texte & mise en scène DaviD Lescot musique Damien Lehman scénographie aLwyne De DarDeL lumières Laïs FouLc costumes syLvette Dequest assistante à la mise en scène charLotte Lagrange écriture chorégraphique roser montLLó guberna avec scaLi DeLpeyrat sara LLorca Damien Lehman céLine miLLiat-baumgartner grégoire oestermann norah KrieF Jean-christophe quenon Nos occupations DAVID Lescot CIE DU KAIROS artiste associé i création 14 < 28 mai { au théâtre Des abbesses } Dossier pédagogique saison 2013 i 2014 DAVID LESCOT Nos occupations CIE DU KAÏROS création David Lescot Damien Lehman SCÉNOGRAPHIE alwyne de Dardel LUMIÈRES Laïs Foulc COSTUMES sylvette Dequest ASSISTANTE À LA MISE EN SCÈNE charlotte Lagrange ÉCRITURE CHORÉGRAPHIQUE roser montlló guberna TEXTE & MISE EN SCÈNE COMPOSITION MUSICALE AVEC scali Delpeyrat, sara Llorca, Damien Lehman, céline milliat-baumgartner, grégoire oestermann, norah Krief, Jean-christophe quenon Compagnie du Kaïros, Théâtre de la Ville-Paris – la Filature, scène nationale de Mulhouse. La Compagnie du Kaïros est subventionnée par le ministère de la Culture – DRAC Île-de-France. David Lescot est artiste associé à la Filature-scène nationale de Mulhouse. Nos Occupations est publié aux Éditions Actes sud-Papiers avec L’aiDe De la SPEDIDAM. La SPEDIDAM est une société de perception et de distribution qui gère les droits des artistes interprètes en matière d’enregistrement, de diffusion et de réutilisation des prestations enregistrées. coproDuction sommaire Nos occupations est édité aux Éditions Actes Sud Papiers. DURÉE 1 H 45 photos spectacle Patrick berger noyau clandestin JOUER SA VIE i F. arvers p. 4 notes d’intention p. 5 précisions p. 7 clandestins, partisans, saboteurs, incendiaires… L’existence et l’envers d’un réseau, comme un opéra parlé. Les opréateurs radio de la résistance p. 18 Un groupe de résistants, vu de l’intérieur. Ils travaillent en réseau, communiquent dans un langage codé. À chaque instant, chacun risque sa peau, et celle des autres. Ce sont des combattants clandestins, comme il y en a eu pendant l’Occupation. Comment on se rencontre, comment on se passe des messages, comment on crypte un texte, comment on maquille tout : une expression, une enveloppe, un visage, une émotion. Et comment, au risque de la mort, on se fait un masque, qui est notre survie. Sans chercher la reconstitution historique, David Lescot restitue très précisément le mécanisme de l’action clandestine. Et par là, interroge la force et la fragilité des organisations en réseau, celles d’hier et celles d’aujourd’hui. Cela dit, il reste lui-même avec son humour, sa sensibilité explosive. Et la musique, dont il ne peut se passer, ici celle du piano de Damien Lehman. Telles sont les armes avec lesquelles il évoque « les raisons d’agir, comme on dirait raisons d’être ». extraits p. 22 David Lescot p. 24 L’équipe artistique p. 26 Les ateliers p. 30 colette godard 2 3 NOYAU CLANDESTIN NOTES D’INTENTION comment « se cacher en pleine lumière » ? avec Nos occupations, dans un antre encombré de pianos, David Lescot joue la partition d’un groupe clandestin, entre langage crypté et stratagèmes pour rester invisible et imprenable. Sept personnages constituent ce réseau. L’un d’eux sera liquidé et il n’est pas innocent que son nom de code soit celui d’un Juif, un personnage inspiré par le film Monsieur Klein, « où quelqu’un devient juif parce qu’il y a une ambiguïté sur son nom ». Il y a aussi la femme recrutée parce qu’elle découvre l’existence du réseau et que la meilleure manière de l’empêcher de la révéler consiste alors à lui faire croire qu’elle aussi en fait partie. « […] Cette pièce raconte comment se cacher en pleine lumière. Il y a une histoire du metteur en scène Tadeusz Kantor que j’adore. Pour ses tournées, on lui avait collé un commissaire politique qui devait vérifier ce qu’il faisait et il lui a donné un rôle dans le spectacle pour être peinard. Là, c’est pareil : au lieu de se cacher, on ramène le témoin gênant à l’intérieur. » Très documentée, la pièce emprunte à l’univers du cryptage son langage codé, ses techniques artisanales qui, pour un néophyte, se muent en poésie concrète, objectiviste, sur l’art de décacheter et recacheter une enveloppe, ou de mémoriser un message délivré en série de 28 groupes de cinq lettres. Les dialogues sont accompagnés au piano par le compositeur Damien Lehman, la musique assumant le rôle de l’action et rappelant celui que, dans la Résistance, l’on appelait « le pianiste » et qui était chargé de crypter les messages. D’où ce décor composé de pianos – en état de marche ou explosés après le passage d’une bombe – dans lequel se déroule le spectacle. C’est encore le pianiste qui soutient le chant final de Merle, au refrain évocateur d’une histoire bien réelle : « J’étais, je suis, je serai. » Ce sont à la fois les mots écrits par Rosa Luxemburg dans ses dernières lettres en prison, et ceux que trois Juifs baltes avaient choisis comme texte de leur pièce de théâtre, jouée en secret dans un camp de concentration où était prisonnier Armand Gatti et qui marqua sa première rencontre avec le théâtre, au cœur de la clandestinité. Une partition à la ligne claire pour dire la conscience mélancolique suscitée par ce constat : « Un groupe a une durée de vie limitée, moins longue que celle des gens parce que c’est l’action qui le constitue. Dans une vie, on aura appartenu à un certain nombre de groupes, un réseau de résistance, une pièce de théâtre, et on aura déploré leur dissolution. » Nos occupations, nom commun accolé à un pronom possessif pluriel, résume ce qui se trame dans la pièce de David Lescot : la vie et la mort d’un groupe, en deux temps : celui de l’action clandestine et celui de « l’après », quand la dissolution de l’être ensemble s’unit à la difficulté de donner un sens à sa propre vie. Nul réalisme ou idéologie ne président à l’écriture : on ne saura jamais ce que font exactement les personnages de ce réseau clandestin, à quelle époque ils évoluent, pas plus qu’on n’apprendra le succès ou l’échec de leurs activités. Mais on plonge directement dans un univers où la nécessité de rester invisible, imprenable, oblige à communiquer à l’aide de codes, de cryptages, comme autant de masques destinés à se protéger. Une thématique de la résistance qui colle à la peau du théâtre de David Lescot : « Je pense que ça me travaille depuis toujours et que ça fait même partie de ma venue au théâtre. J’ai commencé l’écriture de ce texte il y a plusieurs années et n’ai cessé de le retravailler, ce que je ne fais pas d’habitude. Quand j’ose écrire quelque chose, réunir des gens pour faire du théâtre, le premier mouvement est peut-être celui-là : projeter l’univers clandestin sur la scène du théâtre. » Fabienne arvers 4 DAVID LESCOT ration précédente qui a survécu à la Seconde Guerre mondiale et a eu également l’occasion de mener sa révolution. Il paraît très difficile après cela, de réinventer une raison d’agir. C’est donc une pièce sur les raisons d’agir, comme on dirait raison d’être. Et cela m’intéresse parce que toutes ces techniques, tous ces codes, toutes ces choses dont peut dépendre l’efficacité d’une action ou la survie d’une réseau, ont à voir avec le théâtre : avec la construction, l’invention d’un langage, l’invention de situations fictives, le maniement du mensonge et de l’illusion, la constitution d’une équipe, d’un groupe et les menaces de dissolution qui pèsent sur tout groupe. Nos Occupations traite des relations intérieures au sein d’une organisation clandestine. Dans la première partie, nous observons de l’intérieur de manière extrêmement précise et très énigmatique le fonctionnement d’un réseau qui peut être un réseau de dissidence, de résistance, ou encore politique. Et la vie de ce réseau, menacé en permanence de dissolution dans un climat de grand danger, nous donne à voir l’existence d’intrigues internes menaçant la réussite de certaines actions, et la survie même de ses membres. L’accent est mis sur les modes de communication qui reposent sur le cryptage, la dissimulation des informations, et toutes sortes de techniques et de simulacres qui sont vitaux à la poursuite de ce genre d’activités. Dans la seconde partie, la situation de danger a disparu. Les membres du réseau, ou tout du moins ceux qui restent, se réunissent et tentent de faire le bilan de leurs actions. Mais la disparition de la situation de crise n’a fait qu’aiguiser et exacerber les crises humaines et personnelles, à tel point que les membres du réseau qui communiquaient de manière extrêmement efficace avec des codes n’arrivent plus à s’engager dans une relation vraie les uns avec autres. Les deux parties du texte correspondent à deux époques, et à deux esthétiques scéniques. La première partie est comme une sorte de chorégraphie qui fonctionne magnifiquement. C’est une machine très bien huilée, où l’on voit les gens faire ce qu’ils ont à faire, parce qu’ils sont entraînés pour ça, virtuoses dans leurs domaines. Ils agissent dans une sorte de ballet, dans un fonctionnement choral d’une précision mécanique. La structure de cette première partie est très particulière car elle n’est constituée que de duos, qui se passent uniquement en extérieur. La musique sera le lien de ce ballet, comme une espère d’opéra parlé dont la première partie ne serait constituée que de duos. Il y aura donc un piano, et un pianiste sur scène. C’est aussi une façon d’éviter la reconstitution cinématographique de ce genre de combats, qu’on a beaucoup vu, et qui ne fonctionneraient pas au théâtre. Faire surgir ces images dans l’imaginaire est aussi soutenu par l’utilisation de signes, de symboles : le pianiste était, dans la résistance, le terme utilisé pour la personne qui crypte les messages sur une machine à écrire. J’ai demandé une composition originale à Damien Lehman qui permette à la fois de créer des atmosphères, et qui intègre également le bruit de ces « pianistes » qui tapaient à la machine dans des salles où étaient réunis des gens engagés dans l’activité de renseignement. Pour la seconde partie, nous sommes en intérieur, dans une sorte de réception organisée par le responsable du réseau, une réunion d‘anciens. Le contexte qui vient à l’esprit, et la pièce va dans ce sens, est la représentation que nous nous faisons des réseaux de résistance durant la seconde guerre mondiale, mais ce n’est pas une pièce sur la résistance, ni même une pièce historique, mais une pièce qui interroge l’action politique, l’acte de résistance, et d’une manière générale ce que c’est de se regrouper pour mener une action. Donc on peut tout