Ebroin, ou comment un Saint Jeannais aurait pu prendre la place de Charlemagne. 1 Ebroin • PRESENTATION • RAPPELS POUR COMPRENDRE LA • • • • • • • SUITE EBROIN ET L’HISTOIRE CONNUE LE BATISSEUR LE REFORMATEUR DE LA MONNAIE LE POURFENDEUR D’EVEQUES QUI ETAIT EBROIN? ETAIT-IL REELLEMENT DE St-JEAN? QUESTIONS/REPONSES 2 PRESENTATION • ON SAIT PEU DE CHOSES SUR EBROIN • TOUT CE QU’ON SAIT DE LUI VIENT DE SES DETRACTEURS • IL Y A DONC NECESSITE DE FAIRE UNE ANALYSE CRITIQUE DE CES ECRITS • IL FAUT RECADRER CES INFORMATIONS A LA LUMIERE DES FAITS ET COUTUMES DE L’EPOQUE 3 RAPPELS POUR COMPRENDRE LA SUITE (1) • LA SOCETE FRANQUE – Elle est tribale. L’unité sociale de base est La SIPPE (mot qui vient du vieil haut allemand sippia, ou de l’ancien nordique sifjar, dérivé de la déesse SIF (en ancien nordique « parente , proche) qui est la femme du Dieu THOR (WOTAN chez les germains). – La SIPPE est une parentèle élargie regroupant tous les individus issus d’un même ancêtre, éventuellement mythique: le STAMM (vieil haut allemand: tronc) donc l’équivalent de la Familia romaine, mais elle comprend également des dépendants, qu’on pourrait nommer « vassaux » avec quelque anachronisme, ou mieux « client » en référence au rapport de dépendance commun à Rome. Comme telle, elle ressemble fortement au clan ecossais ou à la gens romaine. – Les SIPPE sont comme les « gens » de la Rome républicaine, dominés par des aristocrates qui ont à leur service des dépendants. Ces chefs de SIPPE sont appelés les LEUDES (issu du francique *leudi, même racine germanique que le terme allemand Leute "gens" viel haut allemand liuti) , et ce sont eux seuls qu’on est en droit de qualifier d’ « hommes libres ». Les SIPPE peuvent se regrouper en tribus dirigées par des duces puis par des rois (on dit parfois, de manière un peu péjorative, des « roitelets »). 4 RAPPELS POUR COMPRENDRE LA SUITE (2) • LA SOCETE FRANQUE – Le roi franc est loin de l’absolutisme impérial romain. Il est officiellement acclamé par les guerriers de la tribu en armes. Mais n’imaginons pas que ces cérémonies sont spontanées : le futur roi se met d’accord auparavant avec les leudes, leur offre des présents, leur promet ou leur confirme des gratifications. Ainsi comblés, les leudes donnent instruction à leur suite de guerriers d’acclamer le nouveau souverain. Le roi franc gouverne assisté de ses leudes qui ne sont rien de moins que les (modestes) précurseurs des « Grands », ducs et comtes, qui formeront la cour ordinaire des rois de France. Les décisions royales doivent être approuvées par les leudes. Un roi franc privé du soutien de ses leudes est condamné. – Pourtant, le roi franc possède certains atouts qui compensent en partie sa situation en apparence inconfortable. Pour les membres de la tribu, il est habité par un charisme païen, souvent il descend d’un dieu et il peut parfois se prévaloir d’une lignée ancienne et glorieuse. Mais c’est moins vrai pour les Francs que pour les Goths. La famille royale des Saliens semble d’extraction récente et ne remonterait guère avant le début du V° siècle. Il n’empêche que le roi est considéré comme détenteur de la protection divine, du Heilag, mot proto-germanique qui signifie sainteté 5 RAPPELS POUR COMPRENDRE LA SUITE (3) • LA SOCETE FRANQUE – Chez ces peuplades belliqueuses, la victoire est souvent mère de la prospérité : la tribu vit souvent en grande partie du butin ramené des expéditions de pillage. C’est peut-être même la première source de revenu, devant l’agriculture et le commerce. – Le butin est partagé en parts égales qui sont tirées au sort. Nul ne peut se prévaloir de faveurs sur le butin( Cf- le vase de Soissons), Si le butin comporte des terres et des esclaves, ceux-ci sont également tirés au sort et c’est là, l’origine du Francalleu (ce qui est alloué au franc (Leude) en toute propriété sans suzerain). – La société franque primitive est rurale, même semi-nomade. Les Francs vivent dispersés dans des villages, souvent dans des zones forestières. Agriculture, pêche et chasse assurent l’essentiel de la subsistance. Le brigandage et le commerce peuvent éventuellement améliorer l’ordinaire. – Dans cette société guerrière, tout homme libre est amené à porter les armes. Le guerrier franc est un fantassin. Pour attaquer, le guerrier franc utilise une lance et une épée longue (spatha). Le scramasaxe est une épée plus courte que la spatha (mais qui paraît plus longue que le glaive romain classique). La francisque est une hache à un seul tranchant, utilisable comme arme de jet – Comme toute société antique, la société franque est esclavagiste, les expéditions de pillage dans l’empire romain ou contre les tribus voisines ayant pour objectif, entre autres, d’apporter de la main d’œuvre servile. 6 RAPPELS POUR COMPRENDRE LA SUITE (4) • LE MARIAGE CHEZ LES FRANCS – Les Francs, comme les autres peuples germains, pratiquent l‘endogamie au sein de la Sippe Le mariage y prend plusieurs formes. Le père est le chef de la famille et exerce son autorité (mundium ou munduburdium) sur ses femmes, ses enfants, ses esclaves . Il a le pouvoir d’accepter ou de refuser les mariages de chaque membre de sa familia (Stamm). – Les jeunes nobles francs pratiquent une éducation sentimentale auprès des esclaves de leur familia ou des filles de leurs proches (propinquii). Il en résulte souvent plusieurs mariages avec ses épouses de jeunesse (friedelfrau), qualifiées d’épouses de second rang ou d’épouses morganatiques. – Ce type de mariage, la friedelehe, est généralement hypergamique et est conclu de façon privée entre le mari et la femme . Le chef de famille peut décider d’établir pour les jeunes francs arrivés à maturité, des mariages avec des épouses prestigieuses dites de premier rang. Ce type de mariage, célébré en public, permet le rapprochement des familles, assurant une alliance diplomatique. – Cette poligynie entraîne la confusion chez les chrétiens traditionnellement monogames, qui appliquent naturellement le droit matrimonial romain et qualifient à tort ces épouses de concubines ou de maîtresses, croyant leurs enfants illégitimes. Or, les enfants issus des différents mariages sont tous égaux en matière de succession. Le père garde cependant le droit d’écarter de sa succession les enfants de son choix . 