L Effets métaboliques de la chirurgie de l’obésité MISE AU POINT

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MISE AU POINT
Effets métaboliques
de la chirurgie de l’obésité
Metabolic effects after bariatric surgery
G. Baud*,**, R. Caiazzo*,**, F. Pattou*,**
L
a chirurgie bariatrique est le traitement de
l’obésité le plus efficace au long cours et offre
une perte de poids conséquente et durable. Elle
permet également une amélioration des comorbidités associées à l’obésité. Cette revue de la littérature a pour but de présenter les grands principes
de la prise en charge chirurgicale du patient obèse
sévère et d’illustrer les effets bénéfiques de la
chirurgie bariatrique sur les maladies métaboliques
associées à l’obésité.
Prise en charge chirurgicale
du patient obèse
Chirurgie générale et endocrinienne,
hôpital Huriez, CHRU de Lille.
*
Recherche translationnelle sur le
diabète U1190, faculté de médecine,
pôle recherche, Lille.
**
La chirurgie de l’obésité connaît un développement
exponentiel en France et dans le monde. Ainsi, on
estime qu’en 2020, 1 % de la population française
(personnes âgées de plus de 18 ans) aura été opéré
de son obésité (> 500 000 personnes). Une indication
chirurgicale peut être retenue chez les patients souffrant d’obésité morbide (indice de masse corporelle
[IMC] ≥ 40 kg/m2) ou sévère (IMC ≥ 35 kg/m2) si elle
est associée à une comorbidité susceptible d’être améliorée par l’amaigrissement (1). Cette prise en charge
radicale est conditionnée par un recours à une équipe
pluridisciplinaire spécialisée (chirurgien, nutritionniste,
psychologue) dans le traitement des patients massivement obèses pour une durée minimale de 6 mois.
Cet accompagnement consiste le plus souvent en
une véritable rééducation nutritionnelle, s’intégrant
dans un cursus d’éducation thérapeutique. Chaque
patient doit avoir une information honnête et complète concernant les bénéfices attendus de la chirurgie
mais aussi ses contraintes et ses risques. Il pourra alors
choisir, avec son chirurgien et l’ensemble de l’équipe
médicale, l’intervention qui lui correspond le mieux en
fonction de son excès de poids, de ses comorbidités,
du risque opératoire et de ses propres objectifs. Cette
décision doit être validée par une réunion de concertation formalisée, dont les conclusions seront adressées
au patient et à son médecin traitant.
12 | La Lettre du Cardiologue • N° 504 - avril 2017
Description des interventions
La HAS a édité en 2009 des recommandations visant
à encadrer la chirurgie de l’obésité et, notamment,
la pratique des 3 principales interventions : ­l’anneau
gastrique ajustable (AGA), la gastrectomie longitudinale (sleeve gastrectomy, SG) et le court-­circuit
gastrique (gastric bypass, Roux-en-Y gastric bypass
[RYGB]) [figure 1]. Ces opérations sont celles qui
semblent présenter le meilleur rapport bénéfice/
risque. La dérivation biliopancréatique (DBP), intervention plus lourde et nécessitant un suivi parti­
culièrement attentif, semble réservée aux obésités
les plus sévères.
En France, le nombre d’opérations bariatriques a
quadruplé entre 2005 et 2014 (figure 2A). Un total
de 47 000 interventions en chirurgie de l’obésité
a été recensé en 2014. La SG est devenue l’intervention bariatrique la plus pratiquée, et représente 60,7 % de l’activité bariatrique en 2014.
Le RYGB connaît également une augmentation
progressive tandis que l’AGA présente une diminution substantielle (2). Dans une étude de registre
français, dont les données ont été extraites de la
base nationale du Programme de médicalisation
des systèmes informatiques (PMSI) entre 2007 et
2012, la mortalité postopératoire à 90 jours par
type d’intervention était de 0,01 % pour l’AGA,
de 0,13 % pour la SG et de 0,23 % pour le RYGB
(figure 2B) [3]. Les facteurs associés significativement à la mortalité étaient le sexe masculin,
l’âge de plus de 50 ans, le diabète, l’hypertension
artérielle et l’IMC > 50 kg/m2 .
L’anneau gastrique
Le placement d’un anneau sous le cardia permet la
confection d’un premier compartiment gastrique de
15 ml aux dépens du fundus. L’intervention nécessite
une hospitalisation brève et la prise en charge ambulatoire est idéale pour les patients accompagnés,
Points forts
»» L’obésité est un facteur de risque majeur de maladie cardiovasculaire, qui est associé à d’autres facteurs
de risque cardiovasculaire tels que l’hypertension artérielle, la dyslipidémie, et le diabète de type 2.
