plusieurs régions du globe, la
mondialisation n’est pas encore universelle. Au contraire, une de ses particularités marquantes
est qu’elle est paradoxalement non homogène et fortement asymétrique, dans la mesure où
toutes les activités économiques, financières comme culturelles ne se mondialisent ni au
même rythme ni de la même manière. Certaines, telles que la finance et les entreprises sont
mondialisées depuis des siècles, alors que d’autres encore solidement chevillées dans des
frontières géographiques nationales dont elles portent les marques. C’est bel et bien une
mondialisation à plusieurs vitesses entraînant des chocs asymétriques.
Considérée comme un phénomène polyforme, elle pose des questions déterminantes
pour l’ordre national : Offre-t-elle les mêmes chances et les mêmes avantages à tous les
partenaires ou participants? Quelles sont objectivement ses conséquences directes et
indirectes sur les différents partenaires singulièrement les plus faibles d’entre eux?3 Pourra-telle contribuer positivement à la croissance économique des pays d’Afrique sub-saharienne,
au développement de l’emploi, à l’éradication de la pauvreté et à la réduction des inégalités ?
Quel sort réserve-t-elle aux acteurs nationaux les plus fragiles et les plus déficients ? Va-t-elle
harmoniser les structures institutionnelles et les normes et valeurs propres aux sociétés ? Estelle inéluctable ou contournable ?
Ces questions sont déterminantes pour un pays comme le Sénégal qui se lance dans un
travail de prospective pour l’horizon temporel 2015 qui correspond à la réalisation des
Objectifs du Millénaire (OMD) du PNUD gravitant autour de la réduction de la pauvreté de
masse qui menace tous les équilibres économiques comme non économiques. La prospective
dans ce cadre est un excellent outil pour définir les scénarios du futur en vue d’agir sur la
réalité et peser efficacement sur le cours des choses. Le contexte mondial doit y tenir une
place centrale.
La mondialisation présente un caractère de contrastes et de paradoxes. Les statistiques
des Organisations internationales montrent que jamais le monde n’a disposé d’autant de
techniques et n’a produit autant de richesses, pourtant, jamais elle n’a produit autant
d’inégalités et de pauvreté révélant ainsi la marque d’une humanité socialement duale. Le
Produit mondial a connu au cours du siècle une croissance exceptionnelle : en dollars de
1975, il est passé de 580 milliards en 1900 à 25000 milliards au milieu des années 90 ce qui
représente en moyenne 4500 dollars per capita. Seulement, ce tableau idyllique est traversé
par beaucoup de problèmes et il est altéré par la succession de crises graves qui sont autant de
périls économiques, financiers et sociaux dont les dernières en date ont été la déroute de
certains Nouveaux Pays Industrialisés d’Asie et d’Amérique Latine souvent proposés comme
modèle de référence pour sortir du sous-développement en une génération. Ces crises répétées
et de plus en plus profondes montrent l’ampleur des risques, des incertitudes et des
dysfonctionnements que les Institutions Financières Internationales n’ont pas pu gérer faute
de disposer de ressources suffisantes et d’instruments adéquats de régulation. C’est ce qui est
apparu dans le cas de la crise financière en Asie, au Mexique, au Brésil et en Uruguay.
3
Moustapha KASSE (2003) : De l’UEMOA au NEPAD : le nouveau régionalisme africain, Edition Nouvelles
du Sud, 256 p
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A défaut d’un consensus sur la définition, les pratiques et les tendances de l’économie
mondiale, dans sa double sphère réelle et monétaire, laissent apparaître une triple
interdépendance que l’on pourrait qualifier de mondialisation. Essayons de cerner de plus prés
ces interdépendances pour bien en mesurer toutes les conséquences à la fois sur les économies
et sur les différents acteurs:
 L’interdépendance par la production se caractérise par une décomposition
internationale des processus productifs qui s’appuie sur un réseau de filiales ou de
sous- traitants et le nomadisme de segments entiers des appareils de production selon
la logique des avantages comparatifs ;
 L’interdépendance par les marchés qui se traduit par la disparition des frontières
géographiques, l’abaissement des barrières tarifaires et non tarifaires qui accélère alors
les échanges commerciaux ;
 L’interdépendance financière qui procède d’une interconnexion des places financières
mondiales fonctionnant vingt-quatre heures sur vingt-quatre grâce à la conjugaison de
trois éléments que sont la déréglementation, le décloisonnement des marchés et la
désintermédiation ;
 L’interdépendance par les Nouvelles Technologies de l’Information et de la
Communication (NTIC) qui, avec les transports, intensifient la mobilité et la flexibilité
des capitaux, des biens, des services et des personnes.
 Le caractère géostratégique de l’énergie
Ce sont ces interdépendances qui déterminent les relations entre les différents acteurs
du jeu économique, financier, politique et social mondial.
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Les Etats doivent avoir une perception claire de cette configuration mondiale pour en
évaluer les coûts et les opportunités par des politiques économiques et financières
appropriées.
1) La première interdépendance est relative à la production : un système
productif dominé par des firmes multinationales.
Elle se caractérise par une division internationale du travail qui unifie les processus
productifs nationaux et s’appuie, en conséquence, sur un réseau de filiales ou de sous-traitant
qui opèrent la délocalisation de segments entiers des appareils de production selon la logique
des avantages comparatifs. Cette structuration est le fait des firmes multinationales qui
façonnent l’espace mondial en réseaux de production. Elles sont de plus en plus nombreuses,
puissantes et originaires de diverses zones. Cette stratégie d’implantation leur permet de
maximiser leurs profits à partir d’une optimisation de la localisation de leur production. Ce
sont aujourd’hui, quelques 37 000 firmes multinationales de taille très inégale qui réalisent et
contrôlent l’essentiel de la production mondiale de biens et services, les 500 d’entre elles les
plus puissantes contrôlent presque 30 à 40 % du PIB mondial soit 25 000 milliards de dollars.
Elles effectuent les 2/3 du commerce international sous forme d’échanges internes avec leurs
27 000 filiales soigneusement réparties dans l’espace mondial. Egalement, le négoce
international des produits de base est largement sous le contrôle des firmes multinationales
Le processus de délocalisation des activités industrielles réalisé par les firmes
multinationales sépare les lieux de production ou de transformation de certaines marchandises
de leurs lieux de consommation. Il va s’amplifier sous l’influence de la Nouvelle Révolution
des Technologies de l’Information et de la Communication, de la dématérialisation de
capitaux et de l’extension des aires géographiques du libéralisme. Il a surtout fortement
contribué au décollage industriel de la plupart des pays industrialisés d’Asie. En effet, les
transferts d'activités industrielles et de services du Nord vers le Sud, appelés "délocalisations",
sont l'une des causes les plus spectaculaires de l’industrialisation rapide des pays asiatiques
même si par ailleurs, elle dévitalise les économies du Nord et y opère une destruction des
emplois. S’agit-il alors d’un « partage des richesses ou d’un partage de la misère? Sans nul
doute ; la mondialisation libérale complètement soumise aux lois du marché et du profit à
court terme n'apportera pas de réponse à cette question.
Les Nouveaux Pays Industrialisés d’Asie et d’Amérique Latine ont tiré profit de cette
délocalisation en attirant des segments de production industrielle en valorisant leur dotation
factorielle liée à l’espace géographique, à la qualité des ressources humaines ou à l’offre
illimitée de main d’œuvre. Ils ont réussi à mettre en place un tissu industriel dans les
domaines des hautes technologies.
Certains Etats africains ont fait les mêmes tentatives avec la création des Zones
franches industrielles considérées comme des moyens d’attirer les investissements étrangers,
créer des emplois, développer l'industrie nationale et les infrastructures, favoriser les
transferts de technologies et se procurer des devises. A l’exception de l’Ile Maurice, les Zones
Franches africaines ont produit des résultats médiocres. Ce modèle de réussite procède des
capitaux asiatiques qui ont fait de Maurice leur base de pénétration du marché européen et
d'accès aux pays du Proche-Orient. Créée en 1970, la zone franche couvre tout le pays,
emploie 100 000 travailleurs et rapporte plus d’un millier de milliard de dollars. En vingt ans,
le taux de chômage est tombé de 20 % à 3 %. Elle a permis à l’Ile en quasi-pénurie de main________________________________________________________________________ 25
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d'œuvre de privilégie désormais les investissements à forte valeur ajoutée avec des emplois
qualifiés.
Les principales transformations en cours concernent la multiplication des alliances et
des fusions entre multinationales dans les secteurs stratégiques comme les industries
aéronautiques et les télécommunications. La concentration transnationale augmente, de même
que l’investissement international.
Quel qu’en soit les modalités, la globalisation financière a favorisé
l’internationalisation de la production. Les entreprises se sont largement financiarisées pour se
couvrir contre les risques internationaux, en diversifiant leurs produits. Les investissements
directs à l’étranger sont passés de moins de 40 milliards US $ en 1980 à 200 milliards en
1995. Ils conduisent souvent à une délocalisation, transfert à l’étranger d’une activité de
production (segment ou ensemble de la fabrication) localisée antérieurement sur le territoire
national. Il s’agit en fait d’une véritable décomposition internationale du processus productif
(Lassudrie-Duchêne). Chacun des segments est localisé dans des espaces différents, pour des
raisons liées aux coûts de production, aux dimensions du marché, à des risques ou à des
réglementations.
2) La seconde interdépendance est relative au surdéveloppement des
échanges. Alors comment accéder aux marchés ?
Le volume total des transactions quotidiennes sur les marchés des changes est passé
d’environ 10 à 20 milliards de dollars en 1998. Dans les années soixante dix à 1500 milliards
de dollars en 1998. De 1983 à 1993, les achats et les ventes transfrontaliers de bons du trésor
américain sont passés de 30 à 500 milliards de dollars par an. Les prêts bancaires
internationaux ont progressé de 265 à 4200 milliards de dollars entre 1975 et 1994. Le poids
des échanges internationaux dans l'économie ne s'est pas accru de manière considérable,
contrairement au discours fondamentaliste sur la mondialisation. Il est en fait à peine
supérieur au niveau de 1914 si l'on prend les chiffres du commerce international, qui
représente à peine 20% du PIB mondial.
Les services se sont enflés rapidement particulièrement les services supérieures
directement liés aux activités productives : tourisme, fret et transit, communication et
télécommunication. Le tourisme a plus que doublé entre 1980 et 1996 pour devenir une
composante financière importante. La Demande touristique accuse des taux de croissance
élevés avec un nombre de voyageurs qui passe de 260 à 590 millions par an. Malgré les
restrictions sévères, les migrations internationales se poursuivent, de même que les envois de
fonds des émigrants. Ces envois ont atteint 58 milliards de dollars en 1996. Le volume des
appels téléphoniques internationaux s’est envolé entre 1990 et 1996, passant de 33 à 70
milliards de minutes. Les voyages, internes et les médias stimulent la croissance exponentielle
des échanges d’idées et d’informations.
L’OMC entend désormais régenter toutes les règles de la concurrence, l'accès aux
marchés publics et les lois sur les investissements. Elle impose aux Etats membres La
prééminence des quatre principes du libre-échange à savoir
 le principe de la non discrimination
 le principe de l’abaissement généralisé des droits de douane
 l’interdiction des restrictions quantitatives
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
l’interdiction du dumping.
Ceux-ci doivent prévaloir sur toute autre considération qu'elle soit culturelle, sociale ou
écologique dans la régulation du commerce international.
Cette intégration mondiale est tirée par des changements de politiques visant à
promouvoir l’efficience économique via la libéralisation et la déréglementation des marchés
nationaux et le désengagement de l’Etat de nombreuses activités économiques, ainsi que la
restructuration de l’Etat providence. Mais ce sont surtout les innovations récentes dans la
technologie de l’information et des communications qui favorisent l’intégration. Cependant
celle-ci reste très partielle au niveau mondial. Ainsi, les mouvements de main d’œuvre sont
encore restreints, les frontières étaient fermées aux individus sans qualification.
3) La troisième interdépendance concerne les marchés financiers. Comment
capter les ressources pour financer les opportunités d’investissements ?
Cette troisième interdépendance est rendue possible par l’articulation de trois éléments qui
permettent une internationalisation sans entrave des marchés financiers :
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


la désintermédiation, elle permet aux entreprises, à l’Etat de recourir directement
sans passer par les intermédiaires financiers et bancaires pour effectuer des
opérations de placement et d’emprunt. Ils peuvent accéder directement aux
marchés financiers pour satisfaire leur besoin de financement.
le décloisonnement qui se traduit par la suppression de certains compartiments des
marchés.
la déréglementation celle-ci indique l’abolition des réglementations des marchés
des changes pour faciliter la circulation du capital.
Au début du 20ème siècle, les mouvements internationaux de capitaux participent au
processus de mondialisation de l’économie. Mais le développement de la finance mondiale
atteste d’une déconnexion croissante entre les flux de capitaux et les besoins de financement
de l’économie réelle.
