(1958-1960), Exposé no 182 Mai 1959 GÉOMÉTRIE FORMELLE ET

Séminaire BOURBAKI, 5 (1958-1960), Exposé no182 Mai 19591
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GÉOMÉTRIE FORMELLE ET GÉOMÉTRIE ALGÉBRIQUE3
ALEXANDER GROTHENDIECK4
Résumé. This file represents a L
A
T
E
X transcription of Géométrie formelle et géométrie algébrique
which forms a part of a series of talks Grothendieck gave at the Bourbaki Seminar, commonly refer-
red to as Fondements de la Géometrie Algébrique, or FGA as archived on www.numdam.org.
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1. Schémas5
On sait qu’on espace algébrique affine défini sur un corps kest essentiellement déterminé par6
son algèbre affine A(anneau des fonctions régulières définies sur k), les morphismes d’espaces7
algébriques XYcorrespondant bionivoquement aux homomorphismes de k-algèbres A(Y)8
A(X). L’algèbre affine correspondant à un espace algébrique est une k-algèbre de type fini et dans9
le point de vue ”classique”, elle n’a pas d’éléments nilpotents ; inversement, toute algèbre de ce type10
est obtenue comme algèbre affine d’un espace algébrique défini sur k. Il y a alors un dictionnaire11
connu permettant d’interpréter les situations concernant des espaces algébriques affines en termes12
d’algèbre commutative. On a constate depuis longtemps qu’on obtenait alors des énoncés plus13
généraux, car il n’était généralement plus besoin de supposer que les anneaux en jeu étaient du type14
juste envisagé, l’hypothèse noethérienne étant le plus souvent suffisante. En particulier, qu’il y ait15
ou non un corps de base donné, il n’y avait pas lieu d’exclure le cas où ces anneaux contiennent des16
éléments nilpotents. Jusqu’à présent, les géomètres s’étaient refusés à tenir compte de ces indications17
et se sont obstinés à se restreindre à la considération d’algèbres affines sans éléments nilpotents, i. e.18
d’espaces algébriques dans les faisceaux structuraux desquels il n’y a pas d’éléments nilpotents (et19
même le plus souvent, des espaces algébriques ”absolument irréductibles”). Le conférencier pense20
que cet état d’esprit a été un obstacle sérieux au développement des méthodes vraiment naturelles21
en Géométrie algébrique.22
Soit Aun anneau commutatif. Il est bien connu que l’ensemble X=Spec(A)des idéaux premiers23
de Aest muni d’une topologie naturelle, la ”topologie de Zariski” ou topologie spectrale. D’autre24
part, il y a un faisceau d’anneaux commutatifs OXsur X, dont la fibre en pXest l’anneau localisé25
Ap, et dont l’anneau des sections s’identifie à A. Ainsi, Xdevient un espace annelé, appelé spectre26
premier de A. Un homomorphisme d’anneaux f:ABdéfinit un morphisme d’espaces annelés27
f0:Spec(B)Spec(A), l’application ensembliste sous-jacente n’étant autre que pf1(p). Les28
homomorphismes29
1
d’espaces annelés de Spec(B)dans Spec(A)obtenus de cette façon sont exactement ceux pour30
lesquels les homomorphismes OxOy(x=f0(y)) sont locaux (i. e. l’image inverse de l’idéal31
maximal est l’idéal maximal).32
On appelle schéma affine un espace annelé isomorphe à un Spec(A), et préschéma un espace33
annelé localement affine, i. e. dont tout point a un voisinage ouvert qui est un schéma affine pour34
la structure induite. On définit de façon évidente les morphismes des préschémas ; localement ils35
correspondent à des homomorphismes d’anneaux.36
Quand on se fixe un préschéma S, et qu’on regarde des morphismes de préschémas XS, alors37
Sjoue le rôle d’un corps ou d’un anneau de base (ou mieux, d’un espace de base dans une fibration).38
On dit alors que Xest un S-préschéma ; si S=Spec(A), cela signifie aussi que OXest un faisceau39
de A-algèbres. Ainsi, tout préschéma peut être regardé de façon unique comme un Z-préschéma.40
Bien entandu, les S-préschémas forment une catégorie, de plus on montre que dans cette catégorie41
