Médecine
& enfance
décembre 2012
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hétérogène d’anomalies osseuses rares
et héréditaires, caractérisées par une
augmentation de la masse osseuse à la
radiographie et dues à un dysfonction-
nement des ostéoblastes ou des ostéo-
clastes. Les formes sévères se compli-
quent d’une diminution des cavités mé-
dullaires intra-osseuses, qui provoque
une aplasie médullaire progressive. En
outre, ces maladies se manifestent par
une fragilité de la trame osseuse, avec
risque fracturaire élevé, et par une hy-
perostose de la voûte crânienne pouvant
entraîner un rétrécissement de la base
du crâne (avec risque d’hypertension in-
tracrânienne) et une compression des
nerfs crâniens (risque de cécité et/ou de
surdité). Dans les formes sévères liées à
un dysfonctionnement ostéoclastique, la
greffe de cellules souches hématopoïé-
tiques (dont sont dérivés les ostéo-
clastes) permet de guérir la maladie
avec reprise de la formation d’une trame
osseuse normale. Dans ce cas, cette gref-
fe (quand elle est indiquée par la sévéri-
té de la maladie) doit être réalisée à un
jeune âge, avant que n’apparaissent les
complications neurologiques et senso-
rielles définitives. Les ostéoblastes
n’étant pas dérivés des cellules souches
hématopoïétiques, la greffe de moelle
osseuse est par contre inefficace pour
traiter les formes d’ostéopétrose liées à
un dysfonctionnement ostéoblastique.
LE CHOIX DU DONNEUR
Rappelons que le système HLA est prin-
cipalement composé :
첸
des molécules HLA de classe I (no-
tamment les locus HLA-A, HLA-B, HLA-
C), présentes à la surface de toutes les
cellules de l’organisme (à l’exception
des globules rouges) ;
첸
des molécules HLA de classe II (no-
tamment HLA-DP, HLA-DQ, HLA-DR),
présentes à la surface des cellules pré-
sentatrices d’antigènes.
Le système immunitaire utilise les molé-
cules HLA pour différencier notamment
les cellules du « soi » de celles du « non
soi ». Toute cellule comportant des dif-
férences au niveau du système HLA sera
donc reconnue comme étant du « non-
soi » et entraînera une réponse du systè-
me immunitaire visant à son élimina-
tion.
Dans une greffe de moelle osseuse, le
donneur « idéal » est donc un frère ou
une sœur HLA-identique au malade
(greffe dite « géno-identique »). En cas
de nécessité de réaliser une greffe et en
l’absence d’un tel donneur « idéal », on
peut dans certains cas avoir recours à un
donneur volontaire non apparenté iden-
tique pour les molécules HLA-A, B, C, DR
et DQ. On parle alors de greffe « phéno-
identique ». Néanmoins, ces greffes ex-
posent à plus de complications que celles
réalisées à partir d’un donneur apparen-
té HLA-identique. Dans l’exemple des
déficits immunitaires combinés sévères,
les greffes de cellules souches hémato-
poïétiques permettent de guérir plus de
70 % des enfants lorsqu’elles sont réali-
sées à partir d’un donneur HLA-iden-
tique, mais plus de 90 % des enfants
lorsque ce donneur est apparenté.
Enfin, dans certaines pathologies poten-
tiellement létales à court terme et en
l’absence de donneur HLA-identique, il
est parfois proposé de réaliser une greffe
à partir d’un des parents de l’enfant,
tous deux à moitié identiques dans le
système HLA (greffe dite « haplo-iden-
tique»). Ces greffes nécessitent souvent
une chimiothérapie plus intensive pour
limiter le risque de rejet et sont suivies
d’un risque très important de complica-
tions immunologiques et infectieuses,
pouvant entraîner un décès dans plus de
50 % des cas pour les enfants atteints de
déficits immunitaires constitutionnels.
LES SOURCES
DE CELLULES SOUCHES
Les cellules souches hématopoïétiques
nécessaires à la greffe sont générale-
ment isolées à partir d’un prélèvement
de moelle osseuse réalisé sous anesthé-
sie générale. Elles peuvent également
être issues :
첸
d’un prélèvement de sang périphé-
rique. Dans ce cas, on réalise une « sti-
mulation » de la moelle osseuse du don-
neur par des injections quotidiennes
sous-cutanées de facteur de croissance
granulocytaire (GCSF) pendant quel -
ques jours. Puis le contingent de cel-
lules souches passées dans la circulation
sanguine est recueilli par cytaphérèse,
selon une technique basée sur le même
principe que le don de plaquettes.
L’avantage de cette procédure est de
pouvoir éviter le recours à une anesthé-
sie générale ;
첸
de sang placentaire (« sang de cor-
don »). Celui-ci contient en effet une
concentration importante de cellules
souches hématopoïétiques. Il peut être
prélevé directement sur le cordon ombi-
lical après la naissance d’un enfant, puis
conservé sous forme congelée sans limi-
te de temps en vue de la réalisation
d’une greffe ultérieure. Dans une famil-
le où un enfant présente une pathologie
nécessitant une greffe de cellules
souches hématopoïétiques, il est donc
possible de conserver le sang placentai-
re lors de l’accouchement d’un nouveau
bébé dans sa fratrie. D’autre part, il est
proposé aux femmes enceintes accou-
chant dans certaines maternités de faire
don de façon anonyme du sang placen-
taire de leur bébé (1).
Actuellement, on recense environ
15 millions de donneurs volontaires de
moelle osseuse dans le monde. La ré-
partition géographique de ces donneurs
est très hétérogène, avec notamment
une représentation prédominante de
donneurs de nationalité allemande
(32/100000) (2).
LA GREFFE EN PRATIQUE
La greffe de moelle osseuse est toujours
précédée d’un « conditionnement», des-
tiné d’une part à détruire les cellules tu-
morales en cas de leucémie, d’autre part
à prévenir le rejet de la greffe en détrui-
sant les cellules du système immunitaire
du receveur. Aujourd’hui, ce condition-
nement est réalisé le plus souvent par
chimiothérapie et/ou immunothérapie
(la radiothérapie corporelle totale n’a
actuellement que des indications très
restreintes), en réduisant le plus pos-
sible les doses pour en limiter les effets
secondaires. Après ce conditionnement
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