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THOMAS BERNHARDIKRYSTIAN LUPA
Déjeuner
chez Wigenstein
RITTER, DENE, VOSS
EN POLONAIS SURTIT EN FRANÇAIS
AV EC MALGORZATA HAJEWSKA-KRZYSZTOFIK,
AGNIESZKA MANDAT, PIOTR SKIBA
DU 13 AU 18 DÉC. 2016
AU THÉÂTRE DES ABBESSES
31, RUE DES ABBESSES. PARIS 18
Dossier pédagogique SAISON 2016 I2017
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THOMAS BERNHARD
KRYSTIAN LUPA
Déjeuner chez Wittgenstein
Ritter, Dene, Voss
EN POLONAIS SURTITRÉ EN FRANÇAIS
TEXTE Thomas Bernhard
TRADUCTION Jacek S. Buras
MISE EN SCÈNE & SCÉNOGRAPHIE Krystian Lupa
MUSIQUE Jacek Ostaszewski
ASSISTANT SON Mieczyslaw Guzgan
SCÉNOGRAPHIE Piotr Skiba
AVEC Malgorzata Hajewska-Krzysztok,
Agnieszka Mandat,Piotr Skiba
PRODUCTION Narodowy Stary Teatr-Cracovie/Nova Polska (une saison polonaise en France).
AVEC LE SOUTIEN du Adam Mickiewicz Institute et de l’Institut Polonais de Paris.
CORÉALISATION Théâtre de la Ville-Paris – Festival d’Automne à Paris.
La pièce représentée est publiée chez l’Arche Éditeur
dans la traduction française de Michel Nebenzahl.
DURÉE 3 H 30 AVEC 2 ENTRACTES
© M. Gardulski
Krystian Lupa, grand maître polonais du théâtre d’art fait vivre avec maestria
ce huis-clos de trois êtres en perpétuel décalage.
Deux sœurs, un frère. Elles sont comédiennes. Sans travail. Parce qu’on ne le leur demande pas ? Parce
qu’elles ne veulent pas ? Peu importe, elles sont riches, et se jouent leurs vies entre elles. Lui est philosophe,
séjourne dans un hôpital pour personnes dérangées, inlassablement il écrit son « œuvre ». Thomas
Bernhard s’est inspiré de gens qu’il connaissait. Alors, devenue plus précise encore, son habituelle acuité
s’enrichit d’une étroite complicité. Quasiment affectueuse. Tout au moins dans la mise en scène de Krystian
Lupa, qui fait profondément ressentir les va-et-vient de la douleur, de la fureur de vivre chez ces êtres en
perpétuel décalage, prisonniers de rêves inaboutis, écrasés par une famille absente, omniprésente. Et puis,
ils ont la chance d’être incarnés par des acteurs si profondément humains ! Colette Godard
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SOMMAIRE
Krystian Lupa rencontre Thomas Bernhard p. 4
Entretien Krystian Lupa p. 5
Résumé p. 8
Déjeuner chez Wittgenstein / Journal p. 9
Extrait p. 10
Krystian Lupa p. 11
Thomas Bernhard p. 12
«Portrait de Krystian Lupa» Festival d’Automne à Paris p. 13
4
KRYSTIAN LUPA RENCONTRE
THOMAS BERNHARD
Un jeuner qui unit deux sœurs et un frère. Elles
sont codiennes, « intermittentes ». Mais elles ne
sont pas pauvres, loin de là. Lui est un intellectuel.
Un philosophe que, pour l’occasion, elles ont fait sor-
tir de la maison de santé où il est en traitement.
Laffaire se passe dans un « salon bourgeois » entre
portraits et meubles de famille. On connaît les senti-
ments de Thomas Bernhard envers la bourgeoisie de
son pays, l’Autriche, dont jamais il na accepté le
comportement avant, pendant et après Hitler. Ses
personnages en portent le poids. Ici, les voilà prison-
niers de leurs rêves avortés, de leurs désirs sans
solution. Tout à la fois pitoyables et inquiétants, ils
sont lourds de questions qu’ils ne peuvent pas,
nosent pas résoudre.
