PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 Remarque : sauf précision contraire, 𝐸 désigne un espace vectoriel sur le corps 𝕂 (𝕂 = ℝ ou ℂ). I. Familles liées/libres dans un espace vectoriel Rappels : si ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 est une famille de 𝑛 vecteurs de 𝐸, on note 𝐴 = Vect(ℱ) = Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = {𝑎1⃗𝑣1 + 𝑎2⃗𝑣2 + . . . + 𝑎𝑛⃗𝑣𝑛 ∣ (𝑎1 , 𝑎2 , . . . , 𝑎𝑛 ) ∈ 𝕂𝑛 } l’ensemble de toutes les combinaisons linéaires des vecteurs de la famille ℱ : 𝐴 est l’ensemble des vecteurs que l’on peut écrire 𝑎1⃗𝑣1 + 𝑎2⃗𝑣2 + . . . + 𝑎𝑛⃗𝑣𝑛 , où 𝑎1 , 𝑎2 , . . . , 𝑎𝑛 désignent des scalaires (dans 𝕂). On a prouvé que 𝐴 est un sous-espace vectoriel de l’espace 𝐸 (par conséquent, 𝐴 est donc lui-même un 𝕂-ev) : c’est même le plus petit sev de 𝐸 qui contient la famille ℱ. De façon claire, on a toujours l’inclusion : Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛−1 ) ⊂ Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛−1 , ⃗𝑣𝑛 ). Mais, de plus, si le vecteur ⃗𝑣𝑛 est une combinaison linéaire des autres vecteurs ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛−1 (i.e) s’il existe des scalaires 𝛼1 , . . . , 𝛼𝑛−1 dans 𝕂 tels que ⃗𝑣𝑛 = 𝛼1⃗𝑣1 + 𝛼2⃗𝑣2 + . . . + 𝛼𝑛−1⃗𝑣𝑛−1 , alors on a l’égalité : Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛−1 , ⃗𝑣𝑛 ) = Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛−1 ). En résumé : si ⃗𝑣 ∈ Vect(ℱ), alors Vect(ℱ, ⃗𝑣 ) = Vect(ℱ). Il y a même équivalence, car ⃗𝑣 ∈ Vect(ℱ, ⃗𝑣 ) : donc (⃗𝑣 ∈ Vect(ℱ)) ⇔ (Vect(ℱ, ⃗𝑣 ) = Vect(ℱ)) . ou encore (⃗𝑣 ∈ Vect(⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 )) ⇔ (Vect(⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 , ⃗𝑣 ) = Vect(⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 )) . Rappels : si ⃗𝑐 est une combinaison linéaire de (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ), ∙ Vect (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 , ⃗𝑎) = Vect (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 , ⃗𝑎 − ⃗𝑐). ( ) ∙ Vect (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 , ⃗𝑐) = Vect ⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 , ⃗0 = Vect (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ). ∙ par convention, on a posé : Vect(∅) = {⃗0}. 1˚) Familles liées de vecteurs de 𝐸 (dépendance linéaire) Définition : une famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) de 𝑛 vecteurs (𝑛 ⩾ 2) de l’espace 𝐸 est dite liée si au moins un des vecteurs de cette famille peut s’écrire comme une combinaison linéaire des 𝑛 − 1 autres vecteurs. Convention : une famille ℱ = (⃗𝑣1 ) de UN vecteur de 𝐸 est liée si et seulement si ⃗𝑣1 est le vecteur nul (i.e) ssi ⃗𝑣1 = ⃗0𝐸 . Quelques exemples : – Toute famille ℱ contenant le vecteur nul ⃗0 = ⃗0𝐸 est nécessairement liée. En effet, si on a ℱ = (⃗0, ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ), alors on peut écrire ⃗0 = 0.⃗𝑣1 + ⋅ ⋅ ⋅ + 0.⃗𝑣𝑛 ! Le cas ℱ = (⃗0) est trivial. – Toute famille ℱ contenant deux vecteurs colinéaires (voire égaux) est nécessairement liée. En effet, si ℱ = (⃗𝑎, ⃗𝑏, ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ), où ⃗𝑏 = 𝜆.⃗𝑎, alors on peut écrire ⃗𝑏 = 𝜆.⃗𝑎 + 0.⃗𝑣1 + ⋅ ⋅ ⋅ + 0.⃗𝑣𝑛 . ATTENTION : la réciproque est fausse en général. Autrement dit : une famille dont les vecteurs ne sont pas deux à deux colinéaires peut être liée. Par exemple, dans 𝐸 = ℝ3 , en posant ℱ = (⃗𝑎, ⃗𝑏, ⃗𝑐) avec ⃗𝑎 = (1, 2, 3), ⃗𝑏 = (4, 5, 6), ⃗𝑐 = (7, 8, 9), la famille ℱ est liée car ⃗𝑏 = 12 ⃗𝑎 + 21 ⃗𝑐 MAIS pourtant, les vecteurs de ℱ ne sont pas deux à deux colinéaires . – Dans le ℝ-espace vectoriel 𝐸 = 𝒜(ℝ, ℝ) des applications définies sur ℝ et à valeurs dans ℝ, on définit les fonctions 𝑓 = cos2 , 𝑔 = sin2 , ℎ = 1̃ (fonction constante égale à 1). –1/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 La famille ℱ = (𝑓, 𝑔, ℎ) est liée car ℎ = 𝑓 + 𝑔. 1 1 Autre exemple : la famille ℱ ′ = (exp, exp , ch, sh) est liée car sh = 12 . exp − 12 . exp + 0.ch. 1 1 1 Ainsi, 𝐴 = Vect(exp, exp , ch, sh) = Vect(exp, exp , ch). Mais on a aussi (exp, exp , ch) liée car ( ) ( ) 1 1 1 . Donc 𝐴 = Vect exp, , ch, sh = Vect exp, . ch = 12 . exp + 12 . exp exp exp 1 En remarquant que exp = ch + sh et exp = ch − sh, on aurait pu également prouver que 1 𝐴 = Vect (ch, sh) = Vect(exp, exp ). Les questions sont : est-ce qu’on peut continuer à diminuer le nombre de vecteurs dans la famille qui engendre un sous-espace vectoriel, comment déterminer les vecteurs que l’on peut "effacer", la manière de procéder est-elle unique, obtient-on toujours "à la fin" la même famille ? le même nombre de vecteurs ? 