Université Pierre et Marie Curie
Introduction à la pathologie
neurologique
Niveau DCEM1
2005 - 2006
J.J. Hauw
C. Duyckaerts
D. Seilhean
Laboratoire de Neuropathologie Raymond Escourolle, GH Pitié-Salpêtrière
Mise à jour : 17 octobre 2005
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La neuropathologie est l’anatomie pathologique du système nerveux. L’examen morphologique est
réalisé sur des échantillons habituellement fixés par le formaldéhyde, puis coupés après inclusion
en paraffine.
Ont été sélectionnées, au sein des maladies neurologiques :
Une démence organique dégénérative : la maladie d’Alzheimer (début insidieux, évolution
lentement progressive ; 3 à 10 ans).
Une démence organique infectieuse : la maladie de Creutzfeldt-Jakob (début insidieux, évo-
lution plus rapidement progressive ; 4 à 18 mois).
Une maladie inflammatoire des fibres myélinisées du système nerveux central : la sclérose en
plaques (évolution par poussées régressives ou progressive).
Les tumeurs intracrâniennes (évolution progressive en tache d’huile, de révélation parfois
plus brutale).
Les hémorragies intra-crâniennes (début brutal, évolution variable).
1 La maladie d’Alzheimer
La maladie d’Alzheimer est à l’origine de la plus fréquente des démences
Les démences ont un poids épidémiologique majeur.
Prévalence des démences en France : 850 000 ; Prévisions : 1 270 000 en 2020 en raison du vieil-
lissement de la population
Incidence : 250 000 par an (JF Dartigues ; chiffres de 2005)
La prévalence augmente avec l’âge, de façon apparemment exponentielle, à partir de 65 ans. En
France, près d’une personne sur trois est démente après 90 ans.
Le diagnostic de la démence d’Alzheimer est clinico-pathologique. Le patient est atteint d’une
démence (selon, par exemple, les critères du DSM-IV) et l’examen du cerveau montre des lésions
caractéristiques :
les dégénérescences neuro-fibrillaires. Il s’agit d’une accumulation de protéine tau (tubule as-
sociated unit) anormalement phosphorylée dans certains neurones.
les plaques séniles, caractérisées par une accumulation de peptide l’A bêta dans l’espace ex-
tra-cellulaire de certaines régions cérébrales Elles ont entourées de prolongements nerveux où
s’est accumulée la protéine tau anormale.
Le peptide A bêta, issu d’un précurseur transmembranaire, s’accumule en raison d’un déséquilibre entre deux
mécanismes de clivage du précurseur (alpha-sécrétase agissant au sein du peptide, bêta [et gamma] sécrétases à
son extrémité). Le peptide soluble (et surtout sa forme 1-42) précipite en fibrilles riches en feuillets bêta-plissés
-et donc amyloïdes- insolubles
On ne sait pas précisément les relations unissant les deux lésions. Elles apparaissent tôt (vers 20-
30 ans chez certaines personnes) et s’accumulent progressivement avec le vieillissement cérébral.
La moitié de la population est touchée vers 45 ans pour la pathologie de tau, vers 75 pour celle de
l’A bêta, Les centenaires sont constamment atteints. Le mécanisme précis de la mort neuronale
n’est pas précisément connu (mais elle est très liée à la pathologie de tau). Comme celle-ci, elle
affecte d’abord le cortex temporal interne (où une atrophie du cortex cérébral est visible macros-
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copiquement de façon précoce), puis elle gagne les aires limbiques et associatives et épargne long-
temps les aires primaires...
De multiples systèmes de neurotransmetteurs (acétylcholine, noradrénaline, sérotonine, somatostatine…) sont affec-
tés. Néanmoins, la plasticité dendritique et synaptique persiste chez les personnes âgées et des précurseurs neuronaux
sont observés chez l’adulte, qui permettent une certaine compensation de la perte fonctionnelle neuronale.
La maladie d’Alzheimer semble en fait liée à une apparition plus rapide, chez les malades, des lé-
sions du vieillissement cérébral qui atteignent alors le seuil d’expression clinique avant la mort de
la personne.
Cette maladie est due à des facteurs génétiques (par exemple des mutations du gène du précurseur du peptide Aβ dans
certaines familles à transmission autosomique dominante ou des polymorphismes particuliers du gène de l’ApoE) et
sans doute aussi à des facteurs épigénétiques accélérant la vitesse d’accumulation des lésions. En tout cas, certaines
personnes très âgées (centenaires) sont indemnes de la maladie.
Le diagnostic clinique de la maladie d’Alzheimer n’est pas toujours exact. Après autopsie, on
constate que la valeur prédictive du diagnostic clinique est de 80 % et seulement de 45 % quand
on ne retient que les cas purs de la maladie (où il n’y a ni lésion vasculaire ni maladie de Parkinson
associée).
2 La maladie de Creutzfeldt-Jakob
La maladie de Creutzfeldt-Jakob est parfois confondue cliniquement avec celle d’Alzheimer. Très
rares, d’allure dégénérative, habituellement démentielles, pouvant être sporadiques, génétiques
(autosomiques dominantes) ou infectieuses, les maladies à Prions sont, dans les 3 cas, transmis-
sibles. Aucun traitement n’est efficace.