»» La chirurgie bariatrique est le traitement le plus efficace de l’obésité sévère, permettant une perte de
poids significative et prolongée.
»» Les facteurs de risque cardiovasculaire s’améliorent après une chirurgie bariatrique.
»» La chirurgie bariatrique est associée à une réduction de la mortalité et des événements cardiovasculaires,
tels que l’infarctus du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux.
Mots-clés
Chirurgie bariatrique
Anneau gastrique
Sleeve gastrectomy
Bypass gastrique
Highlights
Poche gastrique
Canal biliaire
commun
Poche gastrique
Anse de Roux
Estomac
Anneau gastrique
Canal biliaire
commun
Canal biliaire
commun
Anse biliopancréatique
Boîtier sous-cutané
abdominal
Partie intestinale
commune
A
B
C
Figure 1. Schémas représentatifs de l’anneau gastrique (A), de la sleeve gastrectomy (B) et du bypass gastrique
Roux-en-Y (C).
»»Obesity is a major risk factor
for cardiovascular disease and
is associated with other cardiovascular risk factors such
as hypertension, dyslipidemia,
and type 2 diabetes.
»»Bariatric surgery is currently
the most efficient therapy
for treating severe obesity,
allowing significant and sustained weight loss.
»»Cardiovascular risk factors
improve after bariatric surgery.
»»Bariatric surgery is associated with reduced mortality
and cardiovascular events,
such as myocardial infarction
and stroke.
Keywords
40 000
0,5
30 000
20 000
10 000
0
Obesity surgery
Gastric banding
Sleeve gastrectomy
Gastric bypass
B
Taux de mortalité (%)
Nombre d’interventions
A
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
2007
2008 2009
2010
2011
2012
AGA
2007
SG
2008
2009
2010
2011
2012
RYGB
Figure 2. Nombre de procédures bariatriques (A) et taux de mortalité postopératoire à 90 jours (B) en France entre
2007 et 2012. Adapté de Lazzati et al. (3).
dont le domicile est proche du centre hospitalier
et dont l’état général le permet. Cette “ceinture”,
réalisée à l’aide d’un tube en silicone, peut être plus
ou moins remplie afin d’ajuster la restriction alimentaire. Pour cela, l’anneau est connecté par un
cathéter relié à un réservoir accessible par ponction
percutanée.
La sleeve gastrectomy
La SG repose sur la résection des deux tiers de
­l’estomac emportant le fundus et une partie du
corps gastrique. Il est laissé une portion tubulée le
long de la petite courbure calibrée en peropératoire
sur une sonde de 36Fr. La section de l’antre débute
La Lettre du Cardiologue • N° 504 - avril 2017 | 13
MISE AU POINT
Effets métaboliques de la chirurgie de l’obésité
entre 2 et 6 cm du pylore. L’intervention est réalisée
le plus souvent par cœlioscopie et l’absence d’abord
de l’étage sous-mésocolique facilite l’opération, qui
peut trouver des indications particulièrement pertinentes chez le patient super-obèse (IMC > 50 kg/­m2)
ou multi-opéré.
Le bypass gastrique
Parmi les 3 procédures comparées, la dérivation
gastrojéjunale ou bypass gastric Roux-en-Y (RYGB),
décrite il y a plus de 50 ans, offre le meilleur recul.
Même si cette intervention n’est pas la plus réalisée
actuellement, elle reste le gold standard. La technique de référence consiste à réaliser une anse en Y à
la Roux, montée sur un moignon gastrique de 20 ml
appendu au cardia. L’anse montée (appelée anse
alimentaire) mesure 1,50 m. L’anastomose gastro­
jéjunale est de type terminolatéral. Le segment d’intestin allant de l’angle de Treitz au pied de l’anse
mesure 50 cm (anse biliaire). ­L’intestin en aval
de l’anastomose jéjunojéjunale (anse commune)
n’est pas systématiquement mesuré au cours de
l’intervention. Sa longueur est toutefois exceptionnellement inférieure à 2 mètres. La DBP est une
variante plus malabsorptive du bypass gastrique
offrant certes une perte de poids plus importante
et une rémission du diabète plus fréquente, mais
au prix d’une dénutrition et d’une accélération du
transit (diarrhée et flatulences malodorantes). Elle
représente moins de 3 % des interventions.
