partie 1 - paysages de guyane

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PARTIE 1
Un socle paysager
primaire
Atlas des Paysages de la Guyane – Direction Régionale de l’Environnement de la Guyane – VU D’ICI & ARUAG
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Fig. 2 Schéma lithostructural
(Delor et coll. 2003)
8
du
bouclier
des
Guyanes
Atlas des Paysages de la Guyane – Direction Régionale de l’Environnement de la Guyane – VU D’ICI & ARUAG
Géologie
L’histoire géologique de la Guyane est très ancienne ce qui
explique la complexité de son étude mais aussi son originalité par
rapport à celle de la métropole (où 90% des formations
correspondent à l’ère Phanérozoïque, soit les 540 derniers millions
d’années). Elle raconte ainsi la formation des continents et des
océans.
La Guyane française fait partie d’un vaste ensemble
géologique très ancien, appelé le « bouclier des Guyanes ». D’une
superficie totale de 1,5 millions de km², il est limité au Nord par
l’Océan Atlantique et au Sud par le bassin de l’Amazone. Formé
principalement au cours d’une phase orogénique (formation de
montagne) appelée transamazonienne, qui s’est déroulée entre
2,26 et 1,95 Giga années, ce domaine est constitué de roches
magmatiques
(granitoïdes,
granites,
gabbros,
diorites),
volcaniques, volcanosédimentaires et sédimentaires (schistes, grès,
silices, conglomérats, quartzites) vieilles de 2 à 2,2 milliards
d’années que l’on retrouve au nord et au sud de la Guyane.
Les roches les plus anciennes de Guyane, à l’Eorhyacien (vers 2,262,20 Ga1), sont ainsi apparues avec l’ouverture d’un océan entre
Amazonie et Afrique de l’Ouest.
Entre 2,11 et 2,08 Ga au Néorhyacien, les deux continents se sont
accolés. On assiste alors à un coulissage (de sens senestre) entre
ces deux continents.
En association avec cette tectonique qui se poursuit, des granites
se mettent en place au centre et au sud de la Guyane et des
bassins sédimentaires d’origine détritique (cônes alluviaux et
rivières) se forment au nord de la région. Entre 2.07 et 2.06 milliards
d’années, une seconde phase tectonique affecte les bassins
« récemment » formés en même temps que s’observe la mise en
place des derniers granites. Localement métamorphisées, les
roches sont alors transformées en gneiss, en amphibolites ou en
micaschistes. La structuration de ces roches dures renvoie à la mise
en place des grands ensembles montagneux guyanais.
Après la formation des grands ensembles plutoniques,
volcaniques et sédimentaires au Rhyacien, quelques événements
volcaniques sont observés en Guyane. Ils se traduisent par des
filons (dykes) très nombreux qui recoupent toutes les formations du
Précambrien, et dont l’origine tectonique reste encore inconnue.
Ils marquent cependant des directions franches de Maripasoula
aux Monts Tumuc Humac et suivant la direction de la Comté et de
L’Oyapock.
Entre 2,18 et 2,13 Ga (Mésorhyacien), le rapprochement
des deux continents ferme l’océan précoce alors ouvert. Une zone
de subduction se forme et engendre du plutonisme et du
volcanisme en association avec l’arc insulaire ainsi créé. L’érosion
des ensembles continentaux qui se rapprochent entraîne des
dépôts sédimentaires qui peuvent ainsi s’intercaler entre les
formations volcaniques.
La formation géologique de la Guyane s’appuie donc sur
l’agglomération de magmas et de dépôt volcaniques ou
sédimentaires avec un magmatisme spécifique qui se structurent
avec une orientation est/ouest importante et masquent toutes
traces de structures antérieures : un vaste ensemble central de
type batholite (roches refondues par remontées magmatiques et
solidifiées) se constitue au cœur de la Guyane, zone orange). On
retrouve également ces formations anciennes au nord avec
notamment le Massif du Mahury.
Fig. 5 Modèle d’ouverture océanique à l’Eorhyacien
Fig. 6 Modèle d’arc insulaire mésorhyacien lié à la subduction
Fig. 4 La rectitude du cours de l’Oyapock renvoie à des directions
géologiques anciennes
Les études du paléomagnétisme faites sur des échantillons
rocheux
entre
1996
et
2000
montrent
l’évolution
paléogéographique de la Guyane : elle aurait ainsi parcouru près
de 20000 km en 100 milliards d’années.
Fig. 7 Plutonisme et phase de coulissage au Néorhyacien*
Fig. 3 Le massif du Mahury, témoin d’une géologie ancienne.
1
1Ga= 1 000 milliards d’années
Fig. 8 Plutonisme tardif et coulissage local au Néorhyacien
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Fig. 10 Saut Maripa
Fig. 11 Inselberg de la Montagne de la Trinité
Fig. 9 : Carte de synthèse de la géologie Guyanaise
Fig. 12 La couleur rouge caractéristique de la
latérite
Fig. 13 Coupe géologique de la Guyane des monts Tumuc Humac
à Mana.
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Les débuts de la vie sur terre à l’ère phanérozoïque n’ont pas laissé
d’empreinte en Guyane (fossiles ou traces), aucun témoignage de
ce qui a été à l’origine de la géologie en Europe et en France
métropolitaine.