2˚) Familles libres de vecteurs de 𝐸 (indépendance linéaire) Définition : une famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 de 𝑛 vecteurs (𝑛 ⩾ 1) de l’espace 𝐸 est dite libre si elle n’est pas liée. Ceci signifie donc qu’aucun des vecteurs de la famille ℱ ne peut s’écrire comme une combinaison linéaires des (𝑛 − 1) AUTRES vecteurs de ℱ. Vocabulaire : dire que la famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) est libre revient à dire que les vecteurs ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 sont linéairement indépendants. Remarque : une famille ℱ = (⃗𝑣1 ) de UN vecteur est libre ssi ⃗𝑣1 ∕= ⃗0. La définition de la liberté d’une famille n’est pas très exploitable sous cette forme (vérifier que chacun des vecteurs ne peut pas s’écrire comme combinaison des autres ? ? ? pas pratique !). On possède une caractérisation plus simple à exprimer : Caractérisation de la liberté d’une famille : on a l’équivalence entre les deux propositions suivantes (1) la famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) est libre (2) la seule manière d’obtenir le vecteur nul ⃗0 avec une combinaison linéaire des vecteurs ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 est la combinaison triviale 0⃗𝑣1 + . . . + 0⃗𝑣𝑛 (i.e) la combinaison obtenue en prenant TOUS les coefficients scalaires égaux à 0. Ceci peut encore s’écrire : « avec (𝜆1 , . . . , 𝜆𝑛 ) ∈ 𝕂𝑛 : SI 𝜆1⃗𝑣1 + . . . + 𝜆𝑛⃗𝑣𝑛 = ⃗0, ALORS 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑛 = 0 » . Preuve : (⇒) Si ℱ est libre : supposons que, pour des scalaires 𝜆1 , . . . , 𝜆𝑛 ∈ 𝕂, on ait 𝜆1⃗𝑣1 + . . . + 𝜆𝑛⃗𝑣𝑛 = ⃗0. Montrons que, nécessairement, 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑛 = 0. Raisonnons par l’absurde : supposons qu’un de ces coefficients soit non nul : quitte à changer l’ordre et à renuméroter, on peut, par souci de simplification d’écriture, supposer qu’il s’agit de 𝜆𝑛 ∕= 0. De l’égalité précédente, et grâce à 𝜆𝑛 ∕= 0, on peut en tirer ⃗𝑣𝑛 = − 𝜆𝜆𝑛1 ⃗𝑣1 − 𝜆𝜆𝑛2 ⃗𝑣2 − . . . − 𝜆𝜆𝑛−1 ⃗𝑣𝑛−1 , ce qui signifie que la famille 𝑛 (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) est liée, ce qui est absurde (puisqu’on a supposé ℱ est libre). CQFD. (⇐) Supposons que la seule combinaison nulle des (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) soit la combinaison triviale. Par l’absurde : si ℱ était liée, alors au moins un des vecteurs ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 peut s’écrire comme –2/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 une combinaison linéaire des (𝑛 − 1) autres. Donc, il existe 𝑖0 ∈ {1, . . . , 𝑛} tel que ⃗𝑣𝑖0 soit une combinaison linéaire des (𝑛 − 1) autres, ce qui signifie qu’il existe (𝑛 − 1) scalaires 𝛼𝑖 dans 𝕂 𝑛 𝑛 ∑ ∑ tels que : ⃗𝑣𝑖0 = 𝛼𝑖 .⃗𝑣𝑖 , d’où l’écriture 1.⃗𝑣𝑖0 − 𝛼𝑖 .⃗𝑣𝑖 = ⃗0, d’où l’absurdité, car c’est 𝑖=1,𝑖∕=𝑖0 𝑖=1,𝑖∕=𝑖0 une combinaison non triviale (le coefficient de ⃗𝑣𝑖0 est 1 ∕= 0) des vecteurs ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 qui est égale à ⃗0 (ça contredit l’hypothèse). Donc ℱ est libre. Remarque : les preuves précédentes nécessitent d’avoir 𝑛 ⩾ 2, mais le résultat est évident lorsque 𝑛 = 1 car : ( ℱ = (⃗𝑣1 ) est libre ) ⇔ ( ⃗𝑣1 ∕= ⃗0) ⇔ ( SI 𝜆.⃗𝑣1 = ⃗0 ALORS 𝜆 = 0 ). Méthode pour prouver qu’une famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) est libre ou liée : on commence par supposer qu’on a l’écriture 𝜆1⃗𝑣1 + . . . + 𝜆𝑛⃗𝑣𝑛 = ⃗0 avec (𝜆1 , . . . , 𝜆𝑛 ) ∈ 𝕂𝑛 . Si, après examen, ceci entraine que, NECESSAIREMENT, 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑛 = 0, alors ℱ est libre. Si, au contraire, on trouve une solution autre que celle-ci, plus précisément si on arrive à exhiber des scalaires 𝜆1 , . . . , 𝜆𝑛 NON TOUS NULS (i.e au moins un des 𝜆𝑖 non nul) et vérifiant l’égalité initiale, alors on peut en déduire que ℱ est une famille liée. Exemples : 1. Soit ℱ = (⃗𝑢, ⃗𝑣 ), une famille de deux vecteurs de 𝐸 : (⃗𝑢, ⃗𝑣 ) est liée ssi un des deux vecteurs est une combinaison linéaire de l’autre, autrement dit ssi ⃗𝑢 et ⃗𝑣 sont colinéaires. D’où : (ℱ = (⃗𝑢, ⃗𝑣 ) est liée)⇔ (⃗𝑢 et ⃗𝑣 sont colinéaires) (ℱ = (⃗𝑢, ⃗𝑣 ) est libre )⇔ (⃗𝑢 et ⃗𝑣 ne sont pas colinéaires) Attention : ce résultat ne se généralise pas à plus de deux vecteurs. On a déjà vu l’exemple d’une famille de trois vecteurs de ℝ3 qui sont non-colinéaires deux à deux, mais qui est néanmoins est liée (l’exemple était pris avec trois vecteurs coplanaires dans ℝ3 ). 2. La famille (sin, cos) est libre dans l’espace 𝒜(ℝ, ℝ). En effet, si on a 𝜆1 sin +𝜆2 cos = 0̃ : ceci signifie que, pour tout réel 𝑥 ∈ ℝ, on a 𝜆1 sin(𝑥) + 𝜆2 cos(𝑥) = 0. En prenant successivement 𝑥 = 0 et 𝑥 = 𝜋2 , on en tire les égalités (𝜆1 × 0) + (𝜆2 × 1) = 0 et (𝜆1 × 1) + (𝜆2 × 0) = 0, ce qui entraîne 𝜆2 = 0 et 𝜆1 = 0 ! D’où le résultat. 