Effets métaboliques
de la chirurgie
Perte de poids
L’IMC, principal facteur de risque de maladie
cardiovasculaire, est généralement choisi comme
critère de jugement principal des études évaluant
l’efficacité de la chirurgie bariatrique. Dans une
méta-analyse comprenant plus de 160 000 patients
inclus dans 164 études (dont 37 essais randomisés),
S.H. Chang et al. ont montré une réduction significative de l’IMC avec la chirurgie bariatrique (4).
La réduction moyenne de l’IMC des études observationnelles était de 11,8 kg/­m2 (IC95 : 9,7-13,9 kg/­
m2) à 1 an (d’après une analyse de 57 études) et de
14,3 kg/­m2 (IC95 : 11,5-17,2 kg/m2) à 5 ans (d’après
une analyse de 10 études). La réduction moyenne de
14 | La Lettre du Cardiologue • N° 504 - avril 2017
l’IMC des 12 études randomisées était de 13,5 kg/­m2
(IC95 : 11,6-15,5 kg/m2) au cours de la première année
postopératoire, et de 11,4 kg/m2 dans la seule étude
ayant analysé les résultats à 5 ans (5). Il existe donc
peu de données à long terme issues d’études prospectives. O’Brien et al. ont regroupé des données issues
d’un suivi de plus de 10 ans incluant 100 patients.
Le pourcentage moyen de perte d’excès de poids
était de 54 % (IC95 : 28-68 %) après RYGB, 54 %
(IC95 : 33-64 %) après AGA et 73 % (IC95 : 70-75 %)
après DBP. Les résultats sont encore plus rares pour
la SG ; une étude observationnelle menée chez
53 patients opérés d’une SG et suivis pendant 6 ans
a constaté que la perte d’excès de poids à 3 ans était
de 77,5 %. Les résultats étaient plus décevants à long
terme et la perte d’excès de poids à 6 ans n’était plus
que de 53,3 % (p < 0,001) [6], ce qui montre l’importance d’une évaluation à long terme des résultats
de ce type d’intervention.
Réduction de la mortalité
et du risque cardiovasculaire
Les études Framingham et Manitoba ont montré que
l’obésité, après 26 ans d’évolution, était un facteur
de risque indépendant de survenue d’événements
cardiovasculaires et de mortalité. Dans une large
méta-analyse incluant 10 625 411 patients, répartis
sur les 4 continents, les auteurs ont montré que le
risque de mortalité augmentait proportionnellement
avec l’IMC (7). Les bénéfices de la chirurgie bariatrique sur la mortalité globale ont notamment été
rapportés par L. Sjöström en 2007, dans une étude
longitudinale de cohorte réalisée en Suède (Swedish
Obese Subjects [SOS] trial) [8]. Dans cette étude, les
auteurs ont montré que la chirurgie réduisait de 30 %
la mortalité globale. Plus récemment, ils ont pu également démontrer que la chirurgie bariatrique était
associée à une diminution significative des décès de
cause cardiovasculaire et à un moindre risque d’accident cardiovasculaire comparativement au seul traitement médical de l’obésité (8). Une méta-­analyse
récente par C.S. Kwok et al. a montré une réduction
de 46 % du risque d’infarctus du myocarde et de
54 % du risque d’accident vasculaire cérébral chez
les patients obèses opérés par rapport à ceux non
opérés (9). En 2015, une étude du Registre suédois a
également confirmé la réduction du risque ­d’infarctus
du myocarde de 49 % chez les sujets obèses et diabétiques opérés d’un RYGB (10). Bien que les données
soient limitées, la chirurgie bariatrique semble avoir
un effet bénéfique sur divers indices de la fonction
MISE AU POINT
cardiaque, comme l’amélioration de la fraction
d’éjection (11). Une étude contrôlée rétrospective
portant sur 22 patients atteints d’insuffisance cardiaque congestive systo­lique a montré une amélioration significative de la fraction d’éjection ventriculaire
gauche (de 22 à 35 %) et du stade NYHA (de 2,9
à 2,3) dans le groupe chirurgie en comparaison au
groupe témoin, permettant ainsi à 2 patients opérés
d’être éligibles à une transplantation cardiaque (12).
