durée du traitement ou les contre- indications médicamen-
teuses. Concernant les indications, il est difficile pour un
pharmacien d’officine de juger de la pertinence d’une pres-
cription, en particulier pour les psychotropes. Pour cette rai-
son, nous avons limité la collecte des ordonnances hors indi-
cation aux morphiniques Skenan®et Moscontin®,utilisés en
traitement de substitution et non pour traiter la douleur.
En effet, le contexte de délivrance d’un stupéfiant justifie
un échange patient ou famille/pharmacien qui permet à ce
dernier de connaître l’indication du médicament de manière
certaine.
!Les “demandes abusives” de la part des patients. Plusieurs
types de requêtes constituent pour nous des cas :
–les falsifications au sens strict, c’est-à-dire les ordonnances
volées, photocopiées, surchargées, avec des médicaments
ajoutés ;
–mais aussi toutes les “tricheries”, demandes de renouvelle-
ment trop précoces et non justifiées, tentatives de présentation
d’une ordonnance déjà honorée pour obtenir des médicaments
sans avoir recours à une nouvelle consultation.
Pour chaque cas retenu, les pharmaciens devaient compléter
une fiche de recueil comportant le profil du patient (sexe, âge,
connu ou non à l’officine), le profil du médecin (généraliste,
spécialiste ou hospitalier), les médicaments concernés et le type
de mésusage constaté.
RÉSULTATS
Cent quarante-deux cas ont été retenus, répartis comme suit :
–118 cas concernent des prescriptions sortant du cadre du
résumé des caractéristiques du produit (RCP) ;
–24 cas constituent des falsifications.
Analyse des prescriptions sortant du cadre du RCP
Nous retrouvons 49 % d’hommes et 51 % de femmes, soit un
nombre équivalent. Les patients recevant ces traitements sont
dans 82 % des cas connus dans les officines auxquelles ils pré-
sentent leurs prescriptions. Soixante-six pour cent des ordon-
nances recueillies émanaient de médecins généralistes.
Les benzodiazépines et apparentés représentent dans notre
enquête 72 % des médicaments utilisés en dehors des recom-
mandations de l’AMM. La répartition entre ces médicaments
est représentée sur la figure 1. Les médicaments le plus fré-
quemment retrouvés sont les hypnotiques : le flunitrazépam
(Rohypnol®), la zopiclone (Imovane®) et le zolpidem (Stil-
nox®), avec des fréquences identiques (15 %). Dans 79 % des
cas, il s’agit d’une dose dépassée. Soulignons que, pour les
hypnotiques dont la durée de prescription est limitée à quatre
semaines, nous n’avons retenu, dans notre analyse des cas de
surdosage, que les cas où, pour le même patient, nous retrou-
vions deux prescriptions dans les deux mois couverts par l’en-
quête. Celles-ci ont été identifiées de deux manières diffé-
rentes. Certains pharmaciens nous précisaient, sur la
photocopie de l’ordonnance du premier mois, “même ordon-
nance le deuxième mois”, l’envoi des cas n’étant fait qu’à la
fin de la période de recueil. Les autres cas, non identifiés par
les pharmaciens, l’ont été par analogie (même pharmacie,
même date à quatre semaines d’écart, mêmes initiales du nom
et prénom du patient, même écriture de médecin quand l’or-
donnance était manuscrite). Cela nous permet d’éliminer les
ordonnances “de complaisance” où le patient, contrairement
à la posologie indiquée sur l’ordonnance, prend un comprimé
chaque soir mais souhaite couvrir une période supérieure à
quatre semaines.
Dans 3 % des cas, le problème est une durée de traitement
dépassée. Ce problème est très largement sous-estimé, car ce
taux de 3 % n’inclut pas les hypnotiques. Il semble acquis pour
tous que la durée de traitement pour ces médicaments est, sauf
exception, toujours dépassée. Toutes les prescriptions d’hyp-
notiques retenues dans notre analyse pour une dose dépassée
(nous n’avons retenu que les cas pour lesquels nous retrouvions
deux mois de traitement) pourraient être incluses dans les durées
de traitement dépassées. Il en est de même pour les ordonnances
éliminées de l’analyse, considérées par hypothèse comme étant
“de complaisance”.
Dans 6 % des cas, il s’agissait de sulfate de morphine
(Skenan®) utilisé par des toxicomanes en traitement de substi-
tution ou non (dans tous nos cas, des hommes d’une trentaine
d’années, connus dans les officines, présentant des ordonnances
émanant de médecins généralistes).
Douze pour cent des cas comportaient une association contre-
indiquée. Celles que nous avons recueillies reviennent en fait
le plus souvent à des synergies d’effet dépresseur central entre
codéine et benzodiazépines ou apparentés. Il faut noter que,
dans la catégorie de médicaments étudiés dans notre enquête,
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La Lettre du Pharmacologue - Volume 15 - n° 5 - mai 2001
PHARMACO-ÉPIDÉMIOLOGIE