3. Dans l’espace 𝐸 = ℝ2 , prenons la famille ℱ = (⃗𝑎, ⃗𝑏, ⃗𝑐) où ⃗𝑎 = (1, 2), ⃗𝑏 = (3, 4), ⃗𝑐 = (5, 6). Supposons 𝜆1⃗𝑎 +𝜆2⃗𝑏+𝜆3⃗𝑐 = ⃗0 = (0, 0), (i.e) (𝜆1 +3𝜆2 +5𝜆3 , 2𝜆1 +4𝜆2 +6𝜆3 ) = (0, 0), d’où le système { 𝜆1 + 3𝜆2 + 5𝜆3 = 0 . Par la méthode du pivot de Gauss (𝐿2 ← 𝐿2 − 2𝐿1 ), ce sys2𝜆1 + 4𝜆2 + 6𝜆3 = 0 { 𝜆1 + 3𝜆2 + 5𝜆3 = 0 tème est équivalent à : : c’est un système linéaire homogène (car − 2𝜆2 − 4𝜆3 = 0 𝜆1 = 𝜆2 = 𝜆3 = 0 est une solution évidente), qui, sous cette forme, est un système échelonné, clairement de rang 𝑟 = 2, mais à 𝑛 = 3 inconnues, donc qui possède 𝑛 − 𝑟 = 3 − 2 = 1 paramètre libre (ici 𝜆3 par exemple), donc possède une infinité de solutions, obtenues par exemple { 𝜆1 = 𝜆3 à l’aide du paramétrage . Par conséquent, puisque ce système est équivalent 𝜆2 = −2𝜆3 à l’écriture 𝜆1⃗𝑎 + 𝜆2⃗𝑏 + 𝜆3⃗𝑐 = ⃗0 = (0, 0), on peut en déduire qu’il y a d’autres solutions que la solution triviale : par exemple, en prenant 𝜆3 = 1, on obtient la combinaison ⃗𝑎 − 2⃗𝑏 + ⃗𝑐 = ⃗0, ce qui prouve que la famille ℱ = (⃗𝑎, ⃗𝑏, ⃗𝑐) est liée. –3/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 On peut généraliser et affirmer que, dans ℝ2 , toute famille de trois vecteurs est nécessairement liée ! En effet, l’écriture de la combinaison nulle avec ces trois vecteurs aboutit à un système linéaire et homogène de 2 équations linéaires, à 3 inconnues 𝜆1 , 𝜆2 , 𝜆3 , la matrice 𝑀 du système étant alors élément de ℳ2,3 (ℝ). Le rang 𝑟 de cette matrice est au plus 2 (car elle possède 2 lignes) : de plus, il y a au moins une solution puisque le système est homogène, puis une infinité car il y a 3 − 𝑟 ⩾ 1 paramètre(s) libre(s) ! MIEUX : ceci peut se généraliser à des espaces du type 𝕂𝑛 ! Plus précisément : « Dans 𝕂𝑛 , toute famille contenant (𝑛 + 1) vecteurs est nécessairement liée ». Preuve : l’écriture de la combinaison nulle de ces (𝑛+1) vecteurs est équivalente à la résolution d’un système linéaire homogène de 𝑛 équations (obtenues par les 𝑛 composantes des vecteurs de 𝐸 = 𝕂𝑛 ), à (𝑛 + 1) inconnues (𝜆1 , . . . , 𝜆𝑛+1 , éléments de 𝕂). Le rang 𝑟 d’un tel système est au plus 𝑛, mais, possèdant 𝑛 + 1 inconnues et une solution évidente, il a une infinité de solutions paramétrées à l’aide de 𝑛 + 1 − 𝑟 ⩾ 1 paramètre(s) libre(s) La famille est donc liée, car il existe une autre solution que 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑛+1 = 0. ENCORE MIEUX : puisqu’une surfamille d’une famille liée est liée (voir ci-dessous), on a « dans 𝕂𝑛 , toute famille contenant au moins (𝑛 + 1) vecteurs est nécessairement liée » . ATTENTION : il n’y a pas de réciproque ! Une famille liée dans 𝕂𝑛 peut éventuellement contenir MOINS de 𝑛+1 vecteurs. Par exemple, dans ℝ3 , avec ⃗𝑎 = (1, 0, −1), ⃗𝑏 = (2, 0, −2), ⃗𝑐 = (1, 2, 3), les familles (⃗𝑎, ⃗𝑏, ⃗𝑐) et (⃗𝑎, ⃗𝑏) sont liées car ⃗𝑎 et ⃗𝑏 sont colinéaires. Mais la famille (⃗𝑎, ⃗𝑐) est libre ⃗ de QUATRE car ⃗𝑎 et ⃗𝑐 ne sont pas colinéaires. Par contre, il est certain qu’une famille (⃗𝑎, ⃗𝑏, ⃗𝑐, 𝑑) 3 vecteurs quelconques de ℝ est nécessairement liée ! TOUJOURS MIEUX : pour vérifier si une famille de 𝑝 vecteurs (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑝 ) de 𝕂𝑛 est libre ou liée, on écrit le système correspondant à 𝜆1⃗𝑣1 +⋅ ⋅ ⋅+𝜆𝑝⃗𝑣𝑝 = ⃗0, c’est un système de 𝑛 équations à 𝑝 inconnues, de matrice 𝑀 ∈ ℳ𝑛,𝑝 (𝕂). Le système étant homogène, il a une solution évidente (la triviale 𝜆1 = ⋅ ⋅ ⋅ = 𝜆𝑝 = 0) : par conséquent, t il a une solution unique SSI il n’y a pas de paramètre libre SSI son rang 𝑟 est égal à 𝑝 (car l’ensemble des solutions d’un tel système se paramètre à l’aide de 𝑝 − 𝑟 paramètres libres, voir cours sur les matrices du début d’année). Donc, avec la matrice 𝑀 = Mat𝒞 (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑝 ) dont les colonnes sont ces 𝑝 vecteurs de 𝕂𝑛 , une famille de 𝑝 vecteurs de 𝕂𝑛 est libre SSI le rang de la matrice 𝑀 est 𝑝 4. Dans le 𝕂-espace vectoriel 𝕂[𝑋] des polynômes à coefficients dans 𝕂, toute famille finie de 𝑛 polynômes non nuls de degrés strictement distincts deux à deux est nécessairement libre. Preuve : on peut renuméroter cette famille de 𝑛 polynômes non nuls par degrés croissants, (i.e) ℱ = (𝑃1 , 𝑃2 , . . . , 𝑃𝑛 ) où 0 ⩽ deg(𝑃1 ) < deg(𝑃2 ) < ⋅ ⋅ ⋅ < deg(𝑃𝑛 ). Ecrite comme ceci, on dit que la famille ℱ est une famille de polynômes de degrés échelonnés (on dit aussi famille étagée en degrés). 𝑛 ∑ Supposons que 𝛼𝑖 𝑃𝑖 = 0̃, où (𝛼1 , . . . , 𝛼𝑛 ) ∈ 𝕂𝑛 . On veut prouver que tous les 𝛼𝑖 sont néces𝑖=1 sairement tous nuls (ce qui entrainera bien que ℱ est une famille libre). Raisonnons par l’absurde : supposons qu’au moins un des 𝛼𝑖 soit non nul, et considérons alors le plus grand indice 𝑖0 tel que 𝛼𝑖0 ∕= 0 (i.e 𝑖0 = max{𝑖∣𝛼𝑖 ∕= 0}). On aurait alors (𝑖 > 𝑖0 ) ⇒ (𝛼𝑖 = 0), 𝑖0 𝑛 ∑ ∑ et l’égalité 𝛼𝑖 𝑃𝑖 = 0̃ peut se ré-écrire 𝛼𝑖 𝑃𝑖 = 0̃ (i.e) 𝛼1 𝑃1 + . . . 𝛼𝑖0 𝑃𝑖0 = 0̃. 