1 REPUBLIQUE DU BENIN CENTRE AFRICAIN DE FORMATION ET DE PERFECTIONNEMENT EN ♣♣♣♣♣♣♣♣♣♣ JOURNALISM CENTRE AFRICAIN DE FORMATION ET DE PERFECTIONNEMENT EN JOURNALISME ♣♣♣♣♣♣♣♣♣♣ HUMAINS GESTION DE L’APPROCHE GENREGENRE DROITSDROITS HUMAINS ETET GESTION DE L’APPROCHE Exposé Exposé présenté présenté aux aux membres membres de de la la Cellule Cellule des des Femmes Femmes de de l’Union des Professionnelles des Médias du Bénin l’Union des Professionnelles des Médias du Bénin Lokossa, le 16 juin 2012 ♣ ♣ ♣ Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Tel. : 90 92 98 99 Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI E-mail : [email protected] Magistrat à la Retraite Page 1 2 INTRODUCTION Nés dans un contexte de révolte contre l'arbitraire des classes dominantes, les droits de l'homme visent la protection de l'individu contre tout ce qui peut porter atteinte à sa dignité en tant que être humain. L’Organisation des Nations Unies (ONU) a, à travers de nombreuses déclarations et conventions internationales, proclamé et codifié d’importants principes et normes en matière de promotion et de protection de ses droits. Des institutions ont été créées pour surveiller l’exécution des traités qui protègent les droits et les procédures mises en place pour traiter des violations qui s’avèreraient particulièrement graves desdits droits. En relais à l’action internationale, des Pays partageant un certain espace géographique se sont approprié la même préoccupation et lui ont apporté des solutions régionales. La plupart des Etats ont ainsi fait de la protection des droits de l’homme un de leurs objectifs officiels majeurs. Il demeure cependant la réalité « droits de l’homme » bien des fois, des préoccupations soit au plan sémantique, soit au regard de sa mise en œuvre au quotidien. La formulation du thème du sujet qui fera l’objet de nos échanges ce matin donne un exemple bien parlant de ces types de préoccupations. Elle nous offre en effet l’occasion de nous interroger sur l’opportunité de l’emploi du terme « Droits humains » au lieu de « Droits de l’homme ». En dépit de la délicates et des exigences d'un tel exercice, nous l’esquisserons ensemble et l’éclairage qui en sortira nous conduira à aborder la compréhension de l’expression « approche genre » sous un aspect qui diffèrera un peu de ce qui a été dit dans le cadre du présent séminaire qui de tient depuis une semaine. Tout cela nous permettra de mieux envisager la question de la « gestion de l’approche genre ». Nos développements s’articuleront donc tour à tour sur : Le rappel et l’examen des concepts Droits humains et approche genre ; La présentation de la mise en œuvre de l’approche genre, avec une analyse spécifique à l’état des lieux de la question au Bénin. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 2 3 I- De l’examen des concepts Droits de l’homme, Approche genre. Droits humains et A-Avènement et objectifs des Droits de l’Homme Les droits de l'homme sont un concept selon lequel tout être humain possède des droits universels, inaliénables, quel que soit le droit positif en vigueur ou les autres facteurs locaux de son milieu de vie. Au regard de cette philosophie, l’homme, indépendamment de sa condition sociale, a des droits « inhérents à sa personne, inaliénables et sacrés » et donc opposables en toutes circonstances à la société et au pouvoir. Ainsi, le concept de droits de l’homme est-il par définition incompatible avec les systèmes et les régimes fondés sur la supériorité d’une caste, d’une race, d’un peuple, d’une classe ou d’un quelconque autre groupe social. Du point de vue d’une conceptualisation historique, il est possible de dégager trois tendances, ou trois phases successives, de la revendication des droits. Celle-ci se manifeste sous ses premières formes agressives au XVIIIe siècle dans les pays occidentaux (Europe, Amérique du nord) où elle a été demande de liberté individuelle et de protection contre le pouvoir. Elle aboutit à la reconnaissance des droits civils et politiques (les Droits de l’homme et du citoyen). Ensuite, à la fin du XIXe siècle, la contestation du pouvoir cède la place aux exigences à l’égard du pouvoir : ce dernier n’est plus le tyran potentiel, mais le dispensateur du bien être et du bonheur ; cette deuxième phase est marquée par la reconnaissance des droits économiques et sociaux, et des droits collectifs (associations civiles et professionnelles, familles, entreprises). Enfin au XXe siècle, apparaissent sur la scène internationale des revendications collectives : 1- au profit des peuples, des nations, des minorités. 