verbale alors que la compréhension est relativement intacte ;
• les troubles de type mixte réceptif-expressif, plus rares, où les
difficultés de compréhension s’associent aux difficultés
d’expression ;
• les troubles phonologiques (prévalence2à3%),oùles
difficultés touchent essentiellement la capacité à produire les
sons normalement acquis à chaque stade de développement,
compte tenu de l’âge de l’enfant. Ce trouble englobe aussi
bien les défauts d’articulation (prononciation des sons
isolément), que les difficultés purement phonologiques qui
apparaissent dans la prononciation des sons à l’intérieur des
mots (substitutions [lavabo →tavalo], élisions [avabo]).
La classification de l’organisation mondiale de la santé ou
CIM-10
[21]
se limite aux troubles développementaux clairement
spécifiques, non attribuables à des anomalies neurologiques, des
anomalies de l’appareil phonatoire, des troubles sensoriels, un
retard mental ou des facteurs liés à l’environnement. La CIM-
10 décrit les trois mêmes syndromes trouble du langage expres-
sif, ou bien mixte réceptif et expressif, ou enfin trouble
d’articulation.
Ces deux classifications se rapprochent de la littérature
internationale qui définit sous le terme de « troubles spécifiques
du langage oral » (specific language impairment) les troubles du
développement du langage oral qui ne sont pas secondaires à
une autre pathologie
[22]
. Cette définition tient compte pure-
ment du caractère déficitaire du langage et de l’absence de
pathologie primitive pouvant expliquer le déficit. Elle ne tient
pas compte du degré de gravité, ni du caractère déviant du
langage (ne respectant pas les étapes normales du développe-
ment) ou non déviant. Dans chacun des syndromes définis par
le DSM IV ou la CIM-10, il est décrit que « le trouble peut être
modéré et guérir, ou peut être sévère et persister à l’âge adulte ».
De nombreux auteurs ont donc dénoncé cette insuffisance
des critères diagnostiques du DSM IV et de la CIM-10, compte
tenu de la différence massive sur le plan de la prise en charge
et le pronostic. En France, il est classique, du fait du pronostic
fondamentalement différent, de diviser les troubles spécifiques
du développement du langage en deux grandes pathologies : le
retard simple de langage et les dysphasies. Dans le retard, le
langage se développe avec délai mais normalement, dans les
dysphasies de développement, beaucoup plus rares, les troubles
sont structurels, sévères et durables, caractérisés par des altéra-
tions particulières du langage oral avec des « déviances »
psycholinguistiques. Cette distinction est licite dans certains cas
portant peu à discussion : soit un trouble purement phonologi-
que expressif et modéré à 4 ans évoquant un retard simple, ou
à l’inverse un trouble phonologique et syntaxique sévère avec
une inintelligibilité et une compréhension également modéré-
ment altérée après 6 ans. Néanmoins dans de nombreux cas,
entre 4 et 6 ans, il est extrêmement difficile de préjuger que
l’évolution du trouble se fera soit vers la normalisation, soit vers
la durabilité des déficits. Il est également très difficile, dans ces
cas intermédiaires, d’anticiper si l’enfant va avoir ou non des
difficultés d’acquisition du langage écrit
[2, 3]
. Un certain
nombre d’arguments sémiologiques permettent de suggérer chez
un enfant d’âge préscolaire que son trouble aura ou n’aura pas
l’évolution persistante d’un trouble structurel
[22]
. La richesse de
production lexicale, la longueur moyenne des énoncés (phra-
ses), la diversité dans les productions des mots grammaticaux
(prépositions, pronoms...) et des verbes semble pouvoir suggérer,
sans certitude, la nature de l’évolution. Les études longitudina-
les étrangères montrent également la difficulté d’anticiper
l’évolution d’un trouble du langage oral avant 5 ans. Le suivi
longitudinal de la grande cohorte de Lyytinen et al
[23]
a
comparé l’évolution de deux groupes d’enfants de la naissance
jusqu’à 6 ans, l’un formé de 107 enfants dits « à risque » car un
de leurs parents présentait un trouble du langage, versus un
autre formé de 93 enfants dits « contrôles » sans antécédent
familial. À 6 mois de vie, les potentiels évoqués montraient des
réponses statistiquement différentes dans les deux groupes.