aussi bien penser à des formes d’actions politiques de protestation d’aujourd’hui comme celle des altermondialistes, ou des groupements anticonsuméristes aussi bien violentes que symboliques, ou encore à des réseau islamistes. Nos Occupations est surtout une interrogation sur ce qu’implique ce genre de situation sur le plan existentiel et humain. Interrogation qui concerne notre génération à qui l’action a été confisquée par la géné5 Ce lieu déterminé sera parfois envahi par l’espace mental de chacun des protagonistes : ceux qui ont eu du désir du temps de la lutte, ou ceux qui ont trahi. Au milieu de cette réception surgira tout à coup une focalisation sur l’univers personnel de chacun, et on entendra leur voix intérieure par moment pour ensuite revenir sur le lieu de la rencontre. Le pianiste est alors devenu un musicien a qui on a demandé de jouer pour agrémenter cette soirée. Mais sa musique peut faire surgir des souvenirs de ce qui s’est passé avant, et c’est elle qui assure le lien entre les deux parties, comme un leitmotiv obsédant qui ne disparaîtrait jamais des esprits et des mémoires. PRÉCISIONS OCCUPATION L’OCCUPATION → Ce à quoi on consacre son temps, son activité Période pendant laquelle la France a été occupée par les troupes allemandes (1940-1944). → Action d’occuper militairement un lieu, une ville, un pays. La France sous vichy En mai 1940, l’offensive foudroyante des blindés allemands provoque bientôt la débâcle de l’armée française et l’exode des civils sur les routes. Au gouvernement Paul Reynaud succède un gouvernement Pétain, qui demande l’armistice dès le 17 juin 1940. La convention d’armistice franco-allemande du 22 juin 1940 fixe aussi le principe de la contribution financière de la France à l’entretien des troupes d’occupation et subordonne l’économie française à l’effort de guerre du Reich: participations financières allemandes dans l’industrie, commandes imposées. Elle détermine aussi une ligne de démarcation qui sépare la zone « occupée » de la zone « libre » où siège le gouvernement Pétain, à Vichy. → Action d’occuper un lieu, un local, d’y habiter, d’y travailler. DAMIEN LEHMAN Comment procéder pour instaurer un rapport avec le texte, dès lors qu’il s’agit de ne pas l’illustrer ? Dans un premier temps, je me suis contenté d’en subir globalement l’influence, de me brancher dessus sans l’analyser, comme un appareil électrique que l’on met sous tension. Ne m’abandonner à aucune représentation, mais réduire ma perception au rythme du texte, afin d’en extraire le tempo mental de mon personnage : sa musique. Ne pas représenter le texte, mais produire les mêmes effets que lui par d’autres moyens, sur un autre plan. Le montage texte/musique n’est venu qu’après la composition, avec des rapports variés, allant de la coïncidence au décalage. occuper Le temps… La musique tient une place précisément délimitée dans la mécanique des réseaux de résistance que décrit Nos occupations. Elle n’est pas là pour faire entendre ce qu’éprouvent les personnages, ni pour illustrer certaines situations. Elle n’est qu’un point de vue, très limité, sur le réseau : celui du « pianiste ». Elle est la partition de ce personnage, appelé « pianiste » dans le jargon de la résistance car, assis à sa machine à écrire du matin au soir, il était chargé de coder et de décoder les messages qu’on lui apportait. L’enjeu était donc, non de saisir les émotions des autres, mais d’inventer une musique active, la musique spécifique produite par cette activité précise. Sur scène, en reprenant l’activité du pianiste-décodeur (convertir des signes en gestes), le pianiste-musicien rend sonore son monde mental, son tempo mental. → Mode d’acquisition de la propriété par la prise de possession d’un bien sans maître. → Période pendant laquelle la France a été occupée par les troupes allemandes (1940-1944). http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/l_occupation/74336 au norD, La France occupée est eLLe-même Divisée en trois zones : • la zone occupée proprement dite, • la zone sous administration allemande directe, rattachée à la Belgique, • la zone annexée (Haut-Rhin, Bas-Rhin et Moselle, déjà détachés de la France, au terme de la guerre de 1870 et jusqu’en 1918). Ces trois départements, soumis à une forte pression assimilationniste, sont intégrés au IIIe Reich ; une frontière les sépare de la France. Nord et Pas-deCalais dépendent de l’administration allemande à Bruxelles ; dans la perspective d’une « Europe nouvelle », Hitler pensait les intégrer à la Belgique pour constituer une province industrielle, tandis qu’il assignait à la France une vocation toute rurale. Paris est le siège du haut commandement allemand, auprès duquel Vichy a accrédité un délégué général qui fut longtemps Fernand de Brinon, dévoué à la cause nazie. En outre, Paris est le siège des mouvements d’extrême droite favorables à l’Allemagne nazie : le parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot, le Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat. Ces ligues pro-nazies collaborent étroitement avec l’occupant et dénoncent les actions patriotiques Un procédé musical privilégié dans cette composition m’a été suggéré par Le Tanneur, dans la première scène : « Très lent à l’intérieur et très rapide à l’extérieur ». L’expérience irreprésentable contenue dans cette phrase appartient d’emblée à la musique, car, comme tout processus mental, elle offre à la musique sa matière première : c’est un affect, une transformation, une certaine tension du temps. Or, la transparence du son rend possible la perception simultanée de plusieurs plans sonores, à différentes vitesses. Une technique spéciale, la polyrythmie, permet de mettre en tension plusieurs temporalités indépendantes, voire incompatibles, en les superposant. En exerçant leur force l’un sur l’autre, le « très lent » et le « très rapide » contractent la durée, pour rendre sonore l’impression que le temps, sans cesse, se tend. En écrivant le « texte » du « pianiste », je l’ai imaginé virtuose, c’est à dire joyeux. Quatre ou cinq années à convertir des codes huit heures par jour, voilà qui vous rend plus que compétent. Il m’a semblé que son excellence croissante à décoder devait fatalement évoluer en passion dévorante. J’ai estimé que cette vertu, développée opiniâtrement contre l’ennemi, façonnant son être jusque dans son sommeil, était vouée à devenir une puissance, une capacité de résistance. Ainsi, la musique qui émerge de son activité régulière et tendue peut paraître dure, parfois même glacée ; elle est toujours joyeuse – et, par là même, souvent virtuose. Dans l’intensité de son travail quotidien, « le pianiste », loin de pâtir des tristesses de la guerre, les convertit en action. La musique de Nos occupations ne veut répondre qu’à cette question : de quelle manière « le pianiste », en décodant ses messages, a-t-il occupé le temps ? 6 7 de la Résistance sous toutes ses formes. Les Français ont le choix entre la collaboration avec l’ennemi ou la Résistance qui peu à peu s’organise. de l’Axe. L’espoir renaît et fait place à l’enthousiasme lorsque est connu le débarquement de Normandie (6 juin 1944). L’Occupation va prendre fin ; il faut songer à reconstruire le pays soumis au pillage pendant quatre années. paris pendant l’occupation Mais la très grande majorité, résignée et soumise aux privations, attend la suite des événements pour se déterminer. Le pays, mis en coupe réglée par l’occupant, connaît des souffrances tant matérielles que morales. Le ravitaillement est compromis : les villes et les régions d’agriculture spécialisée subissent de graves restrictions alimentaires, tandis que les campagnes où règne la polyculture les supportent plus aisément. LA RÉSISTANCE Docteur Jean Lapeyre-mensignac, responsable du bcra-boa, région b Le 18 juin 1940, le Général De Gaulle arrivé la veille à Londres lance son appel. Dès juillet 1940, alors que les français sont écrasés matériellement et moralement par le choc de la capitulation puis de l’occupation, s’esquissent les premiers pas de la Résistance. tickets de rationnement Dans les classes populaires, le niveau de carence atteint met en péril la santé des individus. Rationnées, la plupart des denrées sont distribuées contre des « tickets » ; les cartes de rationnement sont attribuées mensuellement par les services municipaux, en tenant compte de l’âge et des activités des gens. Parallèlement s’instaure le trafic de marchandises qui échappent ainsi au marché officiel pour entrer dans le « marché noir ». Allocution de Pierre Laval à Compiègne Progressivement, l’occupation se fait de plus en plus pesante : à l’exploitation économique du pays au profit de l’occupant s’ajoutent les menaces sur les hommes. Laval institue le système de la « relève » (trois travailleurs partent pour l’Allemagne contre un prisonnier libéré : août 1942), puis le Service du travail obligatoire (STO) (février 1943), qui frappe d’abord les chômeurs puis les jeunes gens, envoyés eux aussi en Allemagne, dans les usines d’armement. général De gaulle Dès juillet 1940, s’esquissent les premiers pas de la résistance, alors que les Français sont écrasés matériellement et moralement par le choc de la capitulation puis de l’occupation : service du travail obligatoire, sto à LonDres À partir du 11 novembre 1942, la zone libre est à son tour occupée par les Allemands, qui ripostent ainsi au débarquement allié en Afrique du Nord. Sur tout le territoire national sont désormais pourchassés – outre les résistants – les travailleurs soumis au STO et qui tentent d’y échapper, ainsi que les Juifs. La Gestapo bénéficie de l’appui de la police française : ainsi, le 16 juillet 1942, 28 000 Juifs avaient déjà été parqués dans le Vél' d’Hiv' à Paris pour gagner ensuite les camps d’extermination nazis. À cela s’ajoute le risque pour tout un chacun d’être pris dans une rafle comme otage, en représailles d’une action de la Résistance. L’aube de l’été 1944, c’est une population fatiguée par les privations, exaspérée par le poids de l’Occupation, qui suit avec passion, à la radio, les progrès des offensives alliées et le recul des troupes Le Général De Gaulle constitue son état-major avec notamment: Dewravin (Passy), Roulier (Remy), Duclos (Saint-Jacques), Fourcaud, D’estienne D’orves… Ces premiers « hommes de Londres » formeront le Bureau Central de Renseignement et d’Action (BCRA). Le 19 juillet 1940, MANSION est le premier envoyé clandestin en France, le BCRA fera suivre par bien d’autres « chargés de mission », ils recruteront en France des volontaires pour former des « Réseaux » qui avec leurs opérations aériennes clandestines (atterrissages et parachutages), ainsi qu’avec leurs opérations maritimes, deviendront le cordon ombilical permettant de relier la France occupée à l’état-major du Général De Gaulle à Londres, lui-même en liaison avec l’état-major interallié. 