la produit de deux objets X,Yexiste toujours, il est noté X×SY. Cette notion de produit permet42
de définir le changement de base dans un S-préschéma, correspondant à un morphisme S0S: en43
effet, X×SS0pourra être considéré comme un S0-préschéma.44
On dit que Xest séparé au-dessus de Ssi la diagonale de X×SXest fermée. On appelle schéma un45
préschéma séparé au-dessus de Z; il est alors séparé au-dessus de n’importe quoi. Pour simplifier,46
nous ne parlerons plus que de schémas, que de plus nous supposerons noethériens, i. e. réunions47
finies d’ouverts affines, spectres d’anneaux noéthériens. Xest dit de type fini sur S, si pour tout48
ouvert affine Ude S, son image inverse dans Xest réunion finie d’ouverts affines dont les anneaux49
sont des algèbres de type fini sur l’anneau de U. Ce sont de tels S-schémas qui se prêtent à une50
étude proprement qéométrique. En particulier, pour tout sS, la fibre f1(s)de Xau-dessus de51
sest un schéma algébrique sur le corps résiduel χ(S)de l’anneau local Osde sdans S. Ainsi, X52
peut dans une certaine mesure être considéré comme une famille d’”espaces algébriques” f1(s)le53
paramètre sparcourant S(i. e., du point de vue local, l’ensemble des idéaux premiers d’un anneau54
donné). Bien entendu, les χ(s)peuvent avoir des caractéristiques différentes. Si S=Spec(k), où55
kest un corps, on retrouve essentiellement la notion usuelle d’”espace algébrique”, avec la seule56
différence que maintenant le faisceau structural peut avoir des éléments nilpotents.57
2
En s’inspirant de notions bien connues, on définit la notion de morphisme projectif, et plus58
généralement de morphisme propre. Un tel morphisme est de type fini, de plus il transforme parties59
fermes en parties fermées, et garde cette propriété par changement de base quelconque.60
Xétant un schéma (noethérien, comme toujours) le faisceau OXest un faisceau cohérent d’an-61
neaux au sens de [2]. Les faisceaux cohérents de modules sur Xsont donc aussi les faisceaux qui62
localement sont isomorphes à un conoyau d’un homomorphisme Om
XOn
X.63
2. Schémas formels64
Soient Xun schéma, et X0une partie fermée de X. Alors il existe un sous-faisceau cohérent J65
de OXtel que X0=suppOX/J(et il en existe même un plus grand). Muni de OX/J,X0devient66
un schéma, noté Xo; un tel schéma est appelé ”sous-schéma fermé de X. On peut aussi pour tout67
nconsidérer X0muni de OX/Jn+1, noté Xn, c’est un sous-préschéma fermé de Xdont l’ensemble68
sous-jacent est encore X0, mais ayant un autre faisceau structural, soit OXn=OX/Jn+1. Evidem-69
ment les OXnforment un système projectif de faisceaux d’anneaux sur X, dont la limite projective70
OXest appelée complété formel de OXle long de X0. Muni de ce faisceau d’anneaux, X0est appelé71
complété formel de Xle long de X0, c’est donc un espace annelé, mais pas un schéma en général.72
Pour tout faisceau cohérent Fsur X, on peut considérer de même le complété formel F=lim
n
Fn
73
de Fle long de X0(où Fn=FOXOX/Jn+1), c’est un faisceau de modules sur X. Ses sections74
s’appellent les ”sections formelles de Fle long de X0et s’identifient aux éléments de lim
n
Γ(X0,Fn.75
Pour F=OX, on trouve les ”fonctions holomorphes” de Xle long de X0au sens de ZARISKI, (dont76
nous ne suivrons pas la terminologie à cause de ces interférences avec la terminologie classique).77
On appelle schéma formel (sous-entendu : noethérien) un espace topologique X, muni d’un fais-78
ceau d’anneaux topologiques OXsatisfaisant à la condition suivante : on a un isomorphisme de79
faisceaux d’anneaux topologiques OX=lim
n
On, où les Onforment un système projectif de faisceaux80
d’anneaux sur X, faisant chacun de Xun schéma Xn, et tel que pour mn, l’homomorphisme81
OmOnsoit surjectif et ait pour noyau Jn+1
m, où Jmest82
3
le noyau de OmOo. On montre alors que OXest un faisceau cohérent d’anneaux locaux83
