Focus Traitement des uvéites : quoi de neuf ? Treatment of uveitis: what’s new? A. Brézin (Université Paris-Descartes ; service d’ophtalmologie, hôpital Cochin, Paris) ✔✔Mots-clés. Uvéites • Anti-TNF • Thérapeutiques ciblées. ✔✔Keywords. Uveitis • TNF-inhibitors • Treat to target. B on nombre de décisions thérapeutiques prises chez les patients atteints d’uvéite restent du domaine de l’empirisme. Pendant de nombreuses années, aucune nouvelle autorisation de mise sur le marché (AMM) ciblée sur le traitement des uvéites n’a été sollicitée. La rareté relative des uvéites rend difficile la réalisation d’études à large échelle, telles que nous en disposons dans le domaine du glaucome ou de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Malgré ces difficultés, des données globales fondées sur des preuves concernant l’efficacité de certains traitements pour les uvéites non infectieuses sont aujourd’hui disponibles et l’on peut se réjouir de l’arrivée récente de molécules dont l’utilisation est autorisée chez les patients atteints d’uvéite. De nouvelles possibilités thérapeutiques Devant un patient présentant une uvéite, les choix thérapeutiques comprennent aujourd’hui des options locales, telles que les implants intravitréens à libération prolongée de dexaméthasone, mais également de nouveaux traitements par voie générale. Il est désormais possible et souhaitable de traiter des patients atteints d’uvéite non infectieuse en limitant les complications d’une corticothérapie prolongée à dose élevée. Au-delà des situations où un traitement d’attaque par une corticothérapie par voie générale est justifié, la prescription de traitements d’épargne cortisonée est aujourd’hui la règle dès qu’un traitement au long cours est nécessaire. Ces thérapeutiques reposent encore largement sur les immuno­ suppresseurs “conventionnels”, tels que le méthotrexate ou le m ­ ycophénolate mofétil. Cependant, les “biologiques” font aujourd’hui partie des options thérapeutiques disponibles. Après les succès des inhibiteurs du TNF pour le traitement des maladies inflammatoires rhumatismales, digestives ou autres, l’un d’entre eux, l’adalimumab, a 88 Images en Ophtalmologie • Vol. XI - n° 3 • mai-juin 2017 désormais une indication reconnue pour le traitement des uvéites intermédiaires, postérieures ou des ­panuvéites non infectieuses. En effet, les études contrôlées rando­ misées VISUAL I et II ont démontré l’effica­cité de ce produit, tant pour le traitement des uvéites actives que pour la prévention de nouvelles poussées chez des patients à des stades de quiescence, traités au long cours. Chez des patients présentant des spondylarthrites dans un contexte HLA-B27 positif, des données de méta-­analyse montrent que les traitements par anti-TNF monoclonaux diminuent la fréquence des poussées d’uvéite, même si cette indication thérapeutique n’est pas encore autorisée. Vers les thérapeutiques spécifiques ciblées Deux évolutions sont en cours. La première concerne l’acqui­sition de données thérapeutiques ciblées pour chaque entité. En effet, l’hétérogénéité des uvéites justifie de moduler les traitements selon l’étiologie de l’inflammation. L’objectif serait ainsi de disposer de données thérapeutiques spécifiques pour la choriorétinopathie de Birdshot, les uvéites de la maladie de Behçet, celles de la sarcoïdose ou pour chaque autre étiologie. La seconde tendance suit le chemin des autres disciplines, telle la rhumatologie, pour lesquelles la “révolution des biologiques” est en cours. Pour chaque maladie, un profil cytokinique inflammatoire peut être évalué. Les traitements de demain auront pour objectif, pour chaque entité, voire pour chaque patient, l’inhibition d’un mécanisme inflammatoire spécifique. Le traitement des uvéites est à l’aube d’une nouvelle ère, celle des thérapeutiques spécifiques ciblées. II A. Brézin déclare avoir des liens d’intérêts avec Abbvie, Alcon, Eyevensys