Vers 200 Ma, la Province Magmatique de l’Atlantique Central est
marquée par les premières phases volcaniques de la fracturation
du méga continent « Pangée » qui amènera l’ouverture de
l’Atlantique séparant ainsi les Amériques, l’Europe et l’Afrique. Le
socle ancien est ainsi recoupé par des filons de dolérite subverticaux d’orientation N/S ou NW/SE dont la mise en place va
constituer de nouvelles barrières naturelles lisibles dans le paysage
guyanais notamment au niveau des sauts et de certains Inselbergs.
Certains filons très importants sont plus large de 500m à 1km de
distance et se traduisent par des chaînes de monts pouvant
atteindre 200m : la plus importante est celle allant de la Montagne
de Plomb près du lac de Petit Saut jusqu’à la Montagne Bagot et
la Montagne de Maripa entre Cayenne et Régina.
Ces phénomènes d’altérations latéritiques (à la fois chimiques et
mécaniques) ont conditionné la configuration actuelle de la
géomorphologie guyanaise. Ainsi, on observe une organisation par
étages de paléosurfaces cuirassées : entre le niveau de la mer et
200-300m d’altitude sur le littoral atlantique, ces surfaces peuvent
atteindre des paliers entre 100-200m et 600-700m d’altitude vers
l’intérieur de la Guyane. On retrouve ainsi ces structures étagées
de manière remarquable avec les monts de l’île de Cayenne :
 Une première surface sous forme de plateau sub-horizontal
de haute altitude (à partir de 80m) comme le Mahury ou le
Matoury avec une cuirasse épaisse alumino-ferrugineuse
 Une seconde surface entre 20 et 50m d’altitude et une
cuirasse moins épaisse donnant un relief plus moutonné (la
Mirande ou le Petit Matoury)
 Une troisième surface entre 0 et 25m avec de faibles
cuirassements et quasi plan (pénéplaine de Cayenne)
Les phases de cuirassement et d’altération ont laissé des
restes de plateaux anciens qui forment de nombreux reliefs de la
Guyane. Ils ont contribué également à former le modelé en « peau
d’orange » si caractéristique des moutonnements de la zone
forestière guyanaise.
Enfin, sous l’effet conjugué des variations du niveau marin,
des apports des produits d’érosion des fleuves de Guyane et
surtout des apports sédimentaires liés au fleuve Amazone, le littoral
de Guyane a enregistré des phénomènes sédimentaires successifs
mais récents. La plaine littorale, d’une largeur inférieure à 20 km,
est ainsi constituée de formations sableuses et argileuses
quaternaires peu épaisses d’où émergent localement quelques
appointements de roches anciennes ; les savanes-roches.
Fig. 15 Province Magmatique de l’Atlantique Centrale (200 Ma)
Fig. 14 Représentation schématique des paléosurfaces étagées
Cette riche histoire géologique ancienne de la Guyane aide
également à comprendre l’originalité de ce territoire qui est le seul
entre l’Amazone et l’Orénoque à présenter un littoral et des îlets
rocheux.
Tous ces terrains du socle et les dolérites ont subi une altération
importante sous climat tropical et équatorial humide et sont
presque partout recouverts par des formations latéritiques épaisses
de quelques mètres à plus de cinquante mètres.
Fig. 16 Représentation schématique des filons volcaniques
Fig. 17 Vue aérienne de l’étagement des Monts de Cayenne
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Fig. 18 Carte de synthèse du relief guyanais
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Relief et hydrographie
Un relief mouvementé de faible amplitude
La Guyane française correspond à une partie du très vieux
bouclier pénéplané du plateau des Guyanes englobant le
Guyana et le Surinam. Il s’agit d’un vaste plan incliné d’orientation
générale Nord-Sud en forme de quadrilatère. Le 53ème méridien
vient le partager en deux parties sensiblement égales. L’altitude
moyenne comprise entre 100 et 200m et les hauteurs supérieures à
500m font figure de montagnes dominant un relief collinaire le plus
souvent revêtu d’un couvert végétal d’une trentaine de mètres
d’épaisseur.
Le relief s’organise schématiquement en bandes parallèles au
rivage atlantique ; les terres basses qui constituent 6% de la
superficie s’inscrivent alors en opposition avec les terres hautes,
représentant 94%. La Guyane représente une particularité, il s’agit
du seul territoire, sur un vaste linéaire côtier qui s’étend entre
l’Amazone et l’Orénoque (de Fortaleza au Venezuela), qui
présente des plages et des espaces côtiers rocheux (région de
Cayenne) ainsi que des îles et des îlets. Ces appointements
rocheux génèrent des paysages particuliers visibles depuis le large.
Fig. 19 Les marches du relief Guyanais (R. Auburtin)
Les terres basses correspondent à une plaine littorale de 5
à 40 km de large, d’altitude souvent inférieure à 30m. Constituée
de sédiments quaternaires et actuels, cette plaine plus ou moins
inondée s’étend le long de la côte, plus large au niveau
d’Organabo mais se rétrécissant vers l’Est. Dans la région de
Cayenne et de Kourou, des points hauts singuliers la parsèment ;
ce sont les « Roches Vertes », roches anciennes d’origine
volcanique métamorphisées. Une végétation variée mais basse
couvre la plaine ; mangrove, savanes, forêts inondées.
Les terres hautes comprennent les collines et chaînons de la
chaîne septentrionale, le massif central, les montagnes IniniCamopi et enfin la pénéplaine méridionale.