La globalisation financière se caractérise par l’interconnexion des marchés financiers,
par un essor de nouveaux produits financiers et de marchés émergents. On observe également
une organisation mondiale de la production dans certains secteurs stratégiques. Les
marchandises circulent de plus en plus librement avec des coûts de transport décroissants, du
fait de la déréglementation et des progrès de télécommunication permettant des baisses de
tarifs. L’instantanéité des informations abolit temps et espace. La circulation des informations
peut remplacer celle des hommes (télé achat, télé travail). Les opérations financières génèrent
à l’infini ou presque des produits dérivés. Les produits négociés, bien que de plus en plus
sophistiqués, sont standardisés. Les transactions papier prennent, ainsi, une grande ampleur
par rapport aux opérations physiques.
On observe une déconnexion entre les opérations réelles (commerce et investissement)
et la sphère finance-change. L’intégration financière résulte de la mobilité des capitaux et la
substituabilité des actifs (Bourguinat). Le développement des eurodollars (les dollars circulant
hors des Etats-Unis) à partir de 1957 a marqué le début de la circulation internationale des
capitaux hors de tout contrôle étatique. Après le passage aux changes flottants, l’accélération
du processus de libéralisation de la finance internationale date principalement à la fin des
années 70. Les Etats à la recherche de sources de financement pour leurs déficits, ont aboli les
principales règles qui contraignaient les mouvements de capitaux.
Les mutations sur les marchés financiers sont simplement démentielles et d’une rare
ampleur. Ainsi, les mutual funds aux Etats-Unis ont mobilisé quelques 2600 milliards de
dollars en 1995 et les fonds de pension s’élèvent à 3600 milliards de dollars soit plus que
l’encours des réserves de change de toutes les banques centrales de la planète. Les
transactions opérées sur les marchés de change représentent environ 1500 milliards de dollars
par jour soit plus de 50 fois les flux réels de marchandise. La valeur des titres côtés en bourse
dans 80 pays a été multipliée par 10 en 20 ans. Elle est passée en 1980 à 1800 milliards à
18 000 milliards en 1998. En clair, la sphère financière est complètement déconnectée de la
sphère réelle car chaque jour 1500 milliards de dollars de mains sans contre partie en terme de
biens et services. Ces chiffres montrent que les marchés financiers ont acquis des pouvoirs
très étendus qui leur permettent de contrôler l’essentiel des circuits de financement à l’échelle
mondiale et peuvent, toute conséquence, déterminer les rythmes de croissance des économies.
La globalisation des marchés financiers laisse apparaître d’abord un
surdimensionnement des marchés qui rend les activités des établissements financiers
complètement incontrôlables et permet aux acteurs financiers de promener librement leurs
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capitaux dans l'espace mondial à la recherche de meilleures rémunérations, ensuite
l’incapacité de mesurer le niveau optimal des moyens de paiement pour l’économie mondiale
et enfin une montée en puissance des finances illicites dont le produit mondial est estimé à
environ 100 milliards.
Désormais les actifs financiers peuvent se balader librement à la recherche de
meilleures rémunérations. Ces capitaux alimentent les investissements directs étrangers (IDE)
qui s’orientent vers les pays présentant de bonnes politiques dans un environnement
institutionnel favorable et qui respecte les principes de bonne gouvernance économique. Dans
les années 80, les investissements internationaux directs augmentent trois fois plus vite que le
commerce mondial. A partir des années 90, après avoir surtout concerné les pays du Nord, ils
se tournent de plus en plus vers les pays en développement.
A la fin des années 1980, ces pays accueillaient environ 15 % seulement des flux
d'investissements directs, aujourd’hui ils en ingèrent plus de 42 %. Les NPI d'Asie se taille la
part la plus importante puisqu'ils intègrent 25 % des investissements étrangers directs
mondiaux, la Chine en accueillant à elle seule 15 %, soit 33 milliards de dollars sur 214,3
milliards, en 1994. Grâce à ces nouveaux flux financiers et des taux de croissance deux fois
supérieurs à la moyenne mondiale sur une trentaine d'années, l'Asie apparaît de plus en plus
comme l’une des locomotives d’une économie mondiale en proie au chômage et à la morosité,
au niveau de la triade.
4) La quatrième interdépendance est relative au facteur déterminant des
Technologies de l’Information et de la Communication. Quelles chances
offre-t-elle dans le domaine de l’innovation ?
Ce qui change véritablement dans la mondialisation d’aujourd’hui, c'est l’ampleur et la
profondeur de la Révolution des Technologies de l'Information qui modifie qualitativement et
quantitativement les systèmes productifs avec la création de nouveaux produits, permet les
échanges en temps réel du fait de la baisse drastique du coût des microprocesseurs et des
télécommunications et ouvre de nouveaux canaux de communication et de distribution. La
vraie révolution est dans l'innovation accélérée qui permet l’amélioration de la productivité
donc la compétitivité.
Les technologies de l’information et de la communication sont entrain de modifier les
systèmes productifs et les perspectives de la croissance et de l’emploi. Elles déclenchent une
explosion des activités économiques, recomposent les territoires industriels et interconnectent
tous les marchés de la planète. Ce sont elles qui font précisément du monde un village
planétaire. Des millions de kilomètres de fibres optiques se croisent en permanence et relient
des continents dans le temps et l’espace. Des contrats, des transactions et des informations de
tous ordres traversent les fuseaux horaires, les frontières et les cultures. Les nouvelles routes
commerciales sont des éclats de laser et des rayons de satellites. Les marchandises
transportées sont le savoir et la technologie.
Les évolutions et les mutations technologiques accusent des rythmes à la fois rapides
et bouleversants. Les innovations qui en résultent non seulement transforment
structurellement les systèmes productifs mais permettent d’accélérer la croissance. Cela
entraîne selon P.Chapignac4 trois ruptures qui ont une tendance assez nette à structurer les
activités économiques autour du traitement de l’information :
4
P.Chapignac, Communication au Congrès IDT-Marchés et industries, Paris, 1995
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 La production de richesse déplace son centre de gravité de l’activité productrice (la
dialectique entre la machine et l’homme) à la création (la conception et le pilotage
intellectuel). Il va en résulter le déplacement de la source des richesses vers l’activité
de conception.
 Les transactions de toutes natures ont tendance à s’imposer comme principaux
générateurs de la valeur ajoutée, ce qui déjà se constate déjà dans la structure des
entreprises où les fonctions commerciales, marketing et autres prennent une
importance grandissante
 Le renversement des hiérarchies des actifs avec un caractère dominant des actifs
immatériels.
Il se crée alors à l’échelle mondiale un immense réservoir technologique dont peuvent
bénéficier tous les pays pour innover et exploiter leur potentiel compétitif dans les secteurs
industriel, agricole et des services par acquisition de gains de productivité. Certains pays en
ont largement profité sous des formes comme la « révolution verte » ou le développement
d’industries lourdes ou légères.
Ces éléments indiquent à souhait que la mondialisation est en trains de scruter un
nouveau modèle de société que l’on appelle communément la société innovante dont les
valeurs clés la productivité, la compétitivité, l’efficacité, la rentabilité, l’optimisation, la
flexibilité, le contrôle, l’adaptabilité, la mesurabilité et la gestion. Cette société sous-tend un
projet axé sur l’apologie du meilleur et de l’excellence. Elle privilégie les outils plutôt que les
personnes, elle accorde la priorité aux et se soucie très peu des finalités. Elle devrait entraîner
de nouvelles réflexions car si on y prend garde sous couvert de progrès technique, elle peut
déboucher sur une logique de compétition, de violence et d’exclusion. Par ailleurs, elle
ramène en surface le débat sur les technologies et la recomposition de l’emploi : la machine
tue-t-elle l’emploi ou l’oblige-t-il à se déplacer et à se recomposer?5
Cependant, le continent s’insère difficilement dans le concert des nations : en marge
de l’expansion industrielle mondiale, il risque d’être exclu de la révolution mondiale des
technologies de l’information et des télécommunications (Rapports de 1999 et 2001) 6.
L’accélération des innovations technologiques risque de produire plusieurs conséquences
négatives sur le développement des pays notamment le creusement de l’écart entre les
capacités d’accès et d’utilisation des techniques au Nord et au Sud7, les économies de
consommation des matières premières limitant les perspectives d’exportation des PVD et
l’approfondissement des inégalités des revenus. Comme l’observait Carlo De Benedetti alors
PDG de Olivetti, « le développement technologique actuel rendra les riches encore plus riches
et les pauvres encore plus pauvres ».
A côté de ces éléments purement économiques, financiers et technologiques,
coexistent d’autres préfigurant les changements spectaculaires comme par exemple le retour
du politique et du culturel qui n’ont plus le statut de variables muettes d’une mondialisation
qui repose sur l’exigence des « harmonies universelles ».
5
J.B. Foucauld : Une nouvelle donne pour l’emploi, Revue Echanges et projets, janvier 1994
PNUD, RMDH de 2000 et 2001
7
La possibilité pour les PVD de trouver des raccourcis techniques et de choisir le dernier et le meilleur
équipement est assez restreinte.
6
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5) Mondialisation et déstructuration des identités et valeurs culturelles par
échange inégal des cultures.
A la fin des années 60, H Marcuse prédisait dans son célèbre ouvrage « l’homme
unidimensionnel » la réduction de l’individu à une seule facette : un conformisme asservi par
la technologie plutôt que par la terreur. Il déplorait la diffusion de la culture de masse qui
réduit le citoyen au rang de simple consommateur, une quinzaine d’années plus tard, Vance
Packard dans « La persuasion clandestine » dénonçait la stratégie des industriels publicitaires
pour contrôler les mentalités des consommateurs et uniformiser leur comportement.
Aujourd’hui avec la mondialisation, ces phénomènes prennent une dimension
insoupçonnée8et remettent à l’ordre du jour les craintes de Marcuse. Il semble selon Théodore
Levitt que « le temps des différences régionales et nationales dues à la culture, aux normes et
aux structures sont des vestiges du passé »9.
Des intellectuels anglo-saxons avancent l’idée que la culture de masse est vouée à
s’étendre à partir du centre, en l’occurrence les Etats-Unis, vers la périphérie qui est en fait le
reste du monde10. Cela fait craindre l’instauration de l’hégémonie d’une seule puissance du
fait de « l’échange inégal entre les cultures ». On n’a beaucoup parlé du « Mc Monde » ou
encore de la « Mc Donolisation » à quoi les français tentent d’opposer « l’exception
culturelle » Ce débat est entré dans la conscience commune. Et pour beaucoup d’auteurs, la
constitution d’un marché global entraîne la formation d’une culture globale qui gomme toutes
les identités nationales. Revient en surface l’idée classique de l’unification humaine par la
technique de production, de transport, de communication, d’information, désormais banale,
pour rendre compte de cette question de plus en plus prégnante qui concerne l’avenir de la
culture à l’âge du tout planétaire.
Que vont devenir les valeurs culturelles nationales ? Vont-elles se modifier pour
épouser les logiques de compétition ou alors seront-elles étouffer ou gommer par la culture
standardisée découlant de la mondialisation ?
Ces questions sont au cœur de la crise qui secoue les sociétés africaines. En effet, la
mondialisation par les moyens de communication de masse diffuse un modèle culturel global
bouscule toutes les valeurs et comportements autochtones et les pousse à des formes multiples
et complexes de refus et de résistance. Cheikh Anta DIOP, dans un ouvrage consacré aux
problèmes de la renaissance des cultures africaines met l’accent sur l’exemple révélateur de
Thébes sous le 18ème dynastie. « Ekhanon fut un pharaon acquis à l’influence orientale. Par
ses réformes, il faillit diluer l’Egypte de son époque dans et l’aliéner progressivement au
profit des peuples d’Orient qui n’étaient ni techniquement ni scientifiquement plus avancés.
Le clergé de Thèbes se dresse derrière Toutankhamon pour recouvrer sa liberté et
l’autonomie de la nation égyptienne, en ramenant la pensée de l’époque des dieux, aux
croyances at aux cultures de tradition purement thébaines. Les Prêtres savaient tout
simplement que l’Orient de l’époque ne leur apportait rien de substantiel même en matière
religieuse. Ils savaient également qu’en renonçant à leurs dieux et à la leur vision du monde
sous-jacents à leurs institutions religieuses, ils s’abandonnaient dangereusement à une
aliénation culturelle qui préparait progressivement l’extraversion de l’Egypte et la perte
8
Cité par le Recteur Sélim Abou lors du Colloque de Beyrouth sur la mondialisation, 28 avril 1998
Théodor Levitt : The marketing Imagination, cité par le Recteur Sélim Abou
10
D.Rothkopf écrit dans ce sens que « Les américains ne devraient pas lier le fait que de toutes les nations du
monde, la leur est la plus juste, la plus tolérante et constitue le meilleur modèle pour l’avenir, in Foreign Policy
9
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d’identité du peuple pharaonique, la conquête de leur pays par des modèles, des symboles et
des instruments qu’ils n’avaient pas élaborés et dont ils ne pourraient décider l’évolution.
