Mes chatons présentent des troubles de l’équilibre Doit-on penser cervelet ? Nerfs périphériques ? Par Jean-Laurent Thibaud – Centre de cancérologie de l’ ENVA Cette conférence a été donnée le 5 décembre 2010 lors des rencontres éleveurs/vétérinaires de l’AFVAC à Paris – La Défense. Les troubles de l’équilibre (ataxie) sont un symptôme fréquent lors d’atteinte neurologique. Ils peuvent traduire une atteinte des nerfs périphériques, de la moelle épinière, du système vestibulaire (oreille interne et ses relais dans le tronc cérébral. Chez le chaton où les affections dégénératives et infectieuses pré-ou post-natales prédominent, les atteintes cérébelleuses et les neuropathies sont les plus fréquentes. Aussi face à ce symptôme peu spécifique quant à la localisation de la lésion et quant à la nature de la maladie sous jacente, un examen clinique soigné et une démarche diagnostique rigoureuse doivent permettre de déterminer la localisation et la nature de la lésion. 1 Reconnaître une neuropathie d’une atteinte cérébelleuse : • A) La réalisation du mouvement : Les pertes d’équilibre traduisent un défaut de coordination motrice. Pour que le mouvement soit coordonné, il faut que l’information renseignant sur la position du corps dans l(espace (la proprioception, information sensitive) arrive correctment au cerveau qui en retour ordonne un mouvement adapté (information motrice). Cette information va suivre le trajet simplifié suivant : elle part des neurones moteurs centraux situés des l’encéphale ; ces neurones sont connectés aux neurones moteurs périphériques qui transmettent l’information aux muscles. Ces deux informations sensitive et motrice, doivent être contrôlées et ajustées afin que le mouvement soit harmonieux, dosé et adapté au but recherché : c’est le rôle du cervelet. Par ailleurs, le neurone moteur périphérique est responsable du maintien du volume du tonus musculaire et des réflexes. B) Neuropathie/atteinte cérébelleuse, une loco-motion différente : Le nerf intervient dans le versant sensitif et moteur de la réalisation du mouvement ; lors de neuropathie, outre les pertes d’équilibre, on peut observer une diminution de la force motrice (parésie). Au contraire, lors d’une atteinte cérébelleuse, la force motrice est conservée mais le mouvement est inapproprié, souvent exagéré (hypermétrie), le contrôle ne s’exerçant plus. Une autre différence importante est constatée à l’examen neurologique : lors de neuropathie, les reflexes sont diminués ou absents. De même, le tonus musculaire est diminué et une amyotrophie s’installe. Au contraire lors d’atteinte cérébelleuse, les réflexes, le tonus et le volume musculaire sont normaux voire augmentés, la modulation ne s’exerçant plus. Ces différences permettent de distinguer une atteinte cérébelleuse d’une neuropathie en analysant la démarche. L’examen de la tête et des nerfs crâniens sont également utiles. C) Neuropathies et atteintes cérébelleuses : d’autres symptômes que les pertes d’équilibre C.1 Les autres symptômes lors de neuropathie : Les nerfs périphériques innervent bien sûr les muscles des membres mais aussi ceux de la tête, et en particulier les muscles laryngés, pharyngés et oesophagiens. Lors de neuropathie, on peut rencontrer une paralysie laryngée qui se traduit par des miaulements anormaux et une respiration bruyante, une paralysie pharyngée se traduisant par une difficulté à avaler et un mégaoesophage (visible par radiographie) responsable de régurgitations (émission d’aliments sans effort). C.2 Les autres symptômes lors d’atteinte cérébelleuse : Le cervelet module le mouvement pour l’adapter au but recherché ; ce qui est valable pour les membres l’est également pour la tête et les yeux : on peut observer une incoordination de la tête avec des tremblements intentionnels (lors du jeu ou du repas, les tremblements de la tête ou des oreilles s(intensifient) et des tremblement oculaires. De plus, le cervelet est en relation avec le système vestibulaire : on peut ainsi constater nystagmus, tête penchée, tendance à tourner d’un côté… 2 Quelles sont les principales atteintes cérébelleuses du chaton et comment les différencier ? A) Les principales affections cérébelleuses du chaton : • 2.A.1 : Affections infectieuses : On distinguera les infections infectieuses in utero des atteintes postnatales. L’infection in utero par le parvovirus félin et hypoplasie cérébelleuse : une infection dans les 15 premiers jours de la vie peut également résulter en hypophasie cérébelleuse car la maturation du cervelet se poursuit après la naissance. Les symptômes, présents dès les premiers jours de vie, sont d’une intensité variable en fonction d’hypoplasie. Ils sont stables dans le temps ou s’améliorent progressivement. La péritonite infectieuse féline se manifeste souvent par une atteinte vestibulo-cérébelleuse évoluant plus ou moins rapidement. Des symptômes généraux traduisant l’atteinte d’autres organes sont parfois observés. • 2.A.2 Affections dégénératives Maladie de surcharge autosomique récessive : Mannosidose et gangliosidoses La mannosidose, secondaire à un déficit en –D- mannosidase provoquant une accumulation d’ oligosaccarides riches en mannose dans le tissu nerveux, les reins et le foie, est décrite chez le Persan et le chat