𝑖=1 𝑖=1 –4/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel ( 𝑖 0 ∑ 2016-2017 ) Mais, les degrés étant échelonnés, et 𝛼𝑖0 ∕= 0, on a deg 𝛼𝑖 𝑃𝑖 = deg(𝑃𝑖0 ) ⩾ 0, ce qui est 𝑖=1 ( 𝑖 ) 𝑖0 0 ∑ ∑ 𝛼𝑖 𝑃𝑖 = 0̃ donc deg 𝛼𝑖 𝑃𝑖 = deg(0̃) = −∞ ! CQFD ! absurde car 𝑖=1 𝑖=1 A connaître : dans 𝕂[𝑋], (deg(𝑃1 ) < deg(𝑃2 ) < ⋅ ⋅ ⋅ < deg(𝑃𝑛 )) ⇒ (𝑃1 , 𝑃2 , . . . , 𝑃𝑛 ) est une famille libre . Applications : – Dans 𝕂[𝑋], pour tout 𝑛 ⩾ 0, la famille ℱ = (1, 𝑋, 𝑋 2 , . . . , 𝑋 𝑛 ) = (𝑋 𝑖 )0⩽𝑖⩽𝑛 est une famille libre (car de degrés échelonnés) – Dans 𝕂[𝑋], la famille ℱ = (𝑋 + 1, 𝑋 3 − 5, 𝑋 4 − 𝑋 + 1, −5𝑋 10 + 8𝑋 + 8) est libre (car de degrés échelonnés : 1 < 3 < 4 < 10). – Attention : il n’y a pas de réciproque, (i.e) il existe des familles libres dans 𝕂[𝑋] qui ne soient pas constituées de polynômes de dégrés tous distincts deux à deux. Par exemple, dans ℝ[𝑋], la famille ℱ = (𝑋 + 1, 𝑋 − 1) est libre car, si 𝛼1 (𝑋 + 1) + 𝛼2 (𝑋 − 1) = 0̃, alors pour tout réel 𝑥, on a 𝛼1 (𝑥 + 1) + 𝛼2 (𝑥 − 1) = 0. En prenant successivement 𝑥 = 1 puis 𝑥 = −1 dans cette égalité de fonctions, on en tire : 2𝛼1 + 0𝛼2 = 0 et 0𝛼1 − 2𝛼2 = 0, puis 𝛼1 = 𝛼2 = 0. D’où la liberté de la famille ℱ = (𝑋 + 1, 𝑋 − 1) (pourtant constituée de deux polynômes de même degré !). De même, on peut prouver que la famille ((𝑋 − 1)2 , (𝑋 − 1)(𝑋 − 2), (𝑋 − 2)2 ) de trois polynômes de même degré (deux) est libre ! – Dans ℝℝ , la famille de fonctions ℱ = (𝑓1 , 𝑓2 , 𝑓3 , . . . , 𝑓𝑛 ) est libre, où les 𝛼𝑖 sont des réels deux à deux distincts (par exemple 𝛼0 < 𝛼1 < ⋅ ⋅ ⋅ < 𝛼𝑛 ) et, pour tout 𝑥 ∈ ℝ, 𝑓𝑖 (𝑥) = 𝑒𝛼𝑖 𝑥 . Proposition : 1. Toute sous-famille d’une famille libre de vecteurs de 𝐸 est encore une famille libre . 2. Toute sur -famille d’une famille liée de vecteurs de 𝐸 est encore une famille liée . Il faut comprendre : si ℱ est une famille libre, alors la famille ℱ ′ obtenue en enlevant un ou plusieurs vecteurs de ℱ est encore une famille libre (ℱ ′ ⊂ ℱ). De même : si ℱ est une famille liée, alors la famille ℱ ′′ obtenue en ajoutant à ℱ un ou plusieurs vecteurs de 𝐸 reste une famille liée (ℱ ⊂ ℱ ′′ ). Preuve : 1. Si ℱ = (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) est une famille libre, et ℱ ′ , une sous-famille de ℱ. Quitte à changer l’ordre et à renuméroter, on peut supposer que ℱ ′ s’écrit ℱ ′ = (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑝 ) avec 𝑝 ⩽ 𝑛. Prouvons que (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑝 ) est libre. Pour cela : si on suppose que 𝜆1⃗𝑣1 + . . . + 𝜆𝑝⃗𝑣𝑝 = ⃗0, alors on peut écrire 𝜆1⃗𝑣1 + . . . + 𝜆𝑝⃗𝑣𝑝 + 0⃗𝑣𝑝+1 + 0.⃗𝑣𝑝+2 + ⋅ ⋅ ⋅ + 0⃗𝑣𝑛 = ⃗0. Mais la famille (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) étant supposée libre, on en tire automatiquement 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑝 = 0 = 0 = . . . = 0 = 0, d’où, a fortiori, 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑝 = 0, ce qui permet d’affirmer que la famille ℱ ′ = (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑝 ) est libre. CQFD ! Remarque : la preuve précédente nécessite de supposer 𝑛 ⩾ 1. Le résultat reste néamoins valable à condition de prendre la convention suivante : «une famille de 0 vecteur (i.e l’ensemble vide...) est une famille libre» . On remarquera que c’est cohérent, car elle ne peut pas être liée (en effet, comment y trouver UN vecteur, dans cet ensemble, qui soit une combinaison des autres ?). –5/12– Lycée Faidherbe, Lille COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel PCSI1 2016-2017 2. Si ℱ ′′ est une sur-famille de ℱ, alors ℱ est une sous-famille de ℱ ′′ . Si, en plus, on suppose que ℱ est une famille liée, alors il est imposssible que ℱ ′′ soit libre, car sinon, d’après le résultat prouvé juste ci-dessus, on devrait avoir ℱ libre ! Donc ℱ ′′ est nécessairement liée. CQFD ! Conséquence : « Toute famille de vecteurs de 𝕂𝑛 qui contient AU MOINS (𝑛 + 1) vecteurs est nécessairement liée.» En effet, si ℱ ′′ désigne une famille de plus de (𝑛 + 1) vecteurs de 𝕂𝑛 , alors il est possible d’en extraire une sous-famille ℱ contenant exactement (𝑛 + 1) vecteurs de 𝕂𝑛 , qui est donc liée (résultat déjà vu). Alors, ℱ ′′ est liée en tant que sur-famille de ℱ, famille liée. Proposition (unicité de la décomposition sur une famille libre) Si la famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) est libre, si 𝑤 ⃗ est une combinaison linéaire de vecteurs de ℱ (i.e) si 𝑤 ⃗ ∈ Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ), alors son écriture est unique (i.e) il y a unicité des coefficients scalaires 𝑛 ∑ 𝛼1 , 𝛼2 , . . . , 𝛼𝑛 dans l’écriture 𝑤 ⃗= 𝛼𝑖⃗𝑣𝑖 . 𝑖=1 Remarque : la réciproque est également vraie (et évidente par définition) : (ℱ est libre)⇔ (tout vecteur de Vect(ℱ) a une décomposition unique sur la famille ℱ) . 𝑛 𝑛 ∑ ∑ Preuve : supposons que 𝑤 ⃗= 𝛼𝑖⃗𝑣𝑖 = 𝛽𝑖⃗𝑣𝑖 , avec (𝛼1 , 𝛼2 , . . . , 𝛼𝑛 , 𝛽1 , 𝛽2 , . . . , 𝛽𝑛 ) ∈ 𝕂2𝑛 . De 𝑛 ∑ 𝑖=1 𝛼𝑖⃗𝑣𝑖 − 𝑛 ∑ 𝑖=1 𝑖=1 𝑖=1 𝛽𝑖⃗𝑣𝑖 = 𝑤 ⃗ −𝑤 ⃗ = ⃗0, on tire 𝑛 ∑ (𝛼𝑖 − 𝛽𝑖 )⃗𝑣𝑖 = ⃗0. Ceci est une combinaison nulle 𝑖=1 des vecteurs de ℱ, famille supposée libre, donc on a nécessairement : pour tout 𝑖 ∈ {1, 2, . . . , 𝑛}, 𝛼𝑖 − 𝛽𝑖 = 0 (i.e) 𝛼𝑖 = 𝛽𝑖 , d’où l’unicité de la décomposition ! Exemples : 1. Dans 𝒜(ℝ, ℝ), la famille (cos, sin) est libre, donc si une fonction 𝑓 s’écrit 𝑓 = 𝑎 cos +𝑏 sin mais aussi 𝑓 = 𝑐 cos +𝑑 sin, on peut en déduire que 𝑎 = 𝑐 et 𝑏 = 𝑑 (par unicité de la décomposition sur une famille libre). 