Les collines s’étendent en retrait de la frange côtière sur
une bande étroite. Leurs versants dissymétriques portent une forêt
dense assez haute. Les collines au modelé « classique » en peau
d’orange présentent des vallées à fond plat souvent marécageux,
dont certaines pénètrent profondément à l’intérieur des terres.
Le massif central correspond à la région de l’ancienne
plate-forme et de sa couverture cratonisée ayant connu tous les
cycles d’orogénèse et de granitisation. Le massif forme une bande
d’une centaine de kilomètres de profondeur, articulée autour de
la dorsale méridienne des montagnes de la Trinité. A l’Ouest, des
massifs compartimentés pouvant dépasser 500m s’organisent en
une sorte d’amphithéâtre alors qu’à l’Est des plateaux compris
entre 100 et 200m et portant des collines sont entaillés par les
vallées vigoureuses de l’Approuague et de ses affluents.
Les montagnes de l’Inini forment la seule véritable chaîne
de hauteurs atteignant parfois 800m. Le massif s’articule en deux
ensembles séparés par la haute vallée de l’Approuague. Les
formes de relief diffèrent peu de celles du Massif Central mais sont
cependant plus vigoureuses et rappellent même parfois les formes
volcaniques initiales.
La pénéplaine méridionale enfin, couvrant 1/5° du territoire,
prend l’apparence d’un moutonnement monotone de collines
convexes surbaissées, inférieures à 250m.
Des reliefs insolites en émergent, tels les inselbergs
(« savane-roches ») où la roche apparaît à nu sur des pans très
abrupts parfois monumentaux. (cf. Fig. 23)
Ces chaînes montagneuses et notamment le TumucHumac auront pour les premiers explorateurs occidentaux le
caractère attractif de l’inconnu à découvrir en franchissant
l’obstacle renvoyant au mythe de l’eldorado.).
Fig. 20 Les terres basses de la plaine littorale guyanaise.
Fig. 21 Monts de Kourou : un repère sur la plaine littorale
Fig. 22 Le modelé « peau d’orange » des hautes terres
Fig. 23 L’inselberg : une île rocheuse dans un océan de verdure
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Fig. 24 Exemple de cycle hydrologique
montrant l’irrégularité interannuelle du
débit mensuel d’un fleuve type.
Fig. 25 Carte de synthèse d’analyse du
réseau hydrographique
Fig. 26 Principales
caractéristiques du
réseau
hydrométrique
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Le réseau hydrographique dense et marquant
Comme dans toutes les régions de type équatorial, le
réseau hydrographique est dense et développe un chevelu très
ramifié. L'abondance des précipitations et l'imperméabilité de la
plupart des roches du socle et de l'épais manteau de débris qui le
recouvre expliquent la densité du réseau hydrographique.
L’ensemble du territoire est drainé en direction de l’Atlantique. On
distingue deux centres de dispersion des eaux, l’un au Nord-Ouest
(montagne Sparouine, massifs Décou-Décou et Lucifer), l’autre au
Nord-Est (montagnes Tortues). De nombreuses rivières côtières
prennent également leur source au contact des Terres basses et
des Terres hautes.
Les fleuves sont tous orientés vers le Nord et sont alimentés
par de nombreuses criques avec une distribution en éventail du
Maroni à l'Oyapock. On retrouve cependant en fonction des reliefs
des organisations particulières en arêtes de poisson ou en peigne
de certains réseaux. Les bassins versants sont assez allongés et leurs
limites sont imprécises par suite du manque de ligne de faîte. Les
cols sont bas et souvent occupés par des marécages qui
permettent la communication entre bassins sans véritablement
constituer de grands lacs naturels.
Sur la zone côtière, la marée se fait sentir profondément à
l’intérieur des terres et approfondit le lit des fleuves. Dans la chaîne
septentrionale les rivières sont larges, profondes et calmes mais
dans la zone du Massif Central, on rencontre de nombreux
« sauts », des rapides en quelque sorte, dus à des affleurements de
roche saine dans le lit des rivières. Ces sauts créent un « escalier
d’eau » qui rend la circulation fluviale difficile, toutefois ils ont un
intérêt environnementale reconnu et constituent de remarquables
scènes paysagères. Le Maroni à l’Ouest demeure l’unique voie de
communication avec le Sud.
Parmi l’exceptionnel foisonnement d’affluents et sous
affluents de tous ordres qui soulignent le cloisonnement typique
d’un massif forestier fortement arrosé, on peut citer les cinq
principaux cours d’eau, d’est en ouest : l’Oyapock (second fleuve
par son cours), l’Approuague, le Sinnamary, la Mana et le Maroni
(le plus long), fleuve frontière avec le Surinam.
- L’Oyapock est la frontière naturelle avec le Brésil. Les sauts et
rapides y sont nombreux.
- L’Approuague draine un bassin contigu, au centre du
département, à ceux de la Comté, de la Mana, du Sinnamary et
de l’Oyapock. Il possède le saut au plus grand dénivelé avec 19
mètres.
- La Mana « fleuve au 99 sauts » prend sa source dans le massif
central guyanais au nord de Saül et traverse le territoire du sud
au nord sur 430 km . Elle présente une centaine de sauts.
- Le Sinnamary, long de 262 kilomètres, prend sa source au centre
de la Guyane, non loin de Saül. Les sauts y sont aussi très
nombreux. C’est sur son cours qu’est édifié le barrage
hydroélectrique de Petit-Saut.