7 RAPPELS POUR COMPRENDRE LA SUITE (5) • LES NOMS CHEZ LES FRANCS • Un nom unique, d'origine germanique, provenant du • • • • père ou de la mère ou de leurs ascendants. Un nom créé avec des éléments onomastiques des deux parents Un nom issu d’éléments onomastiques provenant de la SIPPE Des abbréviations familières souvent en O pour les hommes et en A pour les femmes. Ex: Faro, Fara, Ado, Ada….. Une signification quasi totemique en vieil haut allemand 8 RAPPELS POUR COMPRENDRE LA SUITE (6) • LES NOMS CHEZ LES FRANCS • Chaque SIPPE est propriétaire de ses éléments onomastiques. Exemples de personnages que nous retrouverons: – – – – – – Authari (Authachar) (Saint Authaire) Od-wacchar-Odaccar-Audacro Odacr le gardien de son héritage • Epouse 1) Aiga : Aigel, Eigel (racine eigan = posséder). • Epouse 2) Mode, Moda: Modhard ou Modoald ( la racine mod signifie courage ou muot = esprit, âme + hard = dur) – Aldwin, Audowin, Adaluuin, Adalwin, Aluuin, Alwin, Athelwin Elduin Dado: formée des racines "ald" (vieux, noble) et "win" (ami), plus noble ami (SAINT OUEN) – Adal-wulf-Adolf-Adalulf Atholf Edelulf ADO edler Wolf, formée des racines "ald" (vieux, noble) et « Wolf" (loup), plus noble loup – Rad-wulf-Radolf-Ratolf Redulf RADO formée des racines « rad, rat" (gloire, conseil ) et « Wolf" (loup), la gloire du loup Farald, Faralt, Farolt, Farold, FARO formée des racines « faran" (voyager) et "waltan" (gouverner), le souverain en marche (SAINT FARON). Forme féminine Fara: la souveraine en marche (SAINTE FARE) Eber-win-Eueruuin-Auin Eburuin Euruin Everwin Everwyn EBROIN formée des racines « eber" (sanglier) et "win" (ami), ami du sanglier • epouse Leutrude formée des racines « trud“ ( pouvoir) et „liuti“ (peuple) celle qui a un pouvoir sur le peuple – Fils Bodegisil, Bodegeisel, Bodo, Bodo, Boso formée des racines « Bald" (courageux) et « geisel" (flêche), fleche du courageux Eber-ric-Euurric formée des racines « eber" (sanglier) et « rich" (puissant), puissant sanglier Fara-gisel-Faregis Geisel; formée des racines « faran" (voyager), »waltan » (gouverner) et « geisel" (flêche), la flèche de la souveraine en marche Ebergeisel, Ebergisel, Ebergisil, Ebregisel, Ebregisil, Ebregislus, Ebregiselus, Ebregisus, Evergislus, Evergisilus, Everigisil, Everigisilus Ebrégésile formée des racines « eber" (sanglier) et « geisel" (flêche), la flèche du sanglier 9 EBROIN DANS L’HISTOIRE • 643 Grimoald, fils de Pépin de Landen devient maire du palais d’Austrasie après • • l’assassinat d’Othon. 653 Sigebert III, roi d’Austrasie meurt 656 A la mort d'Erchinoald, Bathilde, épouse de Clovis II et régente de fait, le remplace par Ebroïn. Ce dernier a pour parrain Leudesius, aristocrate fils d’Erchinoald. Il est également soutenu par ADO (Saint Ouen), dont il est fort probablement le candidat, devenu entretemps, conseiller de la reine. On sait que derrière lui se tient un groupe puissant auquel la Sippe de Jouarre appartient • EBROIN est un homme d’une trempe peu commune, un homme à poigne qui fait honneur à son nom. Car c’est vraiment une sorte de sanglier que cet aristocrate. Fin politique avec un dessein bien précis - il est décidé à rétablir l’autorité de l’état - , grand stratège et remarquable homme de guerre, il a su acquérir la culture gallo-romaine tout en gardant la rudesse et la cruauté des Francs. Il se servira des deux sans vergogne. De plus, il jouit de l’appui et de l’amitié de Saint-Ouen • 656, Grimoald, maire du palais d’Austrasie remet Dagobert II, fils de Sigebert III à l’évêque Desderius de Poitiers qui après l’avoir fait tonsurer l’exile en Irlande avec la complicité du nouveau maire du palais de Neustrie Ebroin, qui voit là une première occasion de mettre en œuvre ses idées politiques. Grimoald, se croyant soutenu par la complicité des neustriens, place son propre fils Childebert sur le trône d’Austrasie. C’est la première tentative de coup d’état par les pippinides. Cette tentative a le don de déplaire fortement à la noblesse austrasienne qui comme tous les francs est attachée à la légitimité et au symbole royal. Celle-ci prépare, avec l’aide des Neustriens, un piège dans lequel Grimoald et son fils se jettent tête baissée. 