Mais les Prêtres savaient aussi que l’impérialisme culturel est toujours contemporain de
l’impérialisme politique et économique »11.
Le drame évité de Thèbes est le drame vécu par le Continent africain qui doit se
convaincre que « l’identité culturelle procède de l’expression volontaire d’une authenticité
qui prend racine dans le génie de chaque peuple et dans les valeurs fondamentales qui la soustendent. Cette recherche de l’authenticité passe par un ressourcement qui ne traduit un simple
retour aux sources mais intègre les réalités et les impératifs du monde moderne. Elle implique
une prise de conscience lucide qui permette l’actualisation et le renouvellement des valeurs,
interdisant ainsi la création de ghettos culturels. Il s’agit de découvrir de nouvelles dimensions
de la culture africaine. C’est dire que le monde africain doit élaborer une stratégie culturelle
suffisamment efficace pou atténuer les impacts négatifs des modèles culturels étrangers. Cela
suppose un système de communication fondé sur l’utilisation des langues nationales atteindre
les masses africaines, une coopération culturelle internationale et la création d’instruments
culturels destinés à favoriser les échanges, à financer les industries cultuelles, à encourager les
activités intellectuelles.
6) Mondialisation libérale de haute compétition et construction de systèmes
démocratiques.
Au plan politique, la mondialisation se traduit par un regain d’intérêt pour les
problèmes de démocratie, de paix, de sécurité et de bonne gouvernance. Il est indiscutable que
ces éléments sont des préalables du développement économique et social.
Le débat est clos assez vite par l’imposition d’un ajustement des PVD aux règles et
normes démocratiques formelles et de bonne gestion de tous les centres de pouvoir. C’est le
socle minimal de la nouvelle civilisation universelle de la démocratie et des droits de
l’homme. Il repose sur l’idée implicite de l’existence de valeurs universelles dans lesquelles
devaient se reconnaître l’ensemble des « citoyens du monde » En effet, il apparaît clairement
que « la démocratie portative » dont parlait Paréto doit essentiellement réglementer la
circulation des élites. Elle repose sur les règles de la démocratie représentative que l’Occident
a mis des siècles à édifier autour du concept de Parti politique12. A-t-on le bon modèle ? Et
dispose-t-on des instruments et des moyens pour les réaliser ? Et enfin comment résoudre
l’équation bien délicate des sanctions à appliquer en cas de défaillance?
Alors que certains auteurs soutiennent que la mondialisation annonce la fin des
conflits ou la « La fin de l’Histoire et le dernier homme »13( Fujuyama), d’autres martèlent les
préceptes de la « pensée unique » qui font de la mondialisation la voie royale du bonheur :
plus le monde sera ouvert, plus la croissance sera élevée, plus le bien-être se généralisera.
Toutes les institutions et tous les acteurs ont l’occasion d’y assister, sinon d’y participer, en
direct ou «en temps réel». Cette vision idyllique ne correspond –t-elle à la globalisation
11
C.A. DIO : Nations nègres et culture, Edit. Présence Africaine, 1956
M. Rocard dans son ouvrage Pour une autre Afrique, Ed.. Flammarion 2001, note que « les institutions
africaines fondées sur des prises de décisions collégiales et consensuelles et en ce sens ne sont pas inférieures. La
méthode en est l’arbre à palabre et l’instrument l’assemblée de village. Tout se passe comme si l’Occident à
remplacer par la démocratie consensuelle africaine par son produit la démocratie conflictuelle. »
13
F.Fukuyama : La fin de l’histoire, Edit. Flammarion, Paris 1992
12
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fortement asymétrique effectivement observée. Qu’apporte-elle globalement au continent et
au Sénégal ?
7) Mondialisation multipolaire par formation de vastes blocs régionaux
véritables pôles de compétition.
Tout le système de la mondialisation jusqu’à la fin des années 80 était géré dans un
cadre bipolaire mais avec l’effondrement du Bloc Soviétique et l’exacerbation de certaines
crises, les contours d’une mondialisation encore plus multipolaire se dessinent.
A l’observation, malgré cette forme multipolaire d’organisation et de gestion de la
mondialisation,, le monde reste fragile, instable et imprévisible. Jamais la précarité n’a été
aussi grande sur la planète dans ses sphères économique, financière, politique et sociale et
même culturelle. La rupture da la croissance fordienne à la fin des années 60, consolidée et
aggravée par le désordre monétaire international a engendré des ruptures d’équilibre dans
l’économie mondiale et face auxquels tous les moyens exceptionnels de régulation vont se
révéler totalement inopérants.
L’inflation croît en même temps que le chômage (stagflation). L’endettement s’enlise
et fragilise les bases du système financier international marqué par l’ampleur des bulles
spéculatives et les fluctuations anarchiques des devises. Le protectionnisme se réinstalle avec
des techniques plus sophistiquées et échappent souvent à la surveillance de l’OMC (la récente
Conférence de Cancun vient d’en administrer la preuve). Face à cette situation et au
darwinisme économique, la plupart des grandes nations industrielles organisent des espaces
de commerce privilégié (multiplication des organisations régionales) et gèrent leurs
complémentarités avec les nations voisines (prolifération des Accords de Libre Echange).
C’est dans ce cadre que fonctionnne le monde multipolaire qui consacre 4 Pôles de
puissance qui tournent autour de l’abolition des frontières par la libre circulation des
marchandises, des capitaux, des services, l’ouverture des marchés publics et l’élaboration des
politiques de coopération pour mieux affronter la concurrence : l’Union Européenne (UE),
l’Accord de Libre Echange Nord-américain (ALENA), le Groupe Economique d’Asie
Orientale(GEAO) qui se compose des 6 pays de l’ASEAN plus le Japon, la Corée du du Sud,
Hong Kong et Taiwan et le MERCOSUR. Ces blocs économiques régionaux sont les
meilleurs instruments de compétitivité. En effet, la concurrence exige des pays et des
entreprises un subtil dosage de protectionnisme et libre-échange, d’étatisme et de libéralisme.
Dans le monde des affaires, on se soucie bien peu des extrêmes : libre échange sans entrave
ou protectionnisme dur ou atténué). Le modelage de l’espace mondial invite à des
combinaisons complexes qui seules sont à même d’atteindre la plus grande efficacité.
Les principaux accords régionaux entre pays en développement
Région
Afrique SubSaharienne
Organisation
Pays Membres
Communauté
Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Équatoriale,
économique et monétaire République Centrafricaine, Tchad.
d’Afrique Centrale
(CEMAC)
Marché commun de
l’Afrique orientale et
Angola, Burundi, Comores, Djibouti, Éthiopie, Ile
Maurice, Kenya, Lesotho, Madagascar, Malawi,
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australe (COMESA)
Mozambique, Namibie, Rwanda, Somalie,
Soudan, Swaziland, Tanzanie, Uganda, Zambie,
Zimbabwe.
Union économique et
Bénin, Burkina, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau,
monétaire ouest-africaine Mali, Niger, Sénégal, Togo.
(UEMOA)
Communauté
Bénin, Burkina, Cap Vert, Côte d’Ivoire, Gambie,
économique de l’Afrique Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Libéria, Mali,
de l’Ouest (CEDEAO)
Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra
Léone, Togo.
Asie
Union douanière de
l’Afrique australe
(SACU)
Botswana, Lesotho, Namibie, Afrique du Sud,
Swaziland.
Communauté du
développement de
l’Afrique australe
(SADC)
Angola, Botswana, Lesotho, Malawi,
Mozambique, Namibie, Afrique du Sud,
Swaziland, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe.
Coopération économique Australie, Brunei, Canada, Chine, Etats-Unis,
Asie Pacifique (CEAP) Hongkong, Indonésie, Japon, Malaisie, Nouvelle
Zélande, Philippines, République de Corée,
Singapour, Thaïlande.
Association des nations
de l’Asie du Sud-Est
(ANASE)
Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos,
Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande,
Vietnam.
Association sud-asiatique Bangladesh, Bhoutan, Inde, Maldives, Népal,
de coopération régionale Pakistan, Sri Lanka.
(ASACR)
Amérique
latine
Marché commun andin
(MERCOAN)
Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou, Venezuela.
Secrétariat de la
Communauté des
Caraïbes (CARICOM)
Antigua et Barbuda, Bahamas, Barbade, Belize,
Dominique, Grenade, Guyane, Jamaïque,
Monteserrat, St Kitts-et-Nevis, Ste Lucie, St
Vincent, Trinité-et-Tobago.
Marché commun
Costa Rica, Salvador, Guatemala, Honduras,
centraméricain (MCCA) Nicaragua.
Association latinoArgentine, Bolivie, Chili, Colombie, Équateur,
américaine d’intégration Mexique, Paraguay, Pérou, Uruguay, Venezuela.
(ALADI)
Marché commun austral Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay.
(MERCOSUR)
Moyen Orient
et Afrique du
Nord
Conseil de coopération
du Golfe (CCG)
Arabie saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis,
Koweït, Oman, Qatar.
Conseil de l’Unité
économique arabe
(CUEA)
Égypte, Émirats arabes unis, Iraq, Jordanie,
Koweït, Libye, Mauritanie, Somalie, Soudan,
Syrie, Yémen.
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Organisation de
Iran, Pakistan, Turquie.
coopération économique
(ECO)
Jadis réservée aux pays en développement, la régionalisation devient la forme
d’organisation de l’économie mondiale si bien que les relations économiques et financières
s’organisent en grande zone géographique. Dans ce contexte, les accords régionaux sont des
accords préférentiels et accordent à certains pays des facilités d’accès aux marchés intérieurs
qui ne sont pas concédées aux autres. La part du commerce mondial qui n’implique pas un des
trois grands accords que sont l’UE, l’ALENA et le GEAO ne représente que 15,6% du
commerce mondial. Désormais, les relations commerciales sont fondées sur le principe fort de
la clause de la nation la plus favorisée. Tout pays exportateur bénéficiaire de cette clause se
voit automatiquement appliquer le tarif douanier le plus favorable. Cette règle est incluse dans
les accords de l’OMC qui, cependant, tolère beaucoup d’exceptions et de dérogations.
En conséquence, du point de vue strictement économique, la mondialisation favorise
la tendance au renforcement de la régionalisation qui diminue l’efficacité des mesures
nationales isolées à la concurrence internationale et encourage les réponses.
III/ Synoptique des Problèmes de la Renaissance
Africaine.
Les statistiques montrent que le monde est en phase de polarisation, avec un
fossé de plus en plus large entre les pays pauvres et les pays riches. Concrètement, le
revenu par habitant entre les pays industrialisés et les pays en développement a ainsi
triplé, passant de 5 700 dollars en 1960 à 15 400 dollars en 1993. De plus sur les
23.000 milliards de dollars que représentait le PIB mondial en 1993, 18.000 milliards
provenaient des pays industrialisés, contre seulement 5.000 milliards pour les pays
en développement. Encore plus significativement, le cinquième le plus riche de la
population mondiale dispose de plus de 80% des ressources et le cinquième le plus
pauvre de 1%. Quelques 2,7 milliards d’individus (sur 6 milliards) vivent avec moins
de 2 euros par jour et ils seront environ 4 milliards en 2015.
Au cours des trente dernières années, la part des 20% de personnes les plus
pauvres dans le revenu mondial est tombée de 2,3% à 1,4%. Dans le même temps, la
part des 20% les plus riches passait de 70% à 85%. L’écart de revenu entre les 20%
plus riches et les 20% les plus pauvres a ainsi doublé, passant de 30/1 à 6/1. La
fortune des 358 milliardaires en dollars que compte la planète est supérieure au
revenu annuel cumulé des 45% d’habitants les plus pauvres de la planète. Au cours
des trois dernières décennies, la proportion d’individus habitant des pays ayant
connu une croissance annuelle de leur revenu supérieure à 5% a plus que doublé
(passant de 12 à 27%), mais la proportion de la population mondiale connaissant une
croissance négative de ce revenu a plus que triplé, passant de 5% à 18%.
Le second type d’inégalité est celle qui existe au sein même des pays. En
prenant l’exemple de la France, le revenu mensuel moyen des ménages résidant dans
ce pays était de 14 190 F en 1994. Mais 10% des ménages disposaient alors de moins
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de 4 530 F alors que 10% des ménages gagnaient plus de 25 890 F, soit un écart
P9/P1 de 5,7 plus important que l’écart des seuls salaires qui s’établissait à 3,2. Dans
les pays de l’OCDE, les inégalités salariales sont mesurées par le ratio P9/P1 qui
s’élevait, en 1990, à 2 en Norvège, 2,5 en Allemagne, 3,4 au Royaume-Uni et 4,5 aux
Etats-Unis.