Le Maroni est le fleuve le plus important de Guyane, avec 520 km
de long et un débit de 1700 m3/s. Il est issu de la réunion à Grand
Santi du fleuve Tapanahoni surinamien et du Lawa guyanais. Il
draine un bassin de 65.830 km², dont 28.665 en territoire français.
Hydrologie
Le réseau hydrométrique de Guyane comporte
aujourd’hui une douzaine de stations mesurant le débit journalier
des cours d’eau. A partir de ces valeurs journalières de débit, des
séries mensuelles et annuelles sont constituées, permettant de
décrire les régimes des bassins versants.
L’hydrogramme annuel réalisé à partir des données
mensuelles montre un cycle hydrologique quasiment unimodal
avec la saison des pluies en mai et l’étiage en octobre. A cette
forme d’hydrogramme très simple se superposent en réalité des
irrégularités. La crue annuelle, est troublée notamment par le
« petit été de mars » qui correspond à un affaiblissement de la
pluviométrie. Ce phénomène d’influence océanique (la zone
intertropicale de convergence favorisant l’action des vents alizés
venant du Nord-Est (Groussain, 2000)) n’est plus visible dans les
débits à plus de 200 km de la côte (Gaucherel, 2000).
L’hydrogramme interannuel réalisé à partir de données
mensuelles a été calculé en « année hydrologique », c’est-à-dire
entre deux étiages. Les variations de débit observées d’une année
sur l’autre peuvent être dans un rapport de débit de 1 à 3.
Certaines années déficitaires contrastent alors avec des années à
forte hydraulicité. Aucun « cycle » ne peut néanmoins être mis en
évidence, malgré 45 années de mesures. Une corrélation avec le
fameux phénomène « El Niño » peut seulement être évoquée. Il y a
en effet une relation forte entre El Niño2 et les débits guyanais.
Avec un coefficient significatif (de -0.5) sur la dernière moitié du
siècle, on peut observer que El Niño provoque un affaiblissement
de la pluviométrie (et donc des débits) en Guyane 6 mois plus
tard.
L’amplitude des phénomènes hydrologiques se traduit par
une adaptation nécessaire des habitants des fleuves notamment
en ce qui concerne les vastes zones inondables. Les implantations
humaines sont ainsi liées de manière étroite aux premières zones
de terres exondées en tout temps, ce qui n’empêche pas
aujourd’hui d’assister à des phénomènes d’inondations pouvant
conduire à des déplacements de populations, notamment ces
dernières années sur le fleuve « Maroni ».
Fig. 28 Un réseau de criques alimentant les fleuves (source : DIREN)
Fig. 29 L’estuaire de l’Approuague bordé de mangroves
-
Fig. 27 Implantation des villes dans les embouchures sur les
premières zones exondées (Schéma R. Auburtin)
2
Fig. 30 Le Maroni, fleuve frontalier majestueux
Source : Atlas de la Guyane
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Un climat équatorial…
Fig. 31 Variations moyennes des températures
Fig. 32 Pluviométrie moyenne en Guyane
Située entre 2°N et 6°N, la Guyane bénéficie d’un climat
équatorial chaud et humide. Cette position privilégiée proche de
l’équateur ainsi que sa façade océanique lui confèrent une bonne
stabilité climatique. Ainsi, on observe une grande régularité des
vents et des températures, qui varient faiblement au cours de
l’année. Les températures moyennes annuelles sont de l’ordre de
26.5°C. L’amplitude thermique permet de différencier les saisons.
L’amplitude quotidienne de 8.5°C en moyenne peut atteindre
17°C en saison sèche à l’intérieur du pays.
Seules les précipitations connaissent des variations
annuelles conséquentes, et c’est donc principalement ce
paramètre météorologique qui détermine le rythme des saisons
guyanaises. L’humidité relative est élevée, entre 80 et 90% selon la
saison. Les précipitations quant à elles varient de 1700 mm à 3800
mm selon la région. Les pluies sont généralement courtes et fortes
mais on observe également des pluies continues et faibles
pendant la saison humide. Les zones pluvieuses sont
principalement localisées sur les premiers reliefs arrière-littoraux et
notamment sur le nord - est dans la région de Cacao. Le cycle des
précipitations est lui-même intimement lié aux mouvements
saisonniers de la ZIC ou Zone Intertropicale de Convergence.
Cette zone de convergence des flux d’alizés, générés
principalement par les anticyclones des Açores et de SainteHélène, correspond à une zone de basses pressions relatives, de 10
à 100 km de large sur l’Océan Atlantique au voisinage de
l’équateur, et légèrement décalée vers l’hémisphère nord.
Génératrice de fortes précipitations, la ZIC est animée d’un
mouvement oscillatoire Nord/Sud, lié au basculement saisonnier
de la Terre. Elle balaie ainsi la Guyane deux fois par an, durant des
périodes plus ou moins longues, ce qui détermine au niveau du
département un cycle saisonnier de quatre périodes inégales soit
quatre saisons.
Après une petite saison des pluies, de mi-novembre à mifévrier, comprenant l’hiver boréal, suit le « petit été de mars »
auquel correspond une accalmie des précipitations. Dès le mois
d’avril, la saison des pluies est de retour, jusqu’à mi-juin parfois. Une
période transitoire s’instaure ensuite avant que ne s’installe
définitivement la saison sèche, de mi-août à mi- novembre. En
Guyane Française, il y a, pour résumer, deux saisons des pluies et
deux saisons sèches et pour chacune d’entre elles, une courte et
une longue. Pour autant, les variations inter-annuelles sont
fréquentes. Non seulement la hauteur des précipitations recueillies
est très variable, bien que toujours abondante, mais de plus, il
arrive que la saison pluvieuse s’étale sur la petite saison sèche. Le
«petit été de mars» disparaît alors pour laisser place à sept mois de
pluie...