10 EBROIN DANS L’HISTOIRE • Le coup d’état avorte donc et Grimoald et son fils sont jeté à Paris,dans un cul de basse fosse. Grimoald y sera exécuté par les Leudes neustriens, avec probablement l’appui discret d’Ebroin, « dans de cruels tourments » selon le chroniqueur. • Ebroin, favorisé par les évênements, a réussi son coup et Clovis II redevient seul roi des francs. Ce Clovis était un personnage peu recommandable que les excès de gourmandise et de luxure rendirent fou avant de le conduire au tombeau en 657 à l’age de 22 ans. Sa femme Bathilde , de son vrai nom Balthilde (Elle est aussi nommée Baldechilde, Bauteur ou Baudour) dont il a eu trois enfants Clotaire, Childéric et Thierry se voit confier la « régence » du royaume, qu’elle exerçait déjà de fait (c’est elle qui a fait nommer Ebroin), pour le compte de son premier fils, Clotaire, alors âgé de 5 ans. • Bathilde et Ebroin mettent donc, en 657, sur le trône l’aîné de Clovis, le petit Chlotaire III. Il a 5 ans. Ils écartent, ce faisant, les cadets qui ont 4 et 3 ans. Leur seul dessein, nul ne l’ignore, est de garder l’unité du royaume. La réunion du Regnum Francorum (la Neustrie, l'Austrasie et la Bourgogne) étant devenue une œuvre fort difficile, ils l’imposent d’abord au deux tiers du royaume, la Neustrie et la Burgondie. Ils inaugurent ainsi une tradition salvatrice pour les Francs. En imposant comme seul héritier Clotaire, l’aîné, ils empêchent la partition du royaume entre les enfants de Clovis, évitant ainsi de nouvelles divisions et les querelles qui ne manquent pas d'en être le pendant. 11 EBROIN DANS L’HISTOIRE • • • • • En 656, Eloi fatigué, accaparé par ses tâches épiscopales et dégouté des intrigues de la cour, décide de se cantonner dans sa retraite et conseille à Bathilde de prendre pour aumonier LEODEGAR (Léger) d’une des plus puissantes familles austrasiennes l’un de ses oncles maternels était duc d’Alsace ; Dido, un frère de sa mère est évêque de Poitiers et son frère Warin (Guérin) en est comte. A Paris, Léger apparait comme un autre Eloi et la reine lui confie officieusement l’éducation de ses enfants. Cette vie change l’année suivante (657) quand meurt Ferréol, évêque d’Autun. Deux clans se forment, chacun soutenant un candidat. Une guerre civile s’ensuit qui se termine par la mort de l’un des candidats et par le banissement de l’autre. Ebroin n’intervient pas ; sa politique étant d’affaiblir la Burgondie, il se contente de compter les points. Bathilde désigne Léger. Ebroin, qui le déteste à cause de son influence, insiste dans ce sens. Le nouvel évêque convoque à Autun un concile disciplinaire où siégent cinquante-quatre évêques. Cette action pacificatrice lui vaudra la confiance de la noblesse burgonde qui commençe à voir en lui son chef et son représentant auprès du pouvoir central. Inutile de dire que ceci n'a pas le don de plaire à Ebroin pour qui l’affaiblissement du pouvoir des évêques est un grand dessein. En 656 au moment de son accession au pouvoir, Sigebert III, roi d’Autrasie, vient de mourir et Grimoald le maire du palais a essayé d’usurper son autorité, en faisant tondre et exiler en Irlande le fils de Sigebert III et lui substituant son propre fils, Childebert dit l’adopté. Les nobles en appelèrent au roi de Neustrie, Clovis II pour rétablir l’unité. Ebroin s’empare de l’Austrasie et Grimoald est éxécuté dans son cul de basse fosse. Or les grands d’Austrasie sous la poussée des séparatistes de l’époque et en particulier de certains évêques réclament leur propre roi. Ebroin n’a pas encore réussi à asseoir son autorité sur les trois royaumes et il est obligé d’accéder à leur demande tout en se promettant bien de faire du ménage. Cependant l’Austrasie était restée, malgré la mort de Grimoald, sous le sceptre de Childebert l’Adopté qui pourissait dans son cachot. Le remettre en liberté, signifiait mettre une croix sur l’unité du Regnum francorum. Or, celui-ci disparait fort opportunément en 662. Cette « disparition » arrange bien les affaires d’Ebroin et comme Clotaire III, fils de Clovis régne sur la Neustrie et la Burgondie, il installe Childéric II, âgé de neuf ans (il est né en 653) et frère de Clotaire sur le trône d’Austrasie avec Wullfload, un homme à lui, non comme maire du palais (les grands d’Austrasie lui refusent un titre qui s’était avili avec Grimoald) mais comme dux. Childéric II est d’autre part fiancé avec Bilichild, fille de Sigibert III. La « régence » est assurée par Chimnechild, veuve de Sigibert. Tout ceci se passe de manière pacifique, mais le parti mérovingien prend de l’assurance et Ebroin conforte son hégémonie sur le troisième royaume. 12 EBROIN DANS L’HISTOIRE • • • • • En 664, l’évêque de Paris Chrodobert, conseiller de la reine Bathilde disparaît. C’est une tradition bien établie que les rois mérovingiens nomment les évêques Ils promeuvent leurs proches collaborateurs (les grands considèrent leur entrée dans l’épiscopat comme une sorte d’avancement et entrent en religion en un temps record en envoyant au passage leur épouse se faire voir chez les nonnes), ils vendent aussi quelquefois le siège vacant au plus offrant. En 665 Bathilde remplace Chrodobert par Sigobrand, appuyé par Ebroin. Celui-ci à peine nommé est saisi et exécuté (le texte dit massacré) par les grands du royaume. Le motif ? le texte parle d’une « agitation provoquée par le misérable évêque Sigobrand dont la superbe provoqua la chute mortelle » Cette explication nous met pour ainsi dire la puce à l’oreille : depuis quand l’orgueil chez un évêque est-il passible de la peine capitale ? En fait il a fallu un incident habilement exploité pour se débarasser de quelqu’un et ce quelqu’un est la reine Bathilde. Ebroin n’a pas participé au complot, mais il est difficile de ne pas y voir sa main. Celui-ci tire prétexte de la volonté de celle-ci de venger le meurtre d'un de ses proches, pour lui signifier la faiblesse de sa position. En peu de mots, il lui fait comprendre qu'il est préférable de vivre recluse dans un couvent plutôt que de mourir sur le trône et que de surcroit le fait que Chlotaire III ait atteint sa majorité lui retire tout droit de gouverner. Elle est aussitôt conduite manu militari par quelques grands qui « permettent à la reine