Manifestations cliniques des cancer Cancer du poumon M. R., 59 ans, vous consulte pour des crachats hémoptoïques apparus depuis quelques mois. En l’interrogeant, vous apprenez qu’il fume 20 cigarettes par jour depuis l’âge de 17 ans, et qu’il présente des épisodes de bronchites hivernales chaque année. Il n’a pas d’autre antécédent, est marié, sans enfant, et est taxi. Question 1 Quels éléments recherchez-vous dans un 1er temps ? Quel triade vous paraît importante à rechercher ? Question 1 Quels éléments recherchez-vous dans un 1er temps ? Quel triade vous paraît importante à rechercher ? • Les signes de tolérance hémodynamique : – – – • Les signes de tolérance respiratoire – – – • Pâleur cutanéo-muqueuse Cyanose Dyspnée Les signes d’altération de l’état général (triade) – – – • Pouls Pression artérielle Conscience Asthénie Anorexie Amaigrissement Les signes de syndrome inflammatoire – – Fièvre (ou fébricule) Sueurs nocturnes Signes généraux Sécrétions tumorales (cytokines proinflammatoires, TNF, IL1, IL6,…) • Triade « AAA » : anorexie, asthénie, amaigrissement • Dénutrition (perte de poids > 10% dans les 6 derniers mois ou > 5% dans le dernier mois) • Etat général (grade OMS, Karnofsky) • Syndrome dépressif • Fièvre au long cours (pas une fièvre « canalaire ») Echelles de performance OMS 0 Activité normale 1 Patient symptomatique ambulatoire 2 Alitement < 50% du temps diurne 3 Alitement > 50% du temps diurne 4 Alitement permanent, grabataire 5 Décès Karnofsky 100 Examen clinique normal 90 Activité normale, minimes symptômes de la maladie 80 Activité normale (AN) possible avec effort 70 AN impossible, autonomie pour les besoins personnels 60 Peu vivre seul mais nécessité d’une aide occasionnelle 50 Nécessité d’une aide importante et de soins médicaux 40 Incapacité, assistance et soins spéciaux 30 Grabataire, hospitalisation nécessaire 20 Très grande incapacité 10 Période terminale 0 Décédé Aucun de ces signes n’est présent, en dehors d’une perte de 5 kg Question 2 Quelles sont vos hypothèses diagnostiques ? Donnez vos arguments pour chacune ? Aucun de ces signes n’est présent, en dehors d’une perte de 5 kg Question 2 Quelles sont vos hypothèses diagnostiques ? Donnez vos arguments pour chacune ? Cancer du poumon – – – – Âge (médiane : 60 ans) Amaigrissement Tabagisme à 42 paquets-année Hémoptysies chroniques Embolie pulmonaire – Hémoptysies MAIS anciennes Tuberculose pulmonaire – – Hémoptysies Amaigrissement MAIS pas de contexte inflammatoire Pneumopathie infectieuse – – Hémoptysies MAIS anciennes Pas de contexte infectieux Cancer du poumon Un peu d’épidémiologie Décès annuels dans le monde * – – – – – 2000-2025 2025-2050 2050-2100 Total XXe s Total XXIe s 150 millions 300 millions > 500 millions 100 millions 1000 millions Un cancer lié au tabac… * Peto R, ASCO 2003 Taux d'incidence du cancer du poumon chez les hommes 250 Taux pour 100 000 200 Classes d’âge 150 40-59 ans 60-79 ans 80 ans et + 100 50 0 1997 1998 1999 2000 Années 2001 2002 Taux d'incidence du cancer du poumon chez les femmes 45 40 Taux pour 100 000 35 30 Classes d’âge 25 40-59 ans 20 60-79 ans 80 ans et + 15 10 5 0 1997 1998 1999 2000 Années 2001 2002 Toxiques du tabac 4000 produits chimiques dans la fumée, dont 43 carcinogènes identifiés : Hydrocarbures aromatiques polycycliques Nitrosamines +++ (tabagisme passif) Benzène Hydrocarbures hétérocycliques Polonium-210 radioactif Dépendance : Nicotine (=nitrosamine) Toxiques du tabac Type de toxicité Quantité dans le courant principal / cig. Ratio courant secondaire/ courant principal Monoxyde de carbone Toxique 26,8-61 mg 2,5-14,9 Benzène Cancérogène 400-500 µg 8-10. Formaldéhyde Cancérogène 1 500 µg 50 3-Vinylpyridine