et Turing (consultant). Pour en savoir plus… • Jaffe GJ, Dick AD, Brézin AP et al. Adalimumab in patients with active noninfectious uveitis. N Engl J Med 2016;375(10):932-43. •N guyen QD, Merrill PT, Jaffe GJ et al. Adalimumab for prevention of uveitic flare in patients with inactive non-infectious uveitis controlled by corticosteroids (VISUAL II): a multicentre, double-masked, randomised, placebo-controlled phase 3 trial. Lancet 2016;388(10050):1183-92. • Lin P, Suhler EB, Rosenbaum JT. The future of uveitis treatment. Ophthalmology 2014;121(1):365-76. Focus Traitement de la toxoplasmose oculaire : quoi de nouveau ? Ocular toxoplasmosis: what’s new? M. Guillard, A. Brézin (Service d’ophtalmologie, hôpital Cochin, Paris) ✔✔Mots-clés. Choriorétinite • Toxoplasmose • Azithromycine • Pyriméthamine. ✔✔Keywords. Chorioretinitis • Toxoplasmose • Azithromycine • Pyrimethamine. L a toxoplasmose oculaire est la première cause d’uvéite postérieure. Le diagnostic est avant tout clinique, mais une angiographie à la fluorescéine et une ponction de chambre antérieure avec analyse de l’humeur aqueuse peuvent être nécessaires en cas de présentation atypique. Le traitement local par corticothérapie topique est prescrit selon l’intensité de la réaction inflammatoire en chambre antérieure, qui parfois peut être importante. Concernant le traitement par voie générale, il est composé d’un antiparasitaire associé à une corticothérapie per os. Sa prescription n’est pas systématique. Traitement curatif La pyriméthamine et la sulfadiazine étaient les molécules de référence, mais leur efficacité était au prix de nombreux effets indésirables, notamment immunoallergiques, potentiellement graves. cas de lésion maculaire et périmaculaire, tandis que ­l’abstention thérapeutique était majoritaire en cas de localisation périphérique. Malgré la fréquence de cette pathologie, il n’existe aucune étude bien conduite, prospective et rando­misée. Une revue récente (3) de de la Cochrane Library datant de 2016 le confirme : aucune étude bien conduite ne prouve que le traitement anti­ parasitaire permet de prévenir une perte d’acuité visuelle ; il existe un manque de preuves que le risque de récurrence au long cours est réduit après un traitement par antiparasitaires. Concernant l’adjonction d’une corticothérapie per os, la Cochrane Library a également mené une revue (4) des études existantes. L’adjonction d’une corticothérapie per os est une pratique répandue en clinique et dans de nombreuses études avec pour but de limiter la ­réaction inflammatoire vitréenne ou périlésionnelle associée aux foyers de rétinochoroïdite toxoplasmique (5, 6). Il n’existe aucune étude randomisée bien menée montrant la supériorité du traitement combiné par corticoïde et antipara­ sitaire versus antiparasitaire seul. En ­l’absence de preuves définitives de l’efficacité des corticoïdes, le moment de l’instauration, le dosage et la durée d’utilisation doivent être déterminés pour chaque patient en fonction de son statut immunitaire et de la gravité de l’inflammation. Les corticoïdes per os ne doivent jamais être prescrits seuls car la survenue d’une rétinochoroïdite fulminante a déjà été décrite. Une étude randomisée de 2002 (1) a montré une efficacité similaire entre l’association pyriméthamine-sulfadiazine et la combinaison pyriméthamine-azithromycine avec une fréquence et une sévérité des effets indésirables moins importantes. Cette dernière peut donc être proposée en première intention lorsqu’il existe une indication à traiter, en association avec une supplémentation en acide folique. L’indication thérapeutique dépend donc de plusieurs paramètres : localisation des lésions, présence d’une immunodépression, intensité de la réaction inflammatoire vitréenne et tolérance des traitements. Ainsi, le traitement est systématique pour les lésions situées à moins de 2 diamètres papillaires du point de fixation, ou à