de se rendre sur le champ et directement au monastère (de Chelles) ». Bathilde se réfugie donc à Chelles. Elle a fondé ce monastère, situé au sud-ouest de Meaux, en 658 et l'a richement doté. Bathilde passa dans ce monastère, qu'elle avait royalement agrandi et auquel elle avait donné comme abbesse Bertila, qu'on était allé chercher à Jouarre, les dernières années de sa vie. Elle y mourra en 680. Les circonstances qui ont conduit au retrait de Bathilde, laissent apparaître qu’Ebroin, bien que depuis longtemps l’homme le plus puissant du gouvernement, devait encore en 665, compter avec la « régente ». Juridiquement il n‘était en fait que maire du palais de Neustrie et les grands francoburgondes restaient soumis aux volontés de celle-ci pour ce qui concernait le remplacement des évêques. Mais l’ampleur de la fronde est telle, qu’Ebroin prend aussitôt des mesures d’urgence, il interdit aux « farons », les grands de burgondie de monter à Paris sans un laissez-passer (mandatum) de lui. 13 EBROIN DANS L’HISTOIRE • • • • Après le retrait de la « régente », il restait un groupe de nobles neustriens qui voulait lui faire la peau. Comme à l’époque d’Erkinoald les ducs du Jura entretiennent avec Ebroin de bonnes relations. Mais ce n’était pas le cas de tous les grands des pays de Saône et du Rhône. Les relations directes entre eux et le jeune et influençable roi étaient une source d’inconvénients majeurs. C’est ainsi qu’Ebroin obtient de Chlotaire III un mandat par lequel « plus personne en provenance de la région burgonde du royaume n’accèderait à la cour sans son autorisation ». On pourrait parler d’un coup d’état d’Ebroin. D’un trait de plume le maire du palais de Neustrie était devenu « régent » de la totalité du royaume Neustroburgonde. Il ne semble pas que ce mandat ait été obtenu dans la foulée de la mise à l’écart de Bathilde. Léger d’Autun, qui deviendra le porte parole de l’opposition, signera encore le privilège de l’évêque Dauscius de Soissons en juin 667 sur le monastère de la maison d’Ebroin. Nous ne pouvons pas en conclure que les relations entre les deux futurs adversaires sont amicales mais à ce moment elles sont au moins normales. Léger ne sera accusé de machination contre Ebroin qu’au printemps 673 peu avant la mort de Chlotaire III. L’affaire suit encore son cours lors de la mort du roi. Celle-ci est un coup dur pour Ebroin car le mandat devient caduc. Mais d’un autre côté, la mort de Chlotaire III est si rapide (quelques heures) qu’on soupçonna Ebroin d’avoir voulu couper court aux velleités d’indépendance du jeune roi. Pour éviter une vacance du trône, Le maire du palais proclame alors avec ses partisans le deuxième frère Thierry comme roi, mais s’abstient d’inviter les Optimates aux fêtes d’intrônisation. Il renvoit même à la maison ceux qui qui ont fait le voyage pour la prestation d’hommage. La majorité d’entre eux ne donne pas suite à l’invitation mais se prononce en faveur du troisième frère le roi d’Austrasie Chiderich II qui est bientôt reconnu par l’ensemble. L’erreur d’Ebroin ne consiste pas dans le choix du souverain : Thierry est fils de Clovis II au même titre que Clotaire et n’a encore reçu, contrairement à ses frères, aucune part de l’héritage paternel. Mais Ebroin a agi de son propre chef, sans réunir de conseil de régence et sans consulter les grands des trois royaume qui se sentent floués et ils prononcent la déchéance de Thierry III 14 EBROIN DANS L’HISTOIRE • Pour conclure les festivités de son intronisation le nouveau souverain promet de respecter les us et coutumes de chacun des pays (comme dans l’édit de Chlotaire II) et d’occuper à son tour à chaque fois la charge de maire du palais afin d’éviter que quiconque ne puisse, comme Ebroin s’ériger en tyran. • Childeric envoit son frère Thierry que les grands, en signe de mise à l’écart ont tonsuré – pour le protéger d’une execution éventuelle- en résidence à St Denis sous la garde de l’abbé Chardéric, futur évêque de Beauvais. • Ebroin, sur l’intervention de quelques évêques dont bien sûr Ouen de Rouen et plus étrangement Léger d’Autun a la vie sauve mais est lui aussi tonsuré et envoyé comme moine à Luxeuil. On penser aussi qu’Ebroin fait partie d’une SIPPE si puissante, qu’on ne peut se permettre d’indisposer celle-ci en executant un des ses memebres. • Les leudes mettent la main sur le trésor d’Ebroin et se le partagent. 15 • • • • EBROIN DANS L’HISTOIRE Il n’a cependant pas dit son dernier mot et ceux qui l’ont écarté du pouvoir et laissé en vie vont bientôt le regretter amèrement. L’unité du regnum semble donc revenue comme du temps de Clotaire II, quand Childéric qui était encore célibataire décide d’épouser sa fiancée Bilichilde, fille de Sigebert III et sœur de Dagobert, le prince exilé en Angleterre par Grimoald. Or Leodegar s’oppose à cette union incestueuse du roi et de sa cousine ; Il aurait été simple de demander à un synode d’évêques de ratifier cette union comme bénéfique pour le royaume d’autant plus que les unions consanguines étaient monnaie courante chez les francs. Mais les leudes décident que ce problème est avant tout politique, Léger est éloigné et s’en retourne à Autun. Or Childéric décide célèbrer les fêtes pascales à Autun et le couple royale se fit acclamer le 3 avril 673 lors de la procession des Rameaux, une manière de faire approuver son union par un peuple accouru de toute la Burgondie. Wulfload s’empare de cette occasion pour mettre Léger en accusation. Pour faire bonne mesure on inclut Hector, patrice de Provence et ami déclaré de Leodegar, qui s’était