Les bases de l'immunologie fondamentale et clinique
© 2013, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Chapitre 6
Mécanismes d'action
deslymphocytes T
PLAN DU CHAPITRE
Modes de réactions immunitaires
dépendant des lymphocytes T . . . . . . . 105
Migration des lymphocytes T
au cours des réactions immunitaires
cellulaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106
Fonctions effectrices
des lymphocytes T auxiliaires CD4
+ . . . 109
Rôle des lymphocytes T H 1 dans la défense
immunitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
Rôle des lymphocytes T
H 17 dans la défense
immunitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
Rôle des lymphocytes T
H 2 dans la défense
immunitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
Fonctions effectrices
des lymphocytes T
cytotoxiques CD8
+ . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
Résistance des microbes pathogènes
à l'immunité cellulaire . . . . . . . . . . . . . 114
La défense de l'hôte dans laquelle les lymphocytes T inter-
viennent comme cellules effectrices relèvent de ce que
l'on appelle l'immunité cellulaire. Les lymphocytes T sont
essentiels pour éliminer les microbes qui survivent et se
répliquent à l'intérieur des cellules mais aussi pour éradi-
quer des infections par certains microbes extracellulaires,
souvent par le recrutement d'autres cellules assurant l'élimi-
nation du pathogène. Les réponses immunitaires cellulaires
commencent par l'activation des lymphocytes T naïfs, qui
les fait proliférer et se différencier en cellules effectrices.
Celles-ci éliminent des microbes associés aux cellules, sou-
vent en agissant de concert avec des macrophages et d'autres
leucocytes. Dans le chapitre 3 , nous avons décrit les fonc-
tions des molécules du complexe majeur d'histocompatibi-
lité (CMH) dans la présentation des antigènes des microbes
intracellulaires afin qu'ils soient reconnus par les lympho-
cytes T. Le chapitre 5 a ensuite décrit la manière dont les
lymphocytes T naïfs reconnaissent ces antigènes dans les
organes lymphoïdes et se développent en lymphocytes effec-
teurs. Dans ce chapitre, nous répondrons aux questions sui-
vantes :
Comment les lymphocytes T effecteurs localisent-ils les
microbes intracellulaires dans n'importe quel site de l'or-
ganisme ?
Comment les lymphocytes effecteurs éradiquent-ils les
infections provoquées par ces microbes ?
Quels sont les rôles des macrophages et d'autres leuco-
cytes dans la destruction des pathogènes infectieux ?
Modes de réactions immunitaires
dépendant des lymphocytes T
Pour éliminer différents types de microbes intracellulaires,
l'immunité cellulaire recourt à deux modes de réaction.
Les lymphocytes T auxiliaires CD4
+ crètent des cyto-
kines qui recrutent et activent d'autres leucocytes afin qu'ils
phagocytent (ingèrent) et détruisent les microbes. Les lym-
phocytes T cytotoxiques CD8
+ (CTL) tuent toute cellule
contenant des protéines microbiennes dans le cytosol ou le
noyau, éliminant ainsi les réservoirs cellulaires infectieux
( fig.6.1 ). Les infections microbiennes peuvent survenir
n'importe où dans l'organisme et certains pathogènes sont
Fonctions des lymphocytes T
dansladéfense de l'hôte
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106 Les bases de l’immunologie fondamentale et clinique
capables d'infecter et de vivre à l'intérieur des cellules. Les
germes pathogènes qui infectent les cellules et qui survivent
à l'intérieur de celles-ci comprennent :
de nombreuses bactéries, des champignons et quelques
protozoaires qui sont ingérés par les phagocytes mais
résistent aux mécanismes de destruction de ces phagocytes
et survivent dans des vacuoles ou dans le cytoplasme ;
des virus qui infectent des cellules, phagocytaires ou non,
et vivent dans le cytoplasme de ces cellules (voir chapitre
5, fig. 5.1 ).