𝑛 𝑛 ∑ ∑ 𝑖 2. Quand on dit que deux polynômes 𝑃 = 𝑎𝑖 𝑋 et 𝑄 = 𝑏𝑖 𝑋 𝑖 sont égaux si et seulement si 𝑖=0 𝑖=0 tous leurs coefficients sont deux à deux égaux (i.e pour tout 𝑖 ∈ {0, 1, . . . , 𝑛}, 𝑎𝑖 = 𝑏𝑖 ), c’est la liberté de la famille (𝑋 𝑖 )0⩽𝑖⩽𝑛 qu’on utilise. 3. Plus généralement : quand on «identifie» coefficient par coefficient dans deux décompositions égales mais de formes différentes, il faut au préalable justifier que la famille sur laquelle on décompose est libre, sinon on n’est pas assuré que les coefficients soient nécessairement égaux. Un exemple : dans 𝒜(ℝ, ℝ), on définit la fonction 𝑓 par 𝑓 (𝑥) = 2 cos(2𝑥) − 3 cos2 (𝑥) + 4 sin2 (𝑥) (pour tout réel 𝑥), autrement dit 𝑓 = 2𝑢 − 3 cos2 +4 sin2 (où, ∀𝑥 ∈ ℝ, 𝑢(𝑥) = cos(2𝑥)). Si on donne 𝑓 = 𝑎𝑢 + 𝑏 cos2 +𝑐 sin2 (i.e) ∀𝑥 ∈ ℝ, 𝑓 (𝑥) = 𝑎 cos(2𝑥) + 𝑏 cos2 (𝑥) + 𝑐 sin2 (𝑥), a-t-on nécessairement (𝑎, 𝑏, 𝑐) = (2, −3, 4) ? Réponse : NON ! En effet, la famille (𝑢, cos2 , sin2 ) n’est pas libre, car ∀𝑥 ∈ ℝ, cos(2𝑥) = cos2 (𝑥) − sin2 (𝑥) (i.e) 𝑢 = cos2 − sin2 . On ne peut donc pas identifier ! Par exemple, il est facile de voir qu’on peut écrire : ∀𝑥 ∈ ℝ, 𝑓 (𝑥) = 2. cos(2𝑥) − 3. cos2 (𝑥) + 4. sin2 (𝑥) = 1. cos(2𝑥) − 2. cos2 (𝑥) + 3. sin2 (𝑥). Autre exemple : l’écriture 𝑓 = 𝑎ch + 𝑏sh + 𝑐 exp n’est pas unique car la famille (ch, sh, exp) est –6/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 liée (ch + sh = exp !). Proposition (familles libres et somme directe de sev) Si (⃗𝑒1 , . . . , ⃗𝑒𝑘 , ⃗𝑒𝑘+1 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ) est une famille libre d’un 𝕂-ev 𝐸, alors les sev Vect(⃗𝑒1 , . . . , ⃗𝑒𝑘 ) et Vect(⃗𝑒𝑘+1 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ) sont en somme directe. Preuve : si ⃗𝑣 appartient à Vect(⃗𝑒1 , . . . , ⃗𝑒𝑘 ) ∩ Vect(⃗𝑒𝑘+1 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ), alors il existe des scalaires 𝜆𝑖 tels que 𝑘 𝑛 𝑘 𝑛 ∑ ∑ ∑ ∑ ⃗𝑣 = 𝜆𝑖⃗𝑒𝑖 = 𝜆𝑖⃗𝑒𝑖 , d’où 𝜆𝑖⃗𝑒𝑖 − 𝜆𝑖⃗𝑒𝑖 = ⃗0. Par liberté de la famille (⃗𝑒1 , . . . , ⃗𝑒𝑘 , ⃗𝑒𝑘+1 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ), 𝑖=1 𝑖=𝑘+1 𝑖=1 𝑖=𝑘+1 on en déduit 𝜆1 = . . . = 𝜆𝑘 = −𝜆𝑘+1 = . . . = −𝜆𝑛 = 0, d’où ⃗𝑣 = 𝑘 ∑ 0⃗𝑒𝑖 = ⃗0. On a donc prouvé 𝑖=1 Vect(⃗𝑒1 , . . . , ⃗𝑒𝑘 ) ∩ Vect(⃗𝑒𝑘+1 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ) = {⃗0}, donc les deux sev sont bien en somme directe. Exemple : (1, 𝑋 2 , 𝑋 4 , 𝑋 6 ) et (𝑋, 𝑋 3 , 𝑋 5 ) sont deux familles libres, Vect(1, 𝑋 2 , 𝑋 4 , 𝑋 6 ) et Vect(𝑋, 𝑋 3 , 𝑋 5 ) sont en somme directe, et même supplémentaires dans ℝ6 [𝑋] = Vect(1, 𝑋 2 , 𝑋 4 , 𝑋 6 ) ⊕ Vect(𝑋, 𝑋 3 , 𝑋 5 ). Petit complément : il est posssible de définir la notion de liberté pour une famille infinie. Si 𝐼 est une partie infinie (par exemple de ℕ), et ℱ = (⃗𝑣𝑖 )𝑖∈𝐼 une famille infinie de vecteurs de 𝐸, on dit que ℱ est une famille libre si toute sous-famille finie ℱ ′ , extraite de ℱ, est libre. Un exemple : dans 𝕂[𝑋], la famille infinie (𝑋 𝑘 )𝑘∈ℕ = (1, 𝑋, 𝑋 2 , 𝑋 3 , . . .) est libre, car toute sousfamille extraite finie est nécessairement composée de polynômes de degrés échelonnés, donc libre ! Un autre exemple : dans ℝℝ , la famille (𝑓𝛼 )𝛼∈ℝ est une famille libre (où 𝑓𝛼 (𝑥) = 𝑒𝛼𝑥 ). II. Familles génératrices d’un espace vectoriel Définition : une famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 de 𝑛 vecteurs (𝑛 ⩾ 1) d’un espace vectoriel 𝐸 est dite génératrice de l’espace 𝐸 si on a 𝐸 = Vect(ℱ) = Vect(⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ). On dit aussi que la famille ℱ engendre 𝐸. Méthode : pour prouver que ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 est une famille génératrice d’un espace 𝐸, il faut et il suffit de prouver ∙ que ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 sont bien des vecteurs de 𝐸 (i.e) : ∀𝑖 ∈ {1, . . . , 𝑛}, ⃗𝑣𝑖 ∈ 𝐸. ∙ que tout vecteur ⃗𝑥 de 𝐸 peut s’écrire comme une combinaison linéaire des vecteurs ⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 . 𝑛 ∑ 𝑛 Autrement dit : ∀⃗𝑥 ∈ 𝐸, ∃(𝛼1 , . . . , 𝛼𝑛 ) ∈ 𝕂 , ⃗𝑥 = 𝛼𝑖⃗𝑣𝑖 . 𝑖=1 Rappel : par convention, on a posé Vect(∅) = Vect(⃗0) = {⃗0} . Rappel : Vect(⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) + Vect(𝑤 ⃗ 1, . . . , 𝑤 ⃗ 𝑝 ) = Vect(⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑛 , 𝑤 ⃗ 1, . . . , 𝑤 ⃗ 𝑝 ). Complément : on peut donner un sens pour des familles infinies. Une famille ℱ = (⃗𝑣𝑖 )𝑖∈𝐼 infinie de vecteurs d’un espace 𝐸 est génératrice de 𝐸 si tout vecteur de 𝐸 peut s’obtenir comme une –7/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 combinaison linéaire (finie) de vecteurs de ℱ. Par exemple, ℱ = (𝑋 𝑖 )𝑖∈ℕ est génératrice de 𝕂[𝑋] puisque, pour tout polynôme 𝑃 de 𝕂[𝑋], il existe 𝑛 ∑ un entier 𝑛 ⩾ 0 et des scalaires 𝛼0 , . . . , 𝛼𝑛 dans 𝕂 tels que 𝑃 = 𝛼𝑖 𝑋 𝑖 . 𝑖=0 Quelques exemples : 1. Tout vecteur ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦) de ℝ2 peut s’écrire ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦) = 𝑥(1, 0) + 𝑦(0, 1). Donc ℝ2 = Vect( (1, 0) , (0, 1) ), (i.e) la famille de deux vecteurs de ℝ2 , ℱ = ( (1, 0) , (0, 1) ), est génératrice de ℝ2 . 