2- au profit des identités. Dans les instruments juridiques internationaux relatifs aux Droits de l’homme adoptés depuis les années 1950, l’individu est moins appréhendé comme une personne que sous l’un de ses aspects : femme, étranger, enfant, travailleur migrant, consommateur, contribuable… Ces différentes identités portent différentes exigences à l’égard du pouvoir ; l’accent est mis moins sur la personne que sur la catégorie dont elle se réclame. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 3 4 Les premiers droits contre l'État, ont été classés comme un droit de première génération. Les droits ultérieurs, quand ils sont reconnus, sont qualifiés de droits de deuxième génération ou séparés entre plusieurs générations, jusqu'à une hypothétique et contestée quatrième génération. • La première génération est celle des droits de l'homme civils et politiques ; • Deuxième génération : droits économiques et sociaux ; • Troisième génération : droits de solidarité ; • Quatrième génération : droits globaux. Première génération La première génération des droits de l'homme est celle des droits civils et politiques. Ce sont des droits que l'individu peut opposer à l'État, qui ne peut agir en un sens contraire pour limiter ou supprimer ces droits ou libertés. Historiquement, ces droits se sont développés à la fin du XVIIIe siècle et ont été reconnus lors des révolutions américaine (1787) et française (1789). Deuxième génération Les droits de la deuxième génération sont ceux qui portent sur les droits économiques et sociaux. Ils nécessitent l'intervention de l'État pour être mis en œuvre. L'individu, contrairement à l'hypothèse des droits de la première génération, est ici en mesure d'exiger de l'État une certaine action. On les nomme classiquement droits-créances que l'État doit, en retour d'un abandon d'une part de la liberté de ses citoyens. Historiquement, la plupart de ces droits ont été reconnus au lendemain de la Seconde guerre mondiale. Troisième génération Les droits solidarité, qui tiendraient à une solidarité nationale, ont émergé dans les doctrines dans les années 1980. On peut citer : • le droit de l'environnement ; • les considérations de bioéthique ; • le droit au développement ; • le droit à la paix... Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 4 5 Une quatrième génération ? Certains auteurs parlent d'une quatrième génération des droits, qui seraient globaux ; ainsi, tous les acteurs de la société auraient intérêt à mettre en œuvre ces droits. Le contenu de ces droits n'est cependant pas encore clair. Les théories reprennent certains droits de la troisième génération pour les mettre dans la quatrième (droit de l'environnement, bioéthique, etc.), la différence pour eux étant que les droits des trois premières générations s'attacheraient à l'homme vivant en société, tandis que les droits de la quatrième seraient des droits rattachés à l'être humain en tant qu'espèce L’homme de la première génération est, comme nous l’avons dit, une personne qui revendique, ainsi que l’énonce en son article 6 la Déclaration universelle des Droits de l’homme (DUDH), proclamés le 10 décembre 1948 par la Résolution 217 A III de l'Assemblée Générale des Nations Unies : « Chacun a le droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique ». Cette même déclaration introduit cependant une notion nouvelle, celle d’ « être humain », à la place de « Homme ». On entend donc de plus en plus la formule 'droits humains' au dépend de droits de l'Homme et cela laisse penser soit à une volonté de se détacher d'une formule qui exclurait la moitié de l'humanité soit que cela introduit une autre idée des droits de l'Homme. Mais cette nouvelle idée n’a jamais été dévoilée. B- Des concepts « droits de l’homme » et « droits humains » On se trouve ainsi à se poser la question de savoir si les termes « Homme » et « être humain » sont synonymes ou s’il faut voir dans l’expression « droits humains » la manifestation d’une conception politique et juridique différente de celle de la Révolution française. La diffusion rapide du domaine des Droits de l’homme dans l’espace international a rendu les frontières de ce domaine plus floues, et la définition même de la notion de Droits de l’homme plus incertaine. Les « Droits de l’homme » sont plus couramment désignés sur le plan international par la formulation anglaise « Human rights », traduite en français par « droits humains » et l’emploi de cette dernière expression se répand dans la littérature française. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 5 6 Certains auteurs soutiennent que si les premiers traducteurs n’ont pas rendu « Human Rights », c’est justement pour « la connotation de genre », en clair pour délibérément garder les droits humains pour les hommes. Les défenseurs de l’expression disent que « l’homme » inclut les femmes quand le « h » de « homme » est écrit en majuscules : « Homme ». Les dictionnaires n’ont jamais entendu parler de cette distinction, qui, si elle existait, ne s’entendrait de toutes façons pas à l’oral. D’autres auteurs y voient une victoire des féministes, l’adjectif « humain » asexué (« gender free ») remplaçant en effet le substantif « Homme » à la masculinité provocante. Des historiens des Droits de l’Homme soutiennent que dans cette expression Homme désigne seulement l’individu au sens générique du terme. La différence entre les deux expressions – « Droits de l’homme » et « droits humains » paraît n’être qu’une alors qu’une simple question de sémantique. L’expression « Droits de l’homme » est apparue au milieu du XVIIe siècle en Europe. Le terme « droits » désigne des facultés d’agir, des avantages, des prérogatives régies par le droit, c’est-à-dire acceptées, organisées, limitées ou interdites par la règle juridique. La signification du terme anglais « rights » est identique : liberté, pouvoir, faculté d’agir en justice. Ces prérogatives sont reconnues à « l’homme », c’est-à-dire à l’individu comme un élément de la société humaine à égalité avec les autres être de son espèce. Du point de vue de l’Organisation des Nations Unies, Les droits humains sont les facultés, libertés et revendications inhérentes à chaque personne au seul motif de sa condition humaine. Cela veut dire qu’il s’agit de droits inaliénables (personne, sous aucun prétexte, ne peut priver autrui de ces droits au-delà de l’ordre juridique existant) peu importe la nationalité, l’origine ethnique, la religion, la couleur ou le lieu de résidence de l’individu. De même, les droits humains sont irrévocables (ils ne peuvent pas être abolis), intransférables (une personne ne peut pas « céder » lesdits droits à quelqu’un d’autre) et irréfutables (personne ne peut renoncer à ses droits de base). Même lorsqu’ils sont protégés par la plupart des législations internationales, les droits humains représentent une base morale et étique que la société considère nécessaire de respecter pour protéger la dignité des personnes. La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH), adoptée par les Nations Unies en 1948, a été conçue sous les auspices de la même préoccupation. La dite Déclaration énonce ailleurs que Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 6 7 «Cet homme est une personne ; chacun a le droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique ». Cette même déclaration introduit ailleurs une notion nouvelle, celle d’ « être humain » (traduction de « human being » ; par exemple, dans l’article 1 : « All human beings are born free and equal in dignity and rights »), utilisée alternativement et indifféremment avec elles d’« individu » et de « personne » : une utilisation que l’on retrouve dans les textes ultérieurs, qu’ils soient universels (pactes internationaux, conventions spécifiques) ou régionaux (Convention européenne, charte des droits fondamentaux de l’Union européenne). Les termes « Homme » et « être humain » sont-ils synonymes ? Ou faut-il voir dans l’expression « droits humains » la manifestation d’une conception politique et juridique différente de celle de la Révolution française ? Au total, la différence peut s'argumenter, mais dans l'utilisation courante des termes, il y a finalement peu de différences, comme le montrent si bien les exemples illustratifs cités. On peut voir la particularité sémantique de la langue française qui distingue "homme" de "Homme", alors que les anglophones utilisent le terme de "Human rights". Il ne semble d’aucun intérêt majeur à poursuivre la discussion. C- A propos du concept relatif à l’approche genre Les sociétés « traditionnelles » présentent souvent une spécialisation des rôles selon le sexe. Ainsi,, les hommes se voient attribuer la politique, les arts et techniques et l'armée, tandis que les femmes sont assignées aux tâches ménagères, au soin des enfants et participent aux travaux agraires. Cette antique spécialisation des rôles a porté certains à croire en l'incapacité des femmes à être performantes dans les tâches intellectuelles, ce qui a maintenant quasiment disparu grâce entre autres au féminisme. Calqué sur la construction du terme « racisme », le féminisme a pour vocation de dénoncer cette spécialisation des rôles des sociétés traditionnelles qui ‘est perpétuée jusqu’au temps modernes et caractérisée par des croyances, valeurs et attitudes fondées sur des modèles stéréotypés, bref, la construction genrée de la société qui attribue un caractère, un rôle, des prédispositions physiques et affectives selon le sexe. La notion de sexe n'est alors plus une notion de sexe biologique (mâle et femelle) mais une construction sociale du genre féminin et du genre masculin limitant par là même le développement de l'individu féminin sur les plans personnel, affectif, professionnel et social. Les effets principaux sont la discrimination envers les femmes. et l'aliénation des deux sexes. Apparu au XVIIe siècle, le féminisme n’a véritablement pris de l'ampleur qu'après la Seconde Guerre mondiale, permettant une avancée vers Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 7 8 l'émancipation de la femme et la visibilité et la critique de plus en plus grande des phénomènes de discrimination sexiste. Contemporaine au féminisme, l’approche genre est un concept social qui permet d’expliquer ce qui se passe entre les êtres de sexes différents. Il tient compte des différences biologiques entre les sexes et se concentre plus particulièrement sur les inégalités des rôles entre les hommes et les femmes en fonction du contexte socio-.économique, historique, politique, culturel et religieux des diverses sociétés dans lesquelles vivent les hommes et les femmes. Il permet d’expliquer les différents comportements des hommes et des femmes dans leur contexte et repose son analyse sur l’idée suivant laquelle si le sexe détermine les caractéristiques physiques des êtres humains à leur naissance, le genre regroupe les rôles et les fonctions assignées respectivement aux hommes et aux femmes. En d’autres termes, le mot genre (gender en Anglais) se réfère aux caractéristiques sociales des hommes et des femmes, qui ne sont pas fixes, mais varient au cours du temps et selon les contextes spécifiques locaux et culturels. Il diffère du mot sexe qui est référé aux traits biologique des hommes et des femmes: c'est un fait de nature, un caractère inné qui n'est pas susceptible de changement. Le genre met l'accent sur le caractère social des distinctions fondées sur le sexe : c'est un fait de culture, un caractère acquis qui est donc susceptible de changement. Les différences de genre sont partout un trait significatif de la vie sociale, économique et culturelle, tant dans le domaine public que dans le domaine privé. En tant que concept, l’approche Genre analyse les rapports de pouvoirs entre les femmes et les hommes basés sur les prérogatives et possibilités socialement reconnu à chacun, indépendamment du sexe. En tant qu’objectif, l’approche Genre promeut l’égalité des droits, ainsi qu’un partage équitable des ressources et responsabilités entre les femmes et les hommes. En tant que méthodologie, l’approche Genre produit une analyse comparée de la situation des femmes et des hommes tant d’un point de vue économique que social, culturel et politique. Elle est transversale et aborde tous les champs du développement. Elle conduit à la remise en cause des représentations et pratiques inégalitaires, individuelles et collectives. Au total, l'approche genre est un facteur social, qui se réfère aux relations qui existent entre les hommes et les femmes, mais non aux hommes et aux femmes Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 8 9 en soit ; il n'est pas déterminé biologiquement comme le résultat de caractéristiques sexuelles hommes/femmes. Il présente l’intérêt de permettre d’expliquer ce qui se passe entre les êtres de sexes différents, c’est-à-dire le processus et les raisons de l’éventuelle subordination des femmes. Il favorise ainsi la mobilisation de tous les acteurs pour œuvrer dans le sens d'un changement social et économique dans une vision globale et cohérente, suivant les capacités réelles de chacun, sans une référence absolue aux caractéristiques biologiques de l’individu. Les différences sexuelles propres ne constituent pas et ne justifient pas les inégalités entre les êtres sociaux. Seule la culture intervient en créant les identités pour chaque sexe et en élaborant les systèmes de genres. Les différences se transforment alors en inégalités. II- Au sujet de la mise en œuvre de l’approche genre A- Indication de quelques instruments internationaux se rapportant à la question Dans nos développements ci-dessus sur la conceptualisation des droits humains, nous avons expliqué que les instruments juridiques internationaux relatifs aux Droits de l’homme, correspondant à l’époque de l’avènement des droits de la troisième génération, les identités comme femmes, étrangers, enfants, travailleurs migrants, ont davantage retenu l’intérêt du législateur international. L’individu a été moins appréhendé comme personne prise isolément que dans un cadre collectif. C’est en effet à cette époque que nombre d’instruments ont été soit élaborés soit mis en chantier. Il s’agit entres autres de : • le Pacte International relatif aux droits civils et politiques; • le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; • la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples adoptée par l'Organisation de l'unité Africaine et ratifiée par le Bénin le 20 janvier 1986 et dont les dispositions font partie intégrante de la Constitution et du droit béninois. • la Convention sur les droits de la Femme; • la Convention sur les droits de L'Enfant; • la Convention sur l'élimination de la discrimination sous toutes ses formes à l’égard des femmes. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 9 10 Il convient ici de noter que les Déclarations sont des textes à caractère moral, des textes qui prescrivent des obligations à la communauté des Etats sur les droits humains. Elles n'ont toutefois pas force obligatoire. Les Chartes, Pactes ou autres sont des conventions à portée obligatoire pour les parties. Depuis 1966, à la suite des deux Pactes internationaux, un nombre impressionnant de conventions relatives à la protection de droits spécifiques sont entrées en vigueur. Ces conventions internationales seraient des épouvantails sans consistance à la merci du bon vouloir des Etats s'ils ne sont pas accompagnés de mécanismes de contrôle. On distingue les organes de suivi au plan universel et des mécanismes régionaux de suivi. Dans la perspective d'une meilleure prise en compte des droits spécifiquement liés à la femme, le Bénin a, depuis son accession à la souveraineté nationale, signé ou ratifié un certain nombre d'instruments internationaux en la matière notamment celle pré-citée concernant l’Elimination de toutes formes de Discrimination à l’Egard des Femmes (C.E.D.E.F) La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, plus ancienne, affirme le principe de la non discrimination et proclame que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Elle proclame également que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés qui y sont énoncées sans distinction aucune, notamment de sexe. L’Etat béninois a donc adhéré à un certain nombre de traités et de conventions qui l’obligent au respect d’engagements qui concourent à la gestion de l’approche genre. Les plus importantes ont été ratifiées aux dates ci-après : • le 12 mars 1992, ratification du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ; • le 22 mars 1992, ratification du pacte international relatif aux droits civils et politiques ; • le 20 janvier 1986, ratification de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ; • le 16 mai 1968, ratification de la Convention concernant l’égalité de rémunération entre la main-d’œuvre masculine et la main-d’œuvre féminine pour un travail de valeur égale ; • l’adhésion à l'Accord de partenariat ACP-UE signé à Cotonou le 13 juin 2000 qui marque le soutien de l'Union Européenne aux efforts des pays ACP visant à accorder une importance accrue à l'approche « Genre ». Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 10 11 • l’adhésion du Bénin à la Convention des Nations Unies du 18 décembre 1979 sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes. L’observation des obligations qui découlent de ces adhésions exige une certaine organisation à laquelle le Bénin s’est attelé B- Organisation institutionnelle nationale pour la mise en œuvre de l’approche genre Pour atteindre les objectifs fixés par les instruments internationaux en vue de la promotion genre, des dispositions institutionnelles ont été mises en place. La première observation à faire à cet effet sera de noter l’existence d’un cadre juridique et institutionnel favorable : les dispositions spécialement pertinentes et favorables de la Constitution de 1990, pour une politique nationale de Promotion de la Femme, l’expression concrète de la volonté politique affichée qui s’est traduite par la création d’un ministère dont l’une des attributions principales est la promotion de la femme et du genre. On relèvera ensuite notamment : (i) la mise en place de la Commission Nationale de Promotion de la Femme (CNPF) en 2002 ; (ii) la mise en place des Commissions Départementales de Promotion de la Femme (CDPF) en 2003; (iii) la création de la Cellule Femme dans le Développement Agricole et Rural (CFDAR) au MAEP par arrêté n°28/MDR/DC/DAPS du 12 janvier 1995 ; (iv) l’adoption de la loi 2003-04 du 03 Mars 2003 relative à la santé sexuelle et de reproduction qui fixe également les devoirs et responsabilités de l’État, des collectivités locales et autres personnes morales ; (v) l’adoption de la loi 2003-03 du 03 Mars 2003 portant répression de la pratique des Mutilations Génitales Féminines (MGF) en République du Bénin ; (vi) le vote et la promulgation du Code des Personnes et de la Famille ; (vii) l’adoption d’une politique de micro-finance et une réorganisation de l’appui du ministère en matière de crédit. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 11 12 (viii) l’organisation d’un réseau de points focaux genre choisis dans les différentes structures de planification des ministères techniques, des ONG et Associations afin qu’ils s’assurent à leur niveau, de la prise en compte des principes d’égalité et d’équité pour un développement durable et équitable au Bénin. (ix) l’adoption en Conseil des ministres du 31 janvier 2001 du document portant Politique Nationale de Promotion de la Femme (PNPF). Les objectifs de cette politique se résument comme suit: éducation et la formation de la femme béninoise, renforcement de son pouvoir économique, amélioration de ses conditions sociales et de son statut juridique. S’agissant des dispositions spécifiques de ces textes qui concernent l’approche genre, il pourra être cité, à titre d’exemples : 1°- Les circonstances de sa rédaction font de la Constitution du 11 décembre 1990 l’instrument juridique socle des droits de l’homme au Bénin. - Comme la plupart des constitutions modernes, elle reprend dans son préambule les grands principes déclinés dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ; - son Titre II intitulé « Des droits et devoirs de la personne humaine » répertorie dans les articles 7 à 40 les droits de l’homme reconnus par la communauté internationale dans les principaux traités se rapportant à la matière ; - l’article 7 annexe à la Loi Fondamentale la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et intègre ainsi ses dispositions parmi les principes et règles qui doivent encadrer la vie publique et individuelle dans la société nationale. Sur le plan concret, les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques prévus et garantis dans la Constitution concernent notamment : a- les droits civils et politiques, aussi appelés de la première génération. Ils comprennent les droits à la vie (art 15) ; à l'intégrité de sa personne (art 18) ; d'élire et d’être élu (art 6) ; à la liberté de pensée, de conscience et de religion, d’opinion (art 23) ; à la liberté de la presse (art 24) d'opinion (art 23) ; à la liberté de la presse (art 24) …. b-les droits économiques, sociaux et culturels, dits de la deuxième génération. Ils regroupent les droits à l’éducation. (art .8, 13) ; à la santé (art. 8) Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 12 13 ; au travail (art .30) ; le droit de grève (art .31)... c- les droits de solidarité classés comme étant de la troisième génération. Ils portent sur les droits au développement (art.9) ; à un environnement sain, satisfaisant et durable (art.27, 28, 29, 74). En raison de leur caractère parfois un peu général, certaines de ces dispositions sont renvoyées à des lois qui préciseront les conditions, mécanismes et portées de leur exercice ou de leur sanction. Il en est ainsi par exemple des dispositions relatives: - au suffrage universel (art.6) : la loi précise les conditions d’organisation des élections ; - à la sanction de la violation du domicile (art.19) ou du secret de la correspondance (art.21); - à l’exercice du droit de grève (art.31). - à la répression de la corruption, du détournement, de l’enrichissement illicite (37). Les droits des femmes font partie de la notion plus générale de droits de l'Homme. Les droits des femmes sont les prérogatives appartenant aux femmes en tant que telles, de tous les âges, qui existent indépendamment de leur institution ou leur interdiction par la loi ou la coutume dans une société particulière. 2°-Outre donc toutes les prérogatives dont peuvent se prévaloir les femmes des dispositions de la Constitution, l’Etat s’est doté d’un instrument spécifique pour leur promotion. Il s’agit de Convention sur l'Elimination de la Discrimination sous toutes ses formes à l’Egard des Femmes (CEDEF) qui est en principe, avec la Constitution, le repère d’évaluation de l’avancée au Bénin de l’approche genre. Aussi paraît-il convenable de la revisiter à grands traits. Cette convention a été adoptée par l’Assemblée générale des Nation Unies par sa résolution 34/180 du 18 décembre 1979. Elle est entrée en vigueur le 03 septembre 1981, après avoir été ratifiée par 20 pays. En y adhérant, le Bénin lui a conféré une valeur supérieure à notre Constitution. Cette Convention qui comporte 30 articles regroupés en six (6) parties, a énoncé dans son préambule, qu’elle avait pour l'objectif de mettre en oeuvre les principes d'égalité et de dignité humaine, énoncés dans la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 Décembre 1948, les pactes internationaux relatifs aux droits civils, politiques économiques et socioculturels, et qu’elle tend à obliger les Etats parties à adopter les mesures nécessaires à la suppression des discriminations à l’égard des femmes, sous toutes leurs formes et dans toutes leurs manifestations. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 13 14 Dans la 1ère partie, l’article 1er définit la notion de discrimination à l'égard des femmes. Les Etats parties sont en outre exhortés à se doter de mesures visent à : -instaurer une protection juridictionnelle des droits des femmes ; -prendre des mesures de défense et de promotion des droits de la femme tant au plan social, économique que politique ; -assurer l'épanouissement et le développement des femmes par l'exercice et la jouissance effectifs des droits de l'Homme et des libertés fondamentales à court, moyen ou long terme (art 4). En ses articles art 7 à 9, constitutifs de la 2ème partie les Etats parties se sont engagés à prendre les mesures appropriées en vue de la promotion et de la défense des droits civils et politiques (cf. Pacte sur les droits civils et politiques) des femmes et de l'égalité de ces droits entre hommes et femmes. Dans sa 3ème partie (articles 7 à 14) les Etats se sont engagés à prendre des mesures appropriées en vue de la défense et de la promotion des droits économiques, socioculturels des femmes (troisième génération) par l'adoption des lois de protection et dissuasives, (droit au travail et aux avantages subséquents accès équitable à l'emploi, droit à la sécurité, droit à la tolérance etc..). La 4ème partie, élaborée en deux articles (15 et 16), est relative à la reconnaissance de l'égalité de l'homme et de la femme devant la loi et devant les juridictions tant en matière civile contractuelle, des biens, de même le droit d'aller et de venir, le droit du libre choix de son domicile, le droit au mariage (droit civil et politique, droit économique et socioculturel) La 5ème partie, articles art 17 à 22 établit les mécanismes de mise en oeuvre des clauses de la convention et de contrôle et de suivi des engagements pris par les Etats membres. La 6ème partie en 8 dispositions (art 23 à 30) pose le principe de subsidiarité dans les textes internationaux des droits de l'homme et fait obligation aux parties de la mise en conformité des normes législatives nationales avec les principes de Publié dans droit international des droits de l’homme posés dans la convention. Elle détermine aussi les procédures nécessaires en vue de l'effectivité des dispositions de la convention. Il est unanimement reconnu que même s’il y a encore bien des choses à faire au concret par rapport à ses exigences, de sérieux efforts sont entrepris par l’Etat Béninois pour leur donner un sens de la réalité. Un cadre institutionnel et juridique sérieux déjà présenté supra existe formellement. Un effort de veille citoyenne aidera incontestablement à vaincre Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 14 15 les résistances résiduelles et les manques de moyens financier souvent évoqués à certains niveaux décisionnels. C- Quelques repères statistiques L’espace de temps qui nous ai imparti ne permet pas de faire un inventaire exhaustif des actions concrètes déjà engrangées et sur lesquels les débats enrichiront la présente introduction à nos réflexions sur la gestion de l’approche genre. Ces débats apprécieront aussi avantageusement pour l’objectif de notre rencontre les statistiques ci-après. 7 femmes figurent actuellement parmi les 83 députés que compte notre Assemblée Nationale ; 7 femmes sont Conseillères sur les 31 hauts Magistrat de la Cour suprême ; 8 Ministres sont du sexe féminin parmi les 26 membres du dernier remaniement gouvernemental La Cour constitutionnelle compte 2 femmes sur 7 Conseillers. Au niveau de l’administration publique (A titre indicatif) Le tableau de bord sur les agents de l’Etat mentionne qu’en juillet 2005 l’effectif des femmes dans la fonction publique représente approximativement 27,0% de l’ensemble. La catégorie D, en chiffres relatifs, renferme le plus de femmes (38,0%). Cette catégorie est suivie de la catégorie C avec 33,7% puis de la catégorie B avec 29,7%. La plus faible proportion de femmes est enregistrée au niveau des catégories A et E avec respectivement 18,3% et 13,0%.. La catégorie E est une catégorie en voie de disparition où l’on retrouve très peu de femmes. Les agents des catégories A et B au nombre de 21.273 représentant 73,0% de l’effectif des Agents Permanents de l’Etat (APE) détiennent plus de 85,0% de la masse salariale. Ces deux catégories regroupent 43,8% de femmes contre 56,2% d’hommes. Il résulte de ces informations que l’accès des femmes aux hautes fonctions et leur implication dans la gestion des affaires publiques sont une réalité au Bénin. Au total, par gestion de l’approche genre se mesure à l’aulne des mesures législatives et règlementaires dont se dote l’Etat et des mesures concrètes qui sont organisées pour l’atteinte d’un certain nombre d’objectifs. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 15 16 On a pu remarquer que sur les deux plans des actions restent à prendre mais plus au niveau du second pan que du premier. Je vous remercie pour votre attention. Présenté par : Arsène K. CAPO-CHICHI Magistrat à la Retraite Page 16