Les classes de cellules T diffèrent selon les localisations
cellulaires des microbes qu'elles reconnaissent et par la
nature des réactions qu'ils suscitent. En général, les cel-
lules T CD4
+ reconnaissent des antigènes de microbes dans
des vésicules phagocytaires et sécrètent des cytokines qui
recrutent et activent des leucocytes, tandis que les cellules T
CD8
+ reconnaissent des antigènes microbiens qui sont pré-
sents dans le cytosol et tuent les cellules infectées.
Les réactions de l'immunité dépendant des cellules T se
déroulent en plusieurs phases (voir chapitre 5, fig.5.2 ). Des
lymphocytes T naïfs sont stimulés par des antigènes micro-
biens dans les ganglions lymphatiques et dans la rate , ce qui
génère des cellules T effectrices, dont la fonction est d'éradi-
quer les microbes intracellulaires. Les lymphocytes T effec-
teurs différenciés migrent ensuite dans le foyer infectieux.
Dans ce site, les phagocytes qui ont ingéré les microbes dans
des vacuoles intracellulaires présentent des fragments pepti-
diques des protéines microbiennes associés à des molécules
du CMH de classe II à la surface cellulaire afin qu'ils soient
reconnus par les lymphocytes T effecteurs CD4
+ . Les anti-
gènes peptidiques provenant des microbes vivant dans le
cytosol des cellules infectées sont présentés par des molécules
du CMH de classe I afin qu'ils soient reconnus par des lym-
phocytes T effecteurs CD8
+ . La reconnaissance des antigènes
par les lymphocytes T effecteurs active ceux-ci afin qu'ils
accomplissent leur tâche d'élimination des pathogènes. Ainsi,
dans l'immunité cellulaire, les lymphocytes T reconnaissent
les antigènes protéiques lors de deux phases distinctes :
premièrement, les lymphocytes T naïfs reconnaissent les
antigènes dans les tissus lymphoïdes et réagissent par une
prolifération et une différenciation en cellules effectrices
(voir chapitre 5 ) ;
deuxièmement, celles-ci reconnaissent les mêmes anti-
gènes n'importe où dans l'organisme et réagissent en éli-
minant ces microbes.
Ce chapitre décrit d'abord comment les lymphocytes T
effecteurs différenciés repèrent les microbes dans les tissus,
puis comment les lymphocytes CD4
+ et CD8
+ éliminent ces
microbes.
Migration des lymphocytesT
aucours des réactions
immunitaires cellulaires
Pour que des cellules T puissent répondre à une infection,
elles doivent prendre part à deux types d'activité migratoire.
Tout d'abord, des cellules T naïves doivent migrer entre le
sang et les tissus lymphoïdes dans tout l'organisme, jusqu'à
ce qu'ils rencontrent, au sein d'un ganglion lymphatique ou
de la rate, des cellules dendritiques qui présentent les anti-
gènes que des lymphocytes T reconnaissent (voir chapitre3 ).
Ensuite, après activation, différenciation et expansion des
cellules T naïves sous forme de clones de lymphocytes T
effecteurs, ceux-ci migrent dans les foyers infectieux d'où
ils doivent éliminer les microbes. La migration des cellules
T naïves et effectrices est contrôlée par trois familles de pro-
téines, des sélectines , des intégrines et des chimiokines , qui
régulent la migration de tous les leucocytes, comme décrit
Cellule infectée par
des microbes dans le
cytoplasme
Mise à mort
de la cellule
infectée
Phagocyte avec des microbes
ingérés dans des vésicules
Inflammation,
lyse
microbienne
Activation des
macrophages
lyse des
microbes
ingérés
Cellules T
effectrices
CD4+
(cellules
TH1)
Cellules T
effectrices
CD4+
(cellules
TH17)
Cellules T
CD8+
(CTL)
Sécrétion
de cytokines
AB
Fig.6.1 Immunité cellulaire dirigée contre les microbes intracellulaires. A . Les lymphocytes T effecteurs des sous-populations CD4
+ T
H 1 et
T
H 17 reconnaissent les antigènes et sécrètent des cytokines, qui recrutent des leucocytes (in ammation) et qui activent les phagocytes, a n qu'ils
détruisent les microbes. Les lymphocytes T CD8
+ peuvent aussi produire des cytokines qui induisent de l'in ammation et activent des macrophages
(non montré). B . Les CTL CD8
+ tuent les cellules infectées par des microbes présents dans le cytoplasme. CTL, lymphocytes T cytotoxiques.