Ces inégalités font aujourd’hui l’objet d’intenses controverses au niveau de
l’analyse du développement. En effet, certains économistes soutiennent avec force
d’arguments que les inégalités sont favorables à la croissance économique. Ils
prennent appui sur les prédictions de S.Kuznets et avancent que si la croissance
accroît les inégalités dans un premier temps, elle les réduit ensuite. A y regarder de
prés, cette assertion peut-être économiquement fondée mais ne convient pas dans la
perspective de lutte contre la pauvreté. Pour P. Engelhard14, il faut s’interroger pour
savoir à partir de quel seuil d’inégalité de la croissance de la richesse des uns ne
compense plus la perte de richesse des autres ? Rawls fournit une piste intéressante
dans le second principe de sa Théorie de la justice sociale15 : lorsqu’il y a des riches,
les pauvres sont souvent moins pauvres que si tout le monde était pauvre. Mais alors
sommes–nous encore dans un univers où l’accroissement de la richesse des riches
garantit que la pauvreté des pauvres va diminuer. Et P. Engelhard observe avec
pertinence que deux ou trois cents personnes parmi les plus riches de la planète ont
un revenu qui équivaut à celui de deux ou trois milliards de pauvres. Qu’une inégalité
permette à ces pauvres de vivre un peu mieux qu’ils ne le feraient si la richesse était
un peu moins mal répartie n’est pas très vraisemblable.
Globalement, les inégalités se sont creusées entre les pays et au sein de la
plupart d’entre eux. Ainsi, dans les pays opulents d’Europe occidentale, le nombre de
pauvres n’a cessé d’augmenter depuis vingt ans. Toutefois, ces inégalités et ces
pauvretés excessives deviennent inacceptables et dangereuses car elles constituent le
terreau sur lequel se recrutent les terroristes qui menacent toutes les démocraties du
monde. Manifestement, les réseaux terroristes tirent leur origine dans la
désespérance et les souffrances de la pauvreté que vivent certains peuples souvent
dans l’indifférence totale de la communauté internationale. Les attentats de
Septembre sont intervenus dans une conjoncture de profonde détérioration des
rapports Nord-Sud. : Dégradation des termes de l’échange, approfondissement des
déficits, massification de la pauvreté, endettement qui hypothèque le financement du
développement, baisse de
la croissance. Dans les diverses négociations
internationales à Seattle (OMC), à Kyoto sur le réchauffement de la terre négocié par
160 nations, à Gènes (G8) et à Durban(ONU) dernièrement sur l’esclavage, les pays
du Sud ont fait beaucoup de concessions mais n’ont presque rien obtenu en retour.
Ces éléments entretiennent des sentiments d’exclusion, de frustrations, de désespoir,
tout cela sur fond de pauvreté ambiante.16
A/ L’Afrique entre pauvreté, précarité et exclusion
La participation de l’Afrique à l’économie mondiale a fortement diminué au
des cinq dernières décennies aussi bien du point de vue de son PIB, de ses
14
P.Engelhard : L’Afrique miroir du monde ? Plaidoyer pour une nouvelle économie. Edit. Arléa, Paris, 1998,
p.222
15
J. Rawls : La théorie de la justice sociale
16
Mustapha Lassé : Récession mondiale et terrorisme, Journal Info7 du 02 fev.2002
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exportations que des IDE reçus. Selon l’OCDE, la part de l’Afrique dans le PIB
mondial mesuré en parité de pouvoir d’achat entre 1950-2000 a baissé d’un tiers
alors que sa part dans les exportations a été divisée par 3. Il en va de même pour les
investissements directs étrangers comme cela a été établi plus haut.
D’un autre côté l’économie mondiale a une assez faible incidence sur la
croissance des économies africaines. Cela s’explique d’abord par la base de son
système productif composée essentiellement de produits primaires et ensuite par son
insertion faible dans des réseaux diversifiés de commercialisation
On peut donc dire que les paramètres que pose la mondialisation ignorent le
continent. Ni les investissements croisés, ni les échanges internationaux sur la base
de la croissance de la production mondiale, ni la globalisation financière, ni les
réseaux transnationaux, ni les firmes globales, nulle part on ne trouve une place à
l’Afrique. A ces facteurs s’ajoutent d’autres qui sont endogènes et contribuent à la
marginalisation du continent. Au titre de ces facteurs on peut citer :
 l’absence d’infrastructures adéquates de communication ;
 l’étroitesse des marchés ;
 les incertitudes et risques nés des conflits ;
 la mauvaise qualité des administrations publiques.
Les Programmes d’Ajustement Structurel ont tenté d’introduire des réformes
qui avaient pour objectif l’assainissement des économies en vue de la restauration de
leur compétitivité extérieure par la réduction des déficits, budgétaires, une pression
sur les salaires, la suppression des subventions, la privatisation et le dégraissage de la
fonction publique. Une fois assainie, les économies devraient amorcer une croissance
durable tirée par les IDE et les exportations. En définitive, on s’aperçoit qu’en fait
l’assainissement ne finit jamais, les IDE se font attendre, la croissance n’est pas
durable et la pauvreté est encore loin d’être éradiquée. Cela a nécessité l’élaboration
par la Communauté internationale « Des Objectifs du Millénaires pour le
Développement, un pacte entre les pays pour vaincre la pauvreté »17
Pauvreté de masse et défaillance des systèmes de protection sociale
Le continent africain est la région du monde la plus pauvre, sa production
moyenne par habitant à la fin des années 90 est inférieure à ce qu’elle était en 1960,
sa part dans le commerce mondial a reculé. Au niveau social, la situation est
simplement catastrophique avec 250 millions de personnes qui n’ont pas accès aux
service de santé, 140 millions d’analphabètes et 2 millions d’enfants qui meurent
chaque année avant leur premier anniversaire.
Le bilan de 10 années de recherche et de lutte contre la pauvreté est fortement
contrasté. Les actions de lutte conte la misère et la famine ont donné quelques
résultats positifs indéniables avec l’augmentation de la production alimentaire du
système périphérique et le recul de la faim. Toutefois, depuis les années 70, le
nombre de pauvres augmente au même rythme que la population (Kankwenda, 1999)
sans que l’on soit à mesure de répondre aux questions fondamentales à savoir : i)
Comment mesurer la pauvreté ? ii) Quels sont les groupes les plus vulnérables ? iii)
17
PNUD : RMDH 2003 : Les OMD
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Quelles sont les conditions de vie des pauvres et des très pauvres ? iv) Quelle
politique efficace faut-il mettre en œuvre ?
A l’analyse tous les pays africains sont traversés par une crise sociale d’une très
grande ampleur qui se manifeste dans l’accroissement du couple pauvreté et
chômage. Cela entraîne une forte dégradation des conditions de vie : pénurie et
insécurité alimentaires, diverses épidémies, non-accès aux services de base. Ce
processus de paupérisation de masse s’accompagne paradoxalement d’un
affaiblissement des formes modernes comme traditionnelles de protection sociale.
Le continent africain administrait la force d’une indiscutable « solidarité »,
découlant principalement d’un ensemble d’obligations et de droits complexes
destinés à préserver la cohésion du groupe et à réduire l’incertitude économique. La
logique du « don et du contre don », sans doute latente dans ce tissu d’obligations
réciproques, avait fini par instaurer un contrat-social implicite qui est en train de se
déliter dangereusement. Dès lors, la protection sociale cesse de s’appuyer sur les
réseaux de la famille élargie qui n’est plus en mesure de répondre aux sollicitations de
ses membres les plus faibles et les plus démunis dans un contexte de crise
économique. Au niveau des structures formelles les choses ne vont pas mieux suite à
la crise profonde du système public de sécurité sociale, symbole de « l’Etatprovidence ». Il accuse une triple crise :
 une crise d’efficacité : effets pervers de prélèvements excessifs ;
 une crise de légitimité : côté recettes : une redistribution à
rebours et côté dépenses : la solidarité déviée avec des difficultés
d’évaluation ;
 et une crise d’adaptation.
Pris en tenaille entre l’accroissement soutenu des dépenses et le tarissement
des sources de financement suite à l’assainissement économique et financier, le
fonctionnement du système de redistribution et de protection sociale est de plus en
plus bloqué. La crise économique et financière va finir par liquider tous les filets de
protection et de redistribution. La conséquence est alors l’instauration de la pauvreté,
de la précarité et de l’exclusion. Les analyses sur la pauvreté sont marqués par trois
visions qui peuvent coexister ou alterner dans un même pays : une vision
technocratique, une vision assistantielle et une vision caritative.
La vision technocratique est celle des organisations internationales. Elle est
selon Bruno LAUTIER «exprimée sur le mode de la pathologie et emploie souvent un
langage mi-médical, mi-guerrier : la pauvreté est une maladie, à éradiquer et pour
cela il faut mettre en place des stratégies pour les pauvres». Il s’agit d’une maladie du
corps social et en conséquence, le réalisme imposant de limiter se ambition, il faut
scinder la pauvreté en deux ou trois, pour éliminer «une pauvreté absolue» qu’il est
nécessaire de supprimer en premier. Il est donc normal que cette vision mette
l’accent sur les éléments de quantification en vue de déterminer la proportion de
pauvreté absolue qu’une société peut supporter sans risque de faire imploser son
ordre social.
Cette vison implicite n’est pas appuyée par une bonne connaissance des
mécanismes et des facteurs de la pauvreté : les causes macroéconomiques et
structurelles (économie mondiale, politiques internes introduites par les PAS,
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l’endettement) et les causes sociales (double explosion démographique et urbaine,
exclusion économique et sociale, absence de protection sociale et rupture des
solidarités traditionnelles). Pour en sortir, il est recommandé aux pays africains de
poursuivre et d’approfondir l’ajustement structurel qui seul est à même de relancer la
croissance économique pour éradiquer la pauvreté. Ce schéma appuyé par les IFI
postule que la croissance doit être tirée par les exportations. Ce principe appliqué à
l’Afrique a quelque chose de surréaliste avec des Exportation africaines qui ont
régressé de 14%.
L’hypothèque de la dette africaine.
A la fin de l’année 2000, les allègements promis s’élevaient à 34 milliards de
dollars, ce qui ne représente que 1,6% de la dette totale du tiers monde, et 15% de la
dette des pays pauvres très endettés (PPTE)18. On est très loin des pourcentages
annoncés régulièrement à grand renfort médiatique. A cela s’ajoute le fait que les
quelques allègements fort partiels qui sont décidés sont étalés sur plusieurs dizaines
d’années et liés à certaines conditionnalités politiques et économiques difficilement
accessibles.
Si la Banque Mondiale et le FMI ont lancé cette initiative, c’est parce que la
situation devenait trop dramatique et leur position intenable. Il fallait rendre la dette
soutenable pour garantir la poursuite des remboursements. D’ailleurs, le Rapport
Statistique de la dette extérieure de l’OCDE, paru en 2001, note que «la mise en
œuvre intégrale de l’Initiative ne se traduira pas par une diminution de la valeur (…)
de la dette, car les allègements prendront pour l’essentiel la forme de remises
d’intérêts et de dons destinés à financier le service de la dette, et non de réductions
directes de l’encours de cette dette».
18
Moustapha Kassé : L’endettement de l’Afrique :quelles voies de sortie après PPTE, Marchés Tropicaux
n°3000, 9 mai 03
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Le problème demeure donc entier. L’initiative PPTE, c’est un coup de canif
dans un baobab. Plus généralement, en 1980, le stock de la dette des pays en
développement (PED) s’élevait à 586 milliards de dollars ; en 2000, il est passé à 2
527 milliards de dollars, il a donc été multiplié par plus de quatre. Dans le même
temps, les PED ont remboursé 4 096 milliards de dollars soit sept fois leur dette de
1980.
Selon le rapport Global Développement Finance 2001 de la Banque Mondiale,
les pays du Sud ont remboursé au Nord, en 1999, 137 milliards de dollars de plus que
ce qu’ils ont reçu sous forme de nouveaux prêts. En 2000, c’est 101 milliards de
dollars ! Le mécanisme de la dette représente un transfert de richesses des peuples du
Sud aux détenteurs de capitaux du Nord. Alors que demander de plus ? Au Comité
pour l’annulation de la dette du Tiers monde (CADTM), ainsi qu’à ATTAC, il faut dire
que l’annulation totale de la dette extérieure publique du tiers monde est, sans
conteste, le premier pas indispensable vers la construction d’un monde où le but n’est
pas le remboursement de la dette, mais la satisfaction des besoins humains
fondamentaux. La dette écrasante, la trop grande pauvreté rendent impossible le
financement des investissements collectifs sans lesquels le développement ne peut
commencer.