Avec ses authentiques « personnages de théâtre », la
pièce semble écrite pour Krystian Lupa. Metteur en
scène polonais, qui, d’abord et avant tout, construit
son travail à partir de ses comédiens. Avec eux. Avec
ce qu’ils sont, ce qu’ils peuvent devenir. La manière
dont il les observe, dont progressivement, sans
jamais lâcher prise, il amène chacun d’eux à s’impli-
quer « corps et âme » dans tout ce que mots et
silences peuvent entraîner, est fascinante. Aussi celle
dont, jour après jour, il fait vivre à chacun, et ensem-
ble, leur histoire commune.
Une première fois, ils sont venus (en 2004) aux
Ateliers Ber thier. Ceux qui ont eu la chance de les
voir ne peuvent oublier leur intense présence, les
flashs d’ironie et de détresse, la tension, l’émotion.
Nous allons les retrouver. Le spectacle revient, invité
par le Festival d’Automne à Paris, aux Abbesses. Ni le
temps passé ni l’âge n’y font rien. Le mur des pas-
sions, la « difficulté d’être » demeurent. Et brûlent.
Il ne reviendra pas au Théâtre Polski de Wroclaw,
Krystian Lupa l’a pété, travaillé, retravaillé, comme
dailleurs la plupart de ses spectacles. Pour lui, c’est
fini. La raison? Peu apprécié par les autorités catho-
liques, le directeur a été remplacé par un acteur,
jusqu’à présent sans lien avec la scène, connu pour
ses les dans des feuilletons lévisés. Il a été choisi, a-
t-il expliqué, après avoir exposé son projet au minis-
tre de la Culture: un programme de pièces unique-
ment polonaises, capables de remplir la salle à cent
pour cent à chaque représentation, et parfaitement
rentables.
Et il ne s’agit pas d’un sketch. Les protestations nont
pas tardé. En vain. Quant à Lupa, il a annulé ses répé-
titions programmées du Procès de Kafka. Que sans
doute il reprendra ailleurs. Mais la disparition d’un
théâtre ambitieux et la victoire du populisme ne
sont, à aucun point de vue, rassurants. C. G.
Et si leur pessimisme, leur colère étaient justiés ?
5
ENTRETIEN KRYSTIAN LUPA
VOUS AVEZ MONTÉ SEPT SPECTACLES À PARTIR DES TEXTES DE
THOMAS BERNHARD, PIÈCES OU RÉCITS. C’EST L’AUTEUR, DE
LOIN, QUE VOUS AVEZ LE PLUS SOUVENT MIS EN SCÈNE.
D’OÙ VIENT CETTE PASSION, CET ATTACHEMENT?
KRYSTIAN LUPA: Au début ce fut une surprise. Je pensais
avoir derrière moi mes lectures initiatiques, avoir
tout lu et dans une librairie, au sommet d’une pile, je
remarque un livre titré La Plâtrière avec une couver-
ture verte très moche. Personne nachetait ça. J’ouvre
le livre et je constate qu’il n’y a pas de chapitre, pas
de retour à la ligne. Une légende précise que c’est un
auteur important qui a à voir avec Kafka. C’est un
peu à cause de Kafka que je l’ai acheté. À la maison,
je l’ouvre au hasard comme on ouvre la Bible et je
tombe sur le monologue de Konrad. Ça ma impres-
sionné, j’en suis devenu fou. Dans un premier temps
j’y ai vu une réminiscence de mon père, je nosais pas
encore reconnaître que c’était moi. Je préférais me
servir de mon père, de sa folie. Je me suis identifié de
plus en plus à cet homme. J’ai lu le livre rapidement,
j’en ai cherché d’autres, à l’époque en Pologne il n’y
avait que Le Gel de traduit. J’ai eu alors une proposi-
tion de travailler en suisse et j’ai proposé d’adapter
La Plâtrière. J’ai écrit à Thomas Bernhard une lettre
à la manière de Konrad, il ma répondu de façon
agré able mais ferme disant qu’il refusait toute adap-
tation et voulait lui-me écrire une pièce à partir de
ce récit. C’était un subterfuge car il ne la jamais écrite
et nen a même jamais eu le projet. J’ai perdu cette let-
tre et je ne peux pas me le pardonner.