8 Simultanément De Gaulle regroupe et organise sous son commandement les restes de l’armée échappée aux Allemands et, avec les volontaires qui le rejoignent progressivement, il constitue les forces de terre, de mer et de l’air de la « FRANCE LIBRE » qui vont combattre aux côtés des alliés jusqu’à la fin de la guerre. Dès juillet 1940 vont circuler des tracts clandestins, puis des petits journaux dont la diffusion sera forcément réduite. Rapidement, se constituent des chaînes d’évasion par l’Espagne pour rejoindre « la France Libre », ces chaînes servent aussi bien aux prisonnier de guerre Français évadés qu’aux aviateurs alliés tombés sur note sol. Mais le courage et les sacrifices de tous seraient restés relativement peu efficaces sans coordination de l’ensemble, c’est là que Jean Moulin notamment, va faire preuve d’autant de talent que de ténacité et d’audace, son intervention sera déterminante pour l’avenir. Le rôLe uniFicateur De Jean mouLin permettra à La résistance intérieure De Devenir « L’armée De L’ombre » si reDoutée De L’occupant Progressivement, sur place et sous l’impulsion d’individualités diverses mais toutes de grande valeur, vont naître des « mouvements de Résistance », dont certains prendront une ampleur considérable. Parmi ceux qui vont devenir particulièrement efficaces : → Henri Fresnay qui rédige le 15 août 1940 un manifeste très structuré qui sera l’acte de naissance du mouvement « Combat ». → Le Colonel Remy qui va constituer un remarquable réseau de renseignement avec des ramifications multiples : « la Confrérie Notre Dame ». D’astier De Lavigerie rejoint par les syndicalistes Lacoste et Pinaut qui vont former le mouvement « Libération ». → Marie-Madeleine Fourcade avec son réseau « Alliance » et ses extensions dont l’ensemble sera surnommé « l’Arche de Noé ». → « L’OCM » (Organisation Civile et Militaire), le mouvement « Franc-Tireur », le « CDLR » (Ceux De La Résistance), etc. Jean Moulin a fait son premier séjour à Londres fin 1941, De Gaulle a été très intéressé par le rapport qu’il lui a fait sur la situation en France. Le 1er janvier 1942, avant l’aube, Moulin (dit « REX ») est parachuté en France. Représentant le Général De Gaulle il a pour mission de réaliser l’unité d’action de tous les éléments résistants à l’ennemi. De plus, outre la préparation aux combats libérateurs, il va falloir prévoir l’organisation de l’avenir politique et économique d’une France, qui lorsqu’elle sera libérée, ne devra pas être administrée par les alliés comme certains en ont manifesté l’intention, mais par la République Française que veut rétablir De Gaulle. Il est impossible de citer tous les réseaux et mouvements tant ils ont été nombreux de plus, la plupart ont été hélas anéantis par la gestapo et la milice avant de prendre de l’ampleur, le courage ne suffisait pas devant l’ennemi, il fallait également beaucoup de chance ! L’organisation de la Résistance en France à également été faite par des étrangers, c’est le cas dès juillet 1940 des officiers Polonais démobilisés à Toulouse qui vont créer le réseau « F2 » qui adressera ses renseignements à Londres. En Grande-Bretagne, sous l’impulsion de Churchill, va se former le « SOE » (Spécial Opération Exécutive), dont le major Buckmaster dirigera la « French Section ». Ce réseau sera opérationnel sur la totalité du sol Français. Par la suite, les États-Unis vont également participer aux réseaux en créant « l’OSS » (Office Of Spécial Service). Le 27 mai 1943, Jean Moulin, après de nombreuses discussions clandestines, parfois difficiles, avec les responsables des grands mouvements, il obtient l’adhésion de tous et préside le premier Conseil national de la Résistance (C.N.R) qui proclame l’unité de la Résistance sous l’autorité du Général De Gaulle. La Résistance prend alors une autre dimension, les 3 grands mouvements (Combat, Libération et FrancTireur) se rassemble sous l’appellation de « Mouvements Unis de la Résistance ». Les « M.U.R » fusionnent leurs éléments paramilitaires en une « Armée Secrète)) (l’A. S), placé sous le commandement du Général Delestraint. 9 Ces DMR tiennent leur autorité directement de De Gaulle, ils vont transmettre les directives prises à Londres et veiller à leur application en France auprès des réseaux. Les moyens mis a la disposition des DMR par le BCRA sont importants : → Les opérations aériennes, atterrissage et parachutage (B.O.A. – Bureau des Opérations Aériennes – en Zone nord, S.A.P – Section d’Atterrissage et de Parachutage – en Zone sud) assurant les liaisons indispensables avec Londres pour le transit des agents importants, les sacs de courrier des services de renseignements, la réception d’armes, explosifs et d’émetteurs radio. Les avions « LYSANDER » et aussi quelques « HUDSON » sont tous fournis par la R.A.F. (Royal Air Force Britannique). → Les opérations maritimes, (rares car très dangereuses) sont pratiquées avec de petites embarcations ou de petits sous-marins s’approchant la nuit des côtes Françaises. → Les Instructeurs de sabotages (comme Jacques Nancy en Charente) formés à Londres pour mettre en place des groupes de sabotages en France. → Les opérateurs radio et leur matériel, (mission particulièrement dangereuses en raison du repérage par l’ennemi des ondes radio), mais indispensables afin d’envoyer les messages codés entre les différents réseaux et Londres. Les DMR doivent être les maîtres d’œuvre de la Résistance sur le sol Français, ils sont notamment chargés de mettre en place les plans élaborés à Londres afin de préparer l’action libératrice du jour J (6 juin 1944). Début 1944, « l’armée secrète » formera avec I’O.R.A (Organisation de Résistance de l’Armée) et les F.T.P.F. (Francs-Tireurs et Partisans Français, organisme créé à l’initiative du Parti Communiste Français) les F.F.I (Forces Françaises de l’Intérieur). Les Forces Françaises De L’intérieur (F.F.i.) En février 1943, une loi de VICHY institue le « S.T.O » (Service du Travail Obligatoire) avec le départ des appelés en Allemagne, beaucoup de jeunes refusant alors de s’expatrier pour travailler pour l’occupant refusent d’être requis et vont se cacher dans les bois (le maquis). On va les appeler les Réfractaires (car ils « refusent » le STO), ils vont donc se constituer en groupes et vont constituer ce que l’on va appeler les « Maquis », il va en exister sur tout le territoire plus particulièrement dans les régions boisées ou montagneuses qui se prêtent plus facilement à l’établissement de « cachettes » ou les maquisards pourrons se réfugier une fois leur « travail » accomplis. Très peu structurés au départ il vont se regrouper sous l’impulsion des DMR. Des armes et du matériel leur seront fourni par le BCRA et le BOA, puis seront ensuite directement parachutés sur leurs maquis par Londres. Dans certains maquis, en plus des armes et du matériel, sont parachutés des hommes spécialisés et entraînés, chargés d’encadrer les maquis ce sont les missions « JEDBURGH ». La guérilla, les actions commando, les sabotages vont se multiplier pour « harceler et démoraliser » l’ennemi. Commandées par le Général Koening elles sont le symbole de l’union de la « France Libre » et de la branche armée de la « Résistance Intérieure » : les Maquis. Les « maquisards » sont une poignée en 1941 et 1942, isolés les uns des autres, sans organisation et quasiment sans armes. 10 Certains maquis ont pris des proportions considérables en comptant plusieurs milliers d’hommes comme notamment le maquis du Vercors, cependant, la majorité des maquis, afin d’être insaisissables et efficaces, étaient divisés en groupe ou en bataillon. Au moment des combats de la libération des unités qui ont étés particulièrement bien formées et entraînées feront la preuve de leur efficacité toutes regroupées sous le commandement FFI. Durant 6 années de combats de toutes sortes, sur terre, sur mer, dans les airs, et aussi dans l’ombre de la clandestinité ; des millions de morts ont payé le prix terrible de la victoire et de la paix qui ont permis à la France de retrouver sa dignité et sa liberté le 8 mai 1945. Le 6 juin 1944, au moment du débarquement des armées alliées sur le sol Français en Normandie, tous les plans mis en place par les DMR ont fonctionnés comme prévu, l’exécution de ces plans et l’essor des maquis dont les effectifs ont considérablement grossi, ont retardé ou empêché les troupes Allemandes de se regrouper pour faire face au débarquement, de même qu’après le débarquement, ils ont œuvré pour la libération de nombreuses villes en France. Le Général Eisenhower, commandant en chef des forces alliées a d’ailleurs rendu hommage à l’ensemble de la Résistance Française. La nature très particulière de ce que fut « La Résistance » n’a pas permis de comptabiliser exactement ses effectifs, mais on sait que ses pertes ont été considérables (par exemple, sur 600 opérateurs radio clandestins, près de 400 sont morts), des chercheurs sérieux ont évalués a environ 200.000 le nombre de résistants engagés, actifs. Libération Le 21 Juin 1943 c’est la catastrophe de Caluire, Jean Moulin est arrêté par la Gestapo, torturé à mort… il ne parlera pas. Il est remplacé à la tête du CNR par Serreules, puis par Bidaut. À partir de septembre 1943, selon les décisions prises par Moulin et De Gaulle, des « Délégués Militaires régionaux » (D.M.R) vont être à leur tour envoyés en France. 