Vision synoptique des risques de la mondialisation
En résumant, les risques probables de la mondialisation et de la libéralisation
sont à la fois économiques, politiques et sociales et se présentent comme suit :
Au niveau économique
 faible capacité d’offre
 secteur privé pas suffisamment développé avec des faibles
possibilités financières,
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



techniques de production rudimentaires
concurrence dans les débouchés extérieurs et sur le marché
domestique avec des conséquences dommageables aux entreprises
nationales
suppression des préférences tarifaires et commerciales
orientations défavorables des IDE
Au niveau technologique
 faible capacité technique et technologique et tendance au
creusement de l’écart Nord-sud ;
 défaillance et insuffisance du capital humain et des institutions de
recherche –développement ;
 déficience des composantes du capital humain : éducation et santé
 transferts technologiques et innovations coûteux financièrement et
culturellement.
Au niveau social
 processus contradictoire d’appauvrissement et d’affaiblissement des
formes modernes comme traditionnelles de protection sociale
 l’offre de biens et services est calquée sur celle de l’Europe, dont le
revenu par tête est quarante fois plus élevé (18000 dollars contre 450)
 absence de filet de protection pour atténuer la sévérité des
conséquences sociales des premières générations de PAS.
Au niveau politique
 les limites liées à l’Etat bienveillant et même inadaptation des Etats à un
nombre croissant de situation du fait de l’imbrication de certains
intérêts
 le marché devient le régulateur de la vie économique d’où simultanéité
entre processus de démocratisation et processus de mondialisation
Sans aucun doute, notre époque est celle des « démocraties concurrentielles »
c’est-à-dire des démocraties où la politique est l’économique sont en interaction
permanente, où, c’est le marché mondial qui commande et où ce sont les économies
nationales qui obéissent. Dans ce nouveau contexte, la politique économique sera une
politique internationale tournée vers le marché, où les méthodes d’intervention
n’auront plus rien à voir avec les politiques nationales traditionnelles. Dès lors, une
fois bien comprise le phonème de la mondialisation, présentée comme une nouvelle
configuration de l’économie mondiale, la question majeure est comment y insérer
positivement l’économie sénégalaise
A première vue, toutes les interdépendances analysées révèlent à la fois les
potentialités mais aussi les risques de la globalisation pour l’Afrique. D’abord tous les
paramètres qu’elle pose ignorent pour une bonne part le continent. Et lorsqu’elle les
intègre, c’est pour l’introduire comme un support aux multinationales (européennes,
américaines, asiatiques) en termes d’approvisionnement régulier et stable en
matières premières et de débouchés solvables (ou solvabilisables). Autrement dit, ni
les investissements croisés, ni les échanges internationaux sur la base de la croissance
de la production mondiale, ni la globalisation financière, ni les réseaux
transnationaux, ni les firmes globales, nulle part dans ce jargon de grands et de
riches, on trouvera une place de premier plan pour l’Afrique.
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Les théories et les pratiques de la mondialisation à une faible perception de
l’Etat surtout africain. Elle le confine au simple rôle de gestionnaire des collectivités
sous l’œil vigilant de multiples observatoires que sont les institutions de gouvernance
de l’économie mondiale dont l’efficacité est fortement contestée. Ces observations
n’entament en rien le caractère inéluctable de la mondialisation.
B/ La situation de l'Afrique s’améliore de manière
substantielle même si les tendances lourdes restent encore
bien fragiles.
Par rapport aux années 90, la situation de l’Afrique bouge positivement sur le
plan économique, politique et social et cela quelque soit le domaine d’analyse. Bien
entendu, il faut préciser que le Continent est extrêmement hétérogène en
conséquence de quoi, certains pays s’en sortent facilement, d’autres moins bien et
certains ne s’en tirent pas du tout. Ces contrastes la macroanalyse les occulte mais la
réalité commande d’en tenir grand compte. Cette synoptique est forcément macro
pour bien mettre en relief les trajectoires globales caractéristiques : afro réalisme
oblige.
1. La situation macroéconomique s’améliore de façon notable. Les
indicateurs macro économiques le montrent : retour de la croissance, meilleure
maîtrise des déséquilibres et de l’inflation, amélioration des avoirs extérieurs. A
l’évidence, les Pays Producteurs de Pétrole ont fortement contribué à cette situation
suite à la flambée des prix des hydrocarbures. Delon le dernier Rapport (Afrique
2007) de la CEA « Les économies africaines continuent de maintenir la
dynamique de croissance des années précédentes, en enregistrant un
taux de croissance réel global du PIB de 5,7% en 2006, contre 5,3% en
2005 et 5,2% en 2004. Pour la deuxième année consécutive, le taux de croissance
est resté supérieur à celui de l’Amérique latine (4,8%) mais inférieur à celui de l’Asie
en développement (8,7%). Pas moins de 33 pays ont enregistré une amélioration de la
croissance en 2006 par rapport à 2005. Seuls deux pays, le Zimbabwe et le
Seychelles, ont connu des taux de croissance négatifs en 2006.
Comme les années précédentes, les performances de la croissance de l’Afrique
ont été soutenues par une amélioration de la gestion macroéconomique dans de
nombreux pays et par une forte demande mondiale pour des produits africains clefs,
ce qui s’est traduit par une hausse des prix à l’exportation, en particulier pour le
pétrole brut, les métaux et les minerais. Cela explique les taux très élevés de
croissance enregistrés par les pays riches en pétrole ». Seuls quatre pays ont atteint
un taux de croissance réel du PIB de 7% ou plus, pendant cette période. À ce rythme,
peu de pays sont en mesure de réaliser les OMD d’ici 2015. C’est pourquoi le
continent est confronté au défi qui consiste à augmenter les taux de croissance et à les
maintenir élevés sur une longue période. En Afrique le taux de croissance
devrait être de 5,8% en 2007 en légère augmentation par rapport à 2006 (5,7%).
Les pays exportateurs de pétrole bénéficieront d’une augmentation des recettes
d’exportation résultant de la hausse des cours du brut. La demande mondiale de
produits africains notamment le pétrole les minerais et les produits de base agricoles
– devrait rester ferme en raison d’une reprise économique dans les grands pays
industriels et les nouvelles économies asiatiques en particulier la Chine. De plus, la
livraison de l’aide promise et l’allégement de la dette permettront aux pays africains
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d’augmenter les dépenses dans des secteurs clefs comme les infrastructures et les
services sociaux. La consolidation de la gestion macroéconomique permettra non
seulement de réduire l’inflation à court terme mais également de contenir les craintes
d’une inflation à long terme, ce qui encouragera les investissements privés.
Les pays africains exportateurs de pétrole, en tant que groupe, ont
contribué à hauteur de 57,5% du taux de croissance de 5,7% du continent
en 2006, comparés aux 53,4% en 2005. Aussi, la récente augmentation des
cours du pétrole a-t-elle augmenté le poids des producteurs de pétrole dans la
croissance globale du continent, éclipsant les améliorations observées chez les pays
non pétroliers (la croissance passant de 4,6% en 2005 à 5,2% en 2006).
2. Les contraintes liées à la mondialisation bien que restant fortes, se
desserrent progressivement avec l’amélioration des cours des matières premières
agricoles, minérales et énergétiques, base des recettes extérieures et budgétaires. De
même l’annulation de la dette PPTE accroît les capacités de financement du développement.
L’espoir que la dette extérieure de l’Afrique serait sensiblement réduite dans le cadre
de l’Initiative PPTE et que les réformes économiques stimuleraient l’afflux de
capitaux privés, a été très long à se concrétiser. Le total de la dette extérieure de
l’Afrique était de 244 milliards de dollars É.-U en 2006 contre 289 milliards de
dollars É.-U en 2005 (FMI, 2006b). Bien que l’encours ait diminué considérablement
par rapport au PIB (passant de 35,9% en 2005 à 26,2% en 2006), les obligations au
titre du service de la dette sont restées pratiquement inchangées (4,2% du PIB en
2005 et 4,1% en 2006) en raison des taux d’intérêt élevés. Le fardeau de la dette pèse
gravement sur les dépenses d’investissements publics et retarde en fin de compte la
croissance et la création d’emplois
3. Les Technologies de l'information et de la communication bien
que constituant un risque de dépendance se présente comme énorme opportunité
pour les systèmes productifs et financiers. Selon le Rapport de la CEA « Les
économies africaines sont en train de connaître une mutation
structurelle dans laquelle le secteur des services devient un important
moteur de la croissance. En 2004, le secteur des services contribuait pour 49% à
la croissance du PIB contre 36 pour l’industrie (y compris les industries extractives)
et 15% pour l’agriculture. En 2004, ces trois secteurs ont continué à croître, à des
rythmes relativement lents cependant. Le secteur industriel a enregistré le plus fort
taux de croissance qui s’est établi à 9,05%, même si la croissance dans le secteur
manufacturier a diminué de près de 3,8% par rapport aux valeurs de 2003 ».
4. L'Afrique est beaucoup moins déconnectée du temps mondial avec
la modification de ses réseaux d’alliance et de coopération. La meilleure illustration
est le retour de la Chine Populaire sur les marchés des matières premières qui
reprennent à cause de cette nouvelle demande de la nouvelle usine mondiale. De plus,
le Continent bénéficie d’aides substantielles matérielles et financières et la signature
d’un nouveau cadre de Coopération Stratégique Sino-africaine. En 2004, les
investissements chinois s’élevaient à plus de 900 millions de dollars sur les
15 milliards de dollars d’investissements directs étrangers (IDE) en Afrique. Ce
chiffre peut paraître à priori surprenant si l’on se rappelle que dans un passé récent la
coopération sino-africaine tenait à des considérations purement idéologiques. Les
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temps changent et, à Pékin, le pragmatisme a pris le pas sur la rhétorique
idéologique. Commerce extérieur et coopération économique sont d’ailleurs gérés par
le même ministère. Jusqu’au milieu des années 1970, il s’agissait plutôt de construire
la solidarité entre deux continents appartenant au même monde : celui des pays sousdéveloppés. La présence chinoise en Afrique se résumait au technicien venu assister
le pays frère fraîchement affranchi de sa tutelle coloniale et contribuer ainsi à son
essor. Quinze mille médecins et plus de dix mille ingénieurs agronomes furent alors
envoyés vers ce tiers-monde transformé en base arrière de la guerre froide. Mais,
abandonnant l’exportation de sa boîte à outils révolutionnaire, la Chine se consacre
désormais à l’essor de son commerce extérieur et de ses investissements à l’étranger.
Lorsque la géopolitique de l’après-guerre froide et l’évolution incertaine du ProcheOrient ramènent les pays du Nord en Afrique, notamment pour diversifier leurs
approvisionnements pétroliers, elle est déjà devenue l’« usine du monde » et convoite
les matières premières du continent. Face à cette offensive économique de la chine,
quelle est la stratégie à adopter par les pays africains pour en tirer le meilleur parti ?
5. L’espace politique s’améliore avec l’avènement de systèmes plus
démocratiques ainsi que l’alternance politique et la promotion des principes de
Bonne gouvernance. Les évolutions en RDC, au Sénégal, au Burkina, au Bénin, au
Mali et en Mauritanie sont symptomatiques de grandes mutations au niveau de
l’évolution démocratique.
6. La conflictualité africaine recule avec l’apaisement de beaucoup de foyers de
tension et la démocratie avance: en Centrale et Australe comme (RDC, Angola,
Ouganda, Somalie, Soudan) et en Afrique de l’Ouest (Libéria, Sierra Léone, Côte
d’Ivoire, Togo). D’importantes initiatives pour la Paix et la sécurité sont prises et
semblent fonctionner même par moment avec une situation précaire de ni guerre ni
paix.
7. L’intégration progresse avec la consolidation de l’Union Africaine et des
Organisations régionales. Le NEPAD est l’acte fondateur qui fixe les grandes priorités
du Continent et l’idée d’un Gouvernement continental fait son chemin.
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Manifestation de nouveaux partenariats :
Les Accords de Cotonou de l’UE, le Plan d’Action en faveur de l’Afrique suite à la
rencontre du G8 de Kananaskis, le Rapport de la Commission Blair, les OMD, les
DSRP, l’AGOA, le MCA. Beaucoup de plans qui traduisent une volonté politique
même si les résultats restent encore bien faibles. Trente-sept pays africains
remplissent les conditions pour bénéficier de l’AGOA, qui accorde aux pays
africains l’accès quasiment en franchise de droits et sans contingent au marché des
États-Unis. En 2005, les importations des États-Unis en provenance d’Afrique
subsaharienne au titre de l’AGOA se sont chiffrées à 38,1 milliards de dollars, soit
44% de plus que l’année précédente, principalement en raison de la hausse des
importations de pétrole. Hors pétrole, les importations des États-Unis en
provenance d’Afrique ont en réalité baissé de 16%, à 2,9 milliards de dollars,
principalement en raison d’une concurrence accrue dans le secteur du textile et de
l’habillement suite à la fin de l’Accord multifibres. Il y a également eu des avancées
mineures dans les secteurs traditionnels et non traditionnels, par exemple les
produits chimiques, les fruits, les noix, les fleurs coupées et les articles chaussants.
rente-quatre pays africains sont des PMA et, par conséquent, peuvent bénéficier de
l’initiative de l’UE intitulée «Tout sauf les armes». D’autres pays africains qui ne
sont pas des PMA sont soit des bénéficiaires du système généralisé de préférences
(SGP) de l’UE, soit des parties à un accord de libre-échange bilatéral avec l’UE
(TDCA et Euro-med).