2. La famille ℱ ′ = ((1, 2) , (3, 4)) est également génératrice de ℝ2 : en effet, il suffit de vérifier que, pour tout ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦) de ℝ2 , on peut trouver deux réels 𝑎 et 𝑏 tels que (𝑥, 𝑦) = 𝑎(1, 2) + 𝑏(3, 4). Par résolution d’un système simple, on trouve : (𝑥, 𝑦) = ( 3𝑦 − 2𝑥).(1, 2) + (𝑥 − 𝑦2 ).(3, 4). 2 3. La famille ℱ ′′ = ((0, 1) , (1, 2) , (2, 3) ) est également génératrice de ℝ2 : en effet, si on cherche, à (𝑥, 𝑦) fixé, des réels 𝑎, 𝑏 et 𝑐 tels que (𝑥, 𝑦) = 𝑎(0, 1)+𝑏(1, 2)+𝑐(2, 3), on est amené à résoudre un système linéaire de deux équations à trois inconnues (𝑎, 𝑏 et 𝑐), compatible, qui donne l’infinité de solutions suivantes : {𝑎 = 𝑦 − 2𝑥 + 𝑐, 𝑏 = 𝑥 − 2𝑐, 𝑐 = 𝑐} où 𝑐 est un paramètre libre ! Il y a donc une infinité de façon d’écrire ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦) comme combinaison linéaire de vecteurs de ℱ ′′ . Cette famille ℱ ′′ = ( (0, 1) , (1, 2) , (2, 3) ) est donc bien génératrice de ℝ2 (mais pas libre, car il n’y a pas unicité de l’écriture en général !) 4. Soit 𝐹 = {(𝑥, 𝑦, 𝑧) ∈ ℝ3 ∣ 𝑥 − 𝑦 + 2𝑧 = 0} : c’est un sous-espace de ℝ3 , constitué de tous les vecteurs s’écrivant ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦, 𝑧) avec la condition 𝑥 − 𝑦 + 2𝑧 = 0, donc de tous les vecteurs ⃗𝑢 = (𝑦 − 2𝑧, 𝑦, 𝑧) = 𝑦(1, 1, 0) + 𝑧(−2, 0, 1) où 𝑦 et 𝑧 sont des paramètres libres décrivant ℝ. Ainsi 𝐹 = Vect( (1, 1, 0) , (−2, 0, 1) ) : la famille ( (1, 1, 0) , (−2, 0, 1) ) est une famille génératrice de l’espace 𝐹 . 5. 𝐺 = {(𝑥, 𝑦, 𝑧, 𝑡) ∈ ℝ4 ∣ 𝑥 − 𝑦 + 𝑧 − 𝑡 = 0 et 𝑥 + 𝑦 + 2𝑧 − 3𝑡 = 0} est un plan (à faire). 6. La famille de fonctions (𝑦1 , 𝑦2 ) où 𝑦1 (𝑥) = 𝑒2𝑥 et 𝑦1 (𝑥) = 𝑒−3𝑥 , est une famille génératrice de l’ensemble des solutions de l’équation différentielle 𝑦 ′′ + 𝑦 ′ − 6𝑦 = 0. 7. La famille de suites (𝑣, 𝑤) où 𝑣𝑛 = 2𝑛 et 𝑤𝑛 = (−3)𝑛 , est une famille génératrice de l’ensemble des suites 𝑢 vérifiant la relation 𝑢𝑛+2 + 𝑢𝑛+1 − 6𝑢𝑛 = 0 (pour tout 𝑛 ∈ ℕ). Proposition : si ℱ est une famille génératrice de 𝐸, alors toute sur-famille ℱ ′ , constituée en ajoutant à ℱ des vecteurs de 𝐸, est encore génératrice de 𝐸 (ℱ ⊂ ℱ ′ ). Preuve : c’est évident, car si tout vecteur ⃗𝑥 de 𝐸 peut s’écrire comme combinaison linéaire de vecteurs 𝑛 ∑ de ℱ = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 sous la forme ⃗𝑥 = 𝛼𝑖⃗𝑣𝑖 , alors, en supposant ℱ ′ = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑝 (avec 𝑝 > 𝑛), on peut toujours écrire ⃗𝑥 = 𝑛 ∑ 𝑖=1 𝛼𝑖⃗𝑣𝑖 + 𝑝 ∑ 𝑖=1 0⃗𝑣𝑖 . 𝑖=𝑛+1 Attention ; : ce résultat ne tient plus si on ajoute à ℱ des vecteurs qui ne sont pas dans l’espace 𝐸 ! Par exemple, si 𝐸 = Vect( (1, 0, −1) , (1, 1, 0) ), 𝐸 est un sous-espace strict de ℝ3 (c’est le plan d’équation «𝑥 − 𝑦 + 𝑧 = 0»), mais la famille ( (1, 0, −1) , (1, 1, 0) , (1, 1, 1) ) n’est pas génératrice de 𝐸 ! (car (1, 1, 1) ∈ / 𝐸). –8/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 III. Bases d’un espace vectoriel Définition : une famille ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 de 𝑛 vecteurs (𝑛 ⩾ 1) d’un espace vectoriel 𝐸 est une base de l’espace 𝐸 si ℱ est une famille libre et génératrice de 𝐸 . Autrement dit : ( ℱ = (⃗𝑣1 , ⃗𝑣2 , . . . , ⃗𝑣𝑛 ) = (⃗𝑣𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 est une base de 𝐸 ) ⇔ ( ℱ est libre et 𝐸 = Vect(ℱ) ) . Exemples : 1. ℬ = (⃗𝑒1 , ⃗𝑒2 ) où ⃗𝑒1 = (1, 0) et ⃗𝑒2 = (0, 1), est une base de l’espace ℝ2 . En effet, ℬ est libre car 𝛼1 (1, 0) + 𝛼2 (0, 1) = (0, 0) ⇒ (𝛼1 , 𝛼2 ) = (0, 0) ⇒ 𝛼1 = 𝛼2 = 0. Puis ℬ est bien génératrice de ℝ2 car tout vecteur ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦) de ℝ2 peut s’écrire ⃗𝑢 = (𝑥, 𝑦) = 𝑥(1, 0) + 𝑦(0, 1) = 𝑥⃗𝑒1 + 𝑦⃗𝑒2 . 2. De même, ℬ = (⃗𝑒1 , ⃗𝑒2 , ⃗𝑒3 ) où ⃗𝑒1 = (1, 0, 0), ⃗𝑒2 = (0, 1, 0) et ⃗𝑒3 = (0, 0, 1), est une base de ℝ3 . 3. Généralisons : ℬ = (⃗𝑒1 , ⃗𝑒2 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ) où ⃗𝑒1 = (1, 0, . . . , 0), ⃗𝑒2 = (0, 1, 0, . . . , 0), ..., ⃗𝑒𝑛 = (0, . . . , 0, 1), est une base du 𝕂-espace vectoriel 𝕂𝑛 (appelée la base canonique de 𝕂𝑛 ). 4. (1, 𝑋, 𝑋 2 , . . . , 𝑋 𝑛 ) est la base canonique de 𝕂𝑛 [𝑋]. 5. On rappelle qu’on note 𝐸𝑖,𝑗 la matrice de ℳ𝑛,𝑝 (𝕂) ne comportant que des zéros, sauf en ligne 𝑖 et colonne 𝑗 où se trouve l’élément 1. La famille (𝐸𝑖,𝑗 )1⩽𝑖⩽𝑛,1⩽𝑗⩽𝑝 est la base canonique de l’ev des matrices ℳ𝑛,𝑝 (𝕂). 6. Les bases ne sont pas uniques : par exemple, on a vu que ℱ = ( (1, 2) , (3, 4) ) est une famille génératrice de ℝ2 , qui est également libre car { 𝛼1 + 3𝛼2 = 0 ⇒ ... ⇒ 𝛼1 = 𝛼2 = 0. 𝛼1 (1, 2) + 𝛼2 (3, 4) = (0, 0) ⇒ 2𝛼1 + 4𝛼2 = 0 Donc, ℱ = ( (1, 2) , (3, 4) ) est une autre base de ℝ2 . 7. ATTENTION : en tant que ℂ-espace vectoriel, on a ℂ = Vectℂ (1) car tout complexe 𝑧 ∈ ℂ peut s’écrire 𝑧 = 𝛼.1 i.e ⃗𝑧 = 𝛼.⃗1 avec 𝛼 = 𝑧 ∈ ℂ (le corps des scalaires ici). De plus, la famille (1) est libre (un seul vecteur non nul !), donc (1) est une base du ℂ-espace vectoriel ℂ . MAIS : en tant que ℝ-espace vectoriel, on a ℂ = Vectℝ (1, 𝑖) car tout complexe 𝑧 ∈ ℂ peut s’écrire 𝑧 = 𝛼1 .1 + 𝛼2 .