11 Une vocation communautaire Les réseaux de résistance juifs Une résistance spécifiquement juive a existé, dès 1940 à travers onze réseaux, composés de plus de six cent membres près à risquer leur vie pour d’autres Juifs et la libération du sol français. Le livre « Organisation juive de combat, France 1940-1945 » recense tous ces réseaux et le parcours d’hommes et de femmes d’exception. Organisation juive de combat, France 1940-1945 (éditions Autrement, 2006) Présentation de l’Armée Juive (AJ), du Mouvement de jeunesse sioniste (MJS), de l’Oeuvre de Secours aux enfants (OSE)-Réseau George Garrel, du Comité Amelot, de la Sixième-Eclaireurs Israélites de France, du réseau Westerweel, des aumôniers, du réseau Marcel, du service André, du réseau SF-WIZO, service familial clandestin de placement d’enfants et de l’hôpital de la Fondation Rotschild. L’armée Juive (AJ-OJC) • Au lendemain de la défaite, le premier noyau de l'Armée juive fut élaboré à Toulouse sous le nom de "Main Forte" avec pour but la lutte contre les nazis et la création d'un Etat juif en Palestine. Les jeunes membres du groupe aidaient à ravitailler les détenus des camps d'internement situés dans la région de Toulouse. Ils tentaient de les faire évader de ces camps. • L'Armée juive (AJ) elle-même fut fondée en janvier 1942. Le recrutement de l'AJ s'effectuait par la méthode "un ami amène un ami", ce qui réduisait le danger de dénonciation au minimum. L'AJ élargit les cercles de ses membres et ses activités grâce à des accords de coopération avec le Mouvement de la Jeunesse Sioniste (MJS) et celui des Eclaireurs Israélites de France (EIF). L'AJ créa des unités dans certaines villes de France. Polonski, responsable • Dès la première moitié de 1943, l'AJ commença à mettre Abraham national de l’OJC © en place une filière de passage vers l'Espagne pour les CDJC/Mémorial de la Shoah jeunes qui souhaitaient rejoindre les forces alliées ou la Palestine. Au cours de l'automne 1943, l'AJ décida également de créer un maquis dans la région du Tarn. A la veille de la Libération, l'Armée juive prit le nom d'Organisation Juive de Combat (OJC) et fut reconnue officiellement David Knout et sa sœur à Tel-Aviv en mars 1950, deux comme unité des Forces Françaises de l'Intérieur. des fondateurs de l’AJ © CDJC/Mémorial de la Shoah Le Mouvement de Jeunesse sioniste (MJS) Cinq filles du groupe MJS aux environs de Grenoble à l’automne 1943 : Léa Spiber, Ruth Usrad, Erna Einhorn, Frida Wattenberg et Théa Epstein© CDJC/Mémorial de la Shoah • En France, avant la guerre, la Fédération sioniste regroupait un certain nombre de mouvements s'efforçant de propager le sionisme au sein de la jeunesse juive. Après la défaite de la France, on assista à l'émergence de cercles d'études à Toulouse, Limoges, Périgueux, Montpellier, etc. En mai 1942, se tint à Montpellier une réunion des délégués des différentes organisations de jeunesse sionistes où Il fut décidé que les responsables devaient poursuivre une activité sioniste intensive, tout en refusant de s'intégrer à l'UGIF. Le Mouvement de Jeunesse Sioniste, organisation clandestine est né. Il réunissait tous les jeunes sionistes de France, sans distinction d'appartenance politique ou idéologique, en insistant sur les éléments unificateurs : la Palestine, l'esprit pionnier et le travail productif. • A Montpellier, les dirigeants du MJS décidèrent d'être présents ans toutes les formes de lutte contre les nazis et 12 leurs collaborateurs : sauvetage des Juifs, jeunes et adultes, intensification de l'éducation sioniste, participation à la Résistance armée pour la libération de la France, et envoi de volontaires aux armées alliés. • En août 1942, pendant les grandes rafles en zone Sud, un service social commença à fonctionner, se préoccupant du sauvetage des jeunes, mais aussi de celui des adultes : on essayait de faire sortir des internés des camps de détention, de les cacher pour les soustraire aux griffes de la police française, de les munir de fausses pièces d'identité et de leur procurer aide sociale et morale. Avec le temps, cette activité de sauvetage fut appelée "Education physique ». Les membres du MJS en collaboration avec l'OSE, les EIF et l'AJ participèrent également aux activités de sauvetage par le passage d'enfants et d'adultes en Suisse. • Des membres du MJS partirent en groupes de l'AJ vers l’Espagne pour se joindre aux armées alliées. D'autres furent intégrés aux maquis et aux groupes de corps francs dans les villes et participèrent aux combats pour la libération de la France. L’OSE – Réseau George Garrel • L’œuvre de Secours aux Enfants fut fondée en 1912 par un groupe de médecins juifs afin d'améliorer l'état sanitaire de la population juive de l'empire tsariste. L'Union-OSE s'installa à Paris en 1923, où fut créée une branche française. Celle-ci se spécialisa dans la médecine infantile et l'action médico-sociale familiale. • A partir de début de la Seconde Guerre mondiale, l'action de l'OSEFrance s'étendit à toute la France, occupée et non-occupée. Cette action concernait le sauvetage des enfants juifs, mais revêtait aussi un caractère médico-social important destiné à aider les populations juives de la région parisienne, ainsi que celles réfugiées dans de nombreuses villes de province. En 1942, l'OSE gérait près de vingt homes et maisons qui accueillaient environ 1 600 enfants, la plupart libérés des camps de la zone sud : Gurs, Rivesaltes et Les Milles. • A partir de juillet-août 1942, les arrestations massives suivies des Georges Garrel, responsable premières déportations obligèrent l'OSE à concevoir une stratégie pour du réseau Garel, après la convaincre les parents à disperser les enfants, leur fabriquer de fausses guerre © CDJC/Mémorial de la identités, trouver des personnes et des institutions disposées à les Shoah cacher, tout en organisant des filières permettant de les transférer dans ces cachettes, ou de passer clandestinement les frontières. Cette expérience tragique convainquit le Dr Joseph Weill et Lazare Gurvic de créer différents réseaux. Le circuit créé par l'ingénieur Georges Garel, dit Gasquet, devait à partir de décembre 1942 choisir les institutions ou les familles d'accueil et maintenir les contacts avec les enfants cachés, afin de pouvoir les surveiller, régler les frais d'entretien, rassurer les familles encore joignables et retrouver les enfants à la fin de la guerre. Ce réseau, composé de volontaires en partie non-juifs, fonctionna jusqu'à l'automne 1944. • Mgr Salièges (cf document sur les Justes), archevêque de Toulouse, confia à Georges Garel des adresses d'institutions charitables, qui purent cacher rapidement 300 enfants. Le circuit Garel se développa ensuite sur plus de trente départements, avec l'appui d'une douzaine d'organisations catholiques, protestantes, et laïques, officielles ou privées, et permit de sauver plus de 1 260 enfants de l'arrestation ; seuls quatre enfants furent arrêtés. En revanche, sur une centaine de membres du circuit, près de trente furent assassinés ou déportés. Le Comité Amelot • Le 15 juin 1940, des responsables de divers courants de la Fédération des sociétés juives de France (FSJF), du Bund, du Poale Zion de gauche et du Poale Zion de droite décident d'unir leurs efforts pour secourir les Juifs émigrés et créer un comité dont le siège est fixé dans les locaux de la "Colonie scolaire" au 36 de la rue Amelot, d'où son nom de "comité de la rue Amelot" ou simplement "rue Amelot". • En septembre, David Rapoport - l'un des fondateurs de la "Colonie scolaire", dès 1925, au sein de la FSJF -, de retour à Paris, rejoint le comité, dont il devint très vite la cheville ouvrière. Par prudence, il exigea que la direction du comité reste ignorée du public et des autorités. C'est ainsi que sous l'étiquette de la Colonie scolaire et de son dispensaire, La Mère et l'Enfant, le comité Amelot 13 David Rapoport, président du comité de la rue Amelot © CDJC fonctionnant au grand jour put couvrir une activité clandestine, ce qui lui permit de devenir le principal recours pour les Juifs émigrés lorsque débutèrent les persécutions. • Après les rafles du 16 et 17 juillet 1942 dites du "Vel' d'Hiv", l'activité clandestine de la rue Amelot se trouva devant des problèmes à résoudre d'une urgence imprévue : continuer à aider les internés, secourir ceux qui avaient pu échapper aux rafles et devaient se cacher, leur trouver des filières de passage en zone Sud, s'occuper des enfants livrés à eux-mêmes après l'arrestation de leurs parents. L'ampleur de la tâche devait conduire les dirigeants de la rue Amelot à revenir sur leur refus antérieur d'accepter la carte de légitimation de Le personnel du comité de la rue Amelot et quelques membres du comité de la colonie l'UGIF. Ils la reçurent à leur corps défendant, ce qui leur scolaire quelques jours avant la grande rafle du permit de poursuivre leur oeuvre de sauvetage, mais ne le protégea ni des arrestations, ni de la déportation. Le comité Amelot subit de lourdes pertes. • A la fin de l'année 1942, un certain nombre de dirigeants du Comité dont Henry Bulawko furent arrêtés pour être déportés. Celui-ci revint des camps et devint président de l’Union des déportés d’Auschwitz. David Rapoport mourut d'épuisement à Buna-Monowitz le 2 juillet 1944. en Palestine. Un groupe d'environ 50 garçons et filles, âgés de quatorze à dixsept ans, furent hébergés à Loodsrecht. Leurs moniteurs, à peine plus âgés qu'eux (par exemple, Joachim Simon, alias Schouchou), assumèrent la direction et la formation des jeunes. Tous attendaient les "certificats" leur permettant de partir pour la Palestine. • En juillet 1942, lorsque les arrestations en masse des Juifs commencèrent en Hollande, ces pionniers furent d'abord internés dans le camp de Westerbork (le Drancy hollandais), avant d'être déportés dans les camps de la mort en Pologne et en Allemagne. Peu de temps avant la rafle de Loosdrecht, les moniteurs réussirent, en l'espace d'une seule journée, à cacher les 50 enfants munis de fausses cartes d'identité dans des familles hollandaises non juives. Joop Westerweel, Schouchou était entré en contact avec un enseignant non juif, Joop responsable du réseau associé à Westerweel, pacifiste courageux qui avait pris fait et cause pour défendre les néerlandais l’OJC © CDJC innocents persécutés. •. Grâce au réseau Westerweel, 150 jeunes gens environ ont pu franchir les frontières ; 80 furent conduits en Espagne en passant par les Pyrénées et 60 réussirent à passer en Palestine avant la fin de la guerre. Près de la moitié des jeunes de Loosdrecht survécurent à la guerre. Les aumôniers • Il s’agit de rabbins aumôniers proposés par le grand rabbinat de France et officiellement accrédités par les autorités de Vichy à pénétrer dans les camps de la zone Sud, plus exactement le Roussillon et le Sud-Ouest : Noé, Gurs, Le Récébédou, Le Vernet, Rivesaltes, Saint-Cyprien. Le rabbin René Kapel avait été affecté à ce secteur jusqu'au 31 janvier 1943 où, menacé d'arrestation, il dut fuir précipitamment vers Grenoble en plein accord avec son chef hiérarchique, le grand rabbin René Hirschler, aumônier général. Celui-ci assuma cette lourde charge durant près de La Sixième-Eclaireurs Israélites de France • Le scoutisme juif avait été intégré par l'UGIF à sa 4ème direction, dont il devenait la 6ème section. La Sixième présentait trois facettes : la zone Nord, la zone Sud et le maquis, la Résistance armée. La Sixième en zone Nord : Dans cette zone, le port de l'étoile jaune fut imposé dès juin 1942, et les nombreuses brimades infligées aux Juifs rendaient