L’avènement de nouveaux partenariats dynamiques et agressifs qui risquent
de changer radicalement la donne des anciens rapports de coopération : Chine, Inde,
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Brésil et autres Dragons fortement demandeurs de matières premières. La Chine
accroît son aide et son volume commercial avec l’Afrique et propose un partenariat
qualifié de «gagnant-gagnant».
La politique africaine de la Chine se composent de
trois parties: celle de la politique, de la coopération économique et celle du
commerce.
Le mécanisme de surveillance réciproque des pairs est déjà en place même s’il
reste encore appliqué par une minorité de pays. Ce mécanisme suppose que les
politiques de chaque État puissent être soumises au contrôle par les pairs (African Peer
Review Mechanism). En définitive, toute appréciation globale de ce Mécanisme,
montrerait que les dirigeants africains ne s’empressent point et beaucoup d’entre eux
continuent de soulever des questions relativement à la structure, au mode de
fonctionnement et au pouvoir d'action de ce mécanisme et cela malgré la pression de
certains pays donateurs. Paradoxalement, certains gouvernements se déclarent
intéresser, tout en indiquant qu’ils n'avaient pas encore pris de décision officielle
définitive et irréversible. Concrètement, sur les 53 pays membres de l’Union
Africaine, 24 manifestent des dispositions à participer au mécanisme mais seulement
4 se sont proposés pour subir l’évaluation : le Rwanda, le Ghana, Maurice et le Kenya.
Empressement de quelques uns mais prudence de l’écrasante majorité.
Le Communiqué du Sommet des Chefs d’Etat de Sharm El Sheikh (19 avril
2005) a « reconnu les complexités des évaluations du MEAP qui sont d’autant plus
importantes qu’il s’agit de la première fois qu’un tel processus est mis en place en
Afrique, et qu’il s’agit également d’un processus unique à l’échelle du Monde ».
Certains pays craignaient que le mécanisme d'évaluation ne porte atteinte à la
souveraineté nationale tan disque d’autres redoutent qu’il serve aux partenaires pour
sanctionner.
C/ De grands handicaps subsistent encore
1. Les investissements directs étrangers restent encore assez faibles
et représentent entre 1980 et 2000, 1% du total mondial (9 milliards), contre 10%
pour l'Amérique latine (90 milliards) et 20% pour l'Asie. Les raisons demeurent
l’étroitesse des marchés, l’ampleur des risques et des instabilités. Les flux des
investissements étrangers directs dans le monde ont à nouveau augmenté de façon
significative, de 29% en 2005, après une hausse de 27% en 2004. En ce qui concerne
les investissements étrangers directs, les tendances pour les différentes régions sont
moins évidentes que celles du commerce (figure 1.9). La part de l’Union européenne
dans les flux d’investissements étrangers directs dans le monde est passée à 46% en
2005, soit le même niveau qu’en 2003. En revanche, la part des États-Unis s’est
sensiblement contractée alors que celle du Japon est restée faible. La part de
l’Amérique latine a fluctué autour des 10% au cours des cinq dernières années alors
que celle de l’Asie a plus que doublé, passant de 10% en 2000 à 22% en 2005. À elle
seule, la Chine représente désormais 8% des flux d’investissements étrangers directs
mondiaux, soit la moitié de sa part du PIB mondial. La part de l’Afrique dans les
investissements mondiaux a également augmenté, passant de 0,6% en 2000 à 3,4%
en 2005.
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2.
Le
défi
social
pour
l'Afrique
subsaharienne
de
demain : amplification du couple pauvreté de masse et chômage dans un
contexte de délitement des anciennes formes de solidarité sociale.
L’Afrique sub-saharienne compte selon les plus récentes statistiques environ 250
millions de pauvres soit 45% de sa population. Il semble que le rythme de croissance
de la pauvreté est plus rapide que celui de la production et des revenus. Ce processus
est aggravé par une forte et incohérente croissance urbaine et une démographie
galopante deux phénomènes conjugués qui font exploser la demande sociale. Comme
quoi, la main invisible du marché est fortement prédatrice de la condition sociale.
3. Faiblesses institutionnelles des États marginalisés par deux
acteurs incontournables et limite des processus d’intégration.
Les 12 contre performances de l’intégration
1) Faibles effets de l’Intégration commerciale et des marchés:
2) Convergence et politiques monétaires non réglées
3) Les infrastructures intégrationnistes à faire
4) Faibles intégration des politiques économiques
5) Contraintes à la libre circulation des facteurs
6) Rationalisation des Communautés à faire
7) Architecture institutionnelle d’énormes lacunes
8) Beaucoup de Programmes de modestes réalisations
9) Le financement des institutions est entier
10)
Faible participation du secteur privé
11) Paix, sécurité et conflits comme questions transversales restent
encore des préoccupations
12)
Faible volonté politique
D/ Quelques solutions pointent à l’horizon mais seront-elles
suffisantes ?
1. La croissance économique peut-elle éradiquer la pauvreté ? La
vision technocratique de la pauvreté établit un lien entre la croissance et l’éradication
de la pauvreté passe par la croissance économique. C’est pour cette raison que les
PAS posent le postulat selon lequel la croissance viendra à bout de la pauvreté. Car,
même si elle profite principalement aux «riches» par le biais ou non des IDE, elle
peut avoir un effet d’entraînement positif sur le revenu des pauvres. Cette proposition
bien que n’étant pas absurde suppose l’existence d’un État capable de redistribuer les
richesses. Rien ne prouve que cette condition soit réalisable pour des politiques qui
font dépérir prématurément l’État.
2. Cependant, il est établi que même si croissance économique, la pauvreté et
la qualité de vie ne sont pas automatiquement liées, elles vont souvent de pair. Dans
ce sens, certaines recherches tentent d’établir que pour empêcher simplement la
hausse du nombre de pauvres absolus pendant les 15 prochaines années, il faudra un
taux de croissance de 5%. Réaliser l’objectif de développement international qui
consiste à réduire de moitié l’incidence de la grande pauvreté d’ici 2015, exige une
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croissance d’au moins 7% par et une plus juste répartition des revenus. Si les termes
de l’échange de l’Afrique continue de se détériorer, la réduction de la pauvreté
demandera une croissance encore plus élevée. Alors la question se posera de savoir ce
qu’il importe de faire des pauvres si ce niveau de croissance ne se réalise pas. Toutes
les réformes initiées par les gouvernements, en partenariat avec les bailleurs de fonds
bilatéraux et multilatéraux, ces deux dernières décennies, visent principalement à la
relance de la croissance économique. Elles ont permis dans la majeure partie des cas
la réalisation de taux de croissance plus élevés et l’assainissement des finances
publiques. Cependant, les indicateurs sociaux restent toujours à un niveau faible
traduisant une paupérisation des populations vulnérables qui sont surtout en zone
rurale.
3. De plus, ces réformes ont aussi contribué au creusement des inégalités par
accaparement des richesses nationales par une minorité. Cette forme de répartition
des richesses soulève la question de distribution équitable des fruits de l’effort
collectif entre les différentes couches de la population. Une fraction de plus en plus
importante de la population africaine est exclue des processus de production qui
constituent le mécanisme essentiel de répartition des richesses à travers la
distribution de salaires. Après deux décennies d’application des réformes
économiques en vue du déclenchement d’un cercle vertueux de croissance, le
continent est traversé par une crise sociale d’une très grande ampleur qui se
manifeste dans l’accroissement du couple pauvreté et chômage. Cela entraîne une
forte dégradation des conditions de vie : pénurie et insécurité alimentaires, diverses
épidémies, non accès aux services de base. Ce processus de paupérisation des
populations s’accompagne paradoxalement d’un affaiblissement des formes
modernes comme traditionnelles de protection sociale. En effet, le continent africain
administrait la preuve d’une indiscutable «solidarité», découlant principalement d’un
ensemble d’obligations et de droits complexes destinés à préserver la cohésion du
groupe et à réduire l’incertitude économique. La logique du «don et du contre don»,
sans doute latente dans ce tissu d’obligations réciproques, instaure un contrat social
implicite.
4. Or, ce contrat social est entrain de se déliter dangereusement. Dès lors, la
protection sociale cesse de s’appuyer sur les réseaux de la famille élargie qui n’est
plus en mesure de répondre aux sollicitations de ses membres les plus faibles et les
plus démunis dans un contexte de crise économique. Au niveau des structures
formelles les choses ne vont pas mieux suite à la crise profonde du système public de
sécurité sociale, symbole de «l’Etat-providence» qui accuse une triple crise
d’efficacité (effets pervers de prélèvements excessifs) ; une crise de légitimité avec
côté recettes une redistribution à rebours et côté dépenses la solidarité déviée avec
des difficultés d’évaluation et une crise d’adaptation. Pris en tenaille entre
l’accroissement soutenu des dépenses et le tarissement des sources de financement
du fait de l’assainissement économique et financier, le fonctionnement du système de
redistribution et de protection sociale est de plus en plus bloqué. La crise économique
et financière va finir par liquider tous les filets de protection et de redistribution. La
conséquence est alors l’instauration de la pauvreté, de la précarité et de l’exclusion.
Malgré on s »est entêté à recommandé aux pays africains de poursuivre et
d’approfondir l’ajustement structurel qui seul est à même de relancer la croissance
économique pour éradiquer la pauvreté. A la suite de Philip ENGELHARD, on peut se
demander si la croissance viendra à bout de la pauvreté.
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5. Le changement de perspective avec la mise en place de la
stratégie pour la réduction de la pauvreté (DRSP). Aujourd’hui, l’échec des
politiques d’insertion dans la mondialisation se traduit par un impact négatif sur
l’emploi, sur les revenus et sur la prestation des services sociaux. Ces politiques sont
perçues comme un facteur d’aggravation de la misère ou d’expansion de la pauvreté
qui devient un phénomène de masse et touche un nombre sans cesse croissant
d’individus, de groupes d’individus et de couches sociales. Face à cette situation et en
réponse aux nombreuses critiques relatives aux faibles performances des PAS, la
Banque mondiale et le FMI changent de discours et mettent en place un «nouveau
programme de lutte contre la pauvreté». Incontestablement, c’est un véritable regain
d’intérêt pour la pauvreté dont l’allégement est à nouveau inscrit dans l’agenda
mondiale du développement. Les nouveaux Programmes ne sont pas imposés d’en
haut par des experts avec des conditionnalités, mais sont préparés par les pays qui
sont mieux à même de cibler leurs politiques de la lutte contre la pauvreté.
6. Les DSRP contiennent quatre éléments essentiels :
 une description du processus de préparation, fondé sur la participation des
acteurs
 un diagnostic de la pauvreté, avec l’identification des obstacles au recul de la
pauvreté et à la croissance ;
 des objectifs, des indicateurs (par exemple taux annuels de croissance ou
scolarisation primaire) et des systèmes de suivi, fondés sur le diagnostic de la
pauvreté ;
 des mesures prioritaires que les pays s’engagent à prendre - dans les limites
imposées par leur budget- pour atteindre les objectifs établis.
Il apparaît alors que toutes les initiatives complètement laissées aux pays de
manière à ce qu’ils prennent en charge leurs réformes économiques en enclenchant
un exercice fondé sur une large concertation et participation de tous les acteurs du
développement économique et social a savoir : les pouvoirs publics et les donateurs,
les communautés locales et les organisations civiles, comme les organisations non
gouvernementales (ONG), les syndicats, les organisations religieuses et les Instituts
de Recherche.
7. Les nouveaux programmes sont-ils efficients pour réduire au
plus vite la pauvreté de masse ?
Les DRSP sont des Programmes encore récents dont les évaluations ne sont
pas encore faites au regard de l’absence de statistiques. Cependant, ils comportent
trois points très positifs :
 la prise en compte des indicateurs de la pauvreté dans l’allocation des
ressources ;
 la création d’un mécanisme de contrôle social et sa reconnaissance par la loi
sur le dialogue national sont, sans aucun doute, le grand succès du
processus ;
 la constitution de filets de protection adéquats et souples partant de
l’identification des domaines potentiels de vulnérabilité et les filets de
protection sociale ou autres ripostes appropriés.
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Ces filets de protection devraient se traduire par la mobilisation de ressources
en faveur des pauvres dans les périodes d’austérité, la maîtrise de l’inflation et le
maintien du chômage à un bas niveau. Ces ressources seront mobilisées par la
Banque mondiale et surtout par le FMI qui vient de remplacer la Facilité
d’Ajustement Structurel Renforcé c’est-à-dire ses facilités de prêts concessionnels par
la Facilité pour la Réduction de la Pauvreté dont l’objectif est de faire reculer la
pauvreté.