précipité à Autun pour saluer le roi et participer aux festivités. Le Vendredi Saint Childéric reunit les leudes et fait comparaitre Léger et Hector accusés de captation d’héritage. Ceux-ci se déclarent étrangers à une telle affaire. On fait venir comme témoin Saint Priest, évêque de Clermont. Celui-ci refuse de se mêler d’une telle affaire pendant la Semaine Sainte et le tribunal se sépare sans jugement à la confusion de Wulfload. Cependant Childéric et la cour, refusant de participer à des cérémonies menées par Léger, s’enferment à l’abbaye de saint Symphorien. Léger et Hector, comprenant que leur vie est en danger s’enfuient dès la fin de la messe pascale, l’un vers Besançon, l’autre vers Marseille. Poursuivis presqu’aussitôt, il sont rejoints tous les deux. Hector refuse de se rendre et est massacré avec son escorte. Léger, lui est ramené avec les ménagements d’usage à Autun et traduit illico devant un conseil réuni à la hâte. Childéric propose de le déposer, mais comme la chose risque de provoquer quelques troubles parmi une population burgonde acquise à son évêque, ce personnage encombrant est expulsé loin de sa cité et de ses ouailles et est assigné à résidence le 10 avril 673 à l’abbaye de Luxeuil.Il y retrouve son vieil « ami », Ebroin qui attendait son heure en rongeant son frein. Celuici, en se promettant de profiter de l’événement, l’acceuille avec des marques d’amitié tout en rigolant sous cape de ce qui vient d’arriver à celui qu’il considère toujours comme son ennemi. 16 EBROIN DANS L’HISTOIRE • • • • Childéric énivré par sa réussite dans l’élimination de Léger et de son influence, se met à règner comme un tyran et finit par indisposer les grands. Ebroin qui se tenait informé de tous ces développements et qui avait gardé des partisans, profita du châtiment infligé à un comte austrasien du nom de Bodilo que Chidéric avait fait attacher à un poteau et frapper publiquement avec des verges pour agir. Trois comtes, dont il tirait les ficelles, Amalbert, Ingolbert et Loup se donnèrent rendez-vous à la grande chasse que donnait le roi au cours de l’année 673 dans la forêt de Chelles. Profitant d’un moment où Childéric s’était isolé avec la reine et leur fils ainé Dagobert, ils les surprirent et les massacrèrent tous les trois. Leur deuxième fils Chilpéric fut confié à la reine Bathilde, sa grand mère par sa nourrice qui avait réussi à s’enfuir discrètement avec lui. Dès la mort du roi, la plus grande anarchie s’installa dans le royaume. C’est ce qu’attendait Ebroin qui quitta dare dare l’abbaye de Luxeuil accompagné par un Léger sans méfiance. Celui-ci fit dans Autun une entrée triomphale encadré par Genès, évêque de Lyon et par Didon, évêque de Poitiers. Il se rendit ensuite à Paris et avec les Leudes de Neustrie et d’Austrasie tira Thierry III âgé de 21 ans de l’abbaye de Saint Denis. C’etait le dernier petit fils vivant du grand Dagobert . Elevé sur un bouclier, il fut proclamé unique roi des Francs. Ebroin n’avait pas participé à ces évènements avec Thierry III, malgré les marques de fidélité feintes qu’il avait envoyé à son favori de 673. Après avoir quitté les partisans de Thierry III, il était allé sortir son épouse du cloitre dans lequel elle avait été enfermée, puis avait commencé à regrouper ses partisans en leur distribuant le trésor Neustroburgonde qu’il avait enlevé d’un habile coup de main. Entretemps et comme Ebroin n’était pas là, Leudesius, fils d’Erkinoald fut élu maire du palais. Quand Ebroin apprit qu’il avait été ainsi écarté, il commença à organiser sa riposte. Et sa vengeance allait être terrible. 17 EBROIN DANS L’HISTOIRE • Il avait, on le sait déjà, gardé des partisans, mais pour jeter le trouble, il joua sur les • • • • sentiments autonomistes de certains leudes d’Austrasie. Il leur présenta un pseudo fils de Clotaire III et tous ceux qui étaient opposés au règne de Thierry III acceptèrent ou fire mine d’accepter cette fiction sans réclamer de preuves. Avec l’aide des Austrasiens, Ebroin rassembla une troupe de guerriers et s’élança sur Noyon, où il savait que Thierry et ses proches séjournait sans méfiance. L’armée passa l’Oise à Pont-Sainte-Maxense, et fondit à l’improviste sur la villa royale. Il attaqua par surprise la cour du roi, poursuivit les fuyards depuis l’Oise jusqu’à la Somme, mit la main à Baizieux (au nord d’Amiens) sur le trésor royal. Ebroin poursuivit Thierry jusqu’à Crusciniacus (Crécy-sur Serre) où il le captura. Leudesius et ses guerriers furent massacrés. S’étant ainsi emparé du pouvoir, il se proclama luimême maire du palais, et commença alors une répression sanglante telle qu’on n’en avait pas vu depuis le début de la dynastie mérovingienne. Il commença par mettre au pas le clergé de Burgondie : il fit exécuter Ferréol à Vienne, Amour et son compagnon Viateur dans le Jura. Il plaça des hommes à lui sur les sièges épiscopaux de Chalon, Dido ou Desiderius et de Valence, Bobon. En Austrasie, les grands qui gravitaient autour de Wulfload rappelèrent, aidés par Wilfrid d’York, le fils de Sigibert III, Dagobert qui avait été éxilé en Irlande et le proclamèrent roi. Les adversaires de Wulfload proclamèrent pour leur part le soidisant fils de Clotaire III qui avait été affublé du nom de Clovis. A ce groupe, auquel Ebroin s’était joint, appartenaient Waimer, le dux de champagne et Aldaricus/Eticho le dux d’Alsace. Les évêques Deideratus/Dido de Chalon et Bobo de Valence en 18 faisait également partie. . EBROIN DANS L’HISTOIRE • • • • • • Le parti du faux Clovis comportait donc des grands des deux parties du