les tâches de sauvetage plus difficiles et plus dangereuses qu'en zone dite "non occupée". • La Sixième en zone Sud : Le 25 août 1942, Robert Gamzon (Castor) apprit qu'une grande rafle visant des Juifs étrangers de plus de seize ans entrés en France après 1936 aurait lieu le lendemain. Il chargea le quartier général des EIF à Moissac et le secrétariat général de répercuter cette information à tous les chefs éclaireurs et à toutes les fermes EIF. En Robert Gamzon, fondateur dépit de l'hospitalité accordée par de nombreux Juifs français qui des EIF, commandant de la Marc-Haguneau, hébergeaient des Juifs étrangers, de nombreuses arrestations eurent lieu. compagnie sous le nom de capitaine Il fallait aussi fournir de faux papiers à ceux qui s’étaient échappés. Lagnès © CDJC • La Sixième au maquis : Le passage à l'option militaire du réseau Sixième-EIF se déroula en deux phases. Le 16 décembre 1943, un groupe de huit cadres et jeunes agriculteurs du chantier de Lautrec forma un maquis dans une ferme abandonnée, La Malquière, dans les monts de Lacaune, à l'est de Vabre. Le 29 avril 1944, un groupe similaire, également venu de Lautrec, désormais fermé, créa lui aussi un maquis dans les ruines d'une ferme, Lacado, à 7 kilomètres de La Malquière. Le 11 juin, fort de 60 hommes, le maquis EIF prit le nom de compagnie Marc Haguenau, formée de trois pelotons. Le 6 septembre, elle s'embarqua en gare de Castres, participa aux combats de la libération de Nevers, puis fit sa jonction avec la 1ère armée de De Lattre. Elle rêvait d'aller libérer les Juifs détenus dans les camps allemands et prit part à la dure campagne des Vosges, de l'Alsace et de la traversée du Rhin. Les combattants de la compagnie MarcHague acclamés par la population à Elle perdit encore deux des siens sur les champs de bataille. Castres lors de la Libération © C'est avant qu'ils ne découvrent ce qui s'était passé dans les CDJC/Mémorial de la Shoah camps nazis. Le réseau Westerweel • En 1938 et 1939, plusieurs "transports d'enfants juifs" venus d'Allemagne et d'Autriche, ainsi que des réfugiés isolés, arrivèrent en Hollande. Une grande partie des jeunes engagés dans le mouvement sioniste rejoignit des harcharot (fermes-écoles) pour se former aux tâches agricoles 14 deux années, du 13 février 1942 au 23 décembre 1943, date de son arrestation à Marseille, suivie peu après de sa déportation. Le rabbin Henri Schilli prit la relève en janvier 1944, se partageant entre ses fidèles de Montpellier et le camp de Rivesaltes. • Les aumôniers avaient forgé une chaîne de solidarité pour obtenir des colis alimentaires, des faux papiers d'identité et surtout des lieux de refuge pour les internés libérés ou évadés. Ils avaient entre trente-cinq et quarante ans ; c'était une nouvelle génération de rabbins, sans rien de commun avec leurs aînés. Pour eux, les internés étaient tous les fils d'un même peuple, subissant le même destin tragique. L'aumônerie a été, en dépit de faibles moyens, un authentique bastion de Résistance. Le grand rabbin René Hirschler, avant sa déportation, durant une commémoration en plein air, devant des membres de l’Union nationale des combattants à Hartmannswillerkopf (Alsace), le 23 septembre 1934 © CDJC/Mémorial de la Shoah Le réseau Marcel • Le réseau Marcel fut créé début 1943 par Moussa Abadi et Odette Abadi. Tous deux rejoignent la Résistance à Nice et y trouvèrent la cause pour laquelle ils allaient risquer leur vie : le sauvetage des enfants juifs. Des Juifs de toute l'Europe, réfugiés à Nice, vivaient sous l'occupation italienne depuis novembre 1942. Les Italiens les protégeaient et interdisaient les déportations. Mais en septembre 1943, après l'armistice entre l'Italie et les Alliés, les Allemands envahirent les Alpes- Moussa Abadi (à droite sur la photo), dit M. Marcel, en compagnie du chanoine Rostan, à l’évêché de Maritimes et les réfugiés juifs furent pris au piège. Nice en 1945 © CDJC/Mémorial de la Shoah • Moussa Abadi convainquit Mgr Rémond, évêque de Nice de l'aider à sauver les enfants juifs. Il ouvrit les pensionnats catholiques du diocèse et nomma Moussa Abadi inspecteur de l'enseignement catholique du diocèse de Nice. Il mit à sa disposition un bureau à l'évêché. Dans ce bureau, Moussa Abadi, sous le nom de Monsieur Marcel, devint un spécialiste des "fausses vraies cartes d'identité" et des "fausses vraies cartes d'alimentation" : il en fabriqua plus de mille. Le réseau Marcel sauva la vie de 527 enfants. 15 Le service André • Bass dit Monsieur André, né en Biélorussie, fit la connaissance de Léon Poliakov, qui le présenta à Maurice Brener, directeur adjoint du Joint de France et membre de l'AJ. Après les rafles et les déportations massives de Juifs étrangers en zone Sud (août 1942), il fonda le Groupe d'action contre la déportation, plus connu sous le nom de Service André, et se consacra au sauvetage de Juifs. Au moment de l'occupation de la zone Sud par les Allemands (11 novembre 1942) et après une prise de contact avec le pasteur André Trocmé, Monsieur André mit sur pied une filière d'évasion vers le Chambon-sur-Lignon. Cette filière devait par la suite s'étendre à Aixen-Provence, Avignon, Orange, Nîmes, Nice et Cannes. • Fin juin 1943, Monsieur André crée un groupe de maquisards juifs sur le Plateau du Chambon, en relation avec Lucien Lublin de l'AJ. Ce groupe se prépare à rejoindre les FFI de Haute-Loire lorsque viendrait l'heure des combats de la Libération. Début mars 1944, Monsieur André fut arrêté par la Gestapo à Marseille à la suite d'une dénonciation, mais il parvint à s'évader tandis que d'autres camarades étaient capturés. Les "assistés" du Service André à Marseille et dans ses environs restèrent sans aide jusqu'à ce que les réseaux Sixième des EIF et Education Physique du MJS de Nice, les prennent en charge. Au mois d'août 1944, le groupe de maquisards de Monsieur André devenu le "capitaine André", prit une part active dans les combats pour la libération du Puy-en-Velay le 22 août. Joseph Bass dit Monsieur André (1944) © CDJC/Mémorial de la Shoah Le réseau SF-WIZO, service familial clandestin de placement d’enfants • « L'Union des Femmes Juives pour la Palestine », fut créée en 1924 en vue d'apporter un soutien aux institutions fondées en Palestine par la WIZO (Women’s International Zionist Organization- Organisation mondiale des femmes sionistes). Dix ans plus tard fut fondée à Paris un cercle féminin d'études juives et sionistes sous le nom de Kadimah. Sa fondatrice et présidente, Juliette Stern, accepte en 1935 de fusionner avec l'Union des Femmes Juives pour la Palestine qui prend le nom de Fédération Française de la WIZO. Des sections sont ensuite ouvertes à Lyon, Marseille et Amiens. • Lorsque dans Paris occupée furent dissoutes toutes les organisations juives, les autorités allemandes constituèrent le « Comité de coordination » chargé de contrôler toutes les activités juives autres que le culte. Juliette Stern fut nommée membre de ce Comité, devenu en 1942 l'UGIF dans l'ensemble de la France, et placée à la tête de la 5e Direction, responsable de l'assistance sociale. La 5e Direction de l'UGIF commença à œuvrer aussi dans la clandestinité. Elle gérait un bureau de placement familial, dit Service 42 dans le jargon administratif de l'UGIF. Désormais c'était la sécurité même d'enfants menacés d'arrestation et de déportation qu'il fallait assurer, mais cette fois à l'insu des autorités de contrôle. Juliette Stern fit accomplir cette tâche dans le plus grand secret par le Service 42B, plus connu sous le nom de code SF. • Sous la direction d'une équipe de militantes de la WIZO, plus de 1 000 enfants ont été pris en charge par le SF qui fut un véritable réseau de résistance au sein même de l'UGIF. L’hôpital de la Fondation Rotschild • Des négligences restées encore inexpliquées ont plongé dans l'oubli un réseau de Résistance né au sein même de l'Hôpital de la Fondation de Rothschild à Paris. Des détenus juifs tombés malades au Vel’ d'Hiv’ et au camp de Drancy avaient été transportés à la Fondation pour une brève hospitalisation, à la suite de laquelle des policiers, les transféraient à nouveau à Drancy en vue de leur déportation. Ces malades étaient groupés dans un pavillon barricadé d'une clôture de barbelés et gardés par des sentinelles de la police. Pourtant, Claire Heyman, assistante sociale juive travaillant sur place parvint à faire évader et placer les enfants et les nourrissons dans des communautés religieuses chrétiennes hors de Paris. • Les résistants de ce réseau étaient exposés aux soupçons de la police sur le lieu même de leur travail, voire à des dénonciations de certains de leurs propres collègues. Parmi les victimes des arrestations, on compte le Directeur de l'Hôpital, M. Halfon ou le médecin-chef, M. Zadoc-Kahn, mort en déportation. Source : CDJC/Mémorial de la Shoah 5 16 17 LES OPÉRATEURS RADIOS DE LA RÉSISTANCE MARIE CATHERINE VILLATOUX chargée De recherche au service historique De La DéFense Les premiers opérateurs radio sont recrutés à Londres, à l’initiative du BCRA comme du SOE. Dans leur grande majorité, ces hommes sont des radios de formation, issus des trois armées même si certains d’entre eux proviennent de la société civile. Le plus souvent parachutés sans personne pour les réceptionner, ils accompagnent un officier ou une équipe, mais peuvent aussi être déposés « au clair de lune » par de petits avions, des Lysander, ou plus rarement par des sous-marins. Leur mission est d’entrer en communication avec les « Centrales », situées en Angleterre, chargées de réceptionner les messages. La formation des premiers opérateurs envoyés en France est assurée par les britanniques. Il faut en moyenne trois à quatre mois pour former un « pianiste », les quelques personnels volontaires sans formation de base ayant pour la plupart une instruction plus poussée de près de six mois. Mais le recrutement des opérateurs devient très vite une cause de différend entre Français libres et Britanniques, ces derniers se refusant à travailler avec des agents qui n’ont pas suivi de formation dans leurs centres spécialisés. Ils estiment qu’un recrutement direct en France, comme le BCRA le préconise dès la fin 1941, présente des risques trop importants d’infiltration d’agents à la solde de l’Allemagne. Ce n’est qu’un an plus tard, en raison de pertes considérables (75 % des radios sont arrêtés au cours des années 1941 et 1942 et près de la moitié exécutés), que débute la formation d’opérateurs sur le territoire métropolitain. Ces derniers, contrairement à ceux issus du milieu militaire qui disposent de tous les