Éditorial Nos années “RAS” sauvages Our wild “RAS” years L’ année 2013 a été riche en actualité pour les biomarqueurs en oncologie, avec la confirmation de nouveaux tests théranostiques en oncologie colorectale pour la famille RAS. En 2006, la découverte de l’impact des mutations de KRAS sur l’action des anticorps anti-EGFR avait permis d’améliorer considérablement la prise en charge des patients atteints d’un cancer colorectal métastatique (CCRm). Plusieurs études rétrospectives ou prospectives ont contribué à l’optimisation de la recherche des mutations potentiellement délétères en cas de traitement par anti-EGFR. Lors de l’ASCO® 2013, ont été présentées les analyses moléculaires de l’étude de phase III PRIME, qui a évalué, chez des malades en première ligne de traitement, un schéma FOLFOX4 associé ou non au panitumumab. L’analyse des mutations RAS – mutations classiques, sur KRAS, des exons 2 (codons 12 et 13), mais aussi, plus rarement, 3 (codon 61) et 4 (codon 146), et, sur NRAS, des exons 2 (codons 12 et 13), 3 (codons 59 et 64) et 4 (codons 117 et 146) – a pu être réalisée chez 90 % des patients de l’étude. Cette analyse fait passer 17 % des patients d’un statut RAS sauvage à un statut mutant. Dans le sous-groupe des patients reclassés RAS sauvage, les résultats obtenus avec le panitumumab sont nettement meilleurs, en particulier pour la survie globale. On observe même un effet délétère du traitement par panitumumab et FOLFOX4 chez les patients porteurs de mutations RAS qui reste à expliquer. La prescription du panitumumab en première ligne thérapeutique devrait donc être réservée au groupe de patients RAS sauvage. L’ajout de la détection de ces mutations supplémentaires de KRAS ou des mutations de NRAS aux mutations habituellement recherchées pour KRAS devient le nouveau standard pour les patients atteints de CCRm traités avec du panitumumab. On attendait les mêmes évaluations pour le cétuximab ; elles furent présentées à l’ESMO 2013 par S. Stintzing et al. L’étude FIRE 3 (LBA 3506), comparant en première ligne un anti-EGFR, le cétuximab, à un anti-VEGF, le bévacizumab, en association avec le FOLFIRI chez des patients ayant un CCRm KRAS sauvage, montre également un plus grand bénéfice du cétuximab dans le groupe RAS sauvage en termes de survie globale. Suite aux avis positifs du Comité européen des médicaments à usage humain (CHMP), 1 nouvelle AMM conditionnelle a été entérinée, le 25 juillet 2013, pour le vectibix et, pour le cétuximab, c’est imminent. Les plateformes chargées de l’analyse des mutations RAS dans les cancers colorectaux sont en train de s’adapter à ces nouvelles données. L’implémentation de ces nouveaux tests théranostiques a été ralentie par ce niveau de complexité supplémentaire entraînant un surcroît de travail et des coûts plus élevés. Une fois de plus, l’organisation mise en place en France par l’Institut national du cancer (INCa), avec les plateformes de diagnostic moléculaire du cancer, est saluée et enviée par nos collègues étrangers. Les plateformes de biologie moléculaire chargées de l’analyse des mutations RAS sont en train de s’adapter à ces nouvelles données. L’identification de groupes de patients plus sensibles aux traitements est un progrès réel, non seulement médical – être plus efficace, être moins délétère –, mais aussi médico-économique. La multiplication des tests va rendre indispensable la mise en place en routine du séquençage nouvelle génération (NGS), un tournant important que l’INCa va accompagner. Frédérique Penault-Llorca, Rédactrice en chef, Centre Jean-Perrin, Clermont-Ferrand L’auteur déclare avoir des liens d’intérêts avec Boehringer, GSK et Roche. 156 P o u r e n s avo i r p l u s . . . • Douillard JY, Oliner KS, Siena S et al. Panitumumab-FOLFOX4 treatment and RAS mutations in colorectal cancer. N Engl J Med 2013;369(11):1023-34. Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. II - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2013