Antiangiogéniques et radiothérapie DOSSIER THÉMATIQUE Antiangiogenics and radiation therapy

536 | La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 9 - novembre 2010
DOSSIER THÉMATIQUE
Antiangiogéniques
Antiangiogéniques
et radiothérapie
Antiangiogenics and radiation therapy
C. Chira*, Y.D. Kirova*, M.A.Bollet*, A. Toledano**
* Département de radiothérapie,
Institut Curie, Paris.
** Département de radiothérapie,
clinique Hartmann, Neuilly-sur-
Seine.
Rappel sur les liens
possibles entre angiogenèse
et radiothérapie
Les bases de l’angiogenèse tumorale
et les classes d’antiangiogéniques
L’angiogenèse tumorale, bien décrite par J. Folkman
dans les années 1970 (1), est le processus conduisant
à la formation de nouveaux vaisseaux à partir de
vaisseaux préexistants. Elle joue un rôle clé dans
la survie des cellules cancéreuses, la croissance
tumorale et le développement de métastases à
distance (2, 3). Le principal facteur déclenchant
est l’hypoxie tumorale, qui entraîne un déséqui-
libre (“angiogenic switch”) en faveur des facteurs
proangio géniques (Vascular Endothelial Growth
Factor [VEGF], acidic Fibroblast Growth Factor [aFGF],
basic Fibroblast Growth Factor [bFGF], etc.) par
rapport aux antiangiogéniques (thrombospondine 1,
angiostatine, Platelet Factor 1, interron α et β,
prolactine, etc.). Ces facteurs sont secrétés par la
tumeur et les cellules endothéliales (4). Les néovais-
seaux issus de l’angiogenèse tumorale sont carac-
térisés par un manque de péricytes (rôle de soutien
membranaire) et par une perméabilité vasculaire
augmentée, une pression interstitielle élevée – et
en conséquence par un flux sanguin diminué. En
effet, la naissance de cette vascularisation anormale
est le résultat d’une collaboration parfaite entre les
cellules tumorales et les cellules endothéliales, qui
offrent toutes deux des cibles potentielles pour les
thérapeutiques anticancéreuses (5).
Les types d’antiangiogéniques 
Les agents dirigés vers l’inhibition de l’angiogenèse
tumorale ainsi que vers les différentes cibles vascu-
laires, ont été divisés en 2 classes médicamen-
teuses. Ils présentent tous deux l’intérêt de viser
une cellule génétiquement stable (à l’inverse de
la cellule tumorale) et donc de moins exposer au
risque d’acquisition de résistance.
Les agents antiangiogéniques (ou inhibiteurs
de l’angiogenèse).
L’intérêt de ces médicaments est basé sur un index
thérapeutique favorable (l’écart entre les concentra-
tions actives et toxiques) ; l’angiogenèse est rarement
physiologique et donc le ciblage” est assez spéci-
fique du processus tumoral. Les agents antiangiogé-
niques inhibent la formation de néovaisseaux et nont
pas (ou peu) d’impact sur les vaisseaux existants
(voie VEGF [anticorps anti-VEGF, inhibiteurs de
tyrosine kinase, etc.], anti-FGR, anti-récepteur
Hormann HER1, etc.).
Avec la croissance tumorale, l’approvisionnement
en oxygène et en nutriments devient déficitaire et
conduit à une accumulation de métabolites. Ce
phénomène s’accompagne de changements dans
le micro-environnement de la tumeur (hypoxie,
hypoglycémie et acidose) conduisant à la libération
de facteurs angiogéniques par les cellules tumorales,
comme le VEGF et/ou le FGF. Cette production peut
être stimulée, d’une part, par l’expression de certains
gènes inductibles par l’hypoxie, comme le facteur
HIF-1 (Hypoxia-Inducible Factor 1), mais également
par le rayonnement ionisant via l’activation de MAPK
(Mitogen-Activated Protein Kinase).
Le VEGF se lie ensuite à des récepteurs spéci-
fiques sur la cellule endothéliale, principalement
au VEGFR-2. La liaison du VEGF est suivie par la
dimérisation du récepteur puis par l’activation d’une
cascade complexe de voies intracellulaires entraînant
la migration, la prolifération et la survie des cellules
endothéliales.
La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 9 - novembre 2010 | 537
Résumé
Ces dernières années ont été marquées par l’arrivée de nouveaux médicaments ciblés contre le cancer.