Relativement pluvieux mais stable et ensoleillé, le climat de la
Guyane est ainsi propice au développement d’une végétation
luxuriante. L’humidité relative forte et quasi constante qui le
caractérise le rend cependant moins bénéfique pour l’homme et
pour le matériel… La stabilité du climat, notamment en ce qui
concerne les vents, a cependant permis l’installation d’un habitat
pérenne de maisons en bois… La structure des constructions reflète
d’ailleurs les caractéristiques du climat guyanais ; de larges
galeries couvertes permettent en effet d’assurer un ombrage
permanent mais aussi d’abriter des pluies abondantes. Un
soubassement de maçonnerie permet en outre d’éloigner le rezde-chaussée d’un sol trop souvent humide et parfois inondable.
Ces caractères climatiques sont déterminants dans la
perception des paysages. Outre son rôle dans l’alimentation du
réseau hydrographique et l’existence même de la forêt
sempervirente, le climat par son humidité et donc sa nébulosité est
directement lisible (rythme de l’ombre portée des nuages, vagues
de brumes d’évapotranspiration, murs de pluies et ciels
contrastés). Par la dureté de son ensoleillement, il met en valeur les
contrastes en clair obscur baignant le paysage dans une lumière
crue.
Fig. 34 Position de la ZIC en juillet et janvier (M. Halldin)
Malgré sa pluviométrie importante, le pays dispose d’un
ensoleillement régulier, dont les maxima ont lieu en saison sèche
sur la bande côtière.
Concernant le vent, la Guyane est soumise au régime
permanent des alizés du secteur Est dominant.
Fig. 33 Carte pluviométrique de la Guyane (R. Auburtin)
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Atlas des Paysages de la Guyane – Direction Régionale de l’Environnement de la Guyane – VU D’ICI & ARUAG
Fig. 35 Rose des vents guyanaise
Une forte dynamique littorale
L’approche géologique de la première partie a souligné la
singularité des côtes guyanaises, seules côtes rocheuses entre
l’Orénoque et l’Amazone. Ces accroches solides ont d’ailleurs valu
le développement d’implantations humaines directement sur la
côte notamment à Cayenne (ce qui n’est pas le cas sur le reste du
territoire). On retrouve ainsi trois grands types d’espaces aux
ambiances spécifiques et radicalement différentes sur le littoral
guyanais :
 Les zones rocheuses
Formations géologiques très anciennes, elles sont limitées à
quelques sites
o sur l’Ile de Cayenne : les pointes de Montabo,
Montravel, Bourda.
o à Kourou : la Pointe des Roches,
o entre les embouchures de l'Approuague et de
l'Oyapock : la Montagne d’Argent et les Monts de
l’observatoire,
On retrouve aussi des traces de ces côtes rocheuses sur les îles
proches du littoral: les Iles du Salut, l’île du Grand Connétable, les
îlets de Rémire. En raison d'une quasi absence de sol organique,
de rudes conditions d'ensoleillement et des embruns salés
permanents, la végétation est pauvre et discontinue sur les
rochers. En revanche, ces côtes rocheuses favorisent le
développement d'herbiers sous-marins à leur proximité.
 Les zones sableuses
Elles sont instables dans le temps, puisque soumises au
déplacement des bancs de vase. Lorsque la plage n’est pas
protégée par un banc au large, elle s’érode sous l’action de la
houle et des courants. Le sable repart car il n'est plus freiné par les
bancs de vase. Ceci conduit à un déplacement des stocks de
sable à l’intérieur des baies. Ainsi les profils de plage évoluent sans
cesse. Malgré les conditions difficiles, les plantes comme les
ipomées poussant sur le sable ont un pouvoir de colonisation et
une croissance rapide.
 Les zones vaseuses
C’est le domaine de la vasière et de la mangrove littorale. Leur
existence est soumise au déplacement des bancs de vase issus
des rejets de l'Amazone. Les vasières sont des milieux productifs,
grâce aux apports en argile des rivières, qui fixent les éléments
nutritifs, aux déchets organiques produits par la mangrove (feuilles
mortes …), à l’arrivée des éléments nutritifs (ou sels minéraux) lors
des marées hautes, à la température élevée et à l’ensoleillement.
Les vasières permettent à une faune variée de naître, grandir ... Les
micro-organismes qui s'y développent, sont le point de départ
d’une importante chaîne alimentaire tant terrestre qu'aquatique:
larves de crevette, crabes, poissons, oiseaux.
Ces trois grandes entités littorales ne sont pas présentes de
manière homogène et permanente sur la côte guyanaise. En effet
le front de mer guyanais est occupé en majorité par la mangrove,
colonisée principalement par une espèce le palétuvier : Avicennia
germinans. La configuration de cet espace côtier est
essentiellement due à l’impact du système de dispersion
océanique des rejets fins amazoniens. Depuis près de 30 000 ans,
ce système fonctionne de façon identique à l’actuel avec
accumulation des rejets sur les côtes de Guyane.