Tandis que les évaluations de langage à 3 ans ne montraient
aucune différence entre les deux groupes. Il fallait attendre l’âge
de 5 ans pour que les tests de compréhension, d’évocation
lexicale, et d’expression syntaxique montrent des différences
dans les deux groupes. Cette étude évoque qu’il faut attendre
5 ans pour que les caractéristiques de l’évaluation du langage
permettent de différencier un trouble transitoire d’un trouble
persistant. Ces données concordent avec l’étude longitudinale
de Bishop
[24]
d’enfants avec trouble du langage oral suivis de
l’âge de 4 ans jusqu’à 5 ans 6 mois qui montrent que 37 % des
enfants n’ont plus aucun déficit à 5 ans. La revue systématique
de Law
[25]
montre également que plus de 50 % des enfants
détectés précocement comme présentant un trouble expressif du
langage oral verront leur déficit disparaître à l’âge de 5-6 ans.
Donc, même s’il est licite, au-delà du simple critère de gravité,
de chercher les différences sémiologiques illustrant les phéno-
mènes de déviances qui peuvent affecter les niveaux phonolo-
gique, syntaxique, sémantique, et pragmatique du langage oral
permettant définir le générique de « dysphasie »
[26-28]
,ilest
souvent difficile de répondre précisément avant l’âge scolaire
aux interrogations des parents sur le devenir. De sorte que la
conduite pragmatique est de suivre les recommandations
d’indications de l’orthophonie dans ces troubles spécifiques sans
préjuger de l’avenir. Ces recommandations peuvent être résu-
mées comme suit
[9]
: dès 3 ans et demi, 4 ans un trouble
spécifique avec un ou plusieurs critères de gravité (inintelligibi-
lité, agrammatisme, déficit en compréhension) nécessite une
évaluation orthophonique et une rééducation si l’enfant est
coopérant. À partir de 5 ans tout trouble persistant de la parole
ou du langage nécessite une évaluation orthophonique et une
rééducation avec deux objectifs : l’amélioration du trouble du
langage oral et la préparation à l’acquisition du langage écrit. En
dépit d’études françaises évaluant précisément les effets des
soins dans les troubles du langage oral, la revue de littérature de
Law et al.
[29]
concernant les effets des interventions thérapeu-
tiques dans les troubles de parole et de langage, montre les
effets bénéfiques sur les déficits phonologiques et lexicaux, tout
en soulignant le rôle que peuvent avoir les interventions
réalisées par les parents sous la direction des professionnels.
Enfin, les troubles du langage oral sont le facteur prédictif le
plus reconnu dans la littérature de difficultés ultérieures
d’acquisition de la lecture, particulièrement lorsqu’ils sont
persistants
[2, 30]
, donnant toute l’importance à leur dépistage et
prise en charge effective
[9]
. Ceci est d’autant plus important
qu’avec une prise en charge pédagogique et rééducative adaptée,
le pronostic de lecture des enfants dysphasiques est trans-
formé
[26, 31]
.
Il est clair que le diagnostic de « trouble spécifique du langage
oral » n’est pas toujours facile à établir, en particulier chez le
jeune enfant avant 5-6 ans. Il est difficile chez beaucoup
d’enfants d’anticiper si le trouble sera transitoire ou bien
persistant, si l’enfant aura ou non des difficultés d’apprentissage
de la lecture. Lorsque le trouble est sévère, il est plus souvent
associé à d’autres troubles principalement comportementaux et
émotionnels
[32]
, d’intensité diverse, que parfaitement isolé. De
sorte qu’il est indispensable de considérer les difficultés de
l’enfant de façon pluridisciplinaire en s’appuyant sur l’évalua-
tion précise en termes de profil et de gravité du trouble, sans
trop anticiper sur l’avenir. Le rôle du neuropédiatre dans le
diagnostic, l’indication et la coordination des soins orthopho-
niques et des conseils pédagogiques, et le rôle du psychiatre
dans l’évaluation des troubles éventuels de communication,
comportement ou de la relation, et l’indication des soins sont
absolument complémentaires.
■Conclusion
Les conséquences encore trop néfastes des troubles du
développement du langage oral sur les apprentissages scolaires,
la vie sociale et professionnelle des enfants soulignent la
nécessité absolue de construire des projets thérapeutiques et
pédagogiques efficaces pour les combattre. Ces troubles instru-
mentaux ne constituent qu’une faible partie des facteurs
responsables de l’illettrisme, à côté d’autres facteurs psychoaf-
fectifs et socioculturels, mais si ces derniers ont été jusqu’à
maintenant l’objet de recherches pour leur prévention dans le
monde pédagogique, psychanalytique et sociologique, en
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37-201-D-10
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Dépistage des troubles du langage oral chez l’enfant et leur classification
4Psychiatrie/Pédopsychiatrie