papiers nécessaires à la clandestinité (fausses cartes d’identité, de travail d’alimentation, Ausweis de nuit pour pouvoir circuler…) ainsi que d’une solde qui leur est versée chaque mois par leur chef de secteur, sont tenus d’assurer par eux-mêmes leur subsistance. À la suite du débarquement allié en Afrique du Nord en 1942, la France libre s’attache à recruter et à former, dès début janvier 1943, à Alger, des personnels spécialisés dans les liaisons et les transmissions, afin de garantir une plus grande autonomie vis-à-vis des services britanniques. En juillet, une Centrale radio française se met en place ; elle sert également de centre de formation radio. « pianistes », tel est le nom de code utilisé dans la Résistance pour désigner les opérateurs radio qui assurent les communications entre la France occupée et Londres puis Alger. Leur aventure demeure encore souvent méconnue du grand public, car ces héros de l’ombre, formés à œuvrer dans la solitude, ont gardé le silence sur leurs activités. Pourtant dans leurs rangs, beaucoup son tombés. Les risques étaient grands et la répression féroce. Après la défaite de juin 1940, les britanniques ne disposent plus d’aucune information sur la France occupée. Toutefois, la création par Churchill, le 18 juillet, du Special Operations Executive (SOE), chargé d’organiser des actions de luttes clandestines en Europe et comprenant une section française, entraîne la mise en place de liaisons radio. Au printemps 1941, un rapprochement s’opère entre la « French section » du SOE et le service de renseignements de la France libre du général de Gaulle, le Bureau Central de Renseignements et d’Action (BCRA), dirigé par le colonel Passy, qui fournit à la Résistance intérieure des armes et du matériel de transmission. Ces deux organisations, qui entrent souvent en concurrence, regroupent ainsi tout un ensemble d’agents parmi lesquels des équipes d’opérateurs radio parachutés lors de missions de renseignement, de sabotage ou visant à la création de réseaux. 18 une mission à haut risque Toutefois, les terribles pertes que connaissent les opérateurs radio sur le terrain conduisent certains responsables locaux, comme Jean Fleury, à organiser un système baptisé « Electre », qui repose sur une méthodologie nouvelle assurant une plus grande sécurité aux personnels. Ce système s’appuie sur quelques principes de base : raccourcir les séances d’émission (pas plus de trente minutes), séparer les vacations de réception de celle d’une émission, permuter les fréquences au cours d’une émission ainsi que les indicatifs afin de rendre plus difficile la localisation du lieu d’émission. Finalement, à partir d’avril 1943, le système Electre est généralisé, avec l’accord du SOE, à la France entière tout en étant affiné, les opérateurs d’émission œuvrant le jour tandis que les opérateurs de réception travaillent de nuit. Cette réforme conduit le BCRA à donner un certain nombre de consignes et de directives aux radios, transmises sous forme de microfilms. Ces instructions ne sont cependant pas toujours strictement respectées du fait des difficultés de la vie clandestine. Toutefois, ces mesures de sécurité réduisent les pertes même si la moitié des opérateurs tombent encore entre les mains des allemands. Rouage essentiel au sein d’un réseau, l’opérateur radio en est également l’un des maillons les plus faibles dans la mesure où le simple fait d’émettre le rend immédiatement repérable par l’ennemi. Il met ainsi en danger les autres membres du réseau qui sont en contact avec lui, à la différence de l’opérateur qui se contente de recevoir une émission. Les règles de cloisonnement imposent donc d’isoler le « pianiste » autant que possible du reste du réseau. Il n’a de contact qu’avec l’équipe de protection qui assure sa surveillance et les agents de liaison qui lui apportent les messages chiffrés. Pour garantir la sécurité, il ignore le sens exact de ces derniers et ne peut donc en dévoiler le contenu en cas d’arrestation. Au cours des phases de vacation, le radio est totalement coupé du monde extérieur, avec un casque sur les oreilles et la main sur le manipulateur afin d’émettre ses signaux en morse. Il ne peut ni voir ni entendre arriver une personne extérieure. Aussi, a-t-il à ses côtés un « gardien » qui doit être en contact avec un guetteur qui surveille les environs. En outre, le pianiste ne doit jamais être armé ni transporter seul son matériel, bien que de telles pratiques n’aient pas toujours été aisées à respecter. Son gardien, bien souvent un agent de liaison, a également pour mission de trouver de nouveaux asiles, afin de rendre le repérage le plus difficile possible. Un certain nombre de critères préside au choix des lieux d’émission qui doivent être situés dans un endroit dégagé et éloignés d’une ligne à haute tension. Une possibilité de repli en cas de repérage de l’occupant doit systématiquement être envisagé. Ces endroits (fermes, sacristies d’églises, maisons de particuliers, greniers, granges…) peuvent servir de cache pour du matériel mais aussi constituer des lieux d’hébergement pour le radio, notamment s’il s’agit d’un agent venant de Londres ou d’Alger. Lorsque les radios sont issus du milieu local, il leur est, à l’inverse, plus facile de se fondre dans l’environnement. Les vacations s’effectuent essentiellement en ville dans la mesure où, outre le fait que le radio a besoin d’électricité pour opérer, les émissions en pleine campagne s’avèrent plus dangereuses, l’opérateur devant se déplacer avec son matériel, ce qui est contraire aux instructions du BCRA. Pour autant, les lieux d’émission ne sont pas forcément tous équipés d’une prise de courant mais ils doivent comporter nécessairement un éclairage, les opérateurs transportant avec eux « une douille voleuse » qui se branche directement sur l’emplacement de l’ampoule électrique. En cas de nécessité, le radio peut se brancher sur une ligne électrique au moyen de crochets plats reliés à un fil et suspendus à l’aide d’une canne à pêche. L’opérateur doit également installer une antenne de cuivre d’une vingtaine de mètres, facile à transporter et à dissimuler, placée dans une petite mallette et fixée en zigzag dans la pièce. Des procéDures rigoureuses Un des moments les plus délicats de la vie quotidienne du radio demeure le transport du matériel, assuré par des auxiliaires utilisant les moyens de convoyage les plus divers : autocar, bus, train mais surtout vélo ! Des femmes, agents de liaison, sont fréquemment désignées pour accomplir les missions de transport, déguisant au besoin du matériel en appareil médical (appareil de massage électrique) ou en fausse radio TSF. 19 L’instrument de base du pianiste est son émetteur radio. L’émetteur comme la réception se font dans des conditions de plus en plus rigoureuses à partir de l’été 1943. Ce sont les Centrales qui fixent les procédures par le biais d’un plan radio, document sous forme de micro-photos ou de feuilles tapées à la machine, parachuté avec l’appareil. Ce plan, que l’opérateur doit appliquer strictement, détermine les heures et les jours de vacation, les fréquence, les indicatifs ainsi que les clés de chiffrement pour une durée d’une quinzaine de jours. Les rendez-vous pour les quinze jours suivants sont, par la suite, fixés par la Centrale à l’opérateur. L’émission ne dure en moyenne que trente minutes, tandis qu’il ne faut pas plus d’une dizaine de minutes au radio pour mettre en place son appareillage. Le nombre d’émissions est variable : parfois deux ou trois dans une même journée, parfois aucune pendant plusieurs jours. Les Centrales recommandent par ailleurs de ne pas émettre plusieurs jours de suite à partir d’un même lieu et de laisser passer treize jours avant de reprendre ses activités sur un emplacement déjà utilisé. La réception, pour sa part, crée bien moins de difficultés dans la mesure où elle n’est pas repérable. L’opérateur demeure ainsi généralement sur un lieu unique et son plan de travail lui définit plusieurs heures d’écoute quotidiennes. Dès les premières émissions, à la fin de 1940, les opérateurs radio font l’objet d’une traque incessante de la part des autorités allemandes mais aussi vichystes, ce qui explique les lourdes pertes enregistrées au cours du conflit, et plus particulièrement dans les années 1941 et 1942. Au lendemain de l’armistice, un cadre législatif organise la recherche et l’arrestation des opérateurs et de tous ceux qui détiennent un émetteur-récepteur, en zone nord d’abord puis dans tout le territoire français après novembre 1942, date à laquelle la condamnation à mort est encourue. Un service spécial de la Gestapo est chargé de détecter les radios et de les arrêter : le repérage s’effectue en plusieurs étapes. Des stations de détection locales situées sur tout le territoire ont pour mission de repérer sur un écran toute émission située dans leur région. Elles contactent alors des centres de détection placées dans toute l’Europe, à grande distance du point d’émission, qui déterminent chacune l’azimut de l’émission par rapport à leur propre position. Trois centrales sont nécessaires pour obtenir une triangulation, qui, pour la France passe par les centres de Brest, Munich et Berlin. L’intersection des trois azimuts forme un triangle d’une vingtaine de kilomètres de côté délimitant la zone d’émission. Ce repérage, qui s’effectue en une trentaine de minutes au début du conflit, est réalisé en moins de cinq minutes dans les derniers mois de la guerre ! Dans un second temps, la détection locale est à nouveau mise à contribution, cette fois à l’aide de voitures gonio équipées de détecteurs sur la longueur d’onde repérée, à l’intérieur du triangle précédemment déterminé. La Gestapo accompagne dans d’autres véhicules les voitures gonio qui stationnent dans toutes les grandes villes. Afin d’accélérer la détection locale, les allemands coupent fréquemment le courant quartier par quartier afin de situer avec plus de précision le lieu d’émission. Il arrive même que des hommes munis de détecteurs de champ parcourent les rues avec un cadre gonio en forme de cintre sous leur vêtement, déterminant ainsi le lieu d’émission à partir de l’intensité de l’onde. Des proDiges De technicité Les progrès considérables accomplis dans le domaine des transmissions à partir de l’été 1943, fondés notamment sur l’adoption du système Electre, permettent fort heureusement de limiter considérablement les pertes, qui en juillet de l’année suivante, ne dépassent pas les 15 %. Cet effort s’appuie également sur une miniaturisation de plus en plus poussée des postes qui deviennent