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Chapitre 6. Mécanismes d'action deslymphocytes T 107
au chapitre 2 . Les voies de migration des cellules T naïves et
des effectrices diffèrent nettement, en raison de l'expression
sélective de différentes molécules d'adhérence et de récep-
teurs de chimiokines sur les lymphocytes T naïfs par rapport
aux cellules T effectrices, conjointement avec l'expression
sélective des molécules d'adhérence endothéliales et des
chimiokines dans les tissus lymphoïdes ou les foyers inflam-
matoires ( fig.6.2 ).
Les lymphocytes T naïfs expriment la molécule d'adhé-
rence L-sélectine (CD62 L) et le récepteur de chimiokine
CCR7 , qui assurent leur migration sélective dans les gan-
glions lymphatiques à travers les vaisseaux spécialisés
dénommés veinules à endothélium élevé (HEV) ( fig.6.2 ).
Ces vaisseaux sont situés dans les zones des lymphocytes T
des tissus lymphoïdes et sont bordés par des cellules endo-
théliales spécialisées, porteuses de ligands glucidiques qui
se lient à la L-sélectine. Les HEV expriment également des
chimiokines propres aux tissus lymphoïdes et spécifiques
de CCR7. Les lymphocytes T naïfs du sang, en interagissant
avec la L-sélectine, roulent sur l'endothélium de l'HEV, ce
qui permet ensuite à leur CCR7 de se lier aux chimiokines.
CCR7 transmet des signaux intracellulaires qui activent l'in-
tégrine LFA-1 ( leukocyte function-associated antigen 1 ) des
cellules T naïves. LAF-1 activée s'attache alors fermement
à son ligand, ICAM-1 ( intercellular adhesion molecule 1 ),
présent sur l'HEV, et arrête ainsi le roulement des cellules T.
Ensuite, celles-ci sortent du vaisseau à travers les jonctions
endothéliales et restent dans la zone des cellules T du gan-
glion lymphatique en raison des chimiokines présentes. En
conséquence, un bon nombre des cellules T naïves amenées
par le sang dans une HEV atteignent la zone des cellules T
dans le stroma du ganglion. Ceci se déroule en permanence
dans tous les ganglions et tissus lymphoïdes des muqueuses.
Les lymphocytes T effecteurs n'expriment pas CCR7 ou la
L-sélectine et ne sont donc pas attirés dans les ganglions.
Le phospholipide sphingosine-1-phosphate (S1P) joue
un rôle clé dans l'entrée et la sortie des cellules T dans les
ganglions lymphatiques. Les taux de S1P sont plus élevés
dans le sang et la lymphe que dans les ganglions lympha-
tiques. S1P se lie à son récepteur et réduit ainsi l'expression
de celui-ci, avec en conséquence une densité faible du récep-
teur de S1P sur les cellules T naïves circulantes. Quand une
cellule T naïve entre dans le ganglion, elle est exposée à une
plus faible concentration de S1P et l'expression du récepteur
commence à augmenter. Si la cellule T ne reconnaît aucun
antigène, elle quitte le ganglion par les vaisseaux lympha-
tiques efférents en suivant le gradient de S1P du ganglion
jusque dans la lymphe . Si la cellule T rencontre un antigène
spécifique et est activée, l'expression en surface du récepteur
S1P est supprimée pendant plusieursjours. Par conséquent,
les cellules T récemment activées restent dans le ganglion
lymphatique assez longtemps pour subir une expansion
clonale et une différenciation. Lorsque ce processus est ter-
miné, le récepteur de S1P est exprimé à nouveau à la sur-
face des cellules, qui entre-temps ont perdu l'expression de
la L-sélectine et CCR7, qui les avaient attirées dans les gan-
glions lymphatiques. En conséquence, les cellules activées
sont entraînées en dehors des ganglions dans le lymphatique
de drainage, qui transporte ensuite les cellules dans la circu-
lation. Le résultat net de ces changements est que les cellules
T effectrices différenciées quittent les ganglions lympha-
tiques et gagnent la circulation. L'importance de la voie de
S1P a été révélée par le développement d'un médicament,
le fingolimod, qui se lie au récepteur S1P et bloque la sortie
des cellules T des ganglions lymphatiques. Ce médicament
est approuvé pour le traitement d'une maladie inflamma-
toire, la sclérose en plaques .
