Accueil / Espaces régionaux / Messages techniques / Régions Ouest / Conseil colza - Larves d'altises d'hiver : situation insolite et inquiétante Conseil colza - Larves d'altises d'hiver : situation insolite et inquiétante Jean Lieven (Normandie, Ile de France Ouest) Le 15 mars 2016 Les températures de novembre à janvier ont conduit à une avance considérable des stades du colza avec des premiers boutons apparents dès la fin janvier. Mais en février, le froid a freiné les colzas ; la pluie n’a pas permis des apports d’engrais précoces. Dans ces conditions de dérèglement physiologique, le colza n’a pas toujours trouvé les éléments nutritifs, les températures et le rayonnement nécessaires à sa croissance. Résultat : souvent des plantes tassées avec tiges rabougries, des boutons rougeâtres voire nécrosés (gel) et les dernières feuilles flétries. Affaiblie par ce scenario météo atypique, la culture supporte plus ou moins bien la forte présence des larves d’altise. Pays de Caux (76) - 17 fév. 2016 Pourquoi autant de larves en 2016 ? Modélisation des dates d'apparition des stades larvaires d'altises d'hiver selon les périodes d'activité des adultes ALENCON Accéder au même graphique pour : CAEN (14) - EVREUX (27) - ROUEN (61) VELIZY (78) Les adultes de grosse altise ont colonisé les parcelles de colza dès le 20 septembre et ont exceptionnellement maintenu leur activité (alimentation, reproduction, ponte) jusqu’à début novembre voire plus. A la faveur d’une météo très douce en novembre et décembre 2015, tous les accouplements réalisés entre le 1er octobre et le 1er novembre- voire plus tard- ont conduit à des infestations de larves beaucoup plus précoces et importantes que la normale. Le nombre important de femelles reproductrices conjugué à des pontes échelonnées et un maintien de températures douces ont eu pour effet de multiplier les populations et d’accélérer la cadence du cycle de développement des larves (voir Figure 1). Or, les larves de stade L2 et L3 sont celles qui provoquent le plus de dégâts au cœur des plantes. Cette année, leur présence a été beaucoup plus précoce et virulente qu’une année normale. Quel impact sur le colza ? www.terresinovia.fr - 1 sur 3 Quel impact sur le colza ? Le plus souvent, les larves gagnent et creusent les pétioles des feuilles sans faire plus de mal. Dans les cas les plus sévères (colza chétifs notamment), elles migrent vers le cœur des plantes provoquant une perturbation de la croissance voire une destruction des bourgeons terminaux. La hampe principale est alors nanifiée voire absente, et les tiges secondaires partent du bas de la plante pour former un petit buisson. Fait atypique cette année, de nombreuses larves se sont portées directement à l’aisselle des boutons et feuilles terminales. Il faut espérer que la culture trouvera suffisamment de réserves pour accompagner le développement et les phénomènes de compensations par une productivité des hampes secondaires. Le colza a stocké des réserves importantes dans son pivot (très bons enracinement cet automne). Larve au coeur du colza Des infestations aux conséquences variables selon les contextes Les parcelles argileuses, superficielles, à faible réserve azotée, pH élevé et/ ou à montaison précoce (variété précoce, secteurs plus chauds) sont plus touchées. Inversement, les parcelles profondes, labourées, « tardives », à bonne disponibilité en azote montrent moins de sensibilité. Les colzas associés à des légumineuses semées tôt et bien développées semblent bien tirer leur épingle du jeu également. Les gros colzas en entrée hiver ne sont pas forcément indemnes en cette année atypique, au contraire. En aucun cas, le degré d’attaques des adultes lors de l’implantation de la culture ou le nombre d’adultes piégés en cuvettes ne prédéfinissent à eux seuls les dégâts ultérieurs causés par les larves. Les insecticides appliqués en septembre/ octobre pour préserver les premières feuilles du colza ne suffisent généralement pas à endiguer les attaques larvaires ultérieures. Colza chétif - Vexin (95) 11 mars 2016 Colza sain - Vallée de Seine (27) 11 mars 2016 CE QU’IL NE FAUT PAS FAIRE - Traiter spécifiquement contre larves d’altise aujourd’hui : Terres Inovia n’a jusqu’à présent jamais évalué, au stade bouton accolé, l’efficacité des insecticides contre larves d’altise (des essais d'opportunité sont en cours). Dans les parcelles gravement infestées, les larves désormais présentes, bien à l’intérieur des plantes, ne sont pas ou très peu atteignables par les substances actives. Il est donc trop tard pour déclencher un traitement ciblant le ravageur aujourd’hui. - Réguler un colza fortement infesté par les larves d'altises (dans tous les cas, tenir compte de l'intérêt d'une régulation : en savoir plus sur la régulation de printemps) - Laisser « tomber » : abandonner le suivi ne peut qu’amplifier le risque de perte de rendement. - Retourner la culture à la hâte compte tenu des frais engagés à ce jour sur la culture. Le colza est doté de facultés de compensations souvent très surprenantes. Pas de précipitation dans la décision ! www.terresinovia.fr - 2 sur 3 CE QU’IL FAUT FAIRE - Proscrire tout traitement non justifié pour préserver les insectes auxiliaires et limiter le risque de sélection d’insectes résistants aux pyréthrinoïdes, - Examiner quelques pieds de colza pour évaluer l’ampleur des dégâts éventuels (voir encadré ci- dessous) - Patienter, observer comment évolue la culture dans les 15 prochains jours et adapter si besoin la dose et le fractionnement d’azote au potentiel ré- estimé. - Maintenir une protection phytosanitaire adaptée à chaque situation : surveiller de près les cuvettes (charançon de la tige du colza) ainsi que les méligèthes puis charançons des siliques. Comment diagnostiquer le colza aujourd’hui ? - Regarder les pivots : sont- ils corrects en termes de forme, diamètre et longueur ? - Observer la plante : initie- t- elle des bourgeons axillaires au niveau des cicatrices foliaires laissées par la perte hivernale de feuilles ? Le bouton terminal est- il rougeâtre voire nécrosé ? La végétation est- elle tassée ? - Fendre longitudinalement les plantes : le cœur (de la tige et du collet) et les jeunes bourgeons sont- ils sains (absence de galeries et de larves) ? www.terresinovia.fr - 3 sur 3