La dynamique côtière est marquée par l’alternance spatiotemporelle de zones d’accrétion et d’érosion des bancs de vase
déversés dans l’océan par l’Amazone (cf. Fig. 38). Ces séquences
sédimentaires se traduisent par la constitution et le déplacement
de bancs de vase de manière saisonnière avec des vitesses
moyennes de déplacement d’un kilomètre par an. Ces derniers
ont une dimension moyenne de 40 à 60 km de long et 10 à 20 km
de large pour une épaisseur de 5 m avec une orientation de 24°
par rapport à la côte. En 2001 entre Cayenne et le Maroni, on
dénombrait ainsi quatre bancs séparés les uns des autres par des
espaces comparables. Dans la partie frontale des bancs, les vases
fluides ont le pouvoir d’amortir les vagues formant une surface lisse
en miroir sur la mer (cf. Fig. 36). Les processus de consolidation de
ces vases permettent à la mangrove de coloniser l’espace. Vers la
partie distale, le banc devient de plus en plus étroit avec une
surface irrégulière et découpée. A contrario l’érosion est maximale
dans les espaces interbancs.
Ces phénomènes influencent largement le fonctionnement des
écosystèmes côtiers : déviation des estuaires, envasement et
désenvasement des côtes, développement et mort de la
mangrove, impact sur l’évolution des marais subcôtiers,
transformation du paysage littoral le faisant passer de plages
sableuses ouvertes sur l’océan à des mangroves formant un écran
boisé.
La migration des bancs fait donc alterner cette morphologie
littorale dans l’espace et dans le temps faisant ainsi l’originalité des
côtes guyanaises.
Fig. 38 Déplacement du banc de vase à la Pointe Isère,
schématisation d’après images de l’ IRD – Landsat
Fig. 39 Côte rocheuse, îles du salut
Fig. 36 Effet miroir sur la vasière de Cayenne
Fig. 37 Mangrove naissante sur un banc de vase littoral
Fig. 40 Cordon sableux d’Awala-Yalimapo
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Végétation : des paysages où le
végétal est omniprésent
Soumise à un climat équatorial chaud et humide, la Guyane
présente un couvert forestier sur plus de 90% de sa superficie, soit 8
millions d’hectares environ. Elle compte 5500 espèces végétales,
dont plus d’un millier d’arbres. Les formations non forestières
occupent en majeure partie la zone côtière.
On distingue trois grands ensembles végétaux majeurs :
- la mangrove, sur les littoraux et les berges des fleuves,
- la savane, souvent immergée,
- la forêt primaire, installée sur la plus grande partie du
territoire, à l’intérieur des terres principalement.
Fig. 41 L’enchevêtrement forestier marin des mangroves (chemin
des Salines, Rémire Monjoly)
Ces grands ensembles occupent deux grands types d’espaces :
les Terres Basses et les Terres Hautes. On retrouve sur les Terres
Basses les mangroves, marais, forêts marécageuses et savanes
côtières. Les Terres Hautes accueillent quant à elles la forêt
équatoriale sempervirente ombrophile avec des forêts basses,
moyennes ou hautes occupant des sols variés.
Une végétation plus particulière occupe par ailleurs les
« inselbergs »
(« savanes-roches »)
qui
viennent
ponctuer
l’uniformité du couvert forestier. Enfin, les « cambrousses » viennent
compléter ces ensembles.
° Les Terres Basses, alluvions marines (bords de
côte, estuaires…).
Les mangroves
Fig. 42 Le Pri Pri Yiyi : un paysage de marais ouvert
Fig. 43 Les palmiers bâche signalant la savane côtière
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Les mangroves correspondent à des forêts inondées à
chaque marée haute. Exclusivement localisées le long du littoral
ou des estuaires, l’espèce qui les caractérise est le palétuvier ; gris
ou blanc (Avicennia germinans) pour les mangroves côtières,
rouge (Rhizophora racemosae) pour les mangroves d’estuaire.
Les mangroves côtières, inondées par la mer à chaque
marée haute, sont caractéristiques des côtes guyanaises dont elles
occupent presque toute la longueur. Colonisant les dépôts vaseux,
elles s’installent, régressent puis disparaissent au rythme du
déplacement des bancs de vase. Elles présentent ainsi tout à la
fois des peuplements denses bien dressés, des zones évoluant vers
le marais ou des enchevêtrements d’arbres morts ou déracinés.
Interface entre milieu marin et écosystèmes terrestres, la mangrove
côtière constitue un écosystème important sur le plan biologique.
Les mangroves d’estuaire, en situation plus abritée, restent
malgré tout soumises au balancement des marées. Plus riche en
espèces que la mangrove côtière, la mangrove d’estuaire abrite
des espèces de la forêt marécageuse telles que le « palmierbâche » (Mauritia flexuosa) ou le « cacao-rivière » (Bombax
aquaticum).
Le paysage de mangrove constitue ainsi un paysage
ouvert à fermé, selon l’éloignement au bord de mer.
Atlas des Paysages de la Guyane – Direction Régionale de l’Environnement de la Guyane – VU D’ICI & ARUAG
Les marais sublittoraux ou « pripris »
Les marais sublittoraux, situés en retrait de la mangrove,
forment de grandes étendues, notamment à l’Est de Cayenne.
Très ouvert, le paysage des marais est marqué par l’horizontalité du
relief mais aussi des surfaces végétales. La végétation herbacée
flottante se caractérise par la présence d’éléments ponctuels tels
que des Cypéracées, des fougères ou des buissons comme les
pruniers-savane – appelés « zicaques ». Dans les zones d’eau libre
apparaissent le « moucou-moucou » (Montrichardia arborescens),
nénuphars, jacinthes d’eau, roseaux et petits balisiers. Enfin, par
endroits, les herbacées peuvent aussi laisser place à de vastes
forêts marécageuses dominées par le palmier « pinot » (Euterpe
oleracea).