Si certains, tels que le cétuximab pour les cancers des voies aéro-digestives supérieures
(Bonner JA et al.,
N Engl J Med 2006)
, ont été développés très tôt dans le but d’être associés à la radiothérapie, cela n’est
pas le cas pour tous. Les oncologues radiothérapeutes se trouvent donc parfois dans la situation inédite
de devoir déterminer s’il est licite ou non d’associer un nouveau traitement à la radiothérapie et, si oui,
chez quels patients, selon quelles modalités, avec quelles précautions, etc. La connaissance des bénéfices
et des risques auxquels les patients sont exposés du fait d’une telle combinaison est parfois très lacunaire.
C’est, de façon assez caricaturale, le cas avec la classe des antiangiogéniques. À défaut de données issues
d’études cliniques précoces, il faut parfois recourir à des extrapolations de données précliniques, in vivo,
voire in vitro. Cet article rappelle en quoi angiogenèse et radiothérapie sont liées et aborde les données
précliniques et cliniques ainsi que les perspectives et les directions de recherche.
Mots-clés
Angiogenèse
Agents
antiangiogéniques
Radiothérapie
Facteur de croissance
vasculaire endotliale
Cancer
Highlights
In the last years we have
witnessed the emergence of
new targeted therapies against
cancer. While some, such as
cetuximab for head and neck
cancer (
Bonner JA et al., N Engl
J Med 2006)
, were developed
very early in order to be deliv-
ered in association with radio-
therapy, this is not the case for
all. Radiation oncologists are
therefore in the unusual situa-
tion where they have to know
if it is adequate or not to add
a new treatment in combina-
tion with radiotherapy and,
if so, in which patients, how
and with what precautions.
The knowledge of the benefit/
risk ratio to which patients are
exposed with such a combina-
tion is sometimes very poor. It
is typically the case with anti-
angiogenics. In the absence of
data from early clinical studies,
we must sometimes resort to
extrapolation from preclinical
data, in vivo or even in vitro.
This article reveals how angio-
genesis and radiotherapy are
linked and analyses the
preclinical and clinical data of
their association. It also tries
to foresee what could be its
clinical applications and to
which aims research should
be directed.
Keywords
Angiogenesis
Anti-angiogenic agents
Radiation therapy
Vascular endothelial growth
factor
Cancer
Basées sur les mécanismes moléculaires des effets
biologiques du VEGF sus-mentionnés, diverses
stratégies pour inhiber l’angiogenèse VEGF-dépen-
dante ont été développées. Lapproche la plus
étudiée comprend des anticorps contre le VEGF
ou contre le VEGFR ainsi que des inhibiteurs de
tyrosine kinase. Les anticorps contre le VEGF et le
VEGFR-2 peuvent induire l’apoptose de la tumeur
et des cellules vasculaires, et réduire le taux de
croissance des tumeurs et des métastases chez
l’animal (6).
Agents antivasculaires (“vascular disrupting
agents”).
À l’inverse, les traitements antivasculaires peuvent
réagir sur les vaisseaux existants et donc perturber
la circulation vasculaire normale (poisons du fuseau,
acide acétique flavone). En réalité, les agents utilisés
dans la pratique courante, comme les anti-VEGF,
ont une action mixte, à la fois antiangiogénique et
antivasculaire (7).
Leffet paradoxal ou du moins
contre-intuitif des antiangiogéniques
qui conduisent à une meilleure
oxygénation tissulaire
et donc à une radiopotentialisation
Selon les travaux de l’équipe de C.G. Lee et al. (8),
les antiangiogéniques induisent in vivo, chez
l’animal, une diminution significative de la pression
interstitielle intratumorale, ainsi qu’une augmen-
tation de l’oxygénation tumorale et donc une radio-
potentialisation. En effet, il y a plus de 50 ans que
les premiers travaux de radiobiologie ont évoqué
l’existence d’un lien entre hypoxie tumorale et
réponse à la radiothérapie. Actuellement, il est bien
connu que l’hypoxie tumorale est un facteur majeur
de radiorésistance. Dans les cellules soumises à
une irradiation, la cassure double brin de l’hélice
d’ADN représente l’événement létal. Ces cassures
peuvent être produites de manière directe par
dépôt d’énergie ou, le plus souvent, de manière
indirecte par la production de radicaux libres issus
de la radiolyse de l’eau avec les rayonnements à
faible transfert d’énergie linéique utilisés en clinique.