8. Qu’en est-il de l’emploi en Afrique ?
Les conséquences de cette montée fulgurante du chômage en Afrique sont à la
fois d’ordre économique et social :
 Au plan économique : La marginalisation et l’exclusion d’une frange de
plus en plus croissante de la population des circuits de production empêche
progressivement toute possibilité d’élargissement du marché intérieur. Il s’en suit
alors une production déclinante, des capacités productives inemployées qui
augmentent les coûts unitaires des produits fabriquées Cette situation peut être
source d’inflation, de contraction de la consommation finale du fait de l’insuffisance
des salaires distribués et enfin de risque important de réduction de la demande
globale (consommation + investissement) du fait d’éventuelles restrictions
d’investissement par les producteurs rendus pessimistes par l’évolution d’ensemble
du marché. A ce niveau, le risque est grand de voir s’enclencher un dangereux
processus de déflation économique généralisé et dont les effets économiques et
sociaux à court, moyen et long termes seraient catastrophiques pour les pays qui de
surcroît ont besoin d’une croissance rapide et au taux le plus élevé possible compte
tenu des ressources disponibles.
 Au plan social L’amplification du chômage a tendance à exacerber les
distorsions sociales déjà existantes et à en créer de nouvelles. Les couches sociales se
stratifient davantage : les classes moyennes s’appauvrissent, les « économiquement
faibles » sont rejetés à la misère et à la survie, la pauvreté se développe, les jeunes
marginaux potentiellement actifs et ainsi rejetés par la production et la société
développe un sentiment de frustration et de « laissés-pour-compte » qui trouve son
exutoire dans la recrudescence de la délinquance, la dépravation des mœurs et le
désordre social.. Face à des perspectives aussi inquiétantes, que faire ?
 Nécessite d’élaborer des politiques réalistes et efficaces de
l’emploi. Il faut commencer par reconnaître tout de suite qu’en matière de
résolution de la crise de l’emploi, il n’existe pas de panacée, ni de formules achevées.
Il importe par conséquent, dans le cas précis des pays africains d’imaginer des
combinaisons assez originales, ce qui n’exclut pas d’emprunter et d’adapter au
contexte socio-économique et syndical local toutes les formules qui ont fait leurs
preuves sous d’autres cieux.
Pour ce faire, notre modèle en la matière devra prendre en compte et articuler
les 5 éléments constitutifs qui suivent :
1. La mise en place de nouveaux cadres de concertations permanentes entre tous les
partenaires sociaux en vue de tendre vers la réalisation d’un véritable consensus
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2.
3.
4.
5.
social, condition de base de toute politique de lutte contre le chômage et de sortie
de crise.
L’adaptation, sur la base du consensus précédemment réalisé, de l’ensemble du
dispositif législatif et réglementaire en matière de travail et de politique d’emploi
au nouvel environnement de crise afin d’en atténuer et de déconcentrer les effets
sociaux négatifs ; cette démarche devrait de surcroît faciliter et accélérer
l’adaptation de l’appareil productif national aux contraintes extérieures,
notamment dans l’aspect concurrentiel.
L’élaboration de mesures vigoureuses de promotion des PME (Petites et
Moyennes Entreprises) généralement reconnues comme étant de grandes
pourvoyeuses d’emplois. Pour cela, il importera aux pouvoirs publics de lever
toutes les rigidités et d’alléger les procédures administratives de création des
PME, de prendre certaines dispositions fiscales incitatrices à leur égard, de
faciliter dans la mesure du possible leur accès aux institutions financières
réputées méfiantes à leur endroit.
L’institution de mécanismes permettant aux agents déflatés des entreprises
publiques ou privées de bénéficier d’un crédit de reconversion et même aux
chômeurs (ayant déjà travaillé) de disposer d’indemnités de licenciement pour
créer de nouvelles PME.
L’exploitation et l’adaptation de certaines mesures en cours d’application
notamment dans les pays développés comme :
 le développement du système de préretraite. Si les employeurs ont jugé le
système très coûteux pour eux, à l’expérience, il ressort des statistiques
officielles que des licenciements pour un effectif équivalent auraient coûté
encore plus chers. De plus, l’impact psychologique et social a été très
favorable contrairement à ce qu’auraient représenté des licenciements
brutaux et massifs ;
 le travail à temps partiel, la réduction du temps de travail et la flexibilité de
l’emploi sous des formes concertées. Dès que la loi assouplit les dispositions
en vigueur, la porte est ouverte à toutes les combinaisons possibles de
partage du travail qui améliore d’ailleurs la productivité et réduit
l’absentéisme. Ainsi, selon la spécificité de la branche d’activité et les
contraintes particulières liées à l’exploitation, plusieurs entreprises en
France, en Belgique ou encore en Allemagne ont déjà mis en œuvre avec des
succès variables une nouvelle organisation de travail fondé sur ce principe.
La journée normale de travail est ainsi sectionnée et le personnel se répartit
en plusieurs équipes roulantes. La productivité a augmenté, la production
aussi et certaines entreprises ont même pu embaucher des travailleurs
supplémentaires.
 Le développement de systèmes nouveaux comme : les travaux d’utilité
collective (TUC) ; en France et qui sont ouvertes aux jeunes de 16 à 25 ans
sans emploi et qui ne suivent pas une formation.
 La nécessité de promouvoir à grande échelle et par des politiques
appropriées le secteur informel et la Toute Petite Entreprise.
Toutes les études montrent aujourd’hui le rôle de premier plan que joue le
secteur informel dans les économies africaines aussi bien dans la production de la
valeur ajoutée que la création d’emplois. «Faute d’alternatives de développement
impulsé par les pouvoirs publics, un nombre sans cesse croissant de citadins africains
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trouvent dans leurs propres initiatives et leur ingéniosité les moyens de s’affirmer et
de survivre». Déjà dans beaucoup de pays le secteur contribue pour plus de 50% au
PIB et peut fournir jusqu’à plus de 60% des revenus. Dans l’avenir selon certaines
statistiques le secteur devrait fournir 93% des nouveaux emplois dans les villes alors
que présentement presque deux personnes sur trois en vivent. Pour ce faire, il faut
alors que les pouvoirs publics lui accordent sa place dans la stratégie de
développement pour en faire le levier de la croissance.
Dans cette direction, P.ENGELHARD observe avec justesse «qu’il sera difficile
de sortir de la pauvreté aussi longtemps qu’on aura pas assimilé un fait essentiel : une
grande partie de la production du continent africain émane des petites entreprises
familiales urbaines et des petites exploitations rurales dont l’efficience économique,
cependant, est souvent très faibles, en dépit de performances parfois étonnantes»
L’État doit alors aider ces entreprises à devenir plus efficiente en accroissant leur
productivité du travail par la formation, la disposition d’un outillage et l’ouverture de
crédits fonctionnels c’est-à-dire en leur créant un environnement incitatif et
approprié.
Le secteur informel est même entrain de se constituer en économie mondiale.
D’abord, ses acteurs contribuent à la réalisation effective des processus d’intégration
régionale avec un dynamisme déconcertant par édictions de propres règles de
circulation et d’échange de biens et de la monnaie : flux commerciaux, taux de change
parallèles. Ensuite, les acteurs établissent des réseaux de plus en plus denses qui
essaiment en Europe, en Amérique et en Asie.
Quelle conclusion : la libéralisation internationale
des économies et des finances, en multipliant les
risques et les incertitudes, commande une nouvelle
gouvernance mondiale ?
La mondialisation inéluctable aujourd’hui soulève de nombreux défis d’ordre
économique, politique, culturel et social qui appellent sans nul doute des solutions à
la fois urgentes et inédites. La globalisation résulte d’une triple mutation :
 géopolitique avec l’effondrement du monde bipolaire ;
 économique et financière ;
 technologique avec la révolution des technologies de l’information et de la
communication.
Comme nouvelle donne mondiale, la mondialisation modifie conséquemment et
profondément les modèles politique, social et culturel ainsi que les environnements
institutionnels. Quoi de plus normal puisque l’on connaît depuis longtemps que la
base matérielle commande et détermine toutes les superstructures. C’est dire que ces
mutations ne sont pas des calamités mais constituent plutôt sur bien des points des
avancées progressistes qui ont donc une valeur positive. C’est un énorme progrès de
constater aujourd’hui que l’internationale est bien devenue le genre humain. Il faut
s’organiser pour tirer le meilleur parti de ces avancées de l’humanité tout en étant
très alertes sur les risques potentiels. Comme l’observe Pierre SECKA «La
mondialisation, à la différence de la décolonisation (où les États pouvaient choisir par
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referendum d’être indépendants ou de demeurer sous le joug colonial) n’est pas une
denrée à prendre ou à laisser dans sa totalité. Elle a ses vertus et ses défauts ;
fortement enraciné dans son contexte, elle épouse parfaitement son temps et
s’impose de ce fait à tous».
Face aux différentes contraintes inhérentes au processus, quelles mutations
socio-économiques doit opérer l’Afrique pour profiter du phénomène ? Ne doit-elle
pas se démocratiser davantage, former ses acteurs, transformer ses structures et
adopter sa culture ? Les questions sont d’autant plus pertinentes que la globalisation
impose de nouvelles conditions de proximité et d’intimité entre entités économiques
et sociales pourtant considérées jadis éloignées qui font que les idées, les identités et
les modes de vie se mondialisent avec rapidité. Les nouvelles technologies ont
complètement gommé le temps et ont relativement homogénéisé les pratiques de
régulation sociales ainsi que les goûts et les consommations.
Toutefois l’émergence inéluctable et irréversible de cette mondialisation a
consolidé les dualités externes et internes aux sociétés, creusé les irrégularités et les
inégalités et approfondi les exclusions des acteurs les plus démunis et les fragiles
souvent sans leur offrir un ascenseur social. La dissolution des filets traditionnels de
protection sociale, les ruptures des solidarités familiales ainsi que la restructuration
des rapports sociaux (Mathieu, 1990 ; Vidal, 1992), mettent en urgence à l’ordre du
jour, la question sociale. La crise de l’État providence, le coût croissant du système
formel d’assurance, d’assistance, et l’émergence de nouveaux risques sociaux
résultant des mutations technologique et de l’emploi commandent la réactivation des
politiques sociales et de solidarité. Face à tous ces nouveaux risques une nouvelle
gouvernance de l’ordre interne et externe se pose.
Quelques ajouts pour compléter l’information sur certaines
questions.
Consulter les Rapports de la CEA, de la Banque mondiale, du
PNUD et de la BAD sur l’Afrique 2007
Les économies africaines continuent de maintenir la dynamique de croissance des années précédentes, en enregistrant un
taux de croissance réel global du PIB de 5,7% en 2006, contre 5,3% en 2005 et 5,2% en 2004.
Pour la deuxième année consécutive, le taux de croissance est resté supérieur à celui de l’Amérique latine (4,8%) mais
inférieur à celui de l’Asie en développement (8,7%). Pas moins de 33 pays ont enregistré une amélioration de la croissance en
2006 par rapport à 2005. Seuls deux pays, le Zimbabwe et le Seychelles, ont connu des taux de croissance négatifs en 2006.
Comme les années précédentes, les performances de la croissance de l’Afrique ont été soutenues par une amélioration de la
gestion macroéconomique dans de nombreux pays et par une forte demande mondiale pour des produits africains clefs, ce qui
s’est traduit par une hausse des prix à l’exportation, en particulier pour le pétrole brut, les métaux et les minerais. Cela explique
les taux très élevés de croissance enregistrés par les pays riches en pétrole
Seuls quatre pays ont atteint un taux de croissance réel du PIB de 7% ou plus, pendant cette période (tableau 2.1). À ce rythme,
peu de pays sont en mesure de réaliser les OMD d’ici 2015. C’est pourquoi le continent est confronté au défi qui consiste à
augmenter les taux de croissance et à les maintenir élevés sur une longue période.
En Afrique le taux de croissance devrait être de 5,8% en 2007 en légère augmentation par rapport à 2006 (5,7%). Les pays
exportateurs de pétrole bénéficieront d’une augmentation des recettes d’exportation résultant de la hausse des cours du brut. La
demande mondiale de produits africains notamment le pétrole les minerais et les produits de base agricoles – devrait rester
ferme en raison d’une reprise économique dans les grands pays industriels et les nouvelles économies asiatiques en particulier
la Chine. De plus, la livraison de l’aide promise et l’allégement de la dette permettront aux pays africains d’augmenter les
dépenses dans des secteurs clefs comme les infrastructures et les services sociaux. La consolidation de la gestion
macroéconomique permettra non seulement de réduire l’inflation à court terme mais également de contenir les craintes d’une
inflation à long terme, ce qui encouragera les investissements privés.