Selon la théorie de Prusiner, elles sont causées par le changement de forme d’une protéine normale de l’organisme, la
PrPc, qui devient amyloïde (riche en feuillets bêta), insoluble, très résistante (PrP res) et infectieuse (PrPsc). La conver-
sion de la PrPc en PrPsc est exceptionnelle (aléatoire ?) dans les formes sporadiques, plus fréquente dans les mutations
du gène de la PrP (chromosome 20) ou les contaminations, en pratique toujours iatrogènes.
Raretés épidémiologiques (100 à 120 cas par an en France), énigmes biologiques, les maladies à Prions restent un défi
pour la santé publique en raison de la persistance d’une épidémie larvée de formes iatrogènes dues à l’hormone de
croissance isolée d’hypophyses prélevées après la mort (« extractive ») et au développement d’une petite épidémie de
nouvelle variante après ingestion de viande bovine contaminée (14 cas en France, dont 5 en 2005 ; 33 nouveaux cas
attendus, les derniers après 2020 si les transmissions secondaires iatrogènes de cette variante sont évitées).
Le diagnostic des formes habituelles repose sur l’examen du cerveau : spongiose, gliose astrocy-
taire, perte neuronale, plaques amyloïdes et autres dépôts de PrPres révélés par l’immunohistochi-
mie et le Western blot. La diffusion aux tissus lymphoïdes de la PrPsc dans les cas de nouvelle
variante permet son diagnostic par la biopsie de l’amygdale.
3 La sclérose en plaques
La sclérose en plaques est la principale maladie démyélinisante humaine. Il s’agit d’une maladie
fréquente (environ 35000 patients en France). Si elle ne diminue pas l’espérance de vie, elle est en
revanche la deuxième cause de handicap de l’adulte jeune après les accidents de la route.
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Des plaques multiples de démyélinisation à bords nets d’âges différents, associées parfois à une
remyélinisation sont observées dans la substance blanche du système nerveux central, débordant
parfois sur la substance grise adjacente. La destruction de la myéline avec respect de l’axone est
caractéristique, mais des lésions axonales apparaissent tant aux stades chroniques que dans cer-
taines formes aiguës ou nécrotiques des plaques.
Le mécanisme immunopathologique de la maladie (ou des maladies) reste mal compris. La cellule impliquée dans la
destruction myélinique est le macrophage, mais la rupture de la barrière hémato-encéphalique, et les immunités à mé-
diations humorale et surtout cellulaire sont impliquées dans le processus physiopathologique. Outre la destruction sé-
lective de la gaine de myéline, l’apoptose des oligodendrocytes, cellule dont dépend cette gaine, a été aussi décrite. La
capacité de régénération des oligodendrocytes myélinisés et de différenciation de leurs précurseurs module les possi-
bilités de la remyélinisation des plaques. Les lésions affectent préférentiellement la substance blanche des hémisphères
cérébraux (notamment les régions périventriculaires), les voies optiques, la calotte mésencéphalique et les voies oculo-
motrices, le cervelet et les pédoncules cérébelleux, ainsi que les faisceaux médullaires.
4 Les tumeurs intra-crâniennes
Les tumeurs intra-crâniennes (2 à 3000 décès par an en France) sont caractérisées par des symp-
tômes et des signes cliniques d’apparition insidieuse et de progression lente ou subaiguë, « en tache
d’huile ». Dans des cas non exceptionnels, toutefois, une hémorragie ou l’apparition d’un kyste in-
tratumoral est responsable d’un début brutal, « pseudo vasculaire ». L’œdème cérébral, constant,
aggrave l’effet de masse produit par la tumeur. Il peut être de mécanisme vasogénique (passage de
transsudats du sang vers l’espace extracellulaire), cytotoxique (augmentation de la teneur en eau
des cellules endothéliales et des astrocytes, à un moindre degré des neurones, à la suite de tout trau-
matisme) ou hydrocéphalique (augmentation de la quantité du liquide interstitiel à la suite du blo-
cage des voies de circulation du LCR).
Tout processus expansif intra-crânien entraîne le risque d’un engagement cérébral (issue d’une
partie du parenchyme cérébral dans un orifice inextensible). Les principaux sont :
temporal (lobe temporal interne faisant issue, de haut en bas, dans le foramen ovale en cas de processus hémis-
phérique latéralisé ; compression du III, du mésencéphale, notamment de la formation réticulée et de l’artère cé-
rébrale postérieure ; surtout hémorragies mésencéphaliques de Duret)
diencéphalique : engagement principalement hypothalamique dans le foramen ovale en raison d’une tumeur mé-
diane ou de tumeurs bilatérales
amygdalien (amygdales cérébelleuses dans le trou occipital ; compression du bulbe et déplacement de l’artère
cérébelleuse postéro-inférieure)
cingulaire sous la faux du cerveau dans les processus hémisphériques latéralisés ;
engagement du culmen cérébelleux de bas en haut dans le foramen ovale en cas de processus expansif de la fosse
postérieure.
Parmi les tumeurs intra-crâniennes, la distinction est importante entre les tumeurs extra-parenchy-
mateuses (qui refoulent sans envahir le tissu nerveux), de pronostic plus favorable que celui des
tumeurs intraparenchymateuses, généralement inextirpables même si elles sont bénignes.
L’astrocytome diffus est la plus fréquente des tumeurs intraparenchymateuses primitives (60 %). Cette tumeur
est souvent hémisphérique, parfois du tronc cérébral ou de la moelle. Elle est caractérisée par une longue évolu-
tion, particulièrement insidieuse, les premiers symptômes (crises par exemple) révélant souvent une tumeur vo-
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