Loxygène va intervenir au sein de cette cascade
radicalaire en permettant la création de radicaux
libres à durée de vie plus longue, à l’origine de
l’effet cytotoxique de l’irradiation. Le rapport de
dose nécessaire pour obtenir le même effet biolo-
gique (mort cellulaire) en l’absence ou en présence
d’oxygène est de 3 avec les rayonnements à faible
transfert d’énergie linéique.
Les auteurs ont par ailleurs montré sur des
xénogreffes de glioblastome et de tumeurs du colôn
que le traitement anti-VEGF augmentait le délai
de croissance tumorale après irradiation dans des
conditions normoxiques et hypoxiques suggèrant
que le traitement antiangiogénique permettrait de
compenser la résistance aux radiations induite par
l’hypoxie.
La cellule endothéliale, élément clé
de l’efficacité et de la tolérance
de la radiothérapie
Efficacité 
Concernant l’efficacité de la radiothérapie, une
autre voie d’étude intéressante est de cibler
la cellule endothéliale. La radiosensibilité de
ces cellules a été testée après implantation de
fibrosarcomes ou de mélanomes chez des souris
présentant ou non une inactivation de l’apoptose
de leurs cellules endothéliales (acide sphingomyé-
linase – ou Bax –). Leurs travaux ont montré que les
tumeurs implantées sur des souris avec apoptose
diminuée avaient, par rapport à celles implantées
sur des souris normales, non seulement un taux de
croissance 2 à 4 fois plus élevé mais elles étaient
surtout beaucoup moins sensibles à une irradiation
monofractionnée. M. Garcia-Barros et al. (9) ont
ainsi démontré que l’apoptose endothéliale est un
facteur de régulation de la croissance tumorale mais
surtout qu’elle est un facteur majeur de réponse
tumorale à la radiothérapie.
Tolérance
Une attention particulière doit également être portée
à la tolérance de la radiothérapie, qui détermine la
dose maximale. C’est dans cet esprit que F. Paris
et al. (10) ont exploré in vivo, sur des modèles
538 | La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 9 - novembre 2010
Antiangiogéniques et radiothérapie
DOSSIER THÉMATIQUE
Antiangiogéniques
murins, le syndrome gastro-intestinal post-radique.
L’hypothèse évoquée est que l’endothélium de la
muqueuse intestinale est la cible réelle de la radio-
thérapie et donc le principal facteur déclenchant
de la toxicité radio-induite. Leur étude a montré
que, chez les souris, la lésion endothéliale se produit
avant l’endommagement des cellules épithéliales et
que l’inhibition de l’apoptose spécifiquement dans
les cellules endothéliales (inhibition pharmacolo-
gique par anticorps anti-FGF ou génétiquement
par délétion du gène acide sphingomyélinase)
permettait d’éviter la toxicité gastro-intestinale
habituellement observée après une radiothérapie
fractionnée de 12 à 15 Gy.
Ces arguments précliniques sont en faveur d’une
incidence non négligeable des médicaments
antiangio géniques sur la toxicité radio-induite, qui
reste bien sûr à confirmer en clinique.
La radiothérapie
et son influence sur l’angiogenèse
Il a été montré que la radiothérapie entraîne une
augmentation de la sécrétion de VEGF et peut donc
jouer un rôle clé dans le processus de néovascu-
larisation (11, 12). Elle pourrait ainsi favoriser le
développement de métastases comme cela a été
montré dans un modèle murin (13).
Bénéfices et risques théoriques
et avérés de la combinaison
de la radiothérapie
et d’un traitement
antiangiogénique
Selon G.G. Steel et al. (14, 15) les bénéfices
théoriques de l’association des traitements systé-
miques et de la radiothérapie sont basés surtout
sur l’effet additif et/ou supra-additif des deux
traitements (l’effet thérapeutique de l’association
se révèle supérieur à la somme des effets de la
radiothérapie seule et de la chimiothérapie seule).
Néanmoins, cette combinaison repose aussi sur la
coopération temporelle et spatiale des deux traite-
ments, qui permet de traiter dans le même temps
la tumeur primitive et les éventuelles métastases
infracliniques.
L’indépendance des effets toxiques (diminution des
toxicités) est basée sur le principe que l’adminis-
tration concomitante de 2 traitements ne majore pas
leurs effets toxiques. En réalité, les effets toxiques
sont dépendants des doses de cytostatiques et
de radiothérapie administrées, ainsi que de leur
séquence chronologique et de la “superposition
de zones à traiter.