moins de 0,5 diamètre papillaire en nasal du bord de la papille. Les indications thérapeutiques posent de nombreuses questions. En effet, un sondage d’experts (2) a confirmé que l’indication d’un traitement était quasi unanime en La durée du traitement dépend de l’évolution ; il est arrêté lorsque le retour à un état suffisamment non inflam­ matoire est obtenu. La durée de l’inflammation autour Images en Ophtalmologie • Vol. XI - n° 3 • mai-juin 2017 89 Focus d’un foyer de rétinochoroïdite toxoplasmique est habituellement corrélée avec sa surface : empiriquement, de 3 à 4 semaines par diamètre papillaire. Le processus de cicatrisation des foyers est centripète. Lorsqu’un traitement a été prescrit, il peut être interrompu à partir de l’obtention d’une couronne cicatricielle à la périphérie du foyer. Chez les patients immunodéprimés atteints d’une toxoplasmose oculaire, l’indication thérapeutique antiparasitaire est systématique. Un traitement antiparasitaire doit être poursuivi tant qu’une restauration immunitaire suffisante n’est pas obtenue, mais aucun traitement ­corticoïde n’est introduit. Traitement préventif Le taux de récidives de la rétinochoroïdite toxoplasmique a été estimé à 49 % à 3 ans (7). Plusieurs études retrouvent l’intérêt d’un traitement préventif sur la fréquence des récidives de toxoplasmose oculaire. Dans la première, 124 patients présentant des récidives de toxoplasmose oculaire ont été suivis pendant 20 mois. La moitié ont reçu un traitement par cotrimoxazole (triméthoprime 160 mg-­sulfaméthoxazole 800 mg), 1 comprimé tous les 3 jours (8). Dans le groupe des patients traités, le taux de récidives était de 6,6 % alors qu’il était de 23,8 % dans celui des patients n’ayant reçu aucun traitement préventif. Une étude (9) plus récente de 2014 a comparé un traitement préventif par cotrimoxazole tous les 2 jours (triméthoprime 160 mg/­sulfaméthoxazole 800 mg) versus placebo sur une durée de 1 an chez 95 patients (après traitement initial d’un foyer actif par 45 jours du même traitement). L’incidence du taux de récurrence sur 1 an a été respectivement de 0 % dans le groupe traité par cotrimoxazole et de 12,8 % dans le groupe placebo. Un traitement préventif peut être discuté lorsque des récidives surviennent plus de 1 fois par an et menacent la macula. Dans ces cas, en l’absence de contre-­indications aux sulfamides, la prise de cotrimoxazole tous les 2 jours peut être proposée. La durée habituelle d’un tel traitement préventif est de 1 à 2 ans. II M. Guillard déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. A. Brézin déclare avoir des liens d’intérêts avec Abbvie, Alcon, Eyevensys et Turing (consultant). Références bibliographiques 1. Bosch-Driessen LH, Verbraak FD, Suttorp-Schulten MS et al. A pros- pective, randomized trial of pyrimethamine and azithromycin vs pyri­ methamine and sulfadiazine for the treatment of ocular toxoplasmosis. Am J Ophthalmol 2002;134(1):34-40. 2. Engstrom RE, Holland GN, Nussenblatt RB et al. Current practices in the management of ocular toxoplasmosis. Am J Ophthalmol 1991; 111(5):601-10. 3. Pradhan E, Bhandari S, Gilbert RE et al. Antibiotics versus no treatment for toxoplasma retinochoroiditis. Cochrane Database Syst Rev 2016; (5):CD002218. 4. Jasper S, Vedula SS, John SS, Horo S, Sepah YJ, Nguyen QD. Cortico­ steroids as adjuvant therapy for ocular toxoplasmosis. Cochrane Database Syst Rev 2017;1:CD007417. 5. Bosch-Driessen EH, Rothova A. Sense and nonsense of corticosteroid administration in the treatment of ocular toxoplasmosis. Br J Ophthalmol 1998;82(8):858-60. 6. Bosch-Driessen LE, Berendschot TT, Ongkosuwito JV, Rothova A. Ocular toxoplasmosis: clinical features and prognosis of 154 patients. Ophthalmo­logy 2002;109(5):869-78. 7. Rothova A, Meenken C, Buitenhuis HJ et al. Therapy for ocular toxoplasmosis. Am J Ophthalmol 1993;115(4):517-23. 