royaume, mais ne devait pas durer longtemps. Ebroin ne l’utilisa que pour mettre sur la touche le parti de Léger en Neustroburgondie. Mais la cible privilégiée d’Ebroin restait Léger. Les évêques en question et les deux dux avaient marché à travers la burgondie sur Autun. L’armée d’Ebroin mis le siège devant la ville le 26 août 676. Léger se rendit pour éviter la destruction de la ville. Celle-ci fut néanmoins consciencieusement pillée puis imposée de 5000 sous d’or (un bœuf valait 2 sous). Entretemps Léger avait été entrainé à l’écart par des guerriers qui, après l’avoir dépouillé de ses vêtements épiscopaux lui arrachèrent les yeux avec leurs poignards. (On était délicat en ce temps-là). Waimer reprit la route de la champagne en trainant derrière lui Léger aveugle et captif et envoya un message à Ebroin pour l’avertir du succès de leur entreprise. Le reste de l’armée finit par mettre le siège devant Lyon, mais là le morceau était un peu gros et la ville bien fortifiée et il dut se retirer. Genesius, l’évêque de la ville entreprit une expédition pour essayer de contrer Ebroin, mais mourut en arrivant à Chelles. Philibert, l’abbé de Jumièges alla trouver Ebroin et lui intima l’ordre d’arrêter sa répression. Celui-ci le fit jeter dans les prisons de son compère Ouen puis expulser en Aquitaine. Saint Lambert évêque de Maestricht fut remplacé par Pharamond. Saint Amé, évêque de Sion fut assigné à résidence au monastère de Péronne. L’évêque de Clermont, Priest , qui avait refusé de témoigner contre Léger fut massacré dans sa villa de Volvic. Bobo de Valence que les insurgés avaient nommé comme successeur de Léger, perdit Autun contre l’abbé Hermenar de saint Symphorien qui avait déjà administré l’évêché pendant l’exil de Léger. Adalrich/Eticho qui voulait devenir Patrice de Provence, retourna en Alsace après l’échec de son plan et retourna promptement sa cote de maille (les vestes n’existaient pas à l’époque) et reconnu Dagobert II comme roi Thierry III, ou plutôt Ebroin, fit de ce fait saisir ses Biens en septembre 676 à Hatuyer (Dijon) pour infidelité. 19 EBROIN DANS L’HISTOIRE • • • A cette date Thierry III était reconnu comme roi dans la Burgondie du nord (Langres-Dijon), mais vraisemblablement aussi dans le pays rhodanien. Le compromis était un fait accompli, lorsque Thierry III appela l’épiscopat Neustroburgonde à un synode qui devait juger l’évêque Chramlin qui avait usurpé l’évêché d’Embrun. A ce synode qui se déroula à Malay-le-Roi prirent part les metropolites de Sens, Besancon, Lyon et Vienne. Après l’affermissement de son pouvoir en Neustrie, Ebroin fit paraître une amnistie générale pour tous les manquements au droit qui avaient été commis pendant les évênements mais qui était surtout favorables à ses amis et alliés. Ingobert, un des conjurés de 675, reçut même le comté de Paris à la place du frère de Léger Gairenius. Le maire du palais frappa cependant aussi fort qu’il le put contre ses opposants politiques. Léger, que Waimer dut livrer depuis la Champagne, apprit à connaître la rudesse de sa vengeance. Ebroin l’accusa lui et son frère Gairenius de la mort du roi dans la silva Lauconis. Avant de le faire traduire devant un synode, il lui fit arracher la langue. Puis il le fit interner dans le couvent pour femmes de Fécamp (Diocèse de Rouen) dans lequel, cruellement mutilé, il dut attendre presque deux ans l’instruction de son procès. La mère de Léger Sigrada fut internée dans l’abbaye fondée par Ebroin à Soissons. Un synode appelé en 678 dans un palais royal déposa l’évêque et le remit à la justice royale qui le condamna à mort. L’execution fut effectué par le comte palatin Chrodebert dont l’épouse, contre les ordres d’Ebroin fit enterrer le corps de Léger dans son Oratorium à Sarcingum (St. Leger près d’Arras). Pendant l’internement de Léger son frère qui s’était enfui en Aquitaine fut livré par les Aquitains et lapidé à mort. Ebroin semblait avoir retiré une expérience profitable de son premier passage aux affaires L’instruction contre Léger était aussi conforme au droit canon dans toutes les malices et cruautés, portées au stade ultime, qu’un évêque jugé coupable par un synode pouvait subir devant un tribunal civil 20 EBROIN DANS L’HISTOIRE • Les leudes devaient s’attendre à pire. De nombreux grands fuirent alors chez le • • dux d’Aquitaine Lupus. Parmi les fugitifs se trouvait le frère de Léger Gairenius/Warin de Paris. Le dux d’Aquitaine utilisa le chaos qui régnait à Paris en 675/676 pour accroitre ses possessions. Il conquis Limoges et fut sanctionné par Ebroin. Ses biens héréditaires en Orléannais furent confisqués et attribués à l’abbaye de Fleury (St Benoit sur Loire) Lupus mourut peu après. Son successeur semble avoir signé avec Ebroin un traité de paix dans lequel figuraient le retour de Limoges et l’extradition de Gairenius. En outre, la reconnaissance de Thierry III comme roi , stipulée dans le traité n’était qu’une pure formalité. La paix avec le duc de Toulouse mit fin aux troubles causés en Neustroburgondie par le meurtre de Chideric II. Il ne restait plus de ces troubles qu’un certaine tension entre Ebroin et le roi d’Austrasie Dagobert II. Le maire du Palais de Thierry III essaya dès que son pouvoir en Neustroburgondie fut consolidé d’imposer son roi au regnum Austrasiorum en battant les austrasiens commandés par Pépin d’Heristal en 678 à Bois-du-Fay, vers Laon.. Ce dernier ne dut son salut qu’à sa fuite vers Liège poursuivi par les sbires d’Ebroin. Nul doute que s’il avait été capturé et executé, l’histoire ne serait pas ce qu’elle est. Il fit assassiner en 679 le roi d’Austrasie Dagobert II. Au printemps 681, Ebroin fut a son tour assassiné par Ermenfried un Franc de Neustrie. 