Rémission du diabète de type 2
Il y a plus de 20 ans, W.J. Pories et al. ont publié un
article s’intitulant : “Qui l’eût cru ? Une opération
se révèle être le traitement le plus efficace pour le
diabète sucré de l’adulte” (13). Cette équipe avait en
effet observé que la chirurgie bariatrique entraînait
une normalisation rapide de la glycémie chez les personnes obèses atteintes de diabète de type 2 (DT2) et,
10 ans plus tard, près de 90 % de ces patients étaient
toujours en rémission. Ces résultats sur l’amélioration,
voire la rémission, du DT2 après la chirurgie ont été
largement reproduits dans le monde. Plusieurs études
contrôlées randomisées prospectives (ERC) ont maintenant confirmé que la chirurgie permet d’obtenir
un meilleur équilibre glycémique que le traitement
médical seul chez des patients obèses et diabétiques (14). L’analyse de ces ERC montre une réduction de l’HbA1c de 2 % pour le traitement chirurgical
contre 0,5 % pour le traitement médical (p < 0,001).
Dans toutes ces études, l’HbA1c postopératoire était
proche de 6 % dans le groupe chirurgie. Cependant,
la plupart de ces essais n’ont examiné que des résultats compris entre 1 et 2 ans, et seuls quelques-uns
ont examiné les résultats à 3 et 5 ans. La notion de
“rémission” du DT2 s’est progressivement imposée
pour refléter la normalisation des paramètres glucidiques en ­l’absence de traitement hypoglycémiant,
observée chez de nombreux patients au décours de
l’intervention. De nombreuses ERC, comportant un
suivi compris entre 1 et 5 ans, ont montré un taux de
rémission du DT2 allant de 30 à 63 %. Néanmoins,
une récidive du DT2 est classiquement observée chez
35 à 50 % des patients initialement en rémission. La
durée du diabète (> 8 ans), le traitement par insuline et le mauvais contrôle glycémique préopératoire
sont associés à un taux plus faible de rémission du
DT2. Dans la grande majorité des cas, les patients
opérés bénéficient néanmoins d’une amélioration de
leur équilibre glycémique pendant au moins 5 ans.
Ainsi, l’efficacité de la chirurgie sur le contrôle glycémique conduit actuellement les sociétés savantes
à élargir ses indications et à la proposer aux patients
dont le diabète est mal contrôlé et dont l’IMC est
compris entre 30 et 35 kg/­m2 (14). Le choix de la
procédure chirurgicale doit prendre en compte la
balance bénéfice/risque de chacune des interventions. Aucune ERC n’a pour le moment comparé les
4 interventions actuellement recommandées. Un
gradient d’efficacité concernant la perte de poids et
l’amélioration de l’équilibre glycé­mique ressort de ces
ERC disponibles allant de DBP > RYGB > SG > AGA.
Un gradient inverse est observé en ce qui concerne
les complications postopératoires. En définitive, la
DBP est plus efficace que le RYGB sur la rémission du
DT2, mais elle est associée à plus de complications
nutritionnelles postopératoires. Le taux de rémission
du DT2 est plus important après RYGB qu’après AGA.
Cependant, le RYGB est associé à plus de complications postopératoires précoces et l’AGA à un taux
de réintervention plus élevé. Par rapport à la SG, le
RYGB offre un meilleur taux de rémission du DT2,
mais une incidence plus élevée de complications.
Résolution de l’hypertension artérielle
L’obésité est la principale cause d’hypertension
artérielle (HTA) et elle est impliquée dans les cas
d’HTA à hauteur de 77 % chez les hommes et de
64 % chez les femmes. La prévalence de l’HTA est
de 18,1 % chez les individus sains contre 52,3 % chez
les personnes souffrant d’obésité de classe III (5).
L’effet de la chirurgie bariatrique sur la pression artérielle (PA) a été analysé par C. Ricci et al. dans une
méta-analyse qui définissait l’hypertension comme
une PA systolique ≥ 140 mmHg ou la PA diastolique ≥ 90 mmHg ou l’utilisation de médicaments
antihypertenseurs (15). Les données regroupées provenant de 20 études ont démontré que la chirurgie
réduisait de moitié le risque d’hyper­tension (risque
relatif [RR] = 0,54 ; IC95 : 0,46-0,64). Ce résultat était
concordant avec celui d’une autre méta-analyse, dans
laquelle près de la moitié des études incluses avaient
une période de suivi inférieur à 2 ans (4). Ces résultats
suggèrent donc que l’effet de la chirurgie sur l’HTA
survient précocement après l’intervention chirurgicale. Le taux de rémission de l’hypertension était de
75,2 % pour les études randomisées et de 74,4 % pour
les études observationnelles. Les données regroupées
provenant d’études observationnelles à long terme
(plus de 2 ans de suivi) ont montré une rémission de
l’hypertension chez 38,2 % des patients après RYGB
et chez 17,4 % après AGA. En outre, les données à
long terme de l’étude suédoise sur les sujets obèses
La Lettre du Cardiologue • N° 504 - avril 2017 | 15
MISE AU POINT
Effets métaboliques de la chirurgie de l’obésité
ont montré une réduction de la pression systolique
(-5,1 mmHg, IC95 : -7,1 ; -3,1 mmHg) et diastolique
(-5,6 mmHg, IC95 : -6,7 ; -4,4 mmHg), 10 ans après
RYGB (16). La chirurgie semble être moins efficace
lorsque l’HTA est sévère (trithérapie) et qu’elle évolue
depuis plusieurs années (probablement > 10 ans).