8. Silveira C, Belfort R Jr, Muccioli C et al. The effect of long-term ­intermittent trimethoprim/sulfamethoxazole treatment on recurrences of toxoplasmic retinochoroiditis. Am J Ophthalmol 2002;134(1):41-6. 9. Felix JP, Lira RP, Zacchia RS, Toribio JM, Nascimento MA, Arieta CE. Trimethoprim-sulfamethoxazole versus placebo to reduce the risk of recurrences of Toxoplasma gondii retinochoroiditis: randomized controlled clinical trial. Am J Ophthalmol 2014;157(4):762-6.e1. AVIS AUX LECTEURS Les revues Edimark sont publiées en toute indépendance et sous l’unique et entière responsabilité du directeur de la publication et du rédacteur en chef. Le comité de rédaction est composé d’une dizaine de praticiens (chercheurs, hospitaliers, universitaires et libéraux), installés partout en France, qui représentent, dans leur diversité (lieu et mode d’exercice, domaine de prédilection, âge, etc.), la pluralité de la discipline. L’équipe se réunit 2 ou 3 fois par an pour débattre des sujets et des auteurs à publier. La qualité des textes est garantie par la sollicitation systématique d’une relecture scientifique en double insu, l’impli­cation d’un service de rédaction/ révision in situ et la validation des épreuves par les auteurs et les rédacteurs en chef. 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L a choriorétinopathie de type birdshot est une uvéite postérieure chronique bilatérale. Son nom provient de l’aspect des taches caractéristiques de la maladie qui évoque une volée de grenailles de plomb. Physiopathologie La choriorétinopathie de type birdshot (BCR) a été décrite par S.J. Ryan et A.E. Maumenee en 1980 (1) et son étiologie est inconnue. La BCR est la pathologie qui présente la plus forte association entre une maladie et un allèle HLA de classe I : le HLA-A29 (2). Dans notre série, 100 % des patients atteints de BCR sont porteurs de cet allèle. Cependant, seuls 5 à 7 % de la population caucasienne étant porteurs de cet allèle, la présence d’autres facteurs explicatifs du développement de la maladie est suspectée. L’étude immunohistochimique d’une pièce anatomique a montré la présence d’infiltrats multiples et focaux de lymphocytes T dans la choroïde, autour des vaisseaux rétiniens et du nerf optique (3). Épidémiologie La BCR représente environ 1 % des uvéites et 6 à 8 % (4) des uvéites postérieures. Elle touche en grande majorité la population caucasienne. Il existe une légère prédominance féminine avec un âge de début de 53 ans en moyenne. C’est une maladie purement oculaire dont les symptômes peuvent précéder l’aspect typique du fond d’œil de plusieurs années. Les symptômes peuvent être les suivants : •• baisse d’acuité visuelle (AV) ou vision floue ; •• myodésopsies ; •• phosphènes ; •• baisse de sensibilité aux contrastes ; •• troubles de la vision des couleurs ; •• photophobie ; •• héméralopie ; •• troubles de la vision périphérique ; •• métamorphopsies ; •• vision du relief altérée. L’AV peut cependant rester longtemps conservée à 10/10 malgré une mauvaise qualité de vision. Des critères diagnostiques (tableau I, p. 92) [5] ont été définis par un comité d’experts avec : •• des caractéristiques requises, notamment la bilatéralité, les lésions choriorétiniennes typiques de la BCR et la faible inflammation de chambre antérieure ; •• des caractéristiques qui confortent le diagnostic, notamment la présence de l’allèle HLA-A29 ; •• et des critères qui excluent le diagnostic comme les synéchies postérieures. On observe classiquement des taches typiques de forme ovale (figure 1a, p. 92) prédominant en nasal de la papille, mesurant un quart à un demi-diamètre papillaire, hypo­ pigmentées jaune orangé, plus ou moins atrophiques avec une hyalite modérée et une très discrète réaction de chambre antérieure. Plusieurs formes de la maladie existent : inflammatoire, atrophique ou mixte. Les formes très atrophiques sont dites de “pseudo-rétinite pigmentaire”. Les examens complémentaires aident à la