21 LES ADVERSAIRES D’EBROIN • Les Pépinides • • Garibald Ier duc de Bavière Mariage avec Waldrade princesse lombarde – – Grimoald Mariage avec une Agilofigienne • Pépin l'Ancien maire du palais d’Austrasie († 640) • Mariage avec une Itte Idoberge plus tard abb. Nivelles († 652) – – • • • Begga de Landen (v. 620 - v. 695) Mariage avec Ansegisèle (? - v. 679) • Pépin II de Herstal - le jeune (v. 653 - v. 714) • Mariage avec Alpaide D’OU Charles de Herstal - Martel (v. 685 - 01/10/741) Mariage avec Rotrude de Trèves (v. 695 - v. 724) – – Pépin - le bref (v. 715 - v. 768) v. 744 : Mariage avec Bertrade de Laon (Berthe au grand pied) (v. 726 - v. 783) • Charles Ier - Charlemagne (v. 742 - v. 814) – – Branche : Carolingiens Carloman Ier (v. 747 - v. 771) 22 EBROIN BATISSEUR • NOTRE DAME DE SOISSONS 23 EBROIN BATISSEUR • NOTRE DAME DE SOISSONS 24 EBROIN BATISSEUR • NOTRE DAME DE SOISSONS Quant à Ebroin, il fonde à Soissons, en 660, avec sa femme Leutrade, la double abbaye royale de NotreDame, juste un siècle après que l’abbaye de SaintMédard ait été fondée par Clotaire I, sur la rive droite de l’Aisne, à coté de la villa de Syagrius, qui était devenue le palais des rois francs. Là aussi, la première abbesse du monastère des femmes Aetheria vient, en 665 à la demande de Saint Drausin évêque de Soissons, de Jouarre où elle était professe. 25 LE REFORMATEUR DE LA MONNAIE • • • Le sou d'or était toujours divisé en semis et en triens ou tremissis; mais il ne pesait que 70 grains et demi. Il n'a d'exception que pour les sous de Théodebert, qui se rapprochent assez de ceux de Constantin, puisqu'ils pèsent environ 81 grains. Presque toutes les espèces mérovingiennes sont en or; la seule monnaie d'argent était le denier, qu'on appelait aussi « saiga ». Le sou d'or comprenait 40 de ces deniers; le sou d'argent, qui était une monnaie purement nominale, n'en valait que 12. Les deniers sont rares avant le VIIIème siècle; leur poids moyen est de 21 à 22 grains. En 675 le Maire du Palais Ebroim réforma le monnayage, en suspendant les frappes d'or et en créant une nouvelle monnaie, le denier d'argent. Cette pièce donna naissance à un nouveau système monétaire fondé sur l'argent puisque l'or ne fut refrappé que six siècles plus tard. Entre 675 et la réforme monétaire de Pépin le Bref en 754 qui marque le début des émissions carolingiennes, plusieurs dizaines d'ateliers émirent de la nouvelle monnaie d'argent 26 LE REFORMATEUR • Ebroin supprime la capitation, impôt à payer par le chef de famille en raison du nombre des membres qui la composent, loi impitoyable qui poussait les parents à laisser mourir leurs enfants pour échapper aux charges du fisc, pratique cruelle, qui en outre, nuit à la démographie du pays • Il édicte plusieurs lois qui condamnent sévèrement les mauvais parents. • Il freine les ardeurs du fisc. Il fait ainsi preuve d'un grand sens politique et d'une conscience aiguë des difficultés des sujets du royaume tout à faits surprenants pour un aristocrate issu d’une des plus puissantes familles • En fin il interdit la vente brutale comme esclave des prisonniers de guerre 27 Le pourfendeur d’évêques • Depuis la mort de Dagobert en 639, les grands, civils et religieux, en prennent à leur aise. • Ebroin qui veut briser le pouvoir des évêques , s’engage dans une réforme de la règle de fonctionnement des établissements religieux. • Il introduit avec l’aide de Bathilde le « sanctus regularis ordo », c’est à dire la règle de Luxeuil, dans les plus importantes basiliques de France dont six sont nommées dans la « Vita Balthildis » St-Denis, St-Germain l’Auxerrois, StMedard(Soissons), St-Martin (Tours), St-Aignan (Orleans), St-Pierre (Sens ). • L’introduction de cette règle signifie que l’attribution de la liberté ecclésiastique (privilegium) par l’évêque est liée à l’attribution de la liberté séculière par le roi. 28 Le pourfendeur d’évêques • Il s'agit de suivre les consignes édictées par Rome en permettant aux • • • • abbayes de recourir à l'évêque de leur choix pour les actes d'ordination et toutes cérémonies spéciales supposant l'intervention d'un prélat. Une telle liberté doit-elle aboutir à l'octroi d'une immunité totale? C'est bien ce que croient les évêques, qui voient là leur échapper l'énorme pouvoir découlant de la nomination des abbés. Sans compter qu'ils sont terrifiés à l'idée de perdre le prestige attaché aux reliques conservées dans les basiliques. En reconnaissant aux basiliques une autonomie, qui leur est normalement accordée dans d'autres pays catholiques, il compte revigorer le rôle de protecteur de l'Eglise dévolu à la famille royale. En ce sens, il s'oppose aux aristocraties locales dont sont issus les évêques. Il entreprend également de lutter activement contre la simonie, pratique qui permet aux plus riches l'achat des ministères vacants et qui permet à certaines familles d’être évêques de père en fils. 29 Le pourfendeur d’évêques • L’exemple le plus grave est donné à Lyon par l’évêque métropolitain (Primat • • • • des Gaules) qui a succédé à Viventius/Viventiolus. Bien qu’il se soit doté d’un nom burgonde comme son père Sigo, Aunemond, le patriarche de Lyon est issu d’une puissante famille gallo-romaine. Il appartient au cercle des Grands Francoburgondes. Son nom véritable est Dalfinus. Elevé au palais royal sous Dagobert et Clovis II, puis dans l’entourage d’Erkinoald, il connaît très bien la machine politique. A ses yeux, Ebroin ne compte pas. Il se conduit en potentat, en comte évêque. Il décide de tout sans faire de différences entre pouvoirs politiques et religieux. Bien que le métropolite de Lyon ait commencé ses dérives sous le règne de Clovis, Ebroin, soutenu par la reine Bathilde, décide de sévir. Tout se passe très vite. L’affaire est menée en dix mois, entre octobrenovembre 657 (mort de Clovis) et la fin de l’été 658. Le « praefectus », nommé par Aunemond, son frère, est convoqué à Maroialo près d’Orléans, il est accusé d’infidélité et décapité. Les guerriers d’Ebroin capturent Aunemond, malade, l’entrainent vers Mâcon et le décapitent à son tour le 28 septembre 658, alors qu’il aurait du être jugé par un synode. 