En revanche, l’administration peut parfois être
limitée par les risques théoriques de toxicité
cumulative augmentée de façon aiguë et tardive,
et par une radiosensibilité diminuée.
Antiangiogéniques et augmentation
de l’efficacité de la radiothérapie
(effet additif ou supra-additif)
Données précliniques
Pour la plupart des études concernées par l’asso-
ciation antiangiogéniques-radiothérapie, l’objectif
principal était le retard à la croissance de la
tumeur (tumor growth delay). Seules deux séries
ont étudié un paramètre radiobiologique : le TCD50
(dose permettant de stériliser 50 % des tumeurs).
Toutefois, leurs résultats sont contradictoires.
La radiosensibilité tumorale par l’usage des anticorps
anti-VEGF a été étudiée dans un certain nombre
d’études précliniques.
Pour D.H. Gorski et al. (11), l’irradiation fractionnée
sur des xénogreffes de cancer œsophagien chez
l’animal, associée à des anticorps VEGF administrés
3 heures avant chaque séance, a démontré un effet
supra-additif de retard à la croissance tumorale.
Le même effet a été noté par W.D. Brazelle
en 2006 (16) sur un modèle murin de cancer du
côlon (HT29), mais traité cette fois par le vandé-
tanib (ZD6474), un inhibiteur de tyrosine kinase
associé au VEGFR-2. La radiothérapie, fractionnée
ou en dose unique, a augmenté la réponse du HT29.
Le DC101, un anticorps monoclonal antiangiogé-
nique dirigé contre le VEGFR-2, a fait la preuve (en
combinaison avec la radiothérapie fractionnée sur
des xénogreffes de cancer mammaire) d’un retard
important et prolongé à la croissance tumorale,
alors que les traitements en monothérapie ont eu
des effets minorés (17).
Données cliniques
Actuellement, seuls quelques essais de phase I/II
sur l’association d’antiantiogéniques (en particulier
d’anticorps anti-VEGF) et de la radiothérapie dans
les cancers localement avancés ou métastatiques
ont été publiés dans la littérature. Toutefois, les
études sont de plus en plus nombreuses. Parmi
ces quelques travaux publiés, une amélioration de
La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 9 - novembre 2010 | 539
DOSSIER THÉMATIQUE
la réponse a été observée quand la radiothérapie
a été associée à un inhibiteur sélectif de la cyclo-
oxygénase 2. Dans un essai de phase I conduit chez
des patients atteints d’un cancer du poumon inopé-
rable, le célécoxib à dose élevée, en association
avec la radiothérapie thoracique, a entraîné un
taux actuariel de survie sans progression locale
de 66,0 % à 1 an et de 42,2 % à 2 ans. Toutefois,
5 patients (10,6 %) ont présenté une toxicité
cardio-vasculaire notable (hypertension, accidents
hémorragiques) [18]. C.G. Willett et al. (19) ont
démontré, dans un protocole préopératoire portant
sur 6 patients ayant un cancer rectal localement
avancé et traités par bévacizumab administré seul
(5 mg/ kg en intraveineux), suivi d’une adminis-
tration concomitante de 5-FU et radiothérapie,
une réponse histologique majeure pour tous les
patients.
Antiangiogéniques et radiothérapie :
collaboration spatiale
L’un des bénéfices attendus de l’association
traitement systémique-radiothérapie repose sur
l’hypothèse de la coopération spatiale des 2 traite-
ments, la radiothérapie s’attelant au contrôle de la
maladie locorégionale ; le traitement systémique
(ici le traitement antiangiogénique) à celui de
la maladie métastatique. Cette coopération est
d’autant plus utile que la radiothérapie (de façon
similaire à la chirurgie) participe à l’augmentation
du VEGF et pourrait favoriser le développement
de métastases (13). D.H. Gorsky et al. ont donc
cherché à mesurer l’impact de la poursuite et de la
durée du traitement antiangiogénique après radio-
thérapie de la tumeur primitive sur la croissance des
métastases. Ils ont eu recours à un modèle murin
de leucémie lymphoïde chronique. Le traitement
a été commencé soit par radio thérapie seule,
soit par radiothérapie plus antiangiogéniques de
courte (2 jours) ou de longue durée (14 jours). Leurs
résultats ont montré :
une diminution du volume tumoral local avec la
combinaison radiothérapie-antiangiogéniques de
courte durée ;
une diminution signifi cative du volume métasta-
tique des souris traitées par antiangiogéniques de
longue durée, par rapport au traitement de courte
durée ou l’irradiation seule.