européen à poil court ou long et connnait des modalités d’apparition et d’évolution variables (généralement apparition à quelques mois et évolution sur quelques mois). Outre les symptômes cérébelleux, troubles comportementaux, déformations osseuses, organométries et opacifications cornéennes sont décrits. Les gangliosidoses se caractérisent par l’accumulation de gangliosides dans les cellules nerveuses. En fonction de l’enzyme déficiente, on distingue la gangliasidose de type GM1 (Siamois, Korat et européen) et la gangliasidose de type GM2 (européen et japonais à poil court, Abyssin, Somali et Korat). L’ataxie cérébelleuse commence dans les premiers mois post-nataux puis un tableau clinique traduisant une atteinte diffuse du système nerveux s’installe (parésie, amaurose, modifications du comportement, convulsions). Une opacification cornéenne et une dysmorphisme facial peuvent être remarqués. La systrophie neuroaxiale, identifiée chez des chats européens tricolores, affection autosomique récessive se traduit par des symptômes cérébelleux apparaissant vers 5-6 semaines et s’intensifiant progressivement. D’autres auteurs rapportent un début des symptômes plusbrutal et une évolution vers une paraplégie. Les chats présentent une robe lilac qui fonce avec le temps. L’hypomyélisation : Chez le siamois, les symptômes (tremblements intentionnels généralisés et accès de troubles du comportement avec tentatives de morsure) débutent à 4 semaines. ?Ils s’aggravent avec l’activité. Ce comportement semble résulter de paresthésies. • 2.B. Démarche diagnostique : La première étape est de déterminer si les symptômes sont évolutifs ou pas (attention, ils peuvent être très très lentement évolutifs). En effet, face à une ataxie cérébelleuse pure qui touche souvent plusieurs chatons, l’hypoplasie cérébelleuse est la cause la plus probable. Le diagnostique est clinique. Les examens d’imagerie révèlent inconstamment une diminution de la taille ou une absence de cervelet. Si les symptômes sont évolutifs, on peut envisager une atteinte inflammatoire ou dégénérative. Les résultats de l’analyse du liquide cérébrospinal et sont des éléments qui permettront de différencier une atteinte inflammatoire vs dégénérative. Une recherche étiologique pourra ensuite se faire en réalisant des recherches d’agents infectieux dans le LCS, des lésions dans d’autres organes et des tests génétiques. 3 Quelles sont les principales neuropathies du chaton et comment les différencier ? 3.A. les principales neuropathies du chaton o o 3.A.1 Affection infectieuse : La toxoplasmose pourrait en théorie provoquer une polynévrite, isolée ou non. 3.A.2 Affection dégénérative, l’axonopathie distale du Sacré de Birmanie : les chatons présentent des anomalies sur les postérieurs dès 8-10 semaines (chutes, plantigradie) puis sur les 4 membres. Neuropathie associée à l’hyperoxalurie : décrite chez des chats européens à poil court est probaclement une affection ausotomique récessive. Le déficit enzymatique est responsable de l’élimination urinaire d’acile L- glycérique et surtout d’oxalate qui cristallise dans les tubules rénaux. Les signes cliniques apparaissent de manière aigue liée aux cristaux d’oxalate. On note une adduction des tarses, une tétraparésie de type MNP et une nociception diminuée. Niemann Pick A (variant) ; Elle se caractérise par l’accumaulation de spingomyélite et de cholestérol dans les neurones et les macrophages. Décrit chez le Siamois, la transmission serait autosomique récessive. Les symptômes apparaissent entre 2 et 5 mois : tétraparésie progressive avec palmigradie, plantigradie et hyporeflexie. Une modification de la voix est également rapportée. Amyotrophie spinale : Récemment décrite che le Maine Coon, elle se transmet selon un mode autosomique récessif. Selon les lignées, l’incidence de la mutation se situe entre 1 et 5%. Les chatons présentent des tremblements, une faiblesse musculaire proximale et une amyotrophie qui débute vers 4 mois. L’évolution est d’abvord rapide puis les symptômes se stabilisent après 7-8 mois. Démarche diagnostique : La confirmation nécessite la réalisation d’un examen EMG et de biopsie de nerfs et de muscles. La recherche éthiologique nécessite une exploration biochimique et infectieuse. Fonction Anomalies lors d’atteinte cérébelleuse Anomalies lors de neuropathie Vigilance Normale Normale Nerfs Craniens Tremblements intentionnels de la tête et/ou des yeux. Parfois nystagmus spontané ou provoqué, tête penchée. Paralysie laryngée : dysphonie, dyspnée Mégaoesphage : régurgitations Anomalies pharyngées : difficultés à déglutir Posture et locomotion Augmentation du polygone de sustentation. Ataxie systémique, hyperthermie. Parfois tendance à tourner d’un côté. Diminution du polygone de sustentation. Plantigradie, palmigradie. Ataxie systématique plus ou moins parésie. Réactions posturales Sautillement et hémilocomotion anormaux. Pas de déficit du Déficit possible de toutes les placer proprioceptif réactions posturales. R. médullaires Normaux à augmentés Diminués ou absents Tonus masse musculaire Tonus musculaire normal à augmenté Tonus musculaire généralement diminué Amyotrophie fréquente Sensibilité Normale Peut être diminuée, automutilation Prochain RV de l’ AFVAC à Lyon fin 2011