30 Le pourfendeur d’évêques • Bathilde avec le soutien d’Ebroin place aussitôt son conseiller politique Genès (Genesius abbas palatini oratorii) à la tête de la métropole de Lyon. • Ce sanglant réveil de l’autorité royale provoque aussitôt la stupéfaction. L’exécution d’un évêque et, pire, d’un métropolite est considérée comme un sacrilège. Autant le roi peut jouer avec la vie des grands laïcs sans problème, autant s’attaquer à un évêque est un exercice périlleux et le décapiter un crime majeur. L’épiscopat, qui constitue la première force politique du royaume et qui prétend, dans les canons des conciles, être en correspondance directe avec Dieu , est toujours choyé par le pouvoir exécutif. Encore le souverain mérovingien ne doit-il rien aux évêques. Etant reconnu de sang divin par tous, il n’a pas besoin de sacre pour régner. • L’épiscopat se réunit à Nantes et édicte vingt canons dont le 19ème décrète, sous prétexte de discipline religieuse, que les femmes doivent se tenir à l’écart des affaires publiques. Ebroin auquel la portée de celui-ci n’a pas échappée décide de la garder en réserve. (il s’en servira en temps voulu pour écarter Bathilde) – Ce canon sera exhumé en d’autres temps pour appuyer « la loi salique » et justifier le fait que le trône de Philippe le Bel ne revienne pas à sa fille, reine d’Angleterre ce qui sera la cause de la guerre de 100 ans 31 Le pourfendeur d’évêques • l'évêque de Paris, Sigobrand, fut assassiné par les grands du royaume en raison de sa morgue et de sa suffisance, mais cet assassinat fut inspiré par Ebroin qui voyait là l’occasion d’éliminer un proche de Bathilde • St Léger, évêque d’Autun, prit la tête du mouvement indépendantiste austrasien, allant par là à l’encontre de la politique d’Ebroin qui prônait un pouvoir centralisé. Celui-ci le fit juger puis exécuter dans des circonstances cruelles • St Lambert, évêque de Maestricht fut dépouillé de son diocèse 32 QUI ETAIT EBROIN? • A QUELLE SIPPE APPARTENAIT-IL? – Sa famille EBER WIN (Ebroin) Sa femme LEU TRUDE Son fils BODE GEISEL 33 QUI ETAIT EBROIN? • A QUELLE SIPPE APPARTENAIT-IL? – La famille de St Authaire et de ses épouses Authachar) (Saint Authaire) Sa 1ère femme AIGA Sa 2ème femme MODA Et ses frères et soeur ABOLIN BETTON 3ème Ses fils 1) ALD WIN (SAINT EBER GEISEL Ebregisele Évêque de Meaux BALDE abbesse de Jouarre TEUDECHILDE 1ère abbesse de Jouarre OUEN, DADO) 2) ADAL WULF (ADO) 3) RAD WULF (RADO) 2ème AGILBERTE abbesse de Jouarre AGILBERT Évêque de Dorchester Puis de Paris Référendaire de Thierry III LEUT HERIUS Évêque de Dorchester 34 QUI ETAIT EBROIN? • A QUELLE SIPPE APPARTENAIT-IL? – Les radicaux communs aux deux familles: • EBER • WIN • GEISEL • LEUT – Il y a donc une forte probabilité pour que les deux familles appartiennent à la même SIPPE – De Plus • La famille d’Authaire est d’Ussy et Ebroin est réputé avoir un fief à St Jean • Ebroin a pu compter toute sa vie sur l’amitié et le soutien de St OUEN • Etherie, première abbesse de Notre Dame de Soissons, fondé par Ebroin, vient du monastère de Jouarre, fondé par le frère de St OUEN 35 Etait-il de Saint-Jean? • Extrait de la charte de Thierry III donnant la Villa Latiniaca à l’Abbaye de St DENIS: « eoque vestra cognuscat industria quod nos, pro salute anime nostre, una cum consilio ponteficum vel obtimatum nostrorum, villa noncopanti Latiniaco, que ponitur in pago Meldequo, qui fuit inlustribus viris Ebroino, Vuarattune et Ghislemaro, quondam majores-domos nostros, et post discessum ipsius Vuarattune in fisco nostro fuerat revocata: nos ipsa villa de fisco nostro ad suggestione precelse regine nostre Chrodochilde, seo et inlustri viro Berchario, majorem-domos nostro, ad monasthirio sancti domni Dionisiae, ubi ipsi preciosus in corpore requiescit, et venerabilis vir Chaeno abba, cum norma plurima monachorum, ad laudis xpi canendas in ordine sancto ibidem adunata preesse viditur, pro remedium anime nostri plena et integra gracia propter rem illa in loco qui dicitur Siliacos, qui fuit Arulfo quondam, et ibidem usque nunc ad ipso Latiniaco aspexit, quem apostholico viro domno Godino episcopo per alia nostra preceptione concessemus, in reliquo viro ad integrum ipsa villa Latiniaco ad ipso monasthirio domni Dionisiae ad die presenti visi fuimus concessisse » • Cet extrait prouve qu’Ebroin habitait dans le Pagus Meldequus 36 Etait-il de Saint-Jean? • • Extrait du cahier de Jean-Baptiste RAVENAU Cet extrait prouve qu’il existait à St JEAN un fief d’Ebroin 37 Etait-il de Saint-Jean? • Les deux documents précédents constituent des présomptions • On sait de plus: – qu’une Villa gallo-romaine existait à St Jean – Ainsi qu’un cimetière mérovingien • Nous avons vu: – qu’Ebroin faisait probablement partie de la SIPPE d’Authaire – Que Saint-Ouen qui était d’Ussy est resté son soutien toute sa vie 38 uestions &R éponses 39