Ces données suggèrent que, bien que la radio-
chimiothérapie de courte durée ait nettement
amélioré le contrôle local, la poursuite du
traitement par antiangiogéniques peut être
nécessaire pour le contrôle de la maladie micro-
métastatique.
Antiangiogéniques et radiothérapie :
facteur temporel
Données précliniques
Lorsque les antiangiogéniques sont administrés
simultanément ou peu après la radiothérapie, il y
a une probable collaboration au niveau de la cible,
l’angiogenèse. Dans une étude menée par M. Amano
et al. (20), les effets d’anginex, un inhibiteur de
la croissance des cellules endo théliales, ont été
analysés dans des modèles murins de carcinome
épidermoïde. Leurs résultats ont montré que
l’anginex (2 × 10 mg/ kg à J2 et J3 après la radio-
thérapie), donné dans les jours qui suivent les rayon-
nements, supprime la repousse de la tumeur en
bloquant la revascularisation et en prolongeant
l’effet de la radiothérapie. Cet effet semble similaire
à celui observé lors de l’utilisation d’anti-VEGFR-2
pour les tumeurs récidivantes après l’irradiation.
Dans une étude menée par l’équipe de S.V. Kozin
et al. (21), des xénogreffes humaines de cancer
du poumon ont été d’une part irradiées avec une
dose insuffi sante pour le contrôle local et d’une
autre part non traitées et suivies après leur implan-
tation. Lorsque les tumeurs ont atteint la même
taille (après un délai de croissance plus important
pour les tumeurs récidivantes), toutes les souris
ont reçu 3 injections d’anticorps anti-VEGFR-2
(27 mg/ kg, à 3 jours d’intervalle). Les travaux
ont mis en évidence un retard à la croissance
tumorale 2 fois plus important chez les souris
précédemment irradiées comparativement au
groupe témoin. A contrario, P.M. Dings et al. (22)
ont démontré, sur des xénogreffes de carcinome
mammaire et de mélanome, que les antiangio-
géniques étaient le plus souvent actifs lorsqu’ils
étaient administrés avant l’irradiation. Leurs
premiers travaux ont démontré que le niveau d’oxy-
génation tumorale (mesuré quotidiennement, en
temps réel) augmentait au cours des 4 premiers
jours de traitement par anginex et que, à partir du
5e jour, il diminuait signifi cativement, au-dessous
de celle des souris contrôle. L’hypothèse d’une
majoration de l’effet de la radiothérapie dans cette
“fenêtre thérapeutique” a ensuite été testée avec
soit anginex pendant 3 jours (J0-J2) suivi d’une
radiothérapie à J2 et J3, soit avec anginex durant
6 jours (J0-J5) suivi d’une radiothérapie à J5 et J6.
Annoncez
vous !
Une deuxième
insertion gratuite
pour
les abonnés
Contactez Valérie Glatin
au 01 46 67 62 77
ou faites parvenir
votre annonce par mail
540 | La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 9 - novembre 2010
Antiangiogéniques et radiothérapie
DOSSIER THÉMATIQUE
Antiangiogéniques
En effet, le retard de la croissance tumorale a
été renforcé lorsque la radiothérapie a été initiée
dans la fetre de l’oxygénation tumorale (à J2
et J3) comparativement à anginex seul et à l’irra-
diation à J5 et J6 (15). Il semblerait donc qu’il y a
une meilleure potentialisation de la radiothérapie
avec un traitement antiangiogénique préalable mais
administré dans un intervalle court.
Données cliniques
Dans un essai de phase II qui portait sur 25 patients
ayant un cancer rectal de stade T3 N1 ou T3 N0,
une administration concomitante de bévaci-
zumab (un anticorps monoclonal dirigé contre le
VEGF) [5 mg/kg] et 5-FU avec une radiothérapie
pelvienne (50,4 Gy en 28 fractions) a montré une
réponse histologique complète chez 8 patients
(32 %) et partielle chez 6 patients (24 %). Un
seul patient a présenté une récidive locale.