Forêts marécageuses et savanes côtières
Au niveau de la plaine côtière ancienne, au caractère
marécageux plus ou moins localisé, on observe des paysages plus
fermés, constitués de forêts hautes sur sols hydromorphes ; forêts
marécageuses pauvres en espèces et dominées par le palmier
« pinot » ou forêts de « flat » occupant les vallées alluviales. Ces
dernières sont riches en palmiers, en particulier les « maripas »
(Maximiliana maripa) sur affleurements argileux ou sédiments
sableux. Le palmier bâche et le pinot sont également des
éléments repères émergeant de la masse de la végétation.
La plaine côtière ancienne abrite également des savanes
côtières, vastes étendues de petites touffes d’herbes parsemées
d’arbrisseaux nains aux feuilles duveteuses (les « zoreilles d’âne »,
Byrsonima verbascifolia). Dans les bosquets isolés sur les sols sableux
poussent le palmier épineux « awara » et le grand « balourou »
(Phenakospermum guianense). Ce paysage ouvert et horizontal
s’appuie sur le relief des collines recouvertes par la forêt en arrièreplan.
° Les Terres
précambrien
Hautes,
collines
du
socle
Les Terres Hautes sont essentiellement occupées par la forêt
équatoriale sempervirente ombrophile créant un moutonnement
vert assez uniforme, interrompu par les seuls inselbergs. Les arbres,
qui constituent le squelette de la forêt, servent de support à des
lianes mais aussi à de nombreuses plantes épiphytes telles que les
Orchidées, Broméliacées, Aracées… Les plantes herbacées, peu
nombreuses, se concentrent au niveau des trouées lumineuses ; il
s’agit de Marantacées ou encore de Zingibéracées. Les bois sont
denses et impénétrables. Leur sous-bois est riche en palmiers.
Les forêts
On distingue un grand nombre de types de forêts, en
fonction de l’altitude, des sols, de leur densité. On peut néanmoins
les regrouper globalement en forêts de basse ou de moyenne
altitude.
-
les forêts de basse altitude (0-500m) regroupent;
- les forêts ripicoles poussant le long des rives des fleuves
(le « cacao-rivière », Pachyra aquatica, et le « wapa » y
sont très présents)
- les forêts sur sols drainés, sur roches éruptives basiques
ou encore sur roches cristallines
- les forêts sur cuirasses latéritiques, broussailleuses et
riches en lianes
les forêts de moyenne altitude (500-860m)
A ces altitudes relativement modestes, la forêt
submontagnarde à nuages prend la place de la forêt de
plaine. Les mousses et plantes épiphytes y prolifèrent du fait de
la persistance de brouillards. Sur les pentes des massifs, une
forêt haute et majestueuse pousse sur un sol argileux, riche et
profond. Les sommets et les crêtes quant à eux, balayés par les
vents, sont occupés par une forêt basse et broussailleuse riche
en lianes et en arbustes de sous-bois, en particulier des
Rubiacées, Myrtacées et Myrsinacées.
-
La végétation des inselbergs
Les inselbergs sont des reliefs caractéristiques aux pentes
rocheuses plus ou moins dénudées. Emergeant au milieu d’un
océan de forêt, on les appelle localement « savanes-roches ». La
végétation y présente toutes les formes de transitions possibles
entre le rocher nu et la forêt haute humide : couvert herbacé
continu ou discontinu, fourrés arbustifs, forêt basse.
Le type de végétation le plus caractéristique de la « savaneroche » que l’on rencontre dans les zones les plus arides est
constitué de coussins denses de Broméliacées. Dans les
dépressions temporairement humides du rocher, la végétation doit
aussi bien s’adapter à la sécheresse en période estivale qu’à
l’accumulation d’eau en saison des pluies. Des fourrés denses et
ligneux de 1 à 5m sont enfin disséminés ça et là. Sous leur couvert,
pousse un certain nombre d’herbacées dont Anthurium solitarium.
Fig. 44 La forêt, profusion végétale monumentale
Les cambrouzes
Fig. 45 Les écosystèmes singuliers des
(Inselberg des Nouragues, photo P. M. Forget)
Inselbergs
Les cambrouzes correspondent à des formations très
denses, impénétrables, monospécifiques, de quelques mètres de
haut. Elles sont généralement constituées de bambous épineux
(Guada macrostachya), parfois de calumets (Lasiacis ligulata),
plus rarement d’autres graminées voire de fougères (Pteridium
aquilinum, Hypolepsis parallelogramma). Ces formations en
équilibre semblent ne pouvoir évoluer vers un stade forestier ; on
n’y observe pas de germination d’arbres.
L’omniprésence du végétal dans la littérature
guyanaise
Le thème du végétal est omniprésent dans la poésie guyanaise, en
témoigne le recueil de poèmes intitulé Traversée de la Poésie
guyanaise dans lequel on rencontre de très nombreuses
évocations des arbres et des fleurs de Guyane. Gilbert Kramer
évoque ainsi les « branches d’awara » et les « maripas », Isaïe
Wacapou « l’ombre du manguier » et « le fier cocotier ». Le
foisonnement de la forêt tropicale est également suggéré par le
« vert horizon » ou le « paradis vert » de Marie-France Duparl.