classification. Images en Ophtalmologie • Vol. XI - n° 3 • mai-juin 2017 91 Focus a b © S. Salah c Figure 1. a . Œil droit : rétinographie couleur montrant les taches typiques prédominant en nasal de la papille. b . Œil gauche : angiographie à la fluorescéine montrant des vascularites (flèche), des diffusions des capillaires maculaires et une papillite. c. Œil gauche : OCT montrant un œdème maculaire et une membrane épirétinienne. © S. Salah Tableau I. Critères diagnostiques de la choriorétinopathie de type birdshot (d’après [5]). Caractéristiques requises 1 Atteinte bilatérale 2 Au moins 3 lésions de type birdshot dans la région inférieure ou nasale de la papille d’un œil (lésions choroïdiennes irrégulières allongées à bords peu nets de grand axe par rapport à la papille) 3 Inflammation modérée du segment antérieur (cellules ≤ 1+ en CA) 4 Hyalite modérée (haze vitréen ≤ 2+) Éléments confortant le diagnostic 1 HLA-A29 + 2 Vascularites rétiniennes 3 Œdème maculaire cystoïde Critères d’exclusion 1 Précipités rétrocornéens 2 Synéchies postérieures 3 Présence d’une maladie infectieuse, néoplasique ou inflammatoire pouvant être responsable de lésions choroïdiennes multifocales 92 Images en Ophtalmologie • Vol. XI - n° 3 • mai-juin 2017 Examens complémentaires L’examen complémentaire clé est la recherche de l’allèle ­HLA-A29. À l’angiographie à la fluorescéine (figure 1b), on observe des vascularites (70 %), une hyperfluorescence papillaire (46 %) et une diffusion maculaire (23 %), les taches sont d’aspect variable mais volontiers iso- ou hypo­fluo­ rescentes aux temps tardifs. En angiographie au vert d’indo­cyanine, les lésions sont hypocyanescentes tout au long de la séquence. L’OCT (Optical Coherence Tomography) objective un œdème maculaire (figure 1c) ou une atrophie associés parfois à une membrane épirétinienne si la pathologie évolue depuis plusieurs mois. Une corrélation a été démontrée entre l’épaisseur maculaire centrale et l’AV : ­celle-ci est abaissée en cas d’œdème (épaississement rétinien), mais également en cas d’atrophie (amincissement). L’OCT permet également d’étudier la structure des différentes couches rétiniennes. Des études utilisant l’OCT swept source sont en cours et retrouvent une ­choroïde amincie (6). a b Figure 2. Forme de pseudo-rétinite pigmentaire. Tableau II. Prise en charge des patients atteints de choriorétinopathie de type birdshot (d’après Monnet D, rapport SFO 2010). Patients atteints de choriorétinopathie de type birdshot Maladie non inflammatoire • Absence de traitement • Surveillance ++ Maladie inflammatoire 1. Phase initiale du traitement • Durée moyenne : de 0 à 3-6 mois ± bolus de corticoïdes • Corticoïdes oraux 0,5 mg/kg/j + immunosuppresseur ± injection intravitréenne de dexaméthasone ou sous-ténonienne de triamcinolone Maladie post-inflammatoire • Surveillance (champ visuel ++) • ± immunosuppresseur seul 2. Phase d’entretien • Durée moyenne : de 3 à 6 mois à 3 à 5 ans • Sevrage des corticoïdes ou dose ≤ 5 mg • Immunosuppresseur ± injection intravitréenne ou sous-ténonienne à la demande Le champ visuel est un élément clé du suivi et guide la thérapeutique. L’examen de la vision des couleurs est utile pour documenter la mauvaise qualité de vision de ces patients. L’électrorétinogramme peut également être utile et retrouve une dysfonction des photorécepteurs dans les formes évoluées. Évolution Cette maladie est très hétérogène, pouvant aller de formes non ou peu inflammatoires à des formes agressives cécitantes (figure 2) en passant par des formes atrophiques. Les complications les plus fréquentes sont : l’œdème maculaire (50 %) et l’œdème papillaire (24 %). Les autres complications sont la cataracte, les membranes épi­ rétiniennes ainsi que la néovascularisation choroïdienne. Traitement Le tableau II propose un algorithme de prise en charge. La prise en charge initiale des formes inflammatoires consiste en