Les lymphocytes T effecteurs migrent dans les foyers
infectieux, car ces cellules expriment des molécules d'ad-
hérence et des récepteurs de chimiokines qui se lient à des
ligands exprimés ou présentés sur l'endothélium vasculaire
à la suite des réactions de l'immunité innée aux microbes.
Le processus de différenciation des lymphocytes T naïfs
en effecteurs, décrit au chapitre 5 , s'accompagne de chan-
gements dans les collections de molécules d'adhérence et
de récepteurs de chimiokines sur ces cellules ( fig.6.2 ). La
migration des cellules T activées dans les tissus périphé-
riques est contrôlée par les mêmes interactions que celles
qui dirigent la diapédèse des autres leucocytes dans les tissus
(voir chapitre 2, fig.2.16 ), dont voici un rappel des points
principaux. Les cellules T activées expriment en forte den-
sité des ligands glycoprotéiques pour les sélectines E et P,
et les formes à haute affinité des intégrines LFA-1 et VLA-4
( very late antigen 4 ), qui apparaît plus tard que LFA-1 lors
de l'activation des lymphocytes T. Dans le foyer infectieux,
l'endothélium est exposé à des cytokines comme le TNF
( tumor necrosis factor ) et l'interleukine 1 (IL-1 ), qui font
exprimer davantage par les cellules endothéliales les sélec-
tines E et P ainsi que les ligands des intégrines , en parti-
culier ICAM-1 ( intercellular adhesion molecule 1 , le ligand
de LFA-1 ) et VCAM-1 ( vascular cell adhesion molecule 1 , le
ligand de l'intégrine VLA-4). Les lymphocytes T effecteurs
qui traversent les vaisseaux sanguins dans le site de l'infec-
tion se lient d'abord aux sélectines et roulent sur la surface
endothéliale. Les cellules T effectrices expriment aussi des
récepteurs pour les chimiokines qui sont produites par les
macrophages et les cellules endothéliales dans ces foyers
infectieux et qui sont présentes à la surface de l'endothélium.
Les lymphocytes T roulant sur cette surface reconnaissent
ces chimiokines, qui induisent une augmentation de l'affi-
nité de liaison des intégrines pour leurs ligands et ainsi une
adhérence ferme des cellules T à l'endothélium. Après s'être
arrêtés sur l'endothélium, les lymphocytes T effecteurs inte-
ragissent avec d'autres molécules d'adhérence situées aux
jonctions entre les cellules endothéliales et s'insinuent à
travers ces jonctions jusque dans le tissu. Les chimiokines
qui ont été produites par les macrophages et d'autres cel-
lules dans les tissus stimulent la motilité des leucocytes en
train de migrer. Le résultat net de ces interactions molécu-
laires entre les cellules T et les cellules endothéliales est la
migration des cellules T hors des vaisseaux sanguins dans
le foyer infectieux. Les lymphocytes T naïfs n'expriment pas
de ligands pour les sélectines E ou P, pas plus qu'ils n'expri-
ment de récepteurs pour les chimiokines produites dans des
sites inflammatoires. Par conséquent, les cellules T naïves ne
migrent pas dans les sites d'infection ou de lésion tissulaire.