Les auteurs ont donc conclu que l’addition de
bévacizumab à la radio-chimiothérapie a permis
d’obtenir des résultats prometteurs en termes de
réponse histologique (23). Actuellement, un essai
national de phase I évalue la tolérance de l’asso-
ciation d’une radiothérapie de l’encéphale avec du
bévacizumab dans le traitement des métastases
cérébrales (centre Baclesse, Caen). Le protocole
du traitement est : bévacizumab administré à
3 reprises, à 2 semaines d’intervalle (J1, J15 et
J29), selon 3 paliers de dose (5, 10 ou 15 mg/kg),
et radio thérapie de l’encéphale en totalité, à la dose
de 30 Gy, en 15 séances réparties sur 3 semaines
(de J15 à J33). Le rationnel est que le dévelop-
pement des métastases cérébrales est facilité par
la néoangiogenèse, par l’utilisation des vaisseaux
existants (“co-option”) ainsi que par l’augmentation
de la perméabilité vasculaire. Cela laisse supposer
que les inhibiteurs d’angiogenèse, parmi lesquels
les agents ciblant la voie VEGF/VEGFR, peuvent
être actifs sur les métastases cérébrales.
Antiangiogéniques et radiothérapie :
toxicité
Récemment, plusieurs études cliniques ont été
menées pour évaluer la tolérance des antiangio-
géniques (en particulier du bévacizumab) en
association avec la radiothérapie. Cependant,
ces études sont limitées par une application sur
de petits effectifs, par un suivi court et donc des
résultats préliminaires, mais aussi par une toxicité
difficilement attribuable au bévacizumab, car la
plupart des patients ont reçu une polychimiothé-
rapie concomitante.
Dans une étude phase II comportant 46 tumeurs
pancréatiques inopérables, C.H. Crane et al. (23)
ont étudié la toxicité locorégionale de la radio-
chimiothérapie concomitante avec du bévaci-
zumab (2 semaines avant l’irradiation, toutes
les 2 semaines pendant la radiothérapie et en
adjuvant jusqu’à la progression) et de la capéci-
tabine (J14-J52). Lanalyse des résultats a montré
un taux de 43 % de toxicité de grade II et de 4 % de
toxicité gastro-intestinale de grade III. Cependant,
4 patients ayant présenté une ulcération du côlon
avec des saignements et/ou une perforation ont
été exclus. Dans les 4 cas, les complications sont
survenues dans le champ d’irradiation sur des
tumeurs envahissant le duodénum. En revanche,
dans une série rétrospective de type étude appariée
cas-témoin” par S. Goyal et al. (24), 14 patientes
présentant un cancer du sein et traitées par radio-
chimiothérapie + bévacizumab sans délai ou inter-
ruption de la radiothérapie n’ont eu qu’une toxicité
faible ( grade 2 CTCAE [Common Terminology
Criteria for Adverse Events]), sans différence en
termes de fatigue, de fibrose liée au rayonnement
ou de lymphœdème, par rapport au groupe contrôle.
Cependant, 5 patients (35 %) ont présenté une
diminution de la fraction d’éjection ventriculaire
(3 irradiés du côté gauche). Dans les tumeurs
des VADS, T.Y. Seiwert et al. (25) ont présenté
une étude de phase I sur 43 patients ayant reçu
une combinaison de bévacizumab (intensifié de
2,5 à 10 mg/ kg), 5-FU, d’hydroxyurée et de radio-
thérapie, pour des tumeurs localement avancées. La
radiothérapie a été administrée en fractionnement
classique pour une dose totale de 66 à 72 Gy
(tumeur primaire) et de 45 à 60 Gy (sur les aires
ganglionnaires à risque). Le taux de complications
cutanées aiguës de grade supérieur ou égal à 3, de
type fistules et ulcérations ou nécroses tardives, a
été de 10 %, sans événements hémorragiques ou
thromboemboliques notés.
Dans l’étude menée par C.G. Willett et al. (19)
l’association bévacizumab (5 mg/kg, administré
d’abord avant la radio-chimiothérapie préopéra-
toire) et 5-FU (225 mg/m
2
pendant 24 h à J1 de la
radiothérapie) a montré une réponse histopatholo-
gique complète chez 2 patients atteints de cancer
du rectum en phase II sur 5, avec seulement des
toxicités mineures de type diarrhée ou douleurs
coliques. Toutefois, F. Lordick et al. (26) ont attiré
l’attention avec une série de 33 patients traités par
bévacizumab : le taux rapporté de complications
1 / 7 100%

Antiangiogéniques et radiothérapie DOSSIER THÉMATIQUE Antiangiogenics and radiation therapy

La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !