Canadian Catholic Bioethics Institute
Institut canadien catholique de bioéthique
SOUCIS BIOÉTHIQUES GUIDE D’ÉTUDE
Vol. 1, No. 1
L’enseignement de l’Église sur la fin
de la vie: un don à partager
Bridget Campion, Ph.D., Bioéthicienne et chercheuse
Institut canadien catholique de bioéthique
En tant qu’éthicienne en clinique, le premier cas
auquel je me suis attardé me conduisit dans une
salle d’isolation d’un hôpital catholique de Toronto.
La patiente était une femme à la fin de la
quarantaine qui avait passé la majeure partie de sa
vie dans des maisons de chambres et foyers pour
sans-abri. Elle avait eu des problèmes de drogues et
d’alcool. Elle était maintenant cloué au lit,
transpirant profusément et ne respirait qu’avec
l’aide d’une machine. Elle avait la tuberculose et
allait mourir. Les médicaments ne faisaient plus
effet, il n’y avait plus de thérapie possible.
Sa condition se détériorait rapidement; elle n’en
avait que pour quelques jours, même avec l’aide du
respirateur artificiel. Elle ne souhaitait pas mourir
mais elle voulait savoir si, pour ses derniers
moments, les machines pouvaient se taire et elle,
être libérée des tubes et des écrans qui l’entouraient.
J’étais l’une des visiteuses masquées, vêtues d’un
sarrau spécial et portent des gants; une nouvelle sur
le cas de cette patiente. On m’avait appelée afin de
l’aider dans sa prise de décision. Pendant les
derniers jours de cette femme, j’ai appris beaucoup
sur la bioéthique et sur le don que l’enseignement
de l’Église catholique apporte à cette discipline.
Parfois appelée éthique biomédicale, la bioéthique
porte sur l’éthique dans la pratique des soins de
santé − de la décision discrète faite quant aux soins
apportés à un patient, aux problèmes complexes de
politiques entourant la recherche, les barèmes de
pratique, comment les fonds pour la santé sont
dépensés et les services alloués. Alors que la
bioéthique semble une entreprise séculière, elle
prend réellement racine dans la théologie morale.
L’Église s’est constamment portée au service des
fidèles en offrant une réponse aux dilemmes
moraux dans tous les aspects de la vie, y compris
les soins de santé.
Dans le cas qui nous concerne, la patiente et le
personnel qui prenait soin d’elle voulait savoir s’il
était permissible de débrancher le respirateur
artificielle tout en sachant que cela conduirait à la
mort de la patiente. Pour nous guider, nous nous
somme référés à la déclaration sur l’euthanasie
(Evangelium Vitae n’avait pas encore paru). J’ai
alors constaté la richesse de la tradition et de
l’enseignement de l’Église catholique. Le document
offre des balises claires interdisant par exemple le
suicide assisté et l’euthanasie, tout en fournissant
une attention équilibrée aux dilemmes qui
surgissent en fin de vie. On y explique que même si
la vie doit être estimée, l’Église n’insiste pas sur la
nécessité de prolonger à tout prix la vie de patients
mourants. Lorsque le traitement est jugé
extraordinaire ou disproportionné au résultat
attendu, ou excessivement coûteux et que la mort
est imminente, le traitement peut être arrêté à
condition que le patient continue de recevoir des
soins. Les dernières technologies en soins intensifs
permettent de sauver des vies qui autrement seraient
perdues. L’Église nous dit cependant de garder nos
priorités en ordre: la technologie est à notre service
et non l’inverse. Elle n’est pas là pour nous dominer
ni pour être idolâtrée.
Si notre foi cherche la raison, comme catholiques
vivant dans le monde, il nous faut aussi poursuivre
la raison informée par la foi. Ma collègue et moi
avons prié sur ce cas ; je suis certaine que l’équipe
médicale et la patiente ont fait la même chose. À la
fin, sachant qu’elle ne serait pas abandonnée, elle a
estimé que sa mort était imminente et a demandé
d’être libérée des tubes et machines qui la pesaient.
Les infirmières m’ont plus tard raconté comment
elle était décédée. Dans cette petite chambre vitrée,
sous un strict protocole de contrôle des infections,
un inhalothérapeute a débranché le respirateur
artificiel alors qu’une infirmière s’assoyait près de
la patiente. Au cours des heures qui ont suivi, l’état
de la femme s’est rapidement détérioré. Elle était
couverte de sueur. L’infirmière demeurait à son
chevet. Elle essuyait son front et gardait sa bouche
humide. Elle avait fait installer une radio afin que la
patiente puisse écouté de la musique country, sa
préférée et elle lui tenait constamment la main.