VOUS PARLEZ DE VOTRE PÈRE COMME SI VOUS PARLIEZ D’UN
PERSON NAGE DE THOMAS BERNHARD
K. L. : Mon père qui était enseignant mais se sentait
chercheur disait tout le temps : vous verrez après ma
mort, j’ai écrit mon œuvre, vous en baillerez d’éton-
nement. Comme Konrad qui veut écrire un traité sur
l’ouïe. Après sa disparition, j’ai cherché son livre, j’ai
retrouvé quelques cahiers. C’est illisible, il écrivait sur
la page sans se soucier si elle était déjà écrite, jusqu’à
huit écritures superposées. Peu de pages sont lisibles:
des vers, quelques propos métaphysiques. Une sorte
d’art phi losophique d’un maniaque ignorant. Jusqu’à
sa mort j’ai eu un conflit énorme avec lui, je faisais le
contraire de ce qu’il aurait fait. Je croyais que j’étais le
revers de sa médaille, il sest avéré que c’était la même
chose. Mon re était polyglotte, il parlait cinq lan gues,
sur son lit de mort il apprenait l’espagnol. Étran ge -
ment juste après sa mort j’ai commencé à apprendre
l’allemand, à lire les philosophes français, Rilke. Les
morts reviennent habiter les vivants. Mon père est
revenu, il occupe plus de place. Mes proches défunts
hantent mes rêves, on les porte en soi, on ne peut pas
s’en séparer et on finit par penser comme eux. À l’aca -
démie des Beaux-arts, un ami très proche et moi for-
mions un couple de veurs. On se construisait notre
propre monde. Tout de suite après sa mort, j’ai res-
senti un besoin, j’ai écrit sur lui pendant très long-
temps, comme si c’était un bien qu’il fallait empaque-
ter dans une boîte. Ce texte est si intime qu’il est
impossible à éditer de mon vivant. J’écrivais pour refer -
mer la boîte, une sorte d’extinction. Thomas Bernhard
lui naurait pas eu ces scrupules. Il aurait édité le texte.
VOUS AVEZ CEPENDANT FINI PAR ADAPTER LA PLÂTRIÈRE?
K. L.: Lorsque j’ai appris la mort de Thomas Bernhard
j’ai écrit une lettre à son frère cadet Peter Fabjan, sem -
blable à celle que je lui avais écrite. et son frère a
accepté que j’adapte La Plâtrière. Personne navait ja -
mais adapté l’un de ses textes, et jusquà aujourd’hui
c’est uniquement dans ma version que l’on peut mon-
ter La Plâtrière. Kafka est revenu car un théâtre italien
ma proposé de faire quelque chose à partir de son
œuvre. Je leur ai proposé La Plâtrière. Kafka mappa-
raissait alors trop nihiliste, un chantre de la mort qui
ne laissait aucun espoir, ce nest qu’aujourd’hui que
j’y décèle de l’humour. Bernhard écrit après la guerre
1939-1945. Son pessimisme outré a été dévoré par la
guerre. Il a besoin d’exagérer pour saisir. Son écriture
c’est de l’énergie. Il est dans le plaisir de la négation,
dans l’exagération, leffacement, l’extinction et larra-
chement de tout le mensonge. Quand sa pièce La
Place des héros a été montée en autriche à la fin de sa
vie, il a été victime d’une chasse cauchemardesque.
C’est un homme qui étouffait dans son pays ma
raconté plus tard son frère.
ON A L’IMPRESSION QUE DEPUIS QUE VOUS AVEZ DÉCOUVERT
THOMAS BERNHARD, VOUS NE VOUS ÊTES PLUS QUITTÉS.
K. L.: Souvent il cogne chez moi, il y habite en quel que
sorte. Son frère ma invité avec ma tante (un person-
nage à la Bernhard, vampirique, en quête de maison).
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