𝑖 i.e ⃗𝑧 = 𝛼1 .⃗1 + 𝛼2 .⃗𝑖 avec 𝛼1 , 𝛼2 ∈ ℝ (le corps des scalaires ici). De plus, la famille (1, 𝑖) est libre (dans le ℝ-ev ℂ, car (𝜆1 .1 + 𝜆2 .𝑖 = 0) ⇒ (𝜆1 = 𝜆2 = 0) car 𝜆1 , 𝜆2 sont ici des réels), donc (1, 𝑖) est une base du ℝ-espace vectoriel ℂ . 8. Soit 𝐸 = {𝑓 ∈ 𝒟2 (ℝ, ℝ) ∣ 𝑓 ′′ + 𝑓 = 0}, le ℝ-espace vectoriel des solutions de l’équation différentielle «𝑦 ′′ + 𝑦 = 0». On sait que 𝐸 est constitué des fonctions de la forme 𝑎 cos +𝑏 sin (où 𝑎, 𝑏 sont des réels décrivant ℝ). Donc 𝐸 = Vect(cos, sin), où la famille (cos, sin) est libre (déjà prouvé). Donc la famille (cos, sin) est une base de l’espace 𝐸 9. Un cas extrême : on peut écrire {⃗0} = Vect(∅), où l’ensemble vide ∅ est une famille libre (car non liée...). Par conséquent, l’ensemble vide est une base de l’espace trivial {⃗0} ! Proposition : en traduisant autrement la définition d’une base, on a « ℬ = (⃗𝑏𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 est une base de l’espace 𝐸 si et seulement si tout vecteur ⃗𝑢 de 𝐸 peut s’écrire (génératrice), et ceci de façon unique (libre) comme une combinaison linéaire des vecteurs de ℬ ». –9/12– Lycée Faidherbe, Lille COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel PCSI1 2016-2017 Ecrit autrement : ( ℬ = (⃗𝑏𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 est une base de 𝐸 ) ⇔ ( ∀⃗𝑢 ∈ 𝐸, ∃!(𝛼1 , . . . , 𝛼𝑛 ) ∈ 𝕂𝑛 , ⃗𝑢 = 𝑛 ∑ 𝛼𝑖⃗𝑏𝑖 ) 𝑖=1 Définition : si ℬ = (⃗𝑏𝑖 )1⩽𝑖⩽𝑛 est une base de 𝐸, et si ⃗𝑢 = 𝑛 ∑ 𝛼𝑖⃗𝑏𝑖 , on dit que la liste (𝛼1 , . . . , 𝛼𝑛 ) 𝑖=1 (de 𝕂𝑛 ) constitue les coordonnées du vecteur ⃗𝑢 sur (/dans/par rapport à) la base ℬ. Notation (personnelle) : on écrira ⎛ ⎞ 𝛼1 𝑛 ⎜ 𝛼2 ⎟ ∑ ⎜ ⎟ ⃗ ⃗ ⃗ [⃗𝑢]ℬ = ⎜ . ⎟ = les coordonnées du vecteur ⃗𝑢 sur la base ℬ = (𝑏1 , 𝑏2 , . . . , 𝑏𝑛 ), si ⃗𝑢 = 𝛼𝑖⃗𝑏𝑖 . ⎝ .. ⎠ 𝑖=1 𝛼𝑛 Exemples : ⎛ ⎞ 𝑥1 ⎜ ⎟ 1. Dans 𝕂𝑛 , le vecteur ⃗𝑢 = (𝑥1 , . . . , 𝑥𝑛 ) a pour coordonnées, [⃗𝑢]𝒞 = ⎝ ... ⎠ sur la base canonique 𝑥𝑛 𝑛 𝒞 = (⃗𝑒1 , . . . , ⃗𝑒𝑛 ) de 𝕂 , car ⃗𝑢 = (𝑥1 , . . . , 𝑥𝑛 ) = 𝑥1⃗𝑒1 + . . . + 𝑥𝑛⃗𝑒𝑛 . 2. Bien entendu, si on change de bases, les coordonnées ne sont plus les mêmes ( en général. ) 9 2 Par exemple, dans ℝ , le vecteur (9, 10) a pour coordonnées [(9, 10)]𝒞 = sur la base 10 canonique 𝒞 = (⃗𝑒1 , ⃗𝑒2 ) de ℝ2 , mais en prenant ( la base ) ℬ = ( (1, 2) , (3, 4) ), d’après l’égalité, −3 (9, 10) = −3(1, 2) + 4(3, 4), on a [(9, 10)]ℬ = . 4 1 1 3. La famille de fonctions ℬ = (exp, exp ) est libre car, si 𝑎. exp +𝑏. exp = 0̃, alors en dérivant cette 1 relation, on obtient 𝑎. exp −𝑏. exp = 0̃ puis, en évaluant en 0 ces deux égalités de fonctions, on 1 en tire {𝑎.1 + 𝑏.1 = 0 et 𝑎.1 − 𝑏.1 = 0}, d’où 𝑎 = 𝑏 = 0. Donc, la famille ℬ = (exp, exp ) est une 1 ′′ base de l’espace 𝐸 = Vect(exp, exp ) (on peut vérifier que 𝐸 = {𝑓 ∈ 𝒟2 (ℝ, ℝ) ∣ 𝑓 − 𝑓 = 0} ). ( 1 ) ( 1 ) 2 2 Bien entendu : ch et sh sont des éléments de 𝐸, avec [ch]ℬ = et [sh]ℬ = . 1 1 − 2 2 4. La famille 𝒞 = (1, 𝑋, 𝑋 2 , . . . , 𝑋 𝑛 ) = (𝑋 𝑖 )𝑖∈{0,1,...,𝑛} est une base de l’espace 𝕂𝑛 [𝑋] des polynômes à coefficients dans 𝕂 et de degrés inférieurs ou égaux à 𝑛 (la liberté est évidente, car les degrés sont deux à deux distincts, et elle est bien génératrice par construction !). 5. Soit 𝑎 ∈ 𝕂, fixé. La famille ℬ = (1, (𝑋 − 𝑎), (𝑋 − 𝑎)2 , . . . , (𝑋 − 𝑎)𝑛 ) est une base de 𝕂𝑛 [𝑋] : en effet, elle est libre car de degrés échelonnés, et génératrice de 𝕂𝑛 [𝑋] car, grâce à la formule de 𝑛 ∑ 𝑃 (𝑘) (𝑎) Taylor, on sait que tout polynôme 𝑃 de 𝕂𝑛 [𝑋] peut s’écrire 𝑃 = . 𝛼𝑘 (𝑋−𝑎)𝑘 où 𝛼𝑘 = 𝑘! 𝑘=0 6. On considère ici ℂ comme un ℝ-espace vectoriel. On a déjà vu que ℬ = (1, 𝑖) constitue une √ 2𝑖𝜋 3 1 ′ 3 base de ℂ. On va prouver que ℬ = (1, 𝑗) est aussi une base de ℂ (où 𝑗 = 𝑒 = − 2 + 𝑖 2 ). En effet, pour tout vecteur 𝑧 = 𝑥 + 𝑖𝑦 = 𝑥.1 + 𝑦.𝑖 de ℂ, avec (𝑥, 𝑦) ∈ ℝ2 , on cherche s’il –10/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 √ existe (𝑎, 𝑏) ∈ ℝ2 tel que 𝑧 = 𝑎.1 + 𝑏.𝑗. Ceci donne l’égalité 𝑥.1 + 𝑦.𝑖 = 𝑎.1 + 𝑏(− 12 + 𝑖 23 ) √ (i.e) 𝑥 + 𝑖𝑦 = 𝑎 + 𝑏𝑗, ou encore 𝑥.1 + 𝑦.𝑖 = (𝑎 − 12 𝑏).1 + 𝑏 23 .𝑖. Or la famille (1, 𝑖) est libre, donc, par unicité de l’écriture sur cette famille, on{peut identifier, d’où le système à résoudre : { 𝑎 = 𝑥 + √13 𝑦 𝑎 − 12√𝑏 = 𝑥 . On observe donc qu’il y , que l’on résout facilement : √2 𝑦 𝑏 = 𝑏 23 = 𝑦 3 a une solution (𝑎, 𝑏) (pour tout 𝑧 = 𝑥 + 𝑖𝑦), donc la famille (1, 𝑗) est bien génératrice, mais en plus elle est unique, ce qui prouve également la liberté de cette famille (1, 𝑗). Conclusion :(ℬ ′ = (1, autre base du ℝ-espace ℂ. ) 𝑗) est une ( )vectoriel ( ( ) ) ( ) 1 1 √ − 0 0 1 3 √2 , [𝑖]ℬ = mais [𝑖]ℬ′ = , [𝑗]ℬ′ = , [1]ℬ = [1]ℬ′ = ! On a [𝑗]ℬ = 2 3 √ 1 1 0 2 3 7. Soit une famille de trois vecteurs ℱ = (⃗𝑣 , ⃗𝑣 ′ , ⃗𝑣 ′′ ) du ℝ-espace vectoriel ℝ3 . Cette famille ℱ est une base de ℝ3 si et seulement si tout vecteur ⃗𝑢 = (𝑎, 𝑏, 𝑐) peut s’écrire, et de façon unique, comme une combinaison linéaire des vecteurs ⃗𝑣 , ⃗𝑣 ′ , ⃗𝑣 ′′ . En posant ⃗𝑣 = (𝑥, 𝑦, 𝑧), ⃗𝑣 ′ = (𝑥′ , 𝑦 ′ , 𝑧 ′ ), ⃗𝑣 ′′ = (𝑥′′ , 𝑦 ′′ , 𝑧 ′′ ), cela revient à chercher un triplet réels vérifiant ⎧ (𝛼, 𝛽, 𝛾) de ′ ⎨ 𝑥.