Suspect cancérogène 300-450 µg 24-34 Cyanide d’hydrogène Toxique 14-110 g 0, 06-0,4 Hydrazine Suspect cancérogène 90 ng 3 Oxydes d’azote (NOx) Toxique 500-2 000 µg 3,7-12,8 N-nitrosodiméthylamine Suspect cancérogène 200-1040 ng 20-130 N-nitrosopyrrolidine Suspect cancérogène 30-390 ng 6-120 Toxiques du tabac Phase Solide Particulaire Type de toxicité Quantité dans le courant principal / cig Ratio courant secondaire/ courant principal Goudrons Cancérogène 14-30 mg 1,1-15,7 Nicotine Toxique 2,1-46 mg 1,3-21 Phénol Promoteur 70-250 µg 1,3-3 Catéchol Suspect cancérogène 58-290 µg 0,67-12,8 O-Toluidine Cancérogène 3 µg 18,7 2-Naphthylamine Cancérogène 70 ng 39 4-Aminobiphényl Cancérogène 140 ng 3,1 Benz(a)anthracène Cancérogène 40-200 ng 2-4 Benzo(a)pyrène Cancérogène 40-70 ng 2,5-20 Quinoléine Cancérogène 15-20 µg 8-11 N-nitrosonornicotine Suspect cancérogène 0,15-1,7 µg 0,5-5 nor nitrosocotinine Suspect cancérogène 0,2-1,4 µg 1-22 N-nitrosodiéthanolamine Suspect cancérogène 43 ng 1,2 Cadmium Cancérogène 0, 72 µg 7,2 Risque de décès par cancer bronchique 56 50 44 Risque de décès 38 26 19 13 7,3 1 NF 10 20 30 40 50 60 consommation de tabac (en paquets/année) 70 80 Risque de décès par CB après arrêt du tabac 1.4 fumeurs Décès pour 1000 1.2 1.0 0.8 0.6 ex-fumeurs 0.4 non fumeurs 0.2 0 5 10 15 20 années d'arrêt du tabagisme Doll R et Peto R, British Medical Journal 25 poumon emphysémateux poumon normal cancer du poumon Pièce d’exérèse Dans la discussion, il vous signale quelques épisodes récents de céphalées et de lombalgies insomniantes mal calmées par les antalgiques. Question 3 Quels autres signes cliniques recherchez-vous pour étayer votre hypothèse principale ? Question 4 Quelle serait la signification de chacun de ces signes ? Circonstances de diagnostic Volume tumoral Signes généraux Syndrome paranéoplasique Dépistage (asymptomatique) Dans la discussion, il vous signale quelques épisodes récents de céphalées et de lombalgies insomniantes mal calmées par les antalgiques. Question 3 Quels autres signes cliniques recherchez-vous pour étayer votre hypothèse principale ? Question 4 Quelle serait la signification de chacun de ces signes ? • Signes : • Liés à la tumeur • Liés à l’extension régionale • Liés à l’extension à distance • Liés aux syndromes paranéoplasiques Dépistage (sujets asymptomatiques) • Colorectal (toucher rectal, sang occulte dans les selles) • Sein (palpation, mammographie) • Col de l’utérus (frottis) • Peau, testicules (examen clinique) • Tumeur asymptomatique • Stade précoce • Meilleur pronostic • Survie Volume tumoral Signes d’alarme d’un cancer (American Cancer Society) • Masse ou infiltration dans un organe • Saignement ou écoulements anormaux • Modification du transit intestinal ou des mictions • Plaie qui ne cicatrise pas • Toux irritative ou enrouement • Modification évidente d’une verrue ou d’un grain de beauté • Troubles digestifs ou gène à la déglutition La tumeur et son extension locale • Retentissement sur l’organe atteint - Sténose d’un organe creux - Destruction d’un organe plein (os) - Dysphagie, dysphonie, douleur, occlusion … • Retentissement sur les structures de voisinage - Compression - Hémorragie - Douleur Chez M. R. Interrogatoire Dysphonie Compressionrécurrentielle Dyspnée Compression arbre trachéo-bronchique Dysphagie Compression oesophagienne Toux sèche D’origine bronchique ou pleurale) Toux lors de boisson Fistule trachéo-bronchique Douleurs Pneumothorax, envahissement pariétal, costal… Hoquet Compression du nerf phrénique Hémoptysies Envahissement vasculaire Chez M. R. Inspection Stridor, wheezing Compression laryngée ou trachéale Hippocratisme digital Insuffisance respiratoire Emphysème