des prodiges de technicité et de solidité, la production standardisée, due au SOE, permettant d’équiper en plus grand nombre les réseaux. Dans le même temps, le trafic radio connaît une progression fulgurante : les communications multipliées par 100 entre 1943 et 1944, jouent un rôle déterminant dans l’information de l’état-major allié au cours du Débarquement et de la Libération. À cette date, la création de l’état-major des forces françaises de l’intérieur (FFI) met définitivement fin au dualisme entre les opérateurs travaillant pour le SOE et ceux rattachés au BCRA. 20 21 mée au papier scotch, il vous faudra de nouveau recourir à la lampe chauffante. Ensuite vous soulèverez lentement la bande avec le vaccinostyle sur toute la longueur, en partant du point de coupure, et vous la retirerez avec la pince à épiler. Et enfin vous referez tout en sens inverse. Vous remettrez les bandes de papier scotch en place avec leur propre colle, en suivant le repère de la ligne de fermeture de l’enveloppe où la colle n’a pas pénétré, et de part et d’autres, les deux lignes un peu plus sombres formées par les poussières accumulées pendant le transport. Vous étalerez la bande avec la règle lisse, pour éviter de la rayer. Vous réutiliserez la cire des cachets, rien ne se perd, que vous ramollirez un peu à la lampe chauffante si besoin est, et que vous reverserez avec minutie à l’endroit des cachets sur l’enveloppe. Et avec l’empreinte laissée sur le plâtre, vous scellerez de nouveau ce qui a été descellé. EXTRAITS – 4. Décacheter – MERCIER : Ça va. FRÉSURE : Du papier calque. MERCIER : Ça va. Et puis. FRÉSURE : Et puis un vaccinostyle. MERCIER: Un vaccinostyle. Qu’est-ce que c’est que ça. FRÉSURE : Une plume métallique plate et pas fendue. MERCIER : En plus du rasoir. FRÉSURE : Ne faites pas au rasoir ce qui doit être fait au vaccinostyle. MERCIER : Quoi d’autre. FRÉSURE : De quoi produire de la vapeur. MERCIER : Une casserole d’eau bouillante. FRÉSURE : Par exemple. Et encore une règle lisse. MERCIER : C’est tout ? FRÉSURE : Non. Une pince à mâchoire. MERCIER : Une pince à mâchoire ? FRÉSURE : Une pince à épiler. MERCIER : Et puis. FRÉSURE : Et puis enfin du plâtre mou. Le plâtre des dentistes. Mercier et Frésure. Dehors. MERCIER : Je ne me prends pas pour plus que je ne suis. Je pourrais continuer un bon bout de temps avec ce qu’on m’a confié. Sans que ça grippe. FRÉSURE : Mais. MERCIER : Il y a parfois moyen de faire beaucoup plus d’un seul coup. Quitte ou double. L’occasion d’accélérer les choses. En se mettant ailleurs qu’à sa place. FRÉSURE : Et. MERCIER : Je vois passer des enveloppes. Des piles. Avec des cachets. Officiels. Elles ne restent pas des jours et des nuits. Mais elles ne passent pas non plus sans s’arrêter. Et personne de chez nous ne les ouvre ? FRÉSURE : Seulement. MERCIER : Si je prends la liberté de les ouvrir je n’ai pas le pouvoir de les refermer sans qu’elles aient l’air d’avoir été ouvertes. Je ne vous dis pas comme elles sont scellées les enveloppes dont je vous parle. FRÉSURE : Et donc. MERCIER : Il me faut un conseil. FRÉSURE : Plus qu’un conseil. MERCIER : Une méthode. FRÉSURE : C’est toute une technique. Maquiller le papier c’est toute une technique. MERCIER : Dites-la moi cette technique. FRÉSURE : C’est bon je vous la dis. Il vous faudra des ustensiles. MERCIER : Lesquels. FRÉSURE : Des gants en caoutchouc. MERCIER : Et puis. FRÉSURE : Ou bien une feuille de papier opaque. MERCIER : Et puis. FRÉSURE : Une lame de rasoir. MERCIER : Ça va. FRÉSURE : De sûreté. MERCIER : De sûreté. Ça va. FRÉSURE : Une lampe chauffante. MERCIER : Combien de watts. FRÉSURE : Cent. MERCIER : Y en a. FRÉSURE : Une loupe. Mercier soupire. FRÉSURE : Vous vous ganterez de caoutchouc, ou au pire vous protégerez l’enveloppe en posant vos doigts sur le papier opaque, de façon à ne pas laisser d’empreinte. Vous vérifierez avec la loupe que les cachets sur l’enveloppe sont tous bien identiques. Vous reporterez exactement la position des cachets sur la feuille de papier calque. Vous gâcherez le plâtre mou et vous le déposerez sur la surface d’un des cachets, et s’ils sont tous différents tant pis pour vous, vous recommencerez autant de fois qu’il y a de cachets, bref. Si vous laissez déborder la moindre parcelle de plâtre sur l’enveloppe, autant vous mettre définitivement hors circuit. Quand le plâtre sera sec, vous le décollerez du cachet, qu’il aura moulé en creux. Vous passerez l’enveloppe sous la lampe chauffante de cent watts, qui fera fondre la cire des cachets. Une fois la cire amollie, vous la fendrez en croix avec le rasoir de sûreté et puis vous la garderez de côté. Vous pourrez ensuite ouvrir l’enveloppe, à la vapeur, en vous assurant qu’on n’y a glissé aucun témoin, un cheveu, un fil de soie. Mais si l’enveloppe a été fer- 22 – 24. contact – CLARISSE : Qu’est-ce qu’il fait ? VERNON : Rien. CLARISSE : Il nous observe. VERNON : Certainement. CLARISSE : Mais toi tu ne le regardes pas. VERNON : Non je ne dois pas le regarder. CLARISSE : Et moi non plus. VERNON : Si toi il faudrait que tu le regardes. CLARISSE : Vraiment ? VERNON : Il faudrait que tu le regardes une seconde et qu’il voie que tu le regardes. CLARISSE : Il faudrait que je sois sûre qu’il voie que je le regarde. VERNON : Ce serait bien. CLARISSE : Quand est-ce que je dois le regarder ? VERNON : Quand tu voudras mais il faudra que ce soit court. CLARISSE : Sans bouger. VERNON : Si tu peux. Silence. VERNON : Parle-moi sans arrêt. CLARISSE : Je vais essayer de le regarder. VERNON : Mais sans arrêter de me parler. CLARISSE : Je le fais. D’accord. D’accord. VERNON : Tu l’as regardé. CLARISSE : Oui. VERNON : Tu l’as vu. CLARISSE : Oui. VERNON : Et lui il t’a vue. CLARISSE : Je crois. VERNON : Tu as vu son visage. CLARISSE : Oui. VERNON : Et lui il a vu le tien. CLARISSE : Je crois. VERNON : Tu te souviendras de son visage. CLARISSE : Je crois. Vernon et Clarisse. Dehors. Plus loin derrière eux, Frésure. CLARISSE : Alors ? VERNON : Attends un peu. CLARISSE : Pourquoi est-ce qu’on s’arrête ici ? VERNON : On va se séparer ici mais pas tout de suite. CLARISSE : Je dois faire quelque chose ? VERNON : Non rien on va se parler un peu. CLARISSE : Je t’écoute. VERNON : Oui oui tu vas m’écouter et tu vas me regarder. CLARISSE : C’est ce que je fais. VERNON : C’est ça. C’est bien. CLARISSE : C’est tout ? VERNON : Oui seulement il faut continuer il ne faut pas qu’il y ait de rupture. CLARISSE : Tu me parles et je te réponds on continue comme ça. VERNON : Voilà et tu peux me relancer si tu veux. CLARISSE : Mais je ne sais pas je préfère, je préfère que ce soit toi. VERNON : Comme tu veux ce n’est pas grave ça n’a pas d’importance. CLARISSE : J’aime mieux. VERNON : Il y a quelqu’un derrière nous. CLARISSE : Où ? VERNON : Derrière nous à quelques mètres de nous. CLARISSE : Il est avec nous ? VERNON : Tu le vois ? CLARISSE : Non. Oui. Ça y est. Il est avec nous ? VERNON : Non. CLARISSE : Il est contre nous. VERNON : Non. CLARISSE : Tu le connais ? VERNON : Non. 23 DAVID LESCOT En 2011, il créé 33 Tours, rencontre avec le danseurchorégraphe congolais DeLaVallet Bidiefono sur le thème du combat, dans le cadre des Sujets à Vif SACD/Festival d’Avignon. Ce spectacle est repris à Mettre en Scène en 2011, puis au Théâtre des Abbesses en 2012 sous une forme complétée : il devient 45 Tours. Il met également en scène de l’opéra de Stravinsky The Rake’s Progress à l’Opéra de Lille. En 2012, il créé Le Système de Ponzi, oratorio pour 10 comédiens musiciens racontant l’histoire de Charles Ponzi, ancêtre de Bernard Madoff. Le spectacle est créé en janvier 2012 au CDN de Limoges, puis présenté au Théâtre des Abbesses, au Théâtre national de Strasbourg, et en tournée en France. Ses pièces sont publiées aux Éditions Actes SudPapiers, elles sont traduites publiées et jouées en différentes langues (anglais, allemand, portugais, roumain, polonais, italien, espagnol, russe). Auteur, metteur en scène et musicien. Son écriture comme son travail scénique cherchent à mêler au théâtre des formes non-dramatiques, en particulier la musique. Il met en scène ses pièces Les Conspirateurs (1999, TILF), L’Association (2002, Aquarium) et L’Amélioration (2004, Rond-Point). En 2003, Anne Torrès crée sa pièce Mariage à la MC93-Bobigny, avec Anne Alvaro et Agoumi. Sa pièce Un Homme en faillite qu’il met en scène à la Comédie de Reims et au Théâtre de la Ville à Paris en 2007, obtient le Prix du Syndicat national de la critique de la meilleure création en langue française. L’année suivante, la SACD lui décerne le prix Nouveau Talent Théâtre. David Lescot est artiste associé au théâtre de la Ville. Il y met en scène L’Européenne, dont le texte obtient le Grand Prix de littérature dramatique en 2008, et qui tourne en France et en Italie en 2009 et 2010. C’est en 2008 qu’il crée La Commission centrale de l’enfance, récit parlé, chanté, scandé des colonies de vacances créées par les juifs communistes en France, qu’il interprète seul accompagné d’une guitare électrique tchécoslovaque de 1964. Le spectacle débute à la Maison de la Poésie à Paris, puis est au Théâtre de la Ville en 2009, et en tournée en France et à l’étranger (Argentine, Espagne, Italie, Russie, République tchèque, Uruguay…) durant quatre saisons. David Lescot remporte pour ce spectacle en 2009 le Molière de la révélation théâtrale. En 2010 est repris au Théâtre de la Ville L’Instrument à pression, concert théâtral dont il est auteur et interprète aux côtés de Médéric Collignon, Jacques Bonnaffé, Odja Llorca, Philippe Gleizes, dans une mise en scène de Véronique Bellegarde. au théâtre De La viLLe 2007 2009 2010 2012 2012 un homme en faillite L’européenne & La commission centrale de l’enfance L’instrument à pression Le système de ponzi (janvier) Les Jeunes (dans le cadre du Parcours { enfance & jeunesse }) quarante-cinq tours (novembre) 24 25 ÉQUIPE ARTISTIQUE SCALI DELPEYRAT DAMIEN MARIE scali Delpeyrat est diplômé du Conservatoire national supérieur d’Art Dramatique, Au théâtre, Scali Delpeyrat a joué sous la direction de Bernard Sobel (La Mère de Bertold Brecht), Nabil El Hazan (Le Poisson volant de Lionel Prével), Jacques Kraemer (Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux et L’Eveil des ténèbres de Joseph Danan), Brigitte Jaques (La Place royale de Corneille et Angels in America de Tony Kushner), Philippe Adrien (La Tranche de Jean-Daniel Magnin et Hamlet de Shakespeare), Jean-Louis Thamin (Hélène de Jean Andureau), Arlette Teffany (L’Illusion comique de Corneille), Léa Fazer (Les Fils de Noë et Porte de Montreuil de Léa Fazer), Marcel