noethériens.84
En vertu des définitions, un complété formel Xcomme plus haut est un schéma formel, et85
inversement, tout schéma formel est localement de ce type. En fait, la donnée d’un schéma formel86
affine (i. e. tel que Xosoit affine, ce qui implique que tous les Xnle sont) est équivalente à la donnée87
d’un anneau topologique noéthérien, J-adique séparé et complet.88
Les définitions habituelles : morphisme, morphisme de type fini, morphisme propre, etc., pour89
les schémas ordinaires, s’étendent sans difficulté aux schémas formels.90
3. Les trois théorèmes fondamentaux91
Soit f:XYun morphisme propre de schémas (noethériens comme toujours), soient Y0
92
une partie fermée de Y,X0son image inverse dans X, considérons les complétés formels Y,X93
correspondants. Alors finduit un morphisme f:XYde schémas formels, qui est d’ailleurs94
propre. Soit Fun faisceau cohérent sur X, alors Fest un faisceau cohérent sur X. Dans le théorème 1,95
on oublie X,Y,Fet on ne regarde que le morphisme propre fde schémas formels, et le faisceau96
cohérent Fsur X. (Cependant, le conférencier n’a écrit de démonstration complète que dans le cas97
où on part de X,Y,f,F).98
Théorème 1. (théorème de finitude)99
i. Les Rqf(F)sont des faisceaux cohérents sur Y.100
ii. Les homomorphismes naturels
Rqf(F)lim
n
Rqfn(Fn)
sont des isomorphismes.101
Dans cet énoncé, on suppose choisi un sous-faisceau cohérent Jde OYdéfinissant Y0, d’où par102
image réciproque un sous-faisceau cohérent de OXdéfinissant X0, d’où par suite la définition des103
Fn,Xn,Ynet fn:XnYncomme au n2. Les changements mineurs à faire dans l’explicitation104
de ces notations sont évidents, si on partait d’un morphisme propre quelconque de deux schémas105
formels.106
Le théorème 1 ne concernait que la ”cohomologie formelle”. La Théorème suivant107
4
la met en rapport avec la ”cohomologie algébrique”, et s’apparente à un théorème bien connu de108
SERRE [4] sur la comparaison entre cohomologie algébrique et cohomologie analytique.109
Théorème 2. (Premier théorème de comparaison). - Les Rqf(F)sont des faisceaux cohérents sur110
Y(ce qui est un cas particulier du théorème 1), et les homomorphismes naturels111
Rqf(F)lim
n
Rqfn(Fn)
sont des isomorphismes.112
Corollaire 1. On a des isomorphismes canoniques : Rqf(F) = Rqf(F).113
Ce corollaire est, pour q= 0, une généralisation du ”théorème fondamental des fonctions ho-114
lomorphes” de Zariski, dont nous déduirons une généralisation du ”théorème de connexion” de115
Zariski. Notons d’ailleurs que, alors que le théorème 1 (ii) est trivial pour q= 0, il n’en est plus116
du tout de même pour le théorème 2 ou pour sa formulation équivalente (corollaire 1). En fait, la117
démonstration procède par récurrence descendante sur q(étant trivial pour qgrand, car alors les118
deux membres sont nuls), el le cas q= 0 apparaît donc comme le dernier pas de la récurrence, donc119
si on peut dire le cas ”le plus difficile”.120
Corollaire 2. Supposons Y=Spec(A),Y0étant défini par l’idéal Jde A. Alors pour tout faisceau121
cohérent Fsur X, les Hq(X,F)sont des A-modules de type fini, dont les complétés J-adiques sont122
les Hq(X,F).123
Appliquant enfin ce corollaire à H=HomOX(F,G), on trouve :124
Corollaire 3. Supposons Y=Spec(A),Y0étant défini par l’idéal Jde A. Soient F,Gdeux125
faisceaux cohérents sur X, alors Hom(F,G)est un module de type fini sur A, dont le complété126
J-adique s’identifie à Hom(F,G).127
Bien entendu, l’application naturelle Hom(F,G)Hom(F,G)est celle qui associe à un homo-128
morphisme u:FGson prolongement ”par continuité” u:FG(moyennant quoi Fdevient un129
foncteur en F).130
Supposons maintenant que Asoit séparé et complet pour sa topologie J-adique, alors les corol-
laires 2 et 3 précédents donnent :
Hq(X,F) = Hq(X,F),Hom(F,G) = Hom(F,G).
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