Insuffisance respiratoire Cyanose Hypoxie Insuffisance cardiaque droite, tamponnade Epanchement péricardique Œdème en pèlerine, circulation veineuse collatérale, comblement des creux susclaviculaires Syndrome cave supérieur Syndrome de Pancoast-Tobias : NCB de territoire C8-D1 associé à un syndrome de Claude Bernard-Horner Tumeur de l’apex avec envahissement du plexus brachial et du ganglion sympathique stellaire Chez M. R. Palpation et percussion Diminution des vibrations vocales et matité déclive Epanchement pleural Frottements pleuraux Epanchement pleural Auscultation Diminution du murmure vésiculaire Epanchement pleural Signes de péricardite Epanchement péricardique Syndrome cave supérieur Syndrome cave supérieur Extension métastatique • Locorégionale (adénopathies) - nodule dur, +/- fixé, indolore - inguinal, axillaire, jugulo-carotidien, sus-claviculaire - profond • A distance (adénopathie ou autre organe) - osseux (douleur, fracture) - hépatique (foie maronné, douleur) - pulmonaire (toux, hémoptysie) - cérébral,… Chez M. R. Extension ganglionnaire Palpation des creux sus-claviculaire Des aires cervicales Des aires axillaires Des autres aires périphériques Signes indirects Dysphonie Dysphagie Hoquet Chez M. R. • Extension métastatique à distance – Organes privilégiés • • • • • – Poumons Foie Cerveau Os Surrénales Signes liés à l’organe • • • • • • Dyspnée (nombreuses métastases pulmonaires) Hépatomégalie dure, multinodulaire Ictère Hémiparésie, monoparésie, … HTIC (céphalées, vomissements) Douleurs osseuses • … Syndromes paranéoplasiques • Liés à la tumeur • A distance • En rapport avec des facteurs sécrétés par la tumeur (hormones, peptides aux propriétés identiques ou modifiées par rapport aux sécrétions physiologiques, anticorps) • Orientation particulière : • tumeurs épidermoïdes des VADS, • Cancer de l’œsophage • Cancer du poumon, poumon à petites cellules, Syndromes paranéoplasiques • Syndromes endocriniens - ACTH, ADH like, PTHrP… • Syndromes neuromusculaires - SNC (encéphalomyélite, rétinopathie, dégénérescence cérebelleuse) - Périphérique (neuropathie) - Jonction neuromusculaire (syndrome myasthénique de Lambert-Eaton) - Musculaire (dermatomyosite ou polymyosite) • Syndromes cutanés (plutôt digestif) - Acanthosis nigricans, hyperkératose avec hyperpigmentation des plis, acrokératose de Bazex,… • Syndromes thrombotiques (plutôt digestif) Chez M. R. Syndromes paranéoplasiques les plus fréquents Hippocratisme digital isolé Hypercalcémie paranéoplasique (≠ par lyse osseuse) Hyponatrémie du Syndrome de Schwartz-Bartter (SIADH) Syndrome de Cushing par sécrétion d’ACTH-like Syndromes neurologiques Accidents thrombo-emboliques SPN endocriniens Syndrome de Cushing ACTH Catécholamines SPN dermatologiques Hippocratisme digital SPN dermatologiques Dermatomyosite SPN dermatologiques Dermatomyosite SPN neurologiques Encéphale Dégénérescence cérébelleuse Encéphalite Moelle épinière Neuronopathie sensitive ou motrice Système nerveux périphérique Neuropathie Myasthénie Sd de Lambert-Eaton SPN neurologiques Question 5 Que vous évoquent les céphalées et les lombalgies ? Question 5 Que vous évoquent les céphalées et les lombalgies ? Métastases cérébrales et osseuses Une radiographie de thorax est réalisée. Question 6 Décrivez les signes radiologiques. Question 7 Quel examen vous paraît indispensable pour confirmer votre diagnostic ? Quels autres examens envisagezvous ? Objectifs Objectif principal : diagnostic anatomo-pathologique Objectif secondaire : bilan d’extension complet Mettre en place une CAT adaptée Examens paracliniques Diagnostic anatomo-pathologique Radiologiques Radio-isotopiques Endoscopies Chirurgie cœlioscopique, médiastinoscopie Marqueurs tumoraux Diagnostic anatomo-pathologique • Objectif principal +++ • Le bilan est orienté dans ce but • Nécessite une équipe anatomo-pathologique motivée, expérimentée Ponction « simple » Echographie TDM Endoscopie Echoendoscopie Chirurgicale Cytologie (frottis, ponction à l’aiguille) Microbiopsie (ponction à l’aiguille) Biopsie-exérèse Diagnostic anatomo-pathologique Cancer Non à Petites Cellules Cancer à Petites Cellules Carcinome à petites cellules • 20 à 25% • Tumeur proximale • Envahissement Ganglionnaire médiastinal • Dissémination métastatique Initiale > 70% Adénocarcinome • Adénocarcinome invasif • Tumeur périphérique • Volontiers métastatique • Carcinome bronchiolo-alvéolaire • <5% • Nodule périphérique • Ou opacité alvéolaire « pneumonique » • Respect de l’architecture pulmonaire 20 à 40% •Carcinome à grandes cellules 10 à 20% Carcinome épidermoïde 5% Tumeur proximale à développement 30 à 40% Endo-bronchique (bourgeon endobronchique) Endoscopie • Référence pour les organes creux • Avantages : •dépistage, diagnostic et prélèvements en « direct » • •Inconvénients : - anesthésie +/- préparation - peu de risques si non interventionnel • Couplée à l’échographie (échoendoscopie) performant pr: -le bilan d’extension local (atteinte pariétale) et locorégional des organes digestifs -le diagnostic histologique des ADP médiastinales postérieures et des organes profonds du mésentère supérieur (pancréas). Figure 13 : La fibroscopie ne visualise que l’arbre bronchique (c’est dire le niveau sous-segmentaire). Elle est réalisée sous anesthésie locale ou sédation. Des biopsies sont réalisées au niveau des anomalies (bourgeon tumoral, infiltration) et des éperons sus-jacents. Les biopsies doivent être multiples (4 à 6 si possible). Figure 15 : ponction à l’aiguille à l’aveugle (haut) des adénopathies au contact de la trachée ou sous guidage échographique (bas) par une sonde d’échographie située à l’extrémité de l’endoscope (écho-endoscopie bronchique) Figure 16 : ponction trans-pariétale d’une tumeur périphérique sous guidage TDM Figure 17 : médiastinoscopie axiale Examens radiologiques • Examens radiographiques sans contraste (mammographie, poumon, os) • Examens radiographiques avec contraste (lavement baryté, TOGD) • Echographie (examen simple, sans danger) - performant sur sein, thyroïde, foie, reins, utérus, vessie, ovaire,… - pb si obésité ou interposition digestive - opérateur dépendant - intérêt ++ si couplé à la ponction (risques) • Tomodensitométrie (TDM) - performant cerveau, tumeur rétropéritonéale,… et bilan d’extension - pb en cas de diabète, d’insuffisance rénale, d’allergie à l’iode - coût • Résonance Magnétique Nucléaire (RMN) - meilleur contraste en tissu mou que la TDM - examen de seconde intention sauf pour les tumeurs du rectum - VADS, foie, médiastin, os, pelvis, sein - pbs durée, coût, opérateur dépendant, champs magnétiques Chez M. R. Le scanner Le TEP TDM-FDG Chez M. R. La scintigraphie Le scanner cérébral Syndromes paranéoplasiques • Syndrome de Schwartz-Bartter (SIADH) : - ADH ke • Hypercalcémie paranéoplasique - sécrétion de PTH-rP (parathormone-related-peptide) - K épidermoïde du poumon, œsophage, VADS, ovaire) • Syndrome de Cushing paranéoplasique • Polyglobulie (cancers du rein) : EPO-like… Objectifs en cancérologie Signes d’appel Investigations Stade TNM de la maladie Classification TNM Tableau 1 : CLASSIFICATION TNM 2010 (cette classification est donnée à titre indicatif) Stadification Tableau 2 : les 4 stades du CBNPC et la survie à 5 ans (ce tableau est donné à titre indicatif) Objectifs en cancérologie Traitement Pronostic Signes d’appel Investigations Stade TNM de la maladie