𝛼 + 𝑥 .𝛽 + 𝑥′′ .𝛾 = 𝑎 l’égalité 𝛼.⃗𝑣 +𝛽.⃗𝑣 ′ +𝛾.⃗𝑣 ′′ = ⃗𝑢, équivalent à la résolution du système 𝑦.𝛼 + 𝑦 ′ .𝛽 + 𝑦 ′′ .𝛾 = 𝑏 . ⎩ 𝑧.𝛼 + 𝑧 ′ .𝛽 + 𝑧 ′′ .𝛾 = 𝑐 Or, il s’agit d’un système LINÉAIRE, CARRÉ, trois équations, trois inconnues. que ⎛ On sait ⎞ 𝑥 𝑥′ 𝑥′′ ce système possède une et une seule solution (𝛼, 𝛽, 𝛾) ssi sa matrice 𝑀 = ⎝ 𝑦 𝑦 ′ 𝑦 ′′ ⎠ 𝑧 𝑧 ′ 𝑧 ′′ est inversible (i.e) rang(𝑀 ) = 3. Il est donc facile de détecter si une famille de trois vecteurs est une base, ou pas, de ℝ3 . Exemples : (a) avec ⃗𝑣 = (1, 2, 3), ⃗𝑣 ′ = (4, 5, 6), ⃗𝑣 ′′ = (7, 8, 9), ℱ = (⃗𝑣 , ⃗𝑣 ′ , ⃗𝑣 ′′ ) n’est pas une base de ℝ3 ⎛ ⎞ 1 4 7 car rang(𝑀 ) = rang ⎝ 2 5 8 ⎠ = ⋅ ⋅ ⋅ = 2. 3 6 9 ′ (b) avec ⃗𝑣 = (1, 0, 1), ⃗𝑣 = (1, 1, 1), ⃗𝑣 ′′ = (−1, 1, 2), ℱ = (⃗𝑣 , ⃗𝑣 ′ , ⃗𝑣 ′′ ) est une base de ℝ3 car ⎛ ⎞ 1 1 −1 rang(𝑀 ) = rang ⎝ 0 1 1 ⎠ = ⋅ ⋅ ⋅ = 3. 1 1 2 Remarque : ce résultat est bien entendu encore valable pour deux vecteurs dans ℝ2 , et on peut le généraliser pour des familles de 𝑛 vecteurs du 𝕂-espace vectoriel 𝕂𝑛 . Autrement dit, une famille de 𝑛 vecteurs de 𝕂𝑛 est une base de 𝕂𝑛 ssi rang(𝑀 ) = 𝑛, i.e ssi la matrice 𝑀 est inversible, où 𝑀 est la matrice carrée dont les 𝑛 colonnes sont les composantes de ces 𝑛 vecteurs. On peut adapter ce résultat à tout espace possédant une base (finie) en passant par la matrice des coordonnées des vecteurs d’une famille. MIEUX ! : on peut même utiliser les opérations sur les colonnes de la matrice des coordonnées des vecteurs d’une famille afin de déterminer une base de l’espace que cette famille engendre (voir cours). 8. Généralisation : si ℬ = (⃗𝑏1 , . . . , ⃗𝑏𝑛 ) est une base de l’ev 𝐸, et ℱ = (⃗𝑣1 , . . . , ⃗𝑣𝑝 ) une famille de 𝑝 de vecteurs de 𝐸, on note 𝑀 = Matℬ (ℱ) = ([⃗𝑣1 ]ℬ , . . . , [⃗𝑣𝑝 ]ℬ ) la matrice des coordonnées des –11/12– Lycée Faidherbe, Lille PCSI1 COURS - Familles finies de vecteurs d’un espace vectoriel 2016-2017 vecteurs de la famille ℱ sur la base ℬ (elle appartient à ℳ𝑛,𝑝 (𝕂)). On sait déjà : (la famille ℱ est libre)⇔ (le rang de la matrice 𝑀 = Matℬ (ℱ) est 𝑝 = card(ℱ)). Ceci permet de prouver que toutes les bases de 𝐸 ont le même cardinal (ici 𝑛). En effet, par l’absurde, si on dispose de deux bases ℬ et ℬ ′ de cardinaux respectifs 𝑛 et 𝑛′ avec, par exemple (sans restriction, quitte à échnger les rôles), 𝑛 < 𝑛′ , alors comme la famille ℬ ′ est libre, sa matrice Matℬ (ℬ ′ ) doit être de rang 𝑛′ , ce qui n’est pas possible car cette matrice comporte 𝑛 lignes avec 𝑛 < 𝑛′ (on a vu, dans le cours sur les matrices, que le rang d’une matrice est toujours inférieur ou égal à son nombre de lignes et à son nombre de colonnes). On doit donc avoir nécessairement 𝑛 = 𝑛′ . Par conséquent, ∙ si 𝐸 dispose d’une base ℬ de cardinal 𝑛, alors toute famille ne comportant pas 𝑛 vecteurs n’est pas une base de 𝐸. ∙ Et si une famille ℱ comporte 𝑛 vecteurs, alors (ℱ est une base de 𝐸) ⇔ (le rang de Matℬ (ℱ) est 𝑛) ⇔ (Matℬ (ℱ) est inversible). Proposition : si 𝐸1 et 𝐸2 sont deux sev supplémentaires dans 𝐸 (𝐸1 ⊕ 𝐸2 = 𝐸) alors la réunion d’une base ℬ1 de 𝐸1 et d’une base ℬ2 de 𝐸2 donne une base ℬ = ℬ1 ∪ ℬ2 de 𝐸 appelée base adaptée à la somme directe 𝐸1 ⊕ 𝐸2 = 𝐸. Preuve : tout vecteur ⃗𝑣 de 𝐸 = 𝐸1 ⊕ 𝐸2 s’écrit, de manière unique, sous la forme ⃗𝑣 = ⃗𝑣1 + ⃗𝑣2 avec ⃗𝑣1 ∈ 𝐸1 et ⃗𝑣2 ∈ 𝐸2 . Puis, ⃗𝑣1 se décompose de manière unique sur la base ℬ1 , de même pour 𝑣2 sur la base ℬ2 . D’où l’écriture de ⃗𝑣 sur ℬ = ℬ1 ∪ ℬ2 , nécessairement unique par somme directe de 𝐸1 et 𝐸2 . Mieux : on a même une réciproque ! Proposition : si 𝐸1 et 𝐸2 sont deux sev dans 𝐸 de bases respectives ℬ1 et ℬ2 , alors on a l’équivalence : (𝐸1 ⊕ 𝐸2 = 𝐸)⇔ (ℬ1 ∪ ℬ2 est une base de 𝐸) . Complément : on peut étendre la notion de base pour des familles infinies. Ainsi, une famille infinie ℬ = (⃗𝑏𝑖 )𝑖∈𝐼 est une base de 𝐸 si elle est libre et génératrice de 𝐸 (avec les définitions vues précédemment). Par exemple : 𝒞 = (𝑋 𝑖 )𝑖∈ℕ = (𝑋 0 , 𝑋 1 , 𝑋 2 , 𝑋 3 , . . .) est une base de l’espace des polynômes 𝕂[𝑋]. Autre exemple : dans ℝℕ , l’espace vectoriel des suites réelles, pour tout 𝑘 ∈ ℕ, on définit la suite 𝑏[𝑘] par : ∀𝑛 ∈ ℕ, 𝑏[𝑘]𝑛 = 0 si 𝑛 ∕= 𝑘, et 𝑏[𝑘]𝑛 = 1 si 𝑛 = 𝑘 qu’on peut noter 𝑏[𝑘] = (0, 0, . . . ,{0, 1, 0, 0, 0, . . . . . .) où le 1 est en (𝑘 + 1)-ième position. 0 si 𝑛 ∕= 𝑘 Autrement dit, 𝑏[𝑘]𝑛 = 𝛿𝑘,𝑛 = , où 𝛿𝑘,𝑛 =symbole de Kronecker. 1 si 𝑛 = 𝑘 La famille ℬ = (𝑏[𝑘])𝑘∈ℕ n’est pas une base de ℝℕ : en effet, la suite 𝑢 constante égale à 1 ne peut pas s’écrire comme une somme finie des 𝑏[𝑘] ! Par contre, en notant 𝒮 l’ensemble des suites nulles à partir d’un certain rang (stationnaires nulles), on vérifie facilement que ℬ = (𝑏[𝑘])𝑘∈ℕ est une base de 𝒮. Un exemple : la suite 𝑣 définie par 𝑣𝑛 = 2𝑛 pour 0 ⩽ 𝑛 ⩽ 5 et 𝑣𝑛 = 0 si 𝑛 ⩾ 6 se décompose en 𝑣 = 1𝑏[0] + 2𝑏[1] + 4𝑏[2] + 8𝑏[3] + 16𝑏[4] + 32𝑏[5]. –12/12– Lycée Faidherbe, Lille