Bozonnet (Antigone de Sophocle), Denis Podalydès (Tout mon possible d’Emmanuel Bourdieu), Arnaud Churin (Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthe) et David Lescot (Le Système de Ponzi, L’Amélioration, Un homme en faillite et L’Européenne de David Lescot). Il a notamment tourné dans les films de Bruno Podalydès, Laurence Ferreira Barbosa, Emmanuel Bourdieu, Agnès Jaoui, Valérie Mrejen, Éric Forestier, Léa Fazer, Jeffrey Nachmanoff, Henri-Alex Rubin ou encore Sofia Coppola. Il est l’auteur de « Dance is a dirty job… », texte lauréat du Prix du Public Danse élargie 2010 et programmé aux Théâtre de la Ville/Les Abbesses en septembre 2011. DOMPNIER marie Dompnier commence sa formation au Conservatoire d’art dramatique du Ve arrondissement de Paris et intègre la Compagnie Artéria en résidence au Théâtre du Soleil jusqu’en 2004. En 2007, elle sort de l’École régionale d’acteurs de Cannes (ERAC) au sein de laquelle elle a joué notamment dans Une Orestie d’Eschyle mis en scène par Jean-Pierre Vincent et Troilus et Cressida mise en scène d’Anne Alvaro et David Lescot. Depuis elle a joué dans La Cerisaie mis en scène par Didier Carette, La Seconde surprise de l’amour mis en scène par Alexandra Tobelaim, Le Système de Ponzi (2011) et L’Européenne (2009) écrit et mis en scène par David Lescot, Eric Von Stroheim mis en scène par Renaud Marie Leblanc en 2010 et Robert Plankett par le collectif La Vie est Brève également en 2010. Au cinéma elle joue dans No Comment ! de Pierre Henri Salfati. NORAH KRIEF norah Krief est une actrice emblématique du Ballatum Théâtre avec lequel elle a joué entre autres dans Ivanov et Les Trois Sœurs de Tchékhov, La Double Inconstance de Marivaux, elle continue avec Éric Lacascade dans Phèdre ou de l’amour, Les Sonnets de Shakespeare (où elle chante), La Tête ailleurs (chansons de François Morel), Hedda Gabler d’Ibsen et Tartuffe de Molière. Elle travaille également avec Yann-Joël Collin, Homme pour homme de Brecht et Henri IV ; Valère Novarina, Le Vrai Sang, Jean-François Sivadier, Italienne avec Orchestre, La Folle journée ou le Mariage de Figaro de Beaumarchais, Italienne Scène et Orchestre, Le Roi Lear de Shakespeare, La Dame de Chez Maxim de Feydeau, Le Misanthrope de Molière et David Lescot Une Homme en faillite. Elle reçoit le Molière de la meilleure comédienne dans un second rôle pour Hedda Gabler en 2005, puis elle est de nouveau nommée à deux reprises pour Le Roi Lear en 2008 et La Dame de chez Maxim en 2011. 26 LEHMAN de Racine, Le Brave Soldat Schweyk de Bertolt Brecht et Une maison de poupée de Henrik Ibsen, avec François Périer dans Le Tube de Françoise Dorin, Pierre Roman dans L’Illusion comique de Pierre Corneille, Aurélien Recoing dans La Vallée de l’ombre de la mort de Judith Gershman, Dominique Féret dans Les Attentions particulières mise en scène de l’auteur, Robert Girones dans Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux, Jean-Pierre Vincent dans Le Suicide de Nicolaï Erdman et Woyzeck de Georg Büchner, Antoine Vitez dans Lucrèce Borgia de Victor Hugo, Sophie Loucachevsky dans Madame de Sade de Yukio Mishima et La Petite planète de Georges Perec, Anne Torres dans Un peu de temps à l’état pur de Jean Magnan, Philippe Adrien dans Les Pragmatistes de Stanislaw Witkiewicz et La Vénus à la fourrure de Leopold von Sacher-Masoch, André Engel dans La Nuit des chasseurs d’après Woyzech de Georg Büchner, Michel Deutsch dans Sit venia verbo mise en scène de l’auteur, Bruno Bayen dans Torquato Tasso de Johann Wolfgang von Goethe, Walter Le Moli dans la création collective intitulée Basta per oggi, Lluis Pasqual dans Sans titre de Federico Garcia Lorca, Philippe Berling dans Agesilan de colchos de Jean de Rotrou, Michel Didym dans Lisbeth est complètement pétée d’Armando Llamas, Bérangère Bonvoisin dans Le Gendarme est sans pitié de Georges Courteline, Pascal Rambert dans Antoine et Cléopâtre de William Shakespeare, Éric Vignier dans L’Illusion comique de Pierre Corneille, Charles Tordjman dans Le Misanthrope de Molière, Laurent Pelly dans Vie et mort du Roi Jean de William Shakespeare, Daniel Martin et Charles Tordjman dans Bastringue à la Gaieté Théâtre de Karl Valentin, Gérard Watkins dans Dans la forêt lointaine mise en scène de l’auteur, Ged Marlon dans Un simple froncement de sourcil mise en scène de l’auteur, Lukas Hemleb dans Titus Andronicus de William Shakespeare, Sandrine Lanno dans Matériau chimère de Didier-Georges Gabily, Marcial Di Fonzo Bo et Élise Vigier dans Le Cycle de l’homme de Jacques Rebotier et La Estupidez de Rafael Spregelburd. Il joue également dans Xu, objet bien rangé mais où ? et Oxu, objet qu’on vient de retrouver et qu’on reperd aussitôt qu’il met en scène avec Christine Murillo et Jean-Claude Leguay. Au cinéma, il a joué sous la direction de Éric Rochant, Manoel de Oliveira, Claude Berri dans Orso Miret, Agnès Jaoui, Robert Guédiguian, Éric Lartigau, Thierry Klifa, Olivier Doran, Anne Le Ny, Arnaud des Pallières, Patricia Plattner, Olivier Nakache et Éric Toledano, Nicolas Brossette. Grégoire Oestermann a également écrit Le Baleinié, dictionnaire des tracas en 3 volumes avec Christine Murillo et Jean-Claude Leguay. Pianiste, chef de chant et compositeur, diplômé du CNSM (direction de chant) où il enseigne le répertoire lyrique. Son activité de chef de chant s’est ensuite développée auprès de chefs d’orchestre et de metteurs en scène tels que Guy Coutance, Petrika Ionesco, Lukas Hemleb, Mireille Laroche, Jean-Claude Fall, Caïo Gaiarsa, Jean Jourdheuil. Il collabore régulièrement avec le Théatre du Châtelet. Il poursuit également une activité de concertiste, et se produit régulièrement en soliste, musique de chambre, ou duo piano-chant (avec Nathalie Manfrino, Delphine Haidant, Magali Léger, Jacques-Greg Belobo…), en France et à l’étranger. Passionné par les rapports entre la musique et le texte, Damien Lehman participe à de nombreuses créations théâtrales, dans lesquelles il sélectionne, agence et interprète la partie musicale. Sur des spectacles comme viktor vavitch (Boris Jitkov), mon pouchkine (Marina Tsvetaïeva), Les derniers jours de l’humanité (Karl Kraus), Un pied dans le crime (Eugène Labiche)… il collabore avec Anne Alvaro, David Lescot, Antonia Bosco, Guy Freix, Denis Podalydès, Jean-Louis Benoît, Philippe Torreton, Dominique Pinon… Damien Lehman compose depuis l’âge de quinze ans. Si le piano domine dans sa production, il écrit aussi des pièces pour formation de chambre, et pour la voix. Sa Fugue III est crée par Bertrand Chamayou au festival Les journée Phénix (Jean-François Zygel). Toujours en quête de lier la musique à d’autres formes d’expression, il compose et interprète la bande originale du film Grossesse nerveuse de Maxime Sassier. GRÉGOIRE OESTERMANN grégoire oestermann suit une formation au Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris. Il travaille avec Jean-Louis Martinelli dans Britannicus 27 MILLIATBAUMGARTNER ALWYNE CÉLINE DE DARDEL scénographe alwyne de Dardel est depuis 1987, responsable de l’Atelier Décoration du Théâtre des Amandiers. En tant que scénographe, Alwyne de Dardel a travaillé avec David Lescot (L’Association, 2002, L’Amélioration, 2004 - un homme en faillite, 2007 - L’Européenne, 2009 - Le Rake’s Progress, 2011 - Le Système de Ponzi, 2012), Anne Torrès (Le Prince de Machiavel, 2001, Lucrèce Borgia de Victor Hugo, 2000), Ingrid von Wantoch Rekowski (La Chose effroyable dans l’oreille de V, 1999), Jean-Pierre Vincent (Pièces de guerre d’Edward Bond, 1999), Olivier Besson (À quoi rêvons-nous la nuit ?, 1998), Noël Casale (Le Pont de Brooklyn, 1995) et Michèle Sigal. Elle a été formée au Cours Florent et travaille depuis au théâtre avec David Lescot (Le Système de Ponzi en 2011), Laurent Brethomme (Les Souffrances de Job en 2010, Striptease en 2009), Jean-Michel Rabeux (Barbe Bleue en 2010-2011, Le Songe d’une nuit d’été en 2007, L’Homosexuel de Copi en 2001), Thierry de Peretti (Richard II en 2004, Valparaiso en 2003), Frederic Maragnani (Le Cas Blanche-Neige de Howard Barker en 2005), Wissam Arbach (Le Château de Cene de Bernard Noël en 2004), Jean Maqueron (L’Androcée de Christian Siméon en 2002) ou encore Monique Espina (La compagnie des spectres de Lydie Salvayre en 2002). Elle travaille également pour le cinéma avec les réalisateurs Eduardo de Gregorio et Irène Jouannet et à la télévision. SYLVETTE DEQUEST costumière Pour le théâtre, elle a créé les costumes des mises en scènes de Julie Brochen: Graal Théâtre: Merlin l’enchanteur de F. Delay et J. Roubaud, La Cagnotte de Labiche, Penthésilée de Kleist, Le Décaméron des femmes de Julia Voznesenskaya, Brecht Ici et Maintenant, Die Lustingen Nibelungen d’Oscar Straus, Père de Strindberg, La Petite Renarde rusée, opéra de Janacek, Oncle Vania de Tchekhov et Le Cadavre vivant de Tolstoï, Je ris de me voir si belle ou solos au pluriel de Charles Gounod et Franck Krawczyk et, récemment, L’Histoire vraie de la Périchole au Festival International d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence. Elle travaille régulièrement avec David Lescot : Le Système de Ponzi, Un Homme en faillite, L’Européenne, le Rake’s Progress de Stravinsky Elle a également conçu les costumes de Hortense a dit « j’m’en fous » de Feydeau mis en scène par Pierre Diot, de Terres Promises de Roland Fichet mis en scène par Philippe Lanton, Drame en 1799 de Hervé mis en scène par J.-C. Feugnet, et récemment de Femme… Femmes… d’Hélène Delavault mis en espace par Jean-Claude Gallotta. Au cinéma, elle travaille avec Roy Lekus et Françoise Jolivet avec Tremblez Tyrans, d’apres l’enfance de Stendhal. 28 29 ATELIERS ATELIERS D’ÉCRITURES → théâtre De La viLLe LES 17 & 24 MAI DE 10 H À 13 H David Lescot, en tant qu’auteur associé au Théâtre de la Ville, animera des ateliers d’écriture composés de spectateurs relais. L’ART DU RÉCIT → paLais De toKyo LES 18 & 25 JUIN 19 H 30 paLais DécaLés/visites aLternatives i tariF 2 € en pLus Du biLLet D’entrée Durée 1 h 30 David Lescot sera l’invité du Palais de Tokyo, dans le cadre des visites guidées « Palais décalés », à partir de l’exposition « L’état du ciel », les 18 et 25 juin 2014. Les visiteurs sont entraînés vers une approche quelque peu inattendue, et parfois théâtralisée. Ces visites, en présence parfois d’un invité, permettent de faire découvrir les expositions de manière alternative et sur un ton différent. David Lescot, en compagnie d’un médiateur culturel, usera des mots et du regard scénique pour décrypter ou brouiller les différentes mises en scène que peuvent nous donner à voir les œuvres de cette saison. 30