Cette migration , ou « homing », des lymphocytes
effecteurs dans le site d'infection est indépendante de la
reconnaissance des antigènes, mais les lymphocytes qui
reconnaissent les antigènes microbiens sont retenus et
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108 Les bases de l’immunologie fondamentale et clinique
Vaisseau
sanguin
Vaisseau
lymphatique
efférent
sélectine L
Ligand de la
sélectine L
ICAM-1
Ligand de la
sélectine L
CCL19 ou CCL21
Intégrine (LFA-1
ou VLA-4)
Intégrine (LFA-1)
LFA-1 (intégrine β2) ou
VLA-4 (intégrine β1)
Ligand de
la sélectine
E ou P
Ligand des sélectines
E et P
Sélectine
E ou P
CXCR3
CXL10,
autres
Sélectine E ou P
Sélectine L
CCR7
ICAM-1
ou VCAM-1
ICAM-1 ou VCAM-1
Molécules des lymphocytes T
contribuant à l’écotaxie
Ligand sur cellule
endothéliale
Fonction du couple récepteur/
ligand
Lymphocytes T naïfs
Lymphocytes T (effecteurs
et mémoire) activés
Adhérence des lymphocytes T naïfs
à la veinule à endothélium élevé(HEV),
dans le ganglion lymphatique
Activation des intégrines
et chimiotaxie
CXCL10, autres
CXCR3, autres Activation des intégrines et chimiotaxie
Adhérence initiale faible des lymphocytes T
effecteurs et mémoire à l’endothélium
activé par les cytokines dans le foyer
infectieux
Arrét stable sur l’endothélium activé par
les cytokines, dans le foyer
infectieux
LFA-1 (intégrine β2) ICAM-1 Arrêt stable sur l’HEV
Veinule périphérique
A
B
CCL19/21
CCR7
Ganglion lymphatique Tissu périphérique
Artère
LymphocyteT
activé
LymphocyteT
naïf
S1PR
S1P
Veinule à endothélium élevé
dans un ganglion lymphatique
Endothélium
dans le foyer infectieux
Fig.6.2 Migration des lymphocytes T naïfs et effecteurs. A . Les lymphocytes T naïfs gagnent les ganglions lymphatiques suite aux liaisons
de la sélectine L et des intégrines à leurs ligands sur les veinules à endothélium élevé (HEV, high endothelial venule ). Les chimiokines exprimées
dans les ganglions lymphatiques se lient à des récepteurs des cellules T naïves, augmentent ainsi l'adhérence dépendant des intégrines et
favorisent la migration à travers la paroi des HEV. Le phospholipide, sphingosine-1-phosphate (S1P), joue un rôle dans la sortie des cellules T
des ganglions lymphatiques, par liaison au récepteur, appelé S1PR1 (récepteur de type 1 de la sphingosine-1-phosphate). Les lymphocytes T
activés, qui comprennent les lymphocytes effecteurs, migrent ( homing , ou écotaxie) dans les foyers infectieux dans les tissus périphériques,
et cette migration est assurée par la sélectine E, la sélectine P, des intégrines et des chimiokines sécrétées dans les sites in ammatoires.
B . Les
fonctions des principaux récepteurs et de leurs ligands responsables de l'écotaxie des lymphocytes T sont présentées dans le tableau. ICAM-1,
intercellular adhesion molecule 1 ; LFA-1, leukocyte function-associated antigen 1 ; VCAM-1, vascular cell adhesion molecule 1 ; VLA-4, very
late antigen 4 .
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Chapitre 6. Mécanismes d'action deslymphocytes T 109
activés de préférence dans ce site. Comme la migration
des lymphocytes T effecteurs vers les sites d'infection
dépend surtout des molécules d'adhérence et des chimio-
kines, et non de la reconnaissance de l'antigène, tous les
lymphocytes effecteurs présents dans le sang, quelle que
soit leur spécificité antigénique, peuvent pénétrer dans
le site de n'importe quelle infection. Cette migration non
sélective maximise probablement les chances des lym-
phocytes effecteurs d'entrer dans les tissus où ils peuvent
rencontrer les microbes qu'ils reconnaissent. Ces cellulesT
effectrices qui sortent de la circulation et reconnaissent
de manière spécifique des antigènes microbiens présentés
par les cellules présentatrices d'antigène (APC) tissulaires
locales sont réactivées et contribuent à la destruction du
microbe dans les APC. Une conséquence de cette réacti-
vation est une augmentation de l'expression des intégrines
VLA sur les cellules T. Certaines de ces intégrines se lient
de manière spécifique aux molécules présentes dans la
matrice extracellulaire, comme l'acide hyaluronique et la
fibronectine . Par conséquent, les lymphocytes stimulés
par l'antigène adhèrent fermement aux protéines de la
matrice tissulaire près de l'antigène, ce qui peut servir à
garder les cellules dans les foyers inflammatoires. Cette
rétention sélective contribue à l'accumulation de cellulesT
spécifiques des antigènes microbiens dans le foyer infec-
tieux.