une corticothérapie dont la dose et ­l’intensité sont à adapter au degré d’inflammation. C ­ ette corticothérapie peut être par voie générale (bolus de méthyl­ prednisolone relayés par une corticothérapie orale à la phase initiale) associée à des immunosuppresseurs. Des injections sous-­ténoniennes de triamcinolone ou Images en Ophtalmologie • Vol. XI - n° 3 • mai-juin 2017 93 Focus intravitréennes de dexaméthasone peuvent parfois être utiles en association aux traitement généraux pour un effet ­add-on sur les œdèmes maculaires récalcitrants. À la phase ­d’entretien, un immunosuppresseur de type mycophénolate mofétil est introduit à visée d’épargne cortisonique. On lui suppose également une action de ralentissement de la progression de l’atrophie. D’autres immuno­suppresseurs ont été utilisés (parmi lesquels l’azathioprine, le cyclophosphamide, le méthotrexate, la ciclosporine) ainsi que des biothérapies (­anti-TNF alpha, ­anti-IL-2). Mais le traitement reste empirique car il n’y a pas eu d’étude randomisée comparant les différentes thérapeutiques. Pour les formes non inflammatoires, une simple surveillance par les paramètres du paragraphe suivant (cf. infra) peut être suffisante. Pour les formes post-inflammatoires ou atrophiques, l’attitude varie d’une surveillance à un traitement par immunosuppresseur seul ou associé à une corticothérapie à faibles doses. Des injections sous-­ténoniennes de triamcinolone ou intravitréennes de dexaméthasone “à la demande” peuvent être utiles en cas d’apparition d’œdème maculaire. Tableau III. Critères de suivi et de traitement des patients atteints d’une choriorétinopathie de type birdshot : les 3 critères principaux de décision sont en gras (d’après Monnet D et Brezin A, rapport SFO 2010). Suivi La tableau III résume les éléments clés du suivi sur 2 volets : ▶▶ structurel : examen du fond d’œil, OCT, angiographie ; l’OCT-angiographie pourrait trouver sa place ; ▶▶ fonctionnel : symptômes et qualité de vie, champ visuel mais également vision des couleurs. Pronostic En cas de prise en charge adéquate, l’AV décline pour la plupart des patients mais reste conservée : ainsi, 75 % des patients ont une AV supérieure à ­5/10 sur leur meilleur œil et seuls 10 % ont une AV inférieure à ­1/10 sur leur meilleur œil. Conclusion Malgré le caractère empirique de certains éléments de la prise en charge thérapeutique des patients atteints d’une choriorétinopathie de type birdshot, le pronostic visuel peut être préservé si le diagnostic est fait précocement. L’intensité du traitement dépend de l’inflammation et de son retentissement fonctionnel. Si une surveillance simple peut être proposée dans quelques cas, d’autres nécessitent les traitements classiques des affections auto-­immunes sévères. II Critères anatomiques 1 Œdème maculaire (OCT) S. Salah déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. 2 Vascularites, papillite (angiographie) Références bibliographiques 3 Hyalite 1. Ryan SJ, Maumenee AE. Birdshot retinochoroidopathy. Am J Ophthalmol 1980;89(1):31‑45. 2. Brézin AP, Monnet D, Cohen JH, Levinson RD. HLA-A29 and birdshot chorio­retinopathy. Ocul Immunol Inflamm 2011;19(6):397-400. 3. Gaudio PA, Kaye DB, Crawford JB. Histopathology of birdshot retino­ choroidopathy. Br J Ophthalmol 2002;86(12):1439-41. 4. Shah KH, Levinson RD, Yu F et al. Birdshot chorioretinopathy. Surv Ophthalmol 2005;50(6):519-41. 5. Levinson RD, Brézin A, Rothova A, Accorinti M, Holland GN. Research criteria for the diagnosis of birdshot chorioretinopathy: results of an international consensus conference. Am J Ophthalmol 2006;141(1):185-7. 6. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28456419 Critères fonctionnels 1 Champ visuel (automatisé) 2 Acuité visuelle 3 Vision des couleurs 4 Électrorétinogramme 5 Questionnaire de qualité de vie (type Visual Function Questionnaire 25) 94 Images en Ophtalmologie • Vol. XI - n° 3 • mai-juin 2017