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rappeler que Messine fut même résidence d'hiver des consuls engagés dans leurs campagnes
siciliennes.
Finie la guerre Messana se retrouva avec le privilège, très limité, d'être liée à un foedus avec
Rome, ce qui confirmait, au moins en théorie, son indépendance et faisait de la civitas italica du
Détroit, l’un des principaux interlocuteurs dans la province de Sicile des preteurs romains. Le bras
de mer qui séparait la péninsule italienne de celle qui serait devenue la première province romaine
fut, pour raisons de caractère religieux - juridique, la cause principale de la forte discrimination
institutionnelle avec la terra Italia, en constituant une précise frontière, mais une frontière sui
generis, de fait devenue toujours plus labile. Il n'est pas peut-être casuel, si l’on part d’une pareille
perspective, que, comme Livius nous informe, ses eaux assistent à ce spectacle, en 218, de la
rencontre entre Hièron II, maintenant très fidèle allié des Romains, avec les bateaux qui portait en
don, et le consul T. Sempronius Longus, auquel le Sénat avait confié les opérations dans le secteur
sicilien - africain. Nous sommes au commencement du deuxième conflit contre Carthage, pendant
lequel, même si nous n'avons pas des nouvelles précises par les sources, on peut toutefois également
affirmer que le rôle de tête de pont joué dans la première punique par le port de Messine se répéta
presque dans les mêmes termes. Les légions romaines qui allaient à combattre contre les
Syracusains et les autres villes siceliotes qui s’étaient rebellées, arrivées sur les rivages calabrais en
suivant la Capua-Rhegium, affrontaient les trois dangereux kilomètres du Détroit, en partant d'une
localité à six milles de Rhegium, appelée ad Fretum ad statuam ou ad Columnam. Débarqués en
localité ad Traiectum (environ 15 Km. au nord de la ville actuelle de Messine) les soldats romains
faisaient une étape dans la ville péloritaine, véritable caput viarum du système routier sicilien,
avant de rejoindre leur destination finale, suivant la via Valeria à l’ouest ou la via Pompeia au sud.
Même les annnées de la seconde guerre punique furent donc importants pour Messana. À
partir de la fin d’un tel conflit, la Sicile, maintenant totalement contrôlée par les Romains, apparaît
très sporadiquement dans les comptes rendus historiographiques, nous empêchant ainsi d'avoir des
nouvelles suffisantes. Le climat d’une paix substantielle, de tranquillité et de bien-être profitant à
l'île dans les soixante ans suivants la seconde guerre punique, dont parle Diodore, dut avoir ses
bénéfiques effets même pour la zone du Détroit, là comprise celle de Calabre, et cela surtout dans la
perspective des échanges de caractère commercial. Comme souvent, et justement, on a écrit,
Messine, qui avait un réduit territoire cultivable, placée comme elle était immédiatement si près des
monts Péloritains, fondait surtout sur le port son bien-être. Le commerce de la province avec l'Italie
faisait du port de la ville mamertine un intermédiaire utile, sinon indispensable, en lui procurant des
richesses considérables, augmentées du fait qu'elle contrôlait, par sa position stratégique, aussi les
voies commerciales qui de l'Afrique et de l'Orient arrivaient à Rome et en Italie. On peut dire la
même chose, en faisant les justes proportions, pour les autres petits centres, les villages et les
abordages de la côte sicilienne (comme le Peloro avec sa statio navalis et, s’il diffère de ce dernier,
l’ ad Traiectum au nord de Messine) et la côte calabraise.
Ni la troisième guerre punique, ni les célèbres guerres des esclaves de la fin du II
e
siècle
intéressèrent de manière significative l'aire du Détroit, qui cependant dut être à cette occasion
solidement contrôlé par les Romains pour permettre l'habituel passage de troupes qu'on devait
ammener à combattre en Afrique ou dans la Sicile même contre les esclaves rebelles d'Eunus ou
d'Atenion ou pour empêcher que des foules d'esclaves fugitivi passent à ravager l'Italie. Comme du
reste le contrôle militaire de l'aire du fretum était important on constata une cinquantaine d'années
après, aux temps de la révolte de Spartacus. Dans la tentative d'échapper aux armées romaines, le
chef des gladiateurs tenta de se rendre dans l'île, où il entendait peut-être répéter l’exploit des
esclaves rebelles, mais il en fut empêché par la trahison des pirates qu’il avait contactés pour le
transport. Même le tristement célèbre Verres dans l'occasion se serait montré à la hauteur de la
situation, en mettant en acte à Messine des actions de force de dissuasion qui contribuèrent à
détourner le gladiateur thrace de son intention de nuire à la province. Il est licite de suspecter qu'à
stimuler le gouverneur, au-delà des intérêts de politique générale, aient été ses étroits liens avec
cette ville, qui, au moins dans l'immédiat, aurait pu subir les dommages les plus grands de l'invasion