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Les pays africains exportateurs de pétrole, en tant que groupe, ont contribué à hauteur de 57,5% du taux de croissance de
5,7% du continent en 2006, comparés aux 53,4% en 2005 (figure 2.3). Aussi, la récente augmentation des cours du pétrole a-telle augmenté le poids des producteurs de pétrole dans la croissance globale du continent, éclipsant les améliorations observées
chez les pays non pétroliers (la croissance passant de 4,6% en 2005 à 5,2% en 2006).
La demande mondiale de brut et de minéraux s’est accrue rapidement grâce à la croissance mondiale tirée en particulier par les
très bonnes performances de la Chine.
En moyenne, les prix des denrées alimentaires et des boissons tropicales ont augmenté de 26% entre 2002 et 2005 et ceux des
matières premières agricoles de 41%. Les plus fortes hausses ont été enregistrées pour le caoutchouc (96%), le café (87%), le riz
(50%), le sucre et les grumes (44%).
Dans le monde, les exportations de biens et services ont augmenté plus rapidement que le PIB. Toutefois, toutes les régions
n’ont pas bénéficié à part égale de cette embellie (figures 1.7 et 1.8). La part de l’Union européenne dans les exportations
mondiales s’est maintenue autour de 40% entre 2001 et 2004 et est tombée à 38,4% en 2005. Elle avait baissé de façon
significative pendant les années 90. En revanche, la part du Japon et celle des États-Unis d’Amérique ont diminué entre 2001 et
2005. alors que celle de l’Asie est passée de 27% en 2001 à 29% en 2005. La part de la Chine est passée de 4,3 à 7,3% en seulement
quatre ans. Celle de l’Afrique est passée de 3,1% en 1990 à 2,2% en 2002, pour atteindre de nouveau 2,9% en 2005 grâce à la
hausse des prix des produits de base.
Augmentation des flux de capitaux
Les flux des investissements étrangers directs dans le monde ont à nouveau augmenté de façon significative, de 29% en 2005,
après une hausse de 27% en 2004. En ce qui concerne les investissements étrangers directs, les tendances pour les différentes
régions sont moins évidentes que celles du commerce (figure 1.9). La part de l’Union européenne dans les flux
d’investissements étrangers directs dans le monde est passée à 46% en 2005, soit le même niveau qu’en 2003. En revanche, la
part des États-Unis s’est sensiblement contractée alors que celle du Japon est restée faible. La part de l’Amérique latine a fluctué
autour des 10% au cours des cinq dernières années alors que celle de l’Asie a plus que doublé, passant de 10% en 2000 à 22% en
2005. À elle seule, la Chine représente désormais 8% des flux d’investissements étrangers directs mondiaux, soit la moitié de sa
part du PIB mondial. La part de l’Afrique dans les investissements mondiaux a également augmenté, passant de 0,6% en 2000 à
3,4% en 2005.
Tant au plan du commerce que des investissements étrangers directs, la Chine et l’Inde sont devenues d’importants partenaires
de l’Afrique, signe de la diversification géographique du commerce et des sources de financement pour le continent
Il subsiste, toutefois, pour les pays africains certains risques qui pourraient provenir de la concurrence asiatique et du
fléchissement du marché de l’immobilier dans les économies avancées, ce qui réduirait la demande et ferait baisser les prix des
produits de base. Aussi, les pays africains ont-ils besoin d’observer de très près l’évolution au plan international. Des mesures
visant à réduire la vulnérabilité aux chocs extérieurs, à augmenter la diversification et à renforcer la demande intérieure sont
cruciales pour maintenir la récente reprise de la croissance en Afrique.
L’espoir que la dette extérieure de l’Afrique serait sensiblement réduite dans le cadre de l’Initiative PPTE et que les réformes
économiques stimuleraient l’afflux de capitaux privés, a été très long à se concrétiser. Le total de la dette extérieure de l’Afrique
était de 244 milliards de dollars É.-U en 2006 contre 289 milliards de dollars É.-U en 2005 (FMI, 2006b). Bien que l’encours ait
diminué considérablement par rapport au PIB (passant de 35,9% en 2005 à 26,2% en 2006), les obligations au titre du service de
la dette sont restées pratiquement inchangées (4,2% du PIB en 2005 et 4,1% en 2006) en raison des taux d’intérêt élevés. Le
fardeau de la dette pèse gravement sur les dépenses d’investissements publics et retarde en fin de compte la croissance et la
création d’emplois
Les économies africaines sont en train de connaître une mutation structurelle dans laquelle le secteur des services devient
un important moteur de la croissance. En 2004, le secteur des services contribuait pour 49% à la croissance du PIB contre 36
pour l’industrie (y compris les industries extractives) et 15% pour l’agriculture. En 2004, ces trois secteurs ont continué à croître,
à des rythmes relativement lents cependant. Le secteur industriel a enregistré le plus fort taux de croissance qui s’est établi à
9,05%, même si la croissance dans le secteur manufacturier a diminué de près de 3,8% par rapport aux valeurs de 2003.
L’évolution dans chaque secteur et pour chaque région est examinée plus en détails ci-après.
Le secteur énergétique
En 2005, la production de pétrole brut de l’Afrique a été en moyenne de 8 856 barils/jour, soit une augmentation de 6,1% par
rapport à la moyenne de 2004. L’Algérie, l’Angola, la Libye et le Nigeria sont les principaux producteurs dont la part moyenne a
été de 75% en 2005. Les autres producteurs de pétrole sont le Cameroun, le Congo, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Gabon, la
Guinée équatoriale, le Soudan, le Tchad et la Tunisie.
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L’Afrique continue d’être un exportateur net de brut et de produits pétroliers raffinés. En 2005, les exportations de pétrole brut
de l’Afrique ont atteint 6 477,6 millions de barils/jour, soit une augmentation de 1,8% par rapport à 2004. Toutefois, la part de
l’Afrique dans les exportations mondiales de pétrole brut a baissé légèrement, passant de 14,9% en 2004 à 14,5% en 2005. En ce
qui concerne les produits raffinés, les exportations de l’Afrique ont légèrement
En ce qui concerne le gaz naturel, la production de l’Afrique a atteint en 2005 une moyenne à 171 735 millions de mètres cubes
standard, soit une augmentation de 13,1% par rapport à 2004. Cela porte la part de l’Afrique dans la production gazière
mondiale de 5,5% en 2004 à 6,1% en 2005. L’Algérie a représenté 50% du total de la production de gaz de l’Afrique, suivie par
l’Egypte et le Nigéria, représentant ensemble environ 44% en 2005.
Le secteur touristique
De nombreux pays en développement considèrent désormais que le tourisme est une part importante et intégrante de leur
stratégie de développement économique. Selon les estimations, 808 millions de touristes ont voyagé dans le monde en 2004 et
généré environ 682 milliards de dollars É.-U. L’Afrique a enregistré 41,3 millions d’arrivées touristiques, ce qui représente
seulement 5,1% des voyages touristiques effectués dans le monde. En termes de recettes, l’Afrique a reçu 3,6% (soit 25,2
milliards de dollars É.-U.) des 682 milliards de recettes touristiques dans le monde.
En 2006, les quatre pays ayant enregistré les meilleurs résultats dans le secteur touristique sont l’Afrique du Sud (6,3 milliards
de dollars É.-U.), l’Egypte (6,1 milliards de dollars É.-U.), le Maroc (3,9 milliards de dollars É.-U.) et la Tunisie (1,9 milliards de
dollars É.-U.).
Le développement social
Si la croissance s’est rétablie sur le continent les gains en termes de bénéfice social et de réduction de la pauvreté sont encore
limités. La présente sous-section fait le point du développement social à travers les OMD, et analyse les progrès et les défis en
rapport avec les divers objectifs et fournit un exposé plus détaillé des problèmes que pose le VIH/sida.
Évaluation globale des OMD
Comme on peut le voir dans le tableau 2.14, les progrès vers la réalisation des OMD sont lents et de sérieux problèmes se posent
toujours dans tous les domaines importants du développement social. Cependant, si on affine l’analyse selon les pays, on
constate que certains ont réalisé des progrès significatifs.
La proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour est restée pratiquement inchangée pendant
la période de 12 ans comprise entre 1990 et 2002 (tableau 2.16).
Le manque de progrès dans la lutte contre la pauvreté peut être attribué à deux facteurs. D’abord le taux de la pauvreté a
tendance à suivre celui de la croissance mais avec un certain retard. Ensuite la croissance économique récente n’est pas allée de
pair avec la création d’emplois réels alors que la croissance de l’emploi est déterminante dans la lutte contre la pauvreté (CEA
2006a).
Évolution des négociations commerciales Le commerce mondial a connu une expansion significative entre 2000 et 2005. Le
montant total des exportations dans le monde est passé de 6 451 milliards de dollars en 2000 à 10 393 milliards de dollars en
7
2005, soit une augmentation de 61% . Le tableau 3.1 permet de comparer cette évolution avec celle des exportations africaines
pendant la même période.
a) Le Cycle du développement de Doha
Le mandat des négociations de ce cycle est défini dans la Déclaration de la quatrième Conférence ministérielle tenue à Doha.
Les pays en développement, notamment africains, ont fait valoir que la dimension développement était cruciale pour la mise en
oeuvre du mandat de Doha, à savoir réformer le système commercial multilatéral et améliorer leurs chances dans le commerce
mondial. Un programme favorable au développement était censé être le facteur de solidarité dans les efforts visant à lutter
contre le caractère injuste de la répartition des fruits du commerce mondial, dont les pays développés se taillent la part du lion.
Le Cycle de Doha devait mettre le développement au coeur des débats. La mise en oeuvre de ce mandat à la satisfaction des
pays en développement était censée être l’aune à laquelle serait mesuré le succès du Cycle de Doha.
b) Autres faits nouveaux dans les négociations commerciales internationales
Compte tenu de la récente suspension des négociations à l’OMC et du processus en cours concernant les APE, les pays africains
ont encore plus intérêt à diversifier leurs marchés d’exportation. Ils sont impliqués dans plusieurs accords et négociations de
libre-échange au niveau régional. Ils tirent également profit de plusieurs grands régimes préférentiels tels que la Loi des ÉtatsUnis eu faveur de la croissance et des opportunités en Afrique (AGOA). Certains pays africains participent aussi à des
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négociations commerciales bilatérales avec d’autres régions du monde. La présente section passe en revue les principaux faits
nouveaux concernant ces processus.
Intégration régionale africaine
La promotion de l’intégration régionale africaine est depuis longtemps un des objectifs du continent. Le Traité d’Abuja
instituant la Communauté économique africaine (chapitre 1) prévoit une intégration continentale progressive, axée sur
l’intégration des cinq sous-régions (Nord, Ouest, Est, Centre et Afrique australe).
2) Régimes commerciaux préférentiels
Trente-sept pays africains remplissent les conditions pour bénéficier de l’AGOA, qui accorde aux pays africains l’accès
quasiment en franchise de droits et sans contingent au marché des États-Unis. En 2005, les importations des États-Unis en
provenance d’Afrique subsaharienne au titre de l’AGOA se sont chiffrées à 38,1 milliards de dollars, soit 44% de plus que
l’année précédente, principalement en raison de la hausse des importations de pétrole. Hors pétrole, les importations des ÉtatsUnis en provenance d’Afrique ont en réalité baissé de 16%, à 2,9 milliards de dollars, principalement en raison d’une
concurrence accrue dans le secteur du textile et de l’habillement suite à la fin de l’Accord multifibres. Il y a également eu des
avancées mineures dans les secteurs traditionnels et non traditionnels, par exemple les produits chimiques, les fruits, les noix,
les fleurs coupées et les articles chaussants. rente-quatre pays africains sont des PMA et, par conséquent, peuvent bénéficier de
l’initiative de l’UE intitulée «Tout sauf les armes». D’autres pays africains qui ne sont pas des PMA sont soit des bénéficiaires du
système généralisé de préférences (SGP) de l’UE, soit des parties à un accord de libre-échange bilatéral avec l’UE (TDCA et
Euro-med).
De Monterrey à Gleneagles Les pays africains et leurs partenaires de développement ont reconnu le rôle crucial du
financement du développement et s’emploient activement à mobiliser des ressources tant internationales que nationales.
Toutefois, ils doivent relever des défis de taille dans leurs efforts visant à faire du financement du développement les suivants: Trouver une solution efficactraversent plusieurs pays africains, de façon à libérer des ressources pour le financement du
développement; - Attirer des flux soutenus de capitaux privés, y compris les envois de fonds, et faire en sorte que ces capitaux
aillent à des secteurs à forte valeur ajoutée et créateurs d’emplois; - Améliorer la mobilisation de ressources intérieures en
augmentant l’épargne et les recettes fiscales et en réduisant les fuites de capitaux; - Améliorer l’efficacité et la capacité
d’absorption de l’aide étrangère; - Utiliser le commerce international comme instrument de mobilisation des ressources. Le
Consensus de Monterrey
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