Résolution de la dyslipidémie
Une méta-analyse de 15 études a montré une réduction de 67 % de la prévalence de la dyslipidémie
après chirurgie bariatrique (15). Dans une autre
méta-analyse plus ancienne, le taux de rémission
pour la dyslipidémie était de 76 % dans les études
randomisées et de 68 % dans les études observationnelles (4). Les données groupées d’études avec un
suivi à long terme (> 2 ans) ont démontré une rémission de l’hyperlipidémie chez 60,4 % des patients
après RYGB et chez 22,7 % après AGA (17).
Effets de la chirurgie sur la stéatose
hépatique et la NASH
Les auteurs déclarent ne pas avoir
de liens d’intérêts.
La maladie non alcoolique du foie liée à l’obésité
(Non-Alcoholic Fatty Liver Disease [NAFLD]) est
devenue l’une des principales causes d’hépatopathie chronique dans le monde. Elle est associée à
une augmentation de la mortalité et devrait représenter un problème majeur de santé au cours des
prochaines décennies. Le spectre des lésions histologiques de la NAFLD peut aller de la simple stéatose
à la stéatohépatite (NASH), la fibrose avancée, la
cirrhose et le carcinome hépatocellulaire. Dans la
majorité des cas, la NAFLD est fortement associée
aux comorbidités métaboliques telles que la dyslipidémie, la résistance à l’insuline, le DT2 et le syndrome d’apnées du sommeil (SAS). Malgré certains
progrès dans le développement de médicaments
efficaces pour le traitement de la NAFLD, l’arsenal
pharmacologique est encore limité. La modification
du mode de vie associée à la perte de poids reste
la seule thérapie recommandée. Dans une cohorte
longitudinale prospective, nous avons confirmé les
effets bénéfiques de la chirurgie de l’obésité sur la
NAFLD, en étroite relation avec la perte de poids
et la diminution de la résistance à l’insuline (18).
Plus récemment, nous avons également montré
la régression complète des lésions histologiques
hépatiques chez près de 85 % des patients atteints
de NASH, 1 an après la chirurgie (19). Dans une
autre étude de cohorte comprenant 1 201 patients
obèses opérés, soit d’un AGA (n = 539), soit d’un
RYGB (n = 662), nous avons montré que les 2 types
d’intervention amélioraient des lésions hépatiques,
1 et 5 ans après la chirurgie (20). L’amélioration des
lésions histologiques du foie au long cours était en
grande partie liée à la perte de poids. Cependant, un
effet métabolique spécifique et indépendant de la
perte de poids se dégageait de cette étude et expliquait la supériorité du RYGB sur l’AGA, notamment
en ce qui concerne l’amélioration de la stéatose et de
l’inflammation du foie chez ces sujets obèses. Ainsi,
le RYGB semble être l’intervention chirurgicale de
choix de l’obésité morbide associée avec la NAFLD
sévère. La place d’autres procédures plus récentes
comme la SG reste à déterminer.
Conclusion
La chirurgie bariatrique est actuellement le traitement le plus efficace de l’obésité, permettant une
perte de poids importante et prolongée. De plus,
la chirurgie, par les modifications de l’anatomie du
tractus gastro-intestinal qu’elle engendre, permet
d’obtenir une amélioration de la plupart des comorbidités liées à l’obésité (HTA, stéatose et NASH,
DT2, etc.). Cependant, les mécanismes à l’origine
de ces effets spectaculaires restent encore largement inexpliqués. Leur parfaite compréhension est
donc un enjeu majeur pour le développement de
traitements ciblés et moins invasifs, susceptibles
de prévenir ou de traiter l’obésité et les maladies
métaboliques qui lui sont associées.
■
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