L’hibiscus et les orchidées sont enfin des éléments récurrents dans
les poèmes guyanais.
Les contes de Guyane font eux aussi continuellement appel au
thème de la forêt et de l’arbre ; « forêt vierge », « géant de la
forêt », « arbre géant » dont les racines piègent les hommes
peuplent ces récits imaginaires puisant leur source au cœur de la
forêt tropicale.
Ces références continues au végétal dans la littérature guyanaise
témoignent de l’importance du végétal dans le paysage mais
aussi dans la vie et la sensibilité guyanaises.
Une richesse végétale à protéger
La forêt équatoriale abrite de nombreuses espèces recherchées
pour leur bois, comme le « wapa » ou l’amourette, appréciées en
ébénisterie. En terme d’exploitation, l’angélique, le gonfolo, le
grignon, l’amarante ou encore le goupi sont les essences locales
les plus couramment utilisées.
L’awara, dont les fruits permettent la fabrication d’un bouillon
fameux, est également un arbre emblématique au même titre que
le Bois de Rose dont on a longtemps extrait le linalol et le Balata
franc dont on extrait le caoutchouc.
Les palmiers et le « wapa » se retrouvent également dans
l’architecture ; ils sont en effet utilisés pour la construction des
maisons (tuiles de bois, bardeaux et colombages).
De nombreuses propriétés médicinales sont enfin associées aux
arbres de la forêt équatoriale qui trouvent un grand nombre
d’usages auprès des populations autochtones. On n’a d’ailleurs
pas fini de découvrir les étonnantes propriétés de tous ces arbres…
La biodiversité est signalée par les ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt
Faunistique et Floristique). Cet inventaire a fait l’objet d’une
actualisation importante qui s’est achevée fin 2001. 92 zones ont
été confirmées en ZNIEFF sur 78 localisations distinctes. Le choix de
ces espaces a porté sur les inventaires faunistiques et floristiques,
permettant de définir des espèces patrimoniales, et aussi des
habitats patrimoniaux. Il convient de noter également la présence
de nombreuses protections réglementaires dont 6 réserves
naturelles, 2 arrêtés de protection de biotope, une réserve
naturelle régionale ainsi que le nouveau Parc amazonien. Mais à
ce jour des secteurs conséquents de Guyane n’ont pas encore été
prospectés.
Atlas des Paysages de la Guyane – Direction Régionale de l’Environnement de la Guyane – VU D’ICI & ARUAG
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Un socle paysager primaire…
Au regard de cette première approche géographique du territoire
guyanais, il ressort une composition tout à fait singulière et quasi
unique à cette échelle sur le territoire français. Le socle sur lequel
se construit le paysage est encore très marqué par des équilibres
naturels qui s’expriment sur une grande partie du territoire depuis
des milliers d’années. Cet environnement s’apparente donc à une
page vierge qui n’a été imprimée qu’à la marge par la main de
l’homme. Cette quasi-intégrité de l’environnement est également
remarquable parce que très ancienne et encore préservée. Ces
caractères primaires, comme des couleurs pures avant de
composer un tableau, s’expriment nettement au travers des
paysages :






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La géologie, rend compte des formes particulières qui se
lisent dans le paysage au travers des sauts, des chaos et
des côtes rocheuses, des inselbergs et des reliefs orientés.
Elle offre également au paysage une palette de couleurs
chaudes allant du rouge latéritique au blanc des sables
quartzeux en passant par les ocres des oxydations. Les
formations géologiques sont également à l’origine de la
présence de nombreux minéraux dont l’exploitation laissera
d’autres traces dans le paysage.
Le relief malgré sa relativement faible amplitude n’en est
pas moins très mouvementé. Il constitue souvent des
repères dans le paysage par ses îles et ses monts et assure
des limites visuelles très lisibles dans les zones les plus
ouvertes. Il offre également l’opportunité de dominer le
paysage forestier et de découvrir l’océan de verdure
bosselé par un modelé en peau d’orange qui s’étend à
perte de vue.
L’hydrographie dense a contribué à accentuer les formes
du relief et à ouvrir l’espace forestier sur des couloirs d’eau
plus ou moins larges. Par son chevelu très ramifié, le réseau
hydrographique constitue toujours l’un des meilleurs
vecteurs de déplacement sur le territoire guyanais et des
limites frontalières très lisibles. On comprend dès lors la
relation organique entre les Guyanais et leurs fleuves
Le climat équatorial marque fortement le paysage
directement par sa pluviométrie, sa nébulosité et son
ensoleillement et indirectement par les conditions idéales
qu’il offre à la végétation ou par les adaptations de
l’homme pour y faire face.
Une dynamique littorale avec des ponctuations rocheuses
marque la singularité des paysages de la côte guyanaise.
Une palette végétale presque infinie teinte majoritairement
les paysages guyanais d’un camaïeu de verts ponctué des
variations colorées des fleurs et fruits déclinant le caractère
sempervirent de la végétation sur toutes les nuances de la
gamme. La variété des architectures et des textures
végétales assure pour chaque écosystème des ambiances
paysagères multiples.
Fig. 46 Vue sur un long fleuve « tranquille »
Fig. 49 Les couleurs de la terre
Fig. 47 Une forte dynamique côtière
Fig. 50 Un relief qui met en scène le paysage
Fig. 48 Une diversité végétale remarquable
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Fig. 51 L’eau une clé de lecture majeure des paysages guyanais
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