Cette séquence d'événements migratoires des cellulesT
permet un déclenchement et un déroulement efficaces de
l'immunité cellulaire quelle que soit la localisation de l'in-
fection. Contrairement à l'activation des lymphocytesT
naïfs, qui nécessite la présentation de l'antigène et une
costimulation par des cellules dendritiques, les lympho-
cytes effecteurs différenciés sont moins dépendants d'une
costimulation. C'est pourquoi la prolifération et la différen-
ciation des lymphocytes T naïfs sont confinées aux organes
lymphoïdes dans lesquels les cellules dendritiques (qui
expriment d'abondants costimulateurs) présentent des anti-
gènes, alors que les fonctions des lymphocytes T effecteurs
peuvent être réactivées par toute autre cellule présentant des
peptides microbiens associés à des molécules du CMH, et
pas seulement par des cellules dendritiques.
Puisque les lymphocytes T auxiliaires CD4
+ et les
lymphocytes T cytotoxiques (CTL) CD8
+ recourent à des
mécanismes distincts pour combattre les infections, nous
décrivons ci-après les mécanismes effecteurs de ces classes
lymphocytaires individuellement. Nous conclurons par la des-
cription du mode de coopération utilisé par ces deux classes
de lymphocytes pour éliminer les microbes intracellulaires.
Fonctions effectrices
deslymphocytes T auxiliaires CD4
+
L'immunité cellulaire contre les pathogènes a été découverte
comme une forme d'immunité dirigée contre une infec-
tion bactérienne intracellulaire et qui pouvait être transfé-
rée à partir d'animaux immunisés à des animaux naïfs par
l'intermédiaire de cellules, identifiés depuis lors comme des
lymphocytes et non des anticorps sériques ( fig.6.3 ) . Les pre-
mières études avaient permis de déterminer que la spécifi-
cité de l'immunité cellulaire contre différents microbes était
2
4
6
8
10
01234
Nombre de Listeria vivantes
dans la rate (log 10)
Jours après I’infection
Lymphocytes T immuns
Lymphocytes T non immuns
1234
ALes lymphocytes T confèrent
une immunité adoptive spécifique
Nombre de Listeria vivantes
dans la rate (log10)
Jours après l’infection
Sérum immun
Sérum non immun
Le sérum ne confère pas
d’immunité spécifique
Pourcentage de destruction
de Listeria in vitro
Leucocytes ajoutés (×10-6)
20
40
60
80
100
0
Seuls les macrophages activés
détruisent les Listeria in vitro
B
C
1.0 2.0 3.0 4.0 5.0 6.0
Lymphocytes T immuns
Macrophages quiescents
Macrophages activés
2
4
6
8
10
0
Fig.6.3 Immunité cellulaire contre une bactérie intracellulaire,
Listeria monocytogenes . Dans cette expérience, des lymphocytes
ou du sérum (une source d'anticorps) ont été prélevés chez une
souris ayant précédemment été exposée à une dose sublétale de Lis-
teria (souris immunisée) et transférés à une souris normale (naïve),
puis on a inoculé la bactérie à la souris receveuse de ce « transfert
adoptif ». On a alors compté les bactéries dans sa rate a n de déter-
miner si le transfert l'avait protégée. La protection contre la bactérie
(se manifestant par une diminution de la récupération de bactéries vi-
vantes) a été induite par le transfert de cellules lymphoïdes immunes,
identi ées comme des lymphocytes T (
A ), mais non par le transfert
de sérum (
B ). Les bactéries ont été tuées in vitro par des macro-
phages activés mais non par des lymphocytes T ( C ). Par conséquent,
la protection dépend des lymphocytes T spéci ques de l